Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2000, présentée par la société à responsabilité limitée Eauto Self, dont le siège est ..., représentée par son gérant ; la société à responsabilité limitée Eauto Self demande à la Cour :
1') d'annuler le jugement du 25 mai 2000 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1992, 1993 et 1994 ainsi que des pénalités dont elles ont été assorties ;
2') de prononcer la décharge demandée ;
Elle soutient que c'est à tort que l'administration a remis en cause le bénéfice du régime d'exonération prévu par les dispositions de l'article 44 sexies du code général des impôts sous lequel elle s'était placé, au motif qu'elle aurait été créée dans le cadre de l'extension d'activités préexistantes ; qu'en effet, elle bénéficie d'une réelle autonomie et ne saurait être regardée comme un simple point de vente du franchiseur ;
Code C+ Classement CNIJ : 19-04-02-01-01-03
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 27 décembre 2000, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant au rejet de la requête ; le ministre soutient qu'eu égard à la complémentarité de l'objet de la société Eauto Self et de celui de la société Hypromat France, avec qui elle est liée par un contrat de franchise, et aux liens de dépendance de la société Eauto Self envers celle-ci, l'activité de la société Eauto Self, qui est privée de toute autonomie réelle, doit être regardée comme le simple prolongement de celle de son franchiseur ; qu'il suit de là que la société appelante ne peut bénéficier du régime d'exonération défini au I de l'article 44 sexies du code général des impôts ;
Vu le mémoire en réplique enregistré le 12 février 2001, présenté par la société à responsabilité limitée Eauto Self, tendant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens et, en outre, par les moyens qu'elle a développé une nouvelle clientèle et qu'elle a elle-même installé la totalité des équipements ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 septembre 2003 où siégeaient M. Gipoulon, président de chambre, M. Z..., premier-conseiller et Mme Eliot, conseiller :
- le rapport de Mme Eliot, conseiller,
- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société à responsabilité limitée Eauto Self demande l'annulation du jugement du 25 mai 2000 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1992, 1993 et 1994 et procédant de la remise en cause par l'administration, au motif que son activité serait le prolongement de celle de la société anonyme Hypromat France, du régime d'exonération prévu à l'article 44 sexies du code général des impôts sous lequel elle s'était placé ;
Considérant qu'aux termes de l'article 44 sexies du code général des impôts : I. Les entreprises créées à compter du 1er octobre 1988 soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l'article 53 A. Les bénéfices ne sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés que pour le quart, la moitié ou les trois quarts de leur montant selon qu'ils sont réalisés respectivement au cours de la première, de la seconde ou de la troisième période de douze mois suivant cette période d'exonération (...)
III. Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou qui reprennent de telles activités ne peuvent pas bénéficier du régime défini au I ;
Considérant qu'en excluant du champ d'application de l'exonération instituée par les dispositions précitées, les entreprises créées dans le cadre... d'une extension d'activités préexistantes , le législateur n'a entendu refuser le bénéfice de cet avantage fiscal qu'aux entreprises qui, eu égard à la similarité ou à la complémentarité de leur objet par rapport à celui d'entreprises antérieurement créées et aux liens de dépendance qui les unissent à ces dernières, sont privées de toute autonomie réelle et constituent de simples émanations de ces entreprises préexistantes ;
Considérant que la société à responsabilité limitée Eauto Self, qui a été créée en 1990 en vue d'exploiter à Bruay-la-Buissière (Pas-de-Calais) une station de lavage pour automobiles, a conclu un contrat de franchise avec la société anonyme Hypromat France lui donnant le droit d'utiliser l'enseigne Eléphant Bleu et de bénéficier de l'aide technique et commerciale du franchiseur moyennant, outre le paiement d'une redevance, le respect de certaines obligations, notamment en matière d'achats, de prix, de qualité des services rendus et de publicité ; que nonobstant les liens résultant du contrat de franchise dont s'agit, la société à responsabilité limitée Eauto Self constitue une personne morale distincte de la société anonyme Hypromat France et n'agit pas pour le compte de celle-ci ; qu'elle a constitué pour l'essentiel par ses propres moyens la clientèle de la station de lavage qu'elle a créée ; qu'ainsi, la société à responsabilité limitée Eauto Self ne peut être regardée comme ayant été créée dans le cadre d'une extension d'activités préexistantes de la société anonyme Hypromat France au sens du III de l'article 44 sexies du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société à responsabilité limitée Eauto Self est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1992, 1993 et 1994 ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 25 mai 2000 est annulé.
Article 2 : La société à responsabilité limitée Eauto Self est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1992, 1993 et 1994.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Eauto Self et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.
Délibéré à l'issue de l'audience publique du 4 septembre 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.
Prononcé en audience publique le 16 septembre 2003.
Le rapporteur
Signé : A. Eliot
Le président de chambre
Signé : J.F X...
Le greffier
Signé : M.T. Y...
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
Le greffier
Marie-Thérèse Y...
N°00DA00797 5