Vu la requête, enregistrée le 27 juillet 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SA CUIR CCM, dont le siège est situé 14 rue du Pont de Grès à Carvin (62220), représentée par son président directeur-général en exercice, par Me Fillon ; la SA CUIR CCM demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0405357 du 23 mai 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations d'impôt sur les sociétés et contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2002 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 7 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient qu'elle était en droit, en application des dispositions de l'article 38-3 du code général des impôts, de demander à ce que son stock soit évalué en fonction du cours du jour déterminé selon la méthode retenue par l'administration fiscale ; que le montant de la provision enregistrée dans les comptes 2002 de l'exposante ne saurait faire obstacle à cette rectification dans la mesure où, en matière de stocks la dépréciation n'est pas conditionnée à la constatation d'une provision mais peut s'effectuer par décote directe ainsi que l'a rappelé le juge de l'impôt et admis la doctrine administrative ; que le recours à la décote reste toujours possible quel que soit le montant des provisions constatées et les éventuelles critiques qu'elles appellent ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 janvier 2007, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient que la base d'imposition a été établie conformément à la déclaration de résultat déposée le
30 avril 2003 par la requérante et qu'il lui appartient de démontrer le caractère exagéré des impositions émises ; que les provisions constituées en vue de faire face à des pertes que des évènements en cours rendent probables ne sont déductibles qu'à la condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice ; qu'il s'ensuit qu'une entreprise ne peut prétendre déduire de ses résultats imposables des provisions dont elle ne peut justifier la réalité et le montant par ses écritures comptables ; que les contribuables ne peuvent satisfaire à l'obligation de comptabiliser les provisions que jusqu'à l'expiration du délai de déclaration des résultats de l'exercice ; que la faculté de procéder par voie de décote directe ne saurait déroger à l'exigence de constatation dans les écritures de l'exercice ; que si la règle, selon laquelle les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice si ce cours est inférieur au prix de revient, a vocation à s'appliquer à toutes les entreprises, pour autant, ces dernières ne sont nullement tenues de constituer des provisions maximales à la clôture d'un exercice, une telle appréciation relevant d'une stricte décision de gestion ; que la charge de la preuve de la réalité et du montant de la dépréciation de ses stocks incombe toujours au contribuable qui doit justifier que le cours du jour à la clôture de l'exercice est inférieur au prix de revient ; qu'il en va ainsi que la dépréciation soit constatée par voie de provision ou par voie de décote directe ; que la société requérante ne produit aucune justification précise de la dépréciation alléguée pour l'exercice 2002, mais se limite à demander l'application de coefficients arrêtés au titre des exercices précédents à partir de constatations de faits propres aux années en cause et qui n'ont évidemment pas vocation à demeurer intangibles ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 5 mars 2007, présenté pour la SA CUIR CCM qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle soutient en outre que l'article 39-1, 5° du code général des impôts ne saurait faire obstacle à l'application du dispositif prévu par l'article 38, 3° du même code ; que l'on ne saurait, s'agissant de l'application des dispositions de l'article 38, 3° du code, parler de décision de gestion, celles-ci étant obligatoires ; que la déclaration de résultat relative à l'exercice 2002 a été souscrite en cours de contrôle, à une date où le service vérificateur n'avait pas encore arrêté une position définitive sur la méthode d'évaluation des stocks et des dépréciations à la clôture des exercices 2000 et 2001 ; que la dépréciation a donc été déterminée selon la méthode habituelle, identique à celle retenue au titre des exercices 2000 et 2001 ; que l'évaluation du stock au 31 décembre 2002, selon la méthode retenue par l'administration fiscale, paraît donc justifiée en vertu du principe de la permanence des méthodes ;
Vu le mémoire en duplique, enregistré le 29 mars 2007, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juillet 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :
- le rapport de M. Christian Bauzerand, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : « 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (…) notamment : (…) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. (…) Les provisions pour pertes afférentes à des opérations en cours à la clôture d'un exercice ne sont déductibles des résultats de cet exercice qu'à concurrence de la perte qui est égale à l'excédent du coût de revient des travaux exécutés à la clôture du même exercice sur le prix de vente de ces travaux compte tenu des révisions contractuelles certaines à cette date. S'agissant des produits en stock à la clôture d'un exercice, les dépenses non engagées à cette date en vue de leur commercialisation ultérieure ne peuvent, à la date de cette clôture, être retenues pour l'évaluation de ces produits en application des dispositions du 3 de l'article 38, ni faire l'objet d'une provision pour perte. » ; et qu'aux termes de l'article 38 du même code également applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 dudit code : « (…) 3. (…), les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient. (…) » ;
Considérant, en premier lieu, que la SA CUIR CCM demande que le montant de son stock au 31 décembre 2002 soit rectifié en appliquant, pour le calcul de la provision sur stocks qu'elle a comptabilisée à la même date, la méthode appliquée par l'administration fiscale aux provisions sur stocks comptabilisées pour les exercices 2000 et 2001 à l'occasion de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet pour ces deux exercices ; que, toutefois, il résulte des dispositions précitées des articles 38 et 39 du code général des impôts qu'il appartient au dirigeant de l'entreprise désirant déduire du bénéfice imposable des amortissements et provisions et les comptabiliser à la clôture de chacun des exercices concernés, d'être en état d'en justifier la réalité devant l'administration et, le cas échéant, devant le juge de l'impôt ; que la société requérante ne justifie pas, par ses écritures comptables, de la réalité et du montant des amortissements et provisions dont elle demande la déduction ; qu'une provision ne saurait être modifiée à titre rétroactif dans les comptes d'un exercice clos alors même que le calcul de cette provision aurait été déterminé selon une méthode écartée par l'administration fiscale à l'occasion de la vérification des exercices précédents ;
Considérant, en second lieu, que la SA CUIR CCM ne peut utilement se prévaloir de la documentation administrative 4 A-2523 n°5 du 9 mars 2001 qui ne dispense pas les contribuables d'apporter toutes justifications utiles sur le montant des provisions pour dépréciation de stock qu'ils ont constituées et ne peut donc être valablement invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA CUIR CCM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme que la SA CUIR CCM demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SA CUIR CCM est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA CUIR CCM et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
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N°06DA01008