Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 7 mars 2002, présentée pour la société anonyme Auchan France, dont le siège est situé ... à Villeneuve d'Ascq (59650), par Me Y..., avocat ; la société anonyme Auchan France demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 99-5339 du 20 décembre 2001 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1996 dans la commune de Lesquin pour l'entrepôt situé au ... ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
Elle soutient que le jugement n'a pas répondu aux arguments qu'elle avait développés en première instance ; que dans le cadre du contrat qu'elle a conclu avec la société pour l'exploitation de l'entrepôt pour lequel elle a été imposée, ce n'est pas sa société mais bien son prestataire qui utilise matériellement les immobilisations pour la réalisation des opérations qu'il effectue ; que l'administration reconnaît elle même cette utilisation même si elle n'en fait pas un élément déterminant ; que le tribunal administratif a omis de se prononcer sur le caractère
Code C+ Classement CNIJ : 19-03-04-01
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déterminant de ce critère ; que le motif retenu par les premiers juges sur l'absence de pérennité des droits sur les biens détenus par le prestataire ne peut fonder le maintien de l'imposition ; qu'il ne résulte d'aucune clause du contrat que sa société exerce un contrôle étroit sur l'utilisation de l'immobilisation corporelle ; qu'une immobilisation n'est pas matériellement utilisée par une entreprise au seul motif qu'elle est bénéficiaire de l'activité exercée au moyen de ladite immobilisation par une entreprise réalisant une prestation à son profit ; qu'en l'espèce, il doit être fait application de la règle fiscale rappelée par la doctrine ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2002, présenté par le directeur des services fiscaux du Nord, tendant au rejet de la requête ; il soutient qu'il ressort des stipulations du contrat de dépôt et de prestation passé entre les sociétés Auchan et qu'est réservé à la société requérante le pouvoir d'exercer le contrôle étroit de l'utilisation de l'immobilisation corporelle dont elle est locataire ; que les droits conférés à la société prestataire ne revêtent aucun caractère de stabilité juridique ; que l'entrepôt sert, au premier chef, les intérêts de la société requérante ; qu'il est constant que l'utilisateur de l'entrepôt litigieux est bien la société anonyme Auchan, qui en a la disposition ; qu'elle ne s'écarte donc pas de sa propre doctrine en rejetant la demande de dégrèvement ;
Vu le mémoire, enregistré le 22 octobre 2002, présenté pour la société anonyme Auchan, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
Vu les mémoires, enregistrés les 20 novembre 2002 et 5 mars 2004, présentés par le directeur de contrôle fiscal Nord, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 22 juin 2004, présenté pour la société Auchan, en réponse au moyen d'ordre public soumis à la discussion des parties le 14 juin 2004 ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 juin 2004, présenté par le directeur de contrôle fiscal Nord, en réponse au moyen d'ordre public soumis à la discussion des parties le 14 juin 2004 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 99-435 du 28 mai 1999 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique en formation plénière du 25 juin 2004 où siégeaient M. Daël, président de la Cour, Mme de B..., M. Z... et M. Gipoulon, présidents de chambre, et Mme Eliot, conseiller :
- le rapport de Mme Eliot, conseiller,
- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : La taxe professionnelle a pour base : 1° ... a) La valeur locative ... des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle ... ; qu'aux termes de l'article 1469 du même code : La valeur locative est déterminée comme suit :1° Pour les biens passibles d'une taxe foncière, elle est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe.... Les locaux donnés en location à des redevables de la taxe professionnelle sont imposés au nom du locataire ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsqu'ils sont donnés en location, les biens passibles d'une taxe foncière, ne peuvent être imposés au nom du locataire que si ce dernier en dispose pour les besoins de son activité professionnelle ;
Considérant que les immobilisations dont la valeur locative est intégrée dans l'assiette de la taxe professionnelle sont les biens placés sous le contrôle du redevable et que celui-ci utilise matériellement pour la réalisation des opérations qu'il effectue ; qu'il résulte de l'instruction que la société Auchan, locataire d'un entrepôt situé à Lesquin, a confié l'exploitation dudit bâtiment, équipé de matériel d'entreposage et affecté à l'approvisionnement de ses hypermarchés, à la société dans le cadre d'un contrat de dépôt et de prestations de service prenant effet le 1er janvier 1996 ; que la société , qui est responsable de la garde du bâtiment et des marchandises mis à sa disposition par la société Auchan, est chargée de la manutention de ces dernières comportant leur réception, leur mise en stock, leur sortie en tout ou en partie ainsi que des opérations administratives relatives à la gestion dudit entrepôt ; que dans ces conditions, la société , alors même qu'elle n'aurait pas le contrôle exclusif de l'entrepôt, utilise matériellement celui-ci pour l'exercice de son activité professionnelle, au sens qui doit être retenu pour l'application des dispositions précitées de l'article 1467 du code général des impôts ; que dès lors, la taxe professionnelle doit être mise à la charge de la société et non de la société Auchan ; que par suite, cette dernière est fondée, à soutenir, que c'est à tort, par le jugement attaqué, que le tribunal administratif a rejeté sa demande en décharge de cette taxe ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 20 décembre 2001 est annulé.
Article 2 : Il est accordé à la société anonyme Auchan France décharge de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1996 sur la commune de Lesquin pour l'entrepôt situé au ....
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme Auchan France et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
Délibéré à l'issue de l'audience publique du 25 juin 2004 dans la même composition que celle visée ci-dessus.
Prononcé en audience publique le 8 juillet 2004.
Le rapporteur
Signé : A. Eliot
Le président de la Cour
Signé : S. X...
Le greffier
Signé : B. A...
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le Greffier
Bénédicte A...
Elle soutient, en outre, en réponse au moyen d'ordre public susceptible d'être soulevé par la Cour qui lui a été communiqué, que les dispositions de l'article 1469-1° du code général des impôts ne sont pas de nature à faire échec aux dispositions de l'article 1467-1° du même code et n'ont pas pour but d'écarter la règle d'imposition au nom du redevable qui dispose du bien pour les besoins de son exploitation chaque fois que le bien en cause est un local donné en location ; que la qualité de propriétaire ou de locataire du bien est sans incidence sur l'appréciation du redevable qui doit se faire au regard des critères permettant de constater quelle est la personne qui a la disposition effective du bien au sens de l'article 1467 ;
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N°02DA00199