Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel, présentée pour M. Bertrand A, demeurant ..., par la SCP Avocats du nouveau siècle ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0506851 du 31 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la condamnation de France Télécom à lui verser les sommes de 17 774,47 euros au titre de l'indemnité de retraite et de la prime de fin de carrière et 985,75 euros, au titre de rappel de congés payés, assorties des intérêts au taux légal, et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à France Télécom de transmettre au service des pensions de la Poste un état de situation rectifié prenant en compte les jours inscrits à son compte épargne-temps ;
2°) de condamner France Télécom au paiement de ces sommes, assorties des intérêts capitalisés ;
3°) d'enjoindre à France Télécom de se prononcer à nouveau dans un délai de deux mois à compter de la décision à intervenir sur son état de situation de carrière ;
4°) de mettre à la charge de France Télécom une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient qu'il a effectivement été placé en disponibilité du 1er janvier au 20 juillet 2004 conformément à la convention d'essaimage qu'il avait signée le 5 décembre 2003 ; qu'il avait également droit à l'indemnité de retraite et à la prime de fin de carrière et que France Télécom ne pouvait opérer une compensation ; que la mise en disponibilité n'était une condition à l'octroi de la prime d'essaimage que lors de la demande mais que le salarié n'avait pas l'obligation de rester en disponibilité pendant un an ; que la décision d'octroi de la prime d'essaimage en date du 1er décembre 2003 n'a jamais été retirée par France Télécom ; que la procédure de remboursement de la prime prévue par l'article 6 de la convention, prévoyant un rapport circonstancié, n'a pas été respectée alors qu'il s'agit d'une formalité substantielle ; que France Télécom ne pouvait opérer la compensation alors que sa créance n'était pas certaine ; que le jugement a admis de statuer sur l'une des créances tout en se déclarant incompétent sur l'autre ; qu'il a droit au paiement de 16,09 jours de congés non pris ; que ces jours, ainsi que ceux correspondant à son comte épargne-temps n'ont pas été pris en compte pour déterminer ses droits à la retraite ; que les demandes reconventionnelles de France Télécom sont irrecevables comme portant sur un litige distinct ; que le Tribunal n'avait pas compétence pour statuer sur une demande reconventionnelle dirigée contre et présentée par une personne privée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2008, présenté pour la société France Télécom, dont le siège est 6 place d'Alleray à Paris (75015 cedex), par la SCP d'avocats Lenglet, Malbesin et associés, qui conclut au rejet de la requête, à l'annulation de l'article 3 du jugement attaqué, à la condamnation de M. A à lui verser la somme de 11 863,31 euros, assortie des intérêts de droit, et à ce qu'il soit mis à la charge de ce dernier la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; la société fait valoir que la convention d'essaimage n'est valable, aux termes de son article 2.6, que pour un agent n'ayant pas rompu le lien avec le service ; que l'intéressé ne peut être à la fois à la retraite et en disponibilité ; que les engagements résultant de la convention demeurent pendant toute sa durée ; que les stipulations de l'article 6 de la convention s'appliquent en cas de rupture de la convention et non en cas de caducité ; qu'il ne suffit pas qu'une créance soit contestée pour la rendre incertaine ; que la somme réclamée au titre des congés payés non pris n'a pas fait l'objet d'une réclamation préalable et repose sur un calcul erroné ; que la juridiction administrative est compétente pour statuer s'agissant d'un litige avec un fonctionnaire de France Télécom ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
Vu la loi n° 96-660 du 26 juillet 1996 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Marianne Terrasse, président-assesseur, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, M. Bertrand A ;
Considérant que la société France Télécom a, à la demande de M. Bertrand A, fonctionnaire, conclu avec lui le 5 décembre 2003 une convention dite d'essaimage aux termes de laquelle l'intéressé présentait une demande de placement en position de disponibilité, pour une durée d'un an pour création d'entreprise, cependant que l'employeur s'engageait à satisfaire à cette demande et versait une prime d'essaimage d'un montant brut de 32 280 euros (29 503,92 euros net) remboursable en cas de non-respect des termes de la convention ; que le 16 décembre suivant, M. A a sollicité sa mise à la retraite avec jouissance immédiate à compter du 30 décembre 2003 en sa qualité de père de trois enfants ; que France Télécom a refusé l'admission à la retraite, placé l'intéressé en disponibilité et lui a versé la prime d'essaimage ; que par une décision du 15 juin 2004 le Tribunal administratif de Lille a annulé le refus d'admission à la retraite et a enjoint à France Télécom de placer rétroactivement M. A en position de retraite à compter du 30 décembre 2003 ; que France Télécom a exécuté ce jugement, mis fin à la convention d'essaimage et opéré une compensation entre la prime de fin de carrière et l'indemnité de retraite, d'un montant global de 21 446,90 brut (17 774,47 euros net), et la prime d'essaimage de 29 503,92 euros net induisant un solde en faveur de la société de 11 729,45 euros net ; que M. A relève appel du jugement du 31 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de France Télécom à lui verser les sommes de 17 774,47 euros au titre de son indemnité de retraite et de sa prime de fin de carrière, et 985,75 euros, au titre de rappel de congés payés ; que la société France Télécom présente des conclusions incidentes tendant à la condamnation de l'appelant à lui rembourser la somme de 11 863,31 euros correspondant au solde précité complété d'une retenue pour service non fait le 4 décembre 2003 et d'un rappel d'une journée en raison de la mise à la retraite rétroactive à compter du 30 décembre 2003 ;
Sur les conclusions principales :
En ce qui concerne les conclusions relatives aux indemnités de fin de carrière :
Considérant, ainsi qu'il a été dit, que France Télécom a procédé à une compensation entre la prime d'essaimage et les indemnités de départ à la retraite ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la convention susmentionnée : Dans le cadre de l'accompagnement du salarié pour la création de son entreprise, la présente convention a pour objet, (...) de définir les conditions de travail de salarié pendant l'élaboration de son projet de création d'entreprise et les conditions de son éventuel départ. (...). ; que l'article 5 précise que la convention est conclue jusqu'à la date de départ effectif du salarié de France Télécom ; qu'enfin, l'article 6 prévoit : Si le salarié ne respecte pas la présente convention ou la Charte d'essaimage de France Télécom, celle-ci pourra mettre fin à la présente convention. En cas de rupture de la présente convention par France Télécom, dans les conditions énoncées ci-dessus, les sommes qu'elle a engagées au titre de la présente convention pourront faire l'objet d'un remboursement total ou partiel. (...) ; qu'il résulte de ces stipulations que la convention n'était applicable qu'aux agents qui conservaient un lien avec le service durant toute la durée de son exécution ; que si l'intéressé a effectivement été placé en position de disponibilité à compter du 1er janvier 2004, cette décision a implicitement mais nécessairement été rapportée par la décision postérieure l'admettant rétroactivement à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 30 décembre 2003 ; que l'admission à la retraite a eu pour effet de rompre définitivement le lien avec le service à cette dernière date ; que, par suite, M. A, qui n'avait plus la qualité de salarié de France Télécom, ne remplissait plus les conditions pour bénéficier de la convention et notamment de la prime d'essaimage ; que, dès lors, France Télécom était fondée, et sans qu'il y ait lieu pour le délégué à l'essaimage de présenter le rapport circonstancié mentionné à l'article 6 de la convention, dont l'absence n'est au demeurant assortie d'aucune sanction, à demander le remboursement de la prime d'essaimage ; qu'aucune disposition ne s'oppose à ce que la récupération de cette somme s'effectue pour tout ou partie par la voie de la compensation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que si M. A a droit au versement de l'indemnité de retraite et de la prime de fin de carrière, d'un montant de 17 774,47 euros, il ne peut bénéficier de la prime d'essaimage d'un montant de 32 280 euros qui lui a été versée ; que France Télécom ayant opéré une compensation entre ces deux sommes, M. A ne peut soutenir qu'il n'a pas perçu la somme correspondant aux indemnités de fin de carrière ; que c'est par suite à bon droit que les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de la société à lui verser la somme de 17 774,47 euros ;
En ce qui concerne les conclusions relatives aux congés payés restant dus :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par France Télécom ;
Considérant que M. A soutient que les jours de congés non pris versés sur son compte épargne-temps (CET), qui lui ont été payés, doivent être assimilés à des jours de travail effectif et lui ouvrent donc droit en sus à des congés payés supplémentaires qui, n'ayant pas été pris, doivent donner lieu au paiement de la somme de 985,75 euros, et non 1 985,75 euros comme indiqué par erreur dans les conclusions du mémoire introductif d'appel ; qu'à l'appui de cette demande, l'intéressé se borne à produire un document interne émanant de la direction des ressources humaines de la société qui mentionne que : Le congé pris au titre du CET est assimilé à une période d'activité, notamment en ce qui concerne l'acquisition des droits à congés (..). ; que la revendication de M. A porte sur des jours de congés non pris et non sur des jours de congés pris ; que, par suite, et en tout état de cause, les conclusions rappelées ci-dessus ne peuvent qu'être rejetées ;
En ce qui concerne les conclusions relatives à la rectification de l'état de situation :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité desdites conclusions ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les jours de congés versés sur le compte épargne-temps et non pris ne pouvant être assimilés à des jours de travail effectif, les conclusions de M. A tendant à ce qu'il soit enjoint à France Télécom de rectifier son état de situation en les prenant en compte doivent être rejetées ;
Sur les conclusions incidentes de France Télécom :
Sur la recevabilité des conclusions incidentes :
Considérant que France Télécom présente des conclusions incidentes tendant à l'annulation de l'article 3 du jugement attaqué rejetant comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ses conclusions tendant à la condamnation de l'appelant à lui rembourser la somme de 11 863,31 euros correspondant à la différence entre le montant des indemnités de fin de carrière et celui de la prime d'essaimage, complété d'une retenue pour service non fait d'une journée et d'un rappel d'une journée en raison de la mise à la retraite à compter du 30 décembre 2003 ;
Considérant que le contentieux entre les agents relevant d'un statut de droit public et les personnes morales qui les emploient relève du juge administratif sauf disposition législative contraire ; que ni la loi du 2 juillet 1990, ni la loi du 26 juillet 1996 susvisées ne comportent de telle disposition ; que c'est par suite à tort que les premiers juges se sont déclarés incompétents pour statuer sur les conclusions sus rappelées ;
Considérant que les conclusions de France Télécom, qui portent comme l'appel principal sur le droit d'un agent à certaines indemnités, ne constituent pas un litige distinct ;
Sur le fond :
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, M. A ne pouvait bénéficier de la prime d'essaimage ; qu'aucune disposition ne s'oppose à ce que France Télécom pratique une compensation entre les sommes dues et les sommes indûment versées ; que la société est dès lors fondée à lui demander le remboursement des sommes indûment perçues ; qu'elle a droit aux intérêts au taux légal à compter de la réception de sa première demande de paiement adressée à l'intéressé soit le 23 juillet 2005 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, d'une part, M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande et, d'autre part, que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté les conclusions reconventionnelles de France Télécom comme irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de cet article : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;
Considérant qu'en vertu de ces dispositions, la cour administrative d'appel ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que la société France Télécom n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées à ce titre par M. A doivent être rejetées ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. A une somme de 500 euros au titre des frais exposés par la société France Télécom et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : L'article 3 du jugement du Tribunal administratif de Lille du 31 octobre 2007 est annulé.
Article 3 : M. A est condamné à rembourser à la société France Télécom la somme de 11 863,31 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2005.
Article 4 : M. A versera à la société France Télécom une somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Bertrand A et à la société France Télécom.
''
''
''
''
2
N°08DA00075