Vu la requête, enregistrée le 12 janvier 2004, présentée pour le CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING, représenté par son président en exercice à ce dûment habilité par délibération du conseil d'administration du 19 décembre 2003, dont le siège est 7 rue Gabriel Péri à Tourcoing (59208), par Me Denecker, avocat ; le CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING demande à la Cour :
11) d'annuler les articles 2, 3, 4 et 5 du jugement n° 99-4273 et 99-5137 en date du 20 novembre 2003 par lesquels le Tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté et la décision du président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING en date des 25 novembre 1999 infligeant la sanction de mise à la retraite d'office à Mme X et 29 novembre 1999 retirant à Mme X l'attribution d'un logement de fonction et lui a enjoint de réintégrer l'intéressée dans son emploi ainsi que de mettre à sa disposition un logement de fonction ;
2°) de rejeter la demande de Mme X ;
3°) de condamner Mme X à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que Mme X, infirmière de classe supérieure exerçant les fonctions de responsable d'une résidence pour personnes âgées, a été sanctionnée en raison de faits susceptibles de mettre en cause la santé et le bien-être des personnes âgées ; que Mme X n'a jamais réellement contesté les faits ; qu'aucune erreur manifeste d'appréciation n'a été commise en prononçant la mise à la retraite d'office de l'intéressée, qui avait déjà fait l'objet de procédures disciplinaires ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense et l'appel incident, enregistrés le 5 mai 2004, présentés pour Mme Brigitte X, par Me Vynckier, avocat, qui conclut au rejet de la requête et demande à la Cour, d'une part, d'annuler l'article 1er du jugement n° 99-4273 et 99-5137 en date du 20 novembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING en date du 11 août 1999 lui infligeant la sanction d'exclusion temporaire de trois jours et, d'autre part, de condamner la CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING à lui verser une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que l'arrêté du 25 novembre 1999 et l'avis du conseil de discipline sont insuffisamment motivés ; que la décision constitue un détournement de pouvoir ; que le dossier est fondé sur les témoignages de deux médecins dont la présence au sein de l'établissement était exceptionnelle et qui n'avaient pas d'autorité hiérarchique ; que les faits ne sont pas établis ; que la majeure partie des faits invoqués dans la requête n'ont pas fait l'objet de l'arrêté contesté ; qu'alors qu'elle produit de nombreux témoignages favorables, la sanction prononcée ne tient pas compte de ses années de service et est disproportionnée ; que la sanction d'exclusion temporaire de trois jours prononcée le 11 août 1999 était également disproportionnée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mars 2006 à laquelle siégeaient M. Philippe Couzinet, président de chambre, M. Alain Dupouy, président-assesseur et M. Fabien Platillero, conseiller :
- le rapport de M. Fabien Platillero, conseiller ;
- les observations de Me Le Briquir, avocat, pour Mme X ;
- et les conclusions de M. Jérôme Michel, commissaire du gouvernement ;
Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 14 mars 2006, présentée pour Mme X ;
Considérant que Mme X, infirmière de classe supérieure dans la fonction publique territoriale, qui exerçait les fonctions de responsable de la résidence foyer-logement pour personnes âgées « Les Hortensias » à Tourcoing, a fait l‘objet d‘une sanction d'exclusion temporaire de trois jours prononcée par arrêté du président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING du 11 août 1999, au motif d'avoir laissé un résident sans dispositif d'alarme pendant quatre jours ; que, par arrêté du 25 novembre 1999, le président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING a prononcé sa mise à la retraite d'office, en raison de défauts de soins envers deux personnes âgées ; que, par décision du 29 novembre 1999, la même autorité, tirant les conséquences de la mise à la retraite d'office, a décidé de retirer à Mme X la concession d'un logement de fonction ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille, après avoir rejeté la demande de Mme X tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 août 1999, a annulé l'arrêté du 25 novembre 1999 et la décision du 29 novembre 1999 et a enjoint au CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING de réintégrer Mme X dans son emploi et de mettre à sa disposition un logement de fonction ;
Sur la légalité de l'arrêté et de la décision du président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING des 25 novembre 1999 et 29 novembre 1999 :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, lors d'une visite le 28 mai 1999, un médecin gérontologue des résidences-services du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING, accompagné de l'infirmière générale suppléant l'absence de Mme X, a constaté qu'une résidente, Mme P., qui sortait d'hospitalisation après une intervention chirurgicale lourde, présentait des signes de souffrance nécessitant de lui prodiguer des soins et une attention particulière et a dû contacter le médecin traitant de cette personne afin que lui soit prescrit un traitement médical, alors que Mme X n'avait pas appelé ce médecin traitant ni examiné la résidente, précisant qu'elle ne traiterait le problème que le lendemain ; qu'un autre médecin gérontologue du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING a constaté, le 4 juin 1999, que Mme T., résidente de 95 ans grabataire, souffrait d'un orteil qui avait fait l'objet d'un soin sommaire, sous pansement sec non refait depuis plusieurs jours, et était douloureux et dans un état purulent épais ; que si Mme X conteste la matérialité des faits qui lui sont reprochés, elle se borne à se prévaloir, d'une part, d'une attestation du médecin traitant de Mme T., qui minimise la portée de l'infection dont souffrait cette résidente sans dater ses constatations, et de considérations générales sur les actes accomplis en faveur de cette résidente, et, d'autre part, d'une attestation du médecin traitant de Mme P., qui déclare ne pas avoir de critiques à formuler sur les soins prodigués à sa patiente et enfin de ce qu'elle n'aurait pas manipulé cette personne en vue de lui éviter des douleurs ; qu'eu égard au rapport et au témoignage des médecins gérontologues du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING, suite à leurs visites des 28 mai et 4 juin 1999, qui font état de faits précis relatifs à l'attitude de l'intéressée envers deux résidentes et aux soins qui leur ont été prodigués, le CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING établit la matérialité des faits qui ont justifié la sanction de mise à la retraite d'office de Mme X ; qu'eu égard aux fonctions d'infirmière responsable exercées par Mme X au service de personnes âgées et compte tenu des deux précédentes sanctions infligées à l'intéressée, motivées, d'une part, par un défaut d'accueil et de suivi d'une personne âgée de retour d'hospitalisation en 1997, et, d'autre part, par un défaut de fourniture d'un dispositif d'appel à une personne de retour d'hospitalisation en situation de dépendance en 1999, et alors même que Mme X avait de nombreuses années de service, produit de nombreuses attestations qui lui sont favorables et que les familles des deux résidentes concernées n'ont pas formulé de plaintes à son encontre, le président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING n'a pas entaché son appréciation d'erreur manifeste en prononçant la mise à la retraite d'office de l'intimée en raison des deux faits qui lui y étaient reprochés ; que le CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING est ainsi fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lille s'est fondé sur une telle erreur pour annuler l'arrêté du 25 novembre 1999 et, par voie de conséquence, la décision du 29 novembre 1999 susmentionnés ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d‘appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X tant devant la Cour que devant le tribunal administratif ;
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'interdit à l'autorité investie du pouvoir disciplinaire d'engager plusieurs procédures disciplinaires lorsque les faits poursuivis dans chacune des procédures sont distincts ; que Mme X n'est par suite pas fondée à soutenir que le CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING ne pouvait engager une procédure disciplinaire à son encontre, dès lors qu'il aurait été en possession des éléments qui ont fondé sa mise à la retraite d'office lorsqu'a été engagée une procédure pour les faits qui ont fondé la sanction d'exclusion temporaire de trois jours prononcée par arrêté du 11 août 1999 ;
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'autorité investie du pouvoir disciplinaire d'engager des procédures disciplinaires sur le seul fondement d'éléments recueillis auprès de supérieurs hiérarchiques directs de l'agent qui fait l'objet de la procédure ; que, par suite, le CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING pouvait se fonder sur les faits constatés par deux de ses médecins gérontologues des résidences-services pour engager une procédure disciplinaire à l'encontre de Mme X, alors même que ces médecins n'avaient pas d'autorité hiérarchique sur l'intéressée et n'étaient pas affectés en permanence à la résidence où celle-ci exerçait ses fonctions ;
Considérant que la circonstance que le procès-verbal du conseil de discipline du 18 octobre 1999 n'indique pas que Mme X a démenti les faits qui lui étaient reprochés implique seulement que le conseil de discipline, après avoir écarté les arguments de la comparante, a regardé les faits comme établis et ne saurait ainsi constituer une atteinte au principe des droits de la défense ;
Considérant que l'avis du conseil de discipline du 18 octobre 1999 mentionne les faits reprochés à Mme X, distingue les faits qui étaient suffisamment graves pour justifier une sanction et propose, après avoir écarté la révocation, la sanction de mise à la retraite d'office ; que cet avis est ainsi suffisamment motivé ; que l'arrêté du 25 novembre 1999 litigieux mentionne les considérations de droit et de fait qui le fondent et s'approprie les conclusions du conseil de discipline ; que cet arrêté est ainsi suffisamment motivé ;
Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les articles 2 à 5 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté et la décision du président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING en date des 25 novembre et 29 novembre 1999 et lui a enjoint de réintégrer Mme X dans son emploi et de mettre à sa disposition un logement de fonction ;
Sur la légalité de l'arrêté du président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING du 11 août 1999, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de l'appel incident de Mme X :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X n'a pas fourni de médaillon d'alarme à un résident pendant quatre jours, alors que l'attribution d'un tel dispositif est prévue par le règlement intérieur de la résidence-foyer « Les Hortensias » ; qu'alors que ce résident, qui était de retour d'hospitalisation et présentait un état de santé précaire, avait fait une demande en ce sens à plusieurs reprises et que les médaillons d'appel étaient en panne depuis plusieurs jours, Mme X n'est intervenue qu'avec retard, le directeur adjoint du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING devant intervenir pour faire procéder à une réparation d'urgence ; que ces faits, qui ne sont pas contestés par Mme X, qui se borne à en minimiser l'importance, étaient de nature à justifier une sanction disciplinaire ; qu'en prononçant une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de trois jours, par son arrêté du 11 août 1999, le président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING en date du 11 août 1999 ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner Mme X à verser au CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING la somme de 1 000 euros qu'il demande au même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 2, 3, 4 et 5 du jugement n° 99-4273 et 99-5137 en date du 20 novembre 2003 du Tribunal administratif de Lille sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de la demande de Mme X devant le Tribunal administratif de Lille tendant à l'annulation de l'arrêté et de la décision du président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING en date des 25 novembre 1999 lui infligeant la sanction de mise à la retraite d'office et 29 novembre 1999 lui retirant l'attribution d'un logement de fonction et à ce qu'il soit enjoint de la réintégrer dans son emploi ainsi que de mettre à sa disposition un logement de fonction sont rejetées.
Article 3 : Mme X est condamnée à verser au CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : L'appel incident de Mme X et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE TOURCOING, à Mme Brigitte X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
Copie sera transmise au préfet de la région Nord-Pas-de-Calais, préfet du Nord.
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N°04DA00024