Vu la requête, enregistrée par télécopie le 1er avril 2005 et régularisée par l'envoi de l'original le 4 avril 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SOCIETE DE GROUPAGE ET DE TRAITEMENT DES DECHETS (SGTD), dont le siège est ..., par Me X... du cabinet d'avocats Matharan-Pintat ; la SOCIETE DE GROUPAGE ET DE TRAITEMENT DES DECHETS (SGTD) demande à la Cour :
11) d'annuler l'ordonnance n° 99-5332 du 24 janvier 2005 par laquelle la présidente de la 2ème chambre du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation du Syndicat intercommunal de la région de Denain pour le retraitement des déchets hospitaliers, industriels et ménagers (SIRDHIM) à lui verser la somme de 19 496 000 francs en réparation des préjudices subis du fait du « mauvais vouloir » ou de l'inexécution de ses obligations contractuelles par le syndicat intercommunal ;
2°) de condamner le SIRDHIM à lui verser la somme globale de 2 394 409 euros en réparation des préjudices subis ;
3°) de condamner le SIRDHIM à lui verser une somme de 4 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que c'est à tort que sa demande devant le tribunal administratif a été déclarée irrecevable, alors que, conformément à l'article 22 du cahier des charges d'exploitation, elle avait saisi le préfet d'une demande de conciliation avant d'engager son action contentieuse ; qu'elle a droit à la réparation des préjudices qu'elle a subis du fait des manquements contractuels du SIRDHIM ; que les différentes fautes du SIRDHIM lui ont également causé un préjudice moral important et une atteinte à sa réputation ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2005, présenté pour le Syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets (SIAVED), venant aux droits du Syndicat intercommunal de la région de Denain pour le retraitement des déchets hospitaliers, industriels et ménagers (SIRDHIM), dont le siège est ... ; le SIAVED conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la SGTD à lui verser la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il fait valoir que la demande était irrecevable faute d'avoir respecté l'obligation contractuelle de recours préalable prévue à l'article 22 de la convention ; que la société n'est pas fondée à soutenir d'une part qu'elle aurait saisi le préfet d'une demande de conciliation en application de la stipulation précitée et d'autre part que cette stipulation serait nulle ou inapplicable dans la mesure où le préfet ne présentait pas l'exigence de neutralité nécessaire à l'exercice de la mission de conciliation ; que c'est donc à bon droit que le premier juge a pu rejeter la demande entachée d'une irrecevabilité manifeste ; que, par ailleurs, la demande était également entachée d'une irrecevabilité tirée de l'absence de présentation d'un mémoire de réclamation en application du cahier des clauses administratives générales des marchés de fournitures courantes et de services applicable ; que la lettre du 22 décembre 1999 ne présente pas les caractéristiques d'un mémoire en réclamation faute de demande précise et détaillée postes par postes ainsi que de valorisation de ces derniers ; que la demande d'une somme globale ne saurait suffire ; que la demande de première instance contient par ailleurs des chefs de réclamation nouveaux par rapport à ceux mentionnés dans la lettre précitée ; qu'il en va par exemple ainsi des frais supportés pour le délestage ; qu'au surplus, les différents chefs de réclamation tels que précisés dans la requête ne sont pas fondés ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 19 mai 2006 par télécopie et régularisé par l'envoi de l'original reçu le 22 mai 2006, présenté pour la SOCIETE DE GROUPAGE ET DE TRAITEMENT DES DECHETS (SGTD) qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et, en outre, par les moyens que la requête n'était pas irrecevable pour défaut de présentation d'un mémoire en réclamation en application des dispositions de l'article 34 du cahier des clauses administratives générales des contrats de fournitures (CCAG-FCS) ; que ces dispositions ne sanctionnent pas, en effet, par une forclusion, le non-respect du délai de trente jours prévu pour présenter un mémoire de réclamation ; que, par ailleurs, la réclamation présentée le 22 octobre 1999 constituait une réclamation suffisante ; qu'enfin, les dispositions dont le syndicat intercommunal entend se prévaloir, adoptées par un décret du 27 mai 1997 après la conclusion du contrat le 26 février 1975, n'étaient pas applicables au marché ; qu'il appartient au syndicat d'apporter la preuve que des dispositions applicables auraient été méconnues ; que, par ailleurs, la requête de la société pouvait comporter d'autres postes que ceux contenus dans la réclamation préalable dès lors qu'ils ne correspondaient pas à une demande nouvelle mais étaient liés à la même cause juridique ; qu'en ce qui concerne le préjudice pour délestage, la lettre du 22 décembre 1999 en faisait état ; que si le poste n'avait pas été chiffré, c'est qu'il ne pouvait pas l'être à cette époque ; que cette demande était donc recevable ; qu'en ce qui concerne le préjudice subi du fait de l'exécution des prestations prévues par le projet d'avenant mais non payées, la circonstance que la demande ne figurait pas dans la lettre du 22 décembre 1999 ne la rend pas irrecevable ; que le SIAVED est de mauvaise foi en prétendant que la société n'a pas payé la taxe professionnelle pendant quatre années ; qu'elle n'est pas en mesure en tout de cas de rapporter la preuve que cette taxe ne lui a pas été remboursée par le syndicat ;
Vu le mémoire, enregistré le 19 mai 2006 par télécopie et régularisé par l'envoi de l'original reçu le 22 mai 2006, pour le syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets (SIAVED) qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mai 2006 à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, présidente de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et M. Alain A... :
- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président-assesseur ;
- les observations de Me Y..., pour la SOCIETE DE GROUPAGE ET DE TRAITEMENT DES DECHETS (SGTD) et de Me de Z..., pour le Syndicat intercommunal de la région de Denain pour le retraitement des déchets hospitaliers, industriels et ménagers (SIRDHIM) ;
- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article 22 du cahier des charges d'exploitation annexé à la convention conclue le 26 février 1975 pour l'exploitation d'une usine d'incinération de résidus urbains à Douchy-les-Mines entre la Société d'évacuation, de répurgation et de traitement industriel de résidus urbains (SERTIRU) et le Syndicat intercommunal de la région de Denain pour le retraitement des déchets hospitaliers, industriels et ménagers (SIRDHIM), aux droits duquel se trouve désormais le Syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets (SIAVED) : « Avant d'être éventuellement soumises à la juridiction compétente, les contestations qui peuvent naître entre le syndicat et l'exploitant au sujet du présent contrat seront portées par la partie la plus diligente devant le préfet qui s'efforcera de concilier les parties dans un délai d'un mois » ; que, par un avenant du 15 décembre 1977 à la convention d'exploitation, la SOCIETE DE GROUPAGE ET DE TRAITEMENT DES DECHETS (SGTD) a été chargée de l'exploitation de l'usine ;
Considérant qu'il résulte des termes de l'article 22 précité du cahier des charges de l'exploitation que, dans la commune intention des parties, les différends pouvant s'élever entre le syndicat intercommunal et l'exploitant et concernant l'application des stipulations contractuelles devaient être soumis, avant toute action contentieuse, au préfet à fin de conciliation ; que l'arrivée à échéance de la convention ne faisait pas obstacle à la mise en oeuvre de la stipulation précitée ; qu'au surplus, la demande indemnitaire a été enregistrée devant le tribunal administratif par télécopie dès le 30 décembre 1999, soit avant l'échéance de la convention dont le terme était fixé au 31 décembre de la même année, puis a été régularisée par la réception de la requête originale le 4 janvier 2000 ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'une réunion s'est tenue le 2 juin 1999 en préfecture du Nord à l'invitation du secrétaire général répondant à la demande que la SGTD avait adressée au préfet le 4 mai 1999, en présence notamment d'un membre de la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, du président-directeur général de la SGTD et d'un vice-président du SIRDHIM ; qu'une telle réunion, mettant en présence des représentants des parties au contrat autour de l'autorité préfectorale, peut être regardée, compte tenu de son objet, comme une démarche de conciliation entre les parties au contrat en application de l'article 22 de la convention d'exploitation de l'usine ; qu'il résulte également de l'instruction et notamment de la lettre de la SGTD au préfet en date du 4 juin 1999, qu'à l'occasion de cette réunion, ont été soumis à la démarche de conciliation le différend relatif aux travaux de mise en conformité de l'usine, à propos duquel a été abordée la question des analyseurs OLDHAM, ainsi que la question des arrêtés préfectoraux de consignation ; qu'en revanche, aucun document ne permet de vérifier qu'auraient été abordés lors de cette rencontre les autres différends ultérieurement portés devant le juge administratif concernant les problèmes de délestage, la difficulté de recourir à de nouveaux déchets pour couvrir l'exploitation (« quota NETREL »), l'absence d'application du contrat concernant le « quota SCORI », le déficit de déchets hospitaliers, l'absence de paiement par le SIRDHIM de montants de taxe professionnelle et différentes factures sur exploitation, enfin, la réparation d'un préjudice moral et l'atteinte à la réputation de l'exploitant ; que, dans ces conditions, la SGTD est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la vice-présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Lille a rejeté comme irrecevable, en application de l'article 22 de la convention, les chefs de demandes indemnitaires concernant les travaux de mise en conformité des installations de l'usine, notamment ceux relatifs aux analyseurs OLDHAM et les sommes objet des arrêtés préfectoraux de consignation ; qu'il y a lieu, par conséquent, d'annuler, dans cette mesure, l'ordonnance n° 99-5332 du 24 janvier 2005 ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer, dans la même mesure, et de statuer immédiatement sur cette partie de la demande indemnitaire de la SGTD présentée devant le Tribunal administratif de Lille ;
Au fond :
Sur le montant de la consignation :
Considérant qu'en cause d'appel, la SGTD, qui en a obtenu le remboursement, ne demande plus la condamnation du maître d'ouvrage à lui verser le montant de 100 000 francs correspondant à la consignation préfectorale mais entend seulement poursuivre la condamnation du syndicat à hauteur du montant des intérêts moratoires correspondant à l'immobilisation de cette somme ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les arrêtés préfectoraux qui ont contraint la SGTD à devoir consigner une somme de 100 000 francs trouveraient, de manière déterminante, leur cause dans une faute contractuelle du SIRDHIM à l'égard de son exploitant à l'occasion de la mise en conformité des installations de l'usine mais résultent principalement du retard de l'exploitant à produire, auprès des services de la préfecture, un dossier complet d'extension des capacités de production de l'usine ; que, dès lors, ladite société n'est pas fondée à demander la condamnation du SIAVED, venant aux droits du SIRDHIM, à lui verser la somme de 1 821 francs hors taxes (soit 277,61 euros hors taxes) au titre des intérêts qu'elle a dû exposer du fait de la consignation ;
Sur les fautes résultant du défaut de signature d'un sixième avenant et le remboursement des travaux liés aux analyseurs :
Considérant que si la SGTD soutient que le SIRDHIM aurait commis une faute contractuelle en refusant de signer un sixième projet d'avenant, elle ne l'établit pas ;
Considérant qu'à supposer que les travaux relatifs aux analyseurs des émissions gazeuses ne relevaient pas de l'entretien au sens de l'article 10 du cahier des charges d'exploitation annexé à la convention d'exploitation de l'usine mais de ceux correspondant à la mise en conformité de l'installation avec de nouveaux règlements techniques au sens de l'article 12 du même cahier, la SGTD n'établit pas qu'elle aurait sollicité, en application dudit article 12, l'accord préalable du SIRDHIM pour la réalisation de ces travaux ni qu'elle aurait dû passer outre une éventuelle inertie du maître d'ouvrage ; que, par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que les analyseurs installés sur l'initiative de la SGTD aient été adaptés ; que, par suite, la SGTD n'est pas fondée à demander le remboursement des sommes qu'elle a exposées du fait de ces travaux ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres fins de non-recevoir, que les conclusions de la SGTD susanalysées doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du SIAVED qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la SGTD demande au titre des frais exposés tant en première instance qu'en appel et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SGTD la somme de 4 000 euros que le SIAVED réclame au titre des frais exposés tant en première instance qu'en appel et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 99-5332 de la présidente de la 2ème chambre du Tribunal administratif de Lille en date du 24 janvier 2005 est annulée en tant qu'elle concerne les chefs de demandes indemnitaires concernant les travaux de mise en conformité des installations de l'usine, notamment ceux relatifs aux analyseurs OLDHAM, et les sommes objet des arrêtés préfectoraux de consignation.
Article 2 : La demande de la SOCIETE DE GROUPAGE ET DE TRAITEMENT DES DECHETS portant sur les chefs de demandes indemnitaires concernant les travaux de mise en conformité des installations de l'usine, notamment ceux relatifs aux analyseurs OLDHAM, et les intérêts moratoires supportés à la suite de la consignation de la somme de 100 000 francs encore en litige, est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de la SOCIETE DE GROUPAGE ET DE TRAITEMENT DES DECHETS tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La SOCIETE DE GROUPAGE ET DE TRAITEMENT DES DECHETS versera au SAVIED, au titre de la première instance et de l'appel, la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE DE GROUPAGE ET DE TRAITEMENT DES DECHETS (SGTD) et au Syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets (SAVIED).
Copie sera transmise au préfet du Nord.
2
N°05DA00359