Vu la requête, enregistrée le 3 août 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme M'Hamed Ali A, demeurant ..., par Me Calimez, avocat ; ils demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0701687 du 11 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge totale de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2001 et 2002 ;
2°) de prononcer la décharge demandée de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2001, 2002 et 2003 ;
3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 85 048,59 euros avec intérêts moratoires à compter du 8 novembre 2006 ;
4°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
5°) à titre subsidiaire, de prononcer la décharge des pénalités pour mauvaise foi afférentes aux impositions en litige ;
Ils soutiennent :
- que l'expert-comptable est tenu au secret professionnel ; que lorsqu'il a été entendu le 15 juin 2004, il était encore soumis au respect de ce principe puisqu'il n'a été visé par une information judiciaire qu'à compter du 18 novembre 2004 ; que les poursuites exercées contre le client de l'expert-comptable ne pouvaient avoir pour effet de lever ce secret ; que le principe d'indépendance des procédures n'est pas applicable en cas de violation du secret professionnel ;
- que la requalification de la prime de 39 637 euros versée à M. A est fondée sur les déclarations illicites du 15 juin 2004 de l'expert-comptable ; qu'il en est de même pour les rappels de salaires à hauteur de 21 336 euros versés à M. A et la prime exceptionnelle de 66 150 euros versée à son épouse ;
- que les rémunérations exceptionnelles en litige trouvent leur origine dans les résultats exceptionnels de la société MGE, qui sont à mettre au crédit des requérants ; qu'elles correspondent à un travail effectif et ont été versées conformément à l'intérêt social de la société MGE ; que l'article 39-1-1° du code général des impôts a été respecté ; que la prime exceptionnelle du 2 janvier 2001 est justifiée par la progression des résultats financiers et la forte implication de M. A dans la fonction commerciale ; que le nouveau mode de calcul du salaire explique la régularisation de l'année 2001 ; que la prime exceptionnelle de Mme A est justifiée par un accroissement de l'activité de la société et par un accroissement de ses tâches ;
- que l'administration n'apporte pas la preuve de la mauvaise foi des dirigeants sociaux dès lors que les rémunérations ont été attribuées au cours d'une période caractérisée par une forte progression des ventes et bénéfices ; que les sommes ont été spontanément déclarées et soumises à l'impôt sur le revenu ;
- que le Trésor a fait usage de la procédure d'avis à tiers détenteur et a accepté de n'être payé qu'à concurrence de la somme de 85 048,59 euros ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ; il conclut au rejet de la requête et fait valoir :
- que l'expert-comptable a révélé des faits délictueux dans le cadre d'une information suivie contre M. A et autres ; qu'il n'est pas établi que l'expert-comptable n'était pas légalement délié du secret professionnel ;
- qu'en tout état de cause, le vice de procédure ne pourrait avoir une incidence que sur les rehaussements reposant sur les éléments issus des divulgations d'informations de l'expert-comptable ; qu'il n'est pas contesté que les informations révélées par l'expert-comptable ont été utilisées pour notifier le rehaussement concernant la prime exceptionnelle octroyée à Mme A ; que les rehaussements notifiés le 13 décembre 2004 ne sont pas fondés sur des informations révélées par l'expert-comptable le 15 juin 2004 ;
- que l'attribution des sommes avait pour but de régulariser le compte courant d'associé de M. A qui se serait trouvé débiteur ; que les sommes ainsi attribuées ne correspondaient donc pas à la rétribution de fonctions exercées au sein de la société ;
- que la majoration de mauvaise foi est justifiée par les circonstances que les requérants détenaient l'ensemble des pouvoirs au sein de la SA MGE et ont procédé à des prélèvements excédentaires sur le compte courant de M. A alors que la société présentait un déficit chronique ;
- qu'il n'existe aucun litige concernant la demande de restitution des intérêts moratoires ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 4 décembre 2009, présenté pour M. et Mme A ; ils concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens et soutiennent en outre :
- que seules les poursuites engagées par un magistrat sont susceptibles d'entrainer la levée du secret professionnel ;
- que l'application de la pénalité n'est pas suffisamment motivée ;
- qu'ils se désistent de leur demande de restitution d'une somme de 85 048,59 euros augmentée des intérêts moratoires ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 24 mars 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ; il fait valoir en outre qu'il n'apparait pas que le service ait violé une règle liée à un secret professionnel à laquelle il aurait été tenu ; qu'en tout état de cause, il s'agit d'une erreur de procédure non substantielle au sens de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 25 mars 2010 et régularisé par la production de l'original le 26 mars 2010, présenté pour M. et Mme A ; ils soutiennent en outre :
- que même dans le cas où le vice n'est pas substantiel, le juge a la possibilité de prononcer la décharge des pénalités d'assiette ;
- que l'utilisation des informations couvertes par le secret professionnel a porté atteinte aux droits de leur défense ; que les services fiscaux se sont procurés des informations de manière irrégulière et la Cour devra prononcer une décharge sur le fondement de l'alinéa 2 de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ou en vertu de la jurisprudence association capitale nationale de l'âge de l'illumination ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Corinne Baes Honoré, premier conseiller, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Maître Kieffer, avocat, pour M. et Mme A ;
Considérant que la SA MGE, dont M. et Mme M'Hamed Ali A sont respectivement, président du conseil d'administration et directeur général, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service a remis en cause le caractère déductible de primes et salaires versés aux requérants ; que le service a estimé que les sommes versées constituaient des revenus distribués imposables en application des dispositions de l'article 109-1 du code général des impôts, et en contrepartie, a déduit des revenus imposables de M. et Mme A, les sommes correspondantes qui avaient été déclarées en tant que salaires ; que M. et Mme A demandent à la Cour d'annuler le jugement susvisé par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2001 et 2002 et 2003 ;
Sur les conclusions tendant à obtenir le remboursement de la somme de 85 048,59 euros augmentée des intérêts moratoires :
Considérant que, par un mémoire enregistré le 4 décembre 2009, M. et Mme A ont déclaré se désister de ces conclusions dans la présente instance ; que ce désistement est pur et simple ; que rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte ;
Sur les conclusions tendant à la décharge des impositions :
En ce qui concerne la procédure :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 21 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 : Sous réserve de toute disposition législative contraire, les experts-comptables, les salariés mentionnés à l'article 83 ter et à l'article 83 quater les experts-comptables stagiaires sont tenus au secret professionnel dans les conditions et sous les peines fixées par l'article 226-13 du code pénal ... . Les personnes visées aux alinéas précédents sont toutefois déliées du secret professionnel dans les cas d'information ouverte contre elles ou de poursuites engagées à leur encontre par les pouvoirs publics ou dans les actions intentées devant les chambres de discipline de l'ordre ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 226-13 du code pénal : La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et ... ; qu'aux termes de l'article 226-14 dudit code : L'article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n'est pas applicable ... ;
Considérant qu'en application de l'article L. 82 C du livre des procédures fiscales, le Tribunal de grande instance de Senlis a communiqué au service, un procès-verbal du 15 juin 2004 portant sur l'audition de l'expert-comptable de la société MGE ; que ce dernier y a reconnu que des procès-verbaux du conseil d'administration, autorisant le versement de primes exceptionnelles aux requérants, avaient été établis a posteriori et par suite, antidatés, afin de régulariser des prélèvements antérieurs des requérants ; que ces déclarations étaient couvertes par le secret professionnel auquel sont soumis les experts-comptables ; qu'il résulte cependant de l'instruction que ce document n'a permis que de confirmer l'existence de revenus distribués au profit de M. et Mme A ; que cette existence a pu être déduite des autres constatations effectuées par le service, au vu notamment des comptes courants des intéressés ; que, dans ces conditions, les rappels en litige ne sauraient être regardés comme fondés sur le procès-verbal susmentionné ; que, dès lors, l'utilisation dudit document n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, entaché d'irrégularité la procédure d'imposition ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ... ;
Considérant que le service a relevé qu'une prime exceptionnelle avait été accordée à M. A le 2 janvier 2001 pour un montant de 39 637 euros et une régularisation du salaire de base a été constatée sur sa fiche de salaire de mai 2001 pour un montant de 139 956 francs (21 336 euros) ; qu'au titre de l'année 2002, une prime exceptionnelle a été accordée à Mme A pour un montant de 66 150 euros ; que les requérants prétendent que les rémunérations exceptionnelles perçues sont justifiées par les résultats exceptionnels de la société MGE, une implication plus importante des requérants au sein de la société et justifient la régularisation de salaire par une délibération du conseil d'administration du 15 mai 2001 portant la partie fixe du salaire de M. A, de 13 à 15 % des ventes réalisées ; que si les requérants soutiennent que la prime attribuée à Mme A résulterait également d'un accroissement des tâches assumées par cette dernière, il ressort notamment de la notification de redressements du 13 décembre 2004, qu'à l'exception de l'exercice 2001, les capitaux propres de la société étaient négatifs depuis l'exercice 1998 ; qu'ainsi, la prime n'a pu être attribuée pour tenir compte des résultats prétendument performants de la société ; que l'examen des comptes courants a permis de constater que la prime a été attribuée à M. A pour régulariser une distribution irrégulière de bénéfices, tandis que la régularisation de salaire visait à annuler un solde débiteur du compte courant de l'intéressé ; que de la même façon, la prime accordée à Mme A a été attribuée afin d'annuler le solde débiteur du compte courant du requérant ; que dans ces conditions, l'administration établit que les sommes en cause constituaient, non un élément de la rémunération des requérants, mais un revenu distribué ; que c'est, par suite, à bon droit que l'administration a taxé les sommes litigieuses dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
En ce qui concerne les pénalités :
Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ... ;
Considérant que pour motiver l'application de la pénalité de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, le vérificateur s'est fondé, dans le cadre des notifications de redressement adressées aux intéressés les 13 décembre 2004 et 3 mai 2005, en ce qui concerne l'attribution des primes, sur leur volonté de masquer des abus de biens sociaux, en ce qui concerne la régularisation de salaires, sur leur volonté de masquer une distribution abusive de bénéfices ; qu'il a également relevé que les requérants, maitres de l'affaire, étaient conscients des infractions commises ; que les motifs pour lesquels le service des impôts a entendu faire application de cette sanction étaient ainsi suffisamment exposés et de nature à établir, de la part de M. et Mme A, une intention d'éluder l'impôt et par suite leur mauvaise foi, justifiant l'application desdites pénalités ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme A la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il est donné acte du désistement d'instance des conclusions de M. et Mme A tendant à obtenir le remboursement de la somme de 85 048,49 euros augmentée des intérêts moratoires.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme M'Hamed Ali A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.
Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.
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N°09DA01163