Vu la requête, enregistrée le 29 janvier 2014, présentée pour M. B...A..., demeurant ... et M. D...C..., demeurant..., par Me Agathe Loevenbruck ; MM. A...et C...demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1102387 du 3 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rouen, après avoir condamné la commune de Fécamp et la société mutuelle d'assurance des collectivités locales (SMACL) à leur verser solidairement la somme de 90 277,32 euros et une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant à la condamnation solidaire de la commune de Fécamp et de la SMACL à leur verser la somme de 159 131,68 euros en réparation des préjudices résultant du sinistre survenu le 4 décembre 2007 et la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) d'annuler la décision implicite du 14 août 2011 du maire de Fécamp rejetant la demande indemnitaire préalable formée par M. A...et M. C...;
3°) de condamner la commune de Fécamp à leur verser la somme à parfaire de 192 341,73 euros toutes charges comprises ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Fécamp la somme de 5 000 euros à verser à M. A...et M. C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens de première instance et d'appel ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;
Vu la loi n° 57-1424 du 31 décembre 1957 attribuant compétence aux tribunaux judiciaires pour statuer sur les actions en responsabilité des dommages causés par tout véhicule et dirigés contre une personne de droit public ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,
- les observations de Me Agathe Loevenbruck, avocate de MM. A...et Tiennot, de Me Renaud de Bezenac, avocat de la SMACL et de la commune de Fécamp ;
1. Considérant que MM. A...et C...sont propriétaires indivis d'une parcelle située sur le territoire de la commune de Saint Léonard, sur laquelle ils ont construit et donné en location 49 garages adossés à un mur de soutènement qui leur appartient, l'ensemble étant dominé par une bande de terrain qui leur appartient également ; qu'en 1993, la commune de Fécamp a décidé de mettre en place, en partie sur la propriété des requérants, une aire de retournement pour faciliter les manoeuvres des camions de ramassage des ordures ménagères ; que, le 4 décembre 2007, après que les requérants aient alerté, à plusieurs reprises, la commune de Fécamp de la déformation du mur de soutènement, cet ouvrage s'est effondré sur les garages ; qu'une expertise judiciaire a été diligentée par une ordonnance du président du tribunal de grande instance du Havre du 11 mars 2008 ; que l'expert a rendu son rapport le 2 août 2010 ; que MM. A... et C...relèvent appel du jugement du 3 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rouen a partiellement fait droit à leur demande tendant à la réparation des préjudices subis en leur allouant la somme de 90 277,32 euros, indemnisant les frais de reconstruction, les frais d'enlèvement des épaves, les frais de nettoyage et de déblaiement ;
Sur l'exception d'incompétence opposée par la SMACL :
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise judiciaire du 2 août 2010 et des expertises menées, à la demande de la SMACL les 6 septembre 2007 et 17 janvier 2008, par la société d'arbitrage et d'expertise technique, que les dommages causés sur la parcelle de MM. A...et C...trouvent leur origine dans la confection et le fonctionnement de l'ouvrage public ; que, dès lors, les requérants sont fondés à en demander réparation devant la juridiction administrative en leur qualité de tiers ; que, par suite, l'exception d'incompétence opposée par la SMACL doit être écartée ;
Sur les conclusions à fin d'indemnisation :
3. Considérant que le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers en raison tant de leur existence que de leur fonctionnement ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 2 août 2010, que l'effondrement du mur survenu le 4 décembre 2007 est imputable à un vice de conception de l'aire de retournement, celle-ci n'étant pas adaptée au passage fréquent de véhicules poids lourds, et à l'absence de mesures de précaution prises par la commune lors de la conception de l'ouvrage et de son fonctionnement, notamment concernant l'écoulement des eaux de pluies ; que MM. A...et C...sont ainsi fondés, en leur qualité de tiers à l'ouvrage public, à engager la responsabilité de la commune de Fécamp au titre des dommages de travaux publics ; qu'il résulte, en outre, de l'instruction que, contrairement à ce que fait valoir la SMACL en défense, aucune faute ne peut être retenue à l'encontre des victimes ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que MM. A...et C...justifient, par la production d'une facture du 15 décembre 2011, avoir subi un préjudice évalué à 2 093 euros au titre des frais de déblaiement et à 400 euros d'enlèvement des épaves ainsi que de nettoyage et de remise en état de leur propriété ; que les requérants justifient également avoir supporté la charge des sommes de 4 365,40 euros au titre des frais de maîtrise d'oeuvre, de 12 670,90 euros au titre des frais d'expertise, de 1 865,76 euros au titre du nettoyage et de 85 918,56 euros au titre des frais de réfection ; qu'en revanche, la perte de loyers alléguée par les requérants n'est justifiée ni dans son principe, ni dans son montant, en dépit de la production d'une liste de locataires des garages classés par la mairie comme menaçant ruine et d'une estimation de la valeur des loyers perdus ; que les préjudices constitués par les frais divers ne sont pas davantage établis par les pièces produites ; qu'enfin, les frais de procédure, le paiement des impôts fonciers, la souscription d'une assurance dommage ouvrage ne constituent pas des préjudices découlant directement du dommage et ne sont dès lors pas indemnisables ;
5. Considérant que les requérants n'établissent pas avoir été dans l'impossibilité de financer le coût des travaux à compter de la date du dépôt par l'expert judiciaire de son rapport ; que leur demande d'indexation des frais de reconstruction et de main-d'oeuvre par application de l'indice du coût de la construction BT01 doit être rejetée ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont fondés à solliciter la réformation du jugement qu'en tant qu'il limite à la somme de 90 277,32 euros l'indemnisation allouée en première instance ; que cette somme doit être portée à 107 313,62 euros ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SMACL une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par MM. A...et C...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
9. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner MM. A...etC..., qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, au versement de la somme demandée par la SMACL au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La somme de 90 277,32 euros mise à la charge de la SMACL et de la commune de Fécamp, par le jugement du 3 décembre 2013, est portée à la somme de 107 313,62 euros à verser à MM. A...etC....
Article 2 : Le jugement n° 1102387 du tribunal administratif de Rouen du 3 décembre 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : La SMACL versera à MM. A...et C...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de la SMACL présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à M. D...C..., à la commune de Fécamp et à la société mutuelle d'assurance des collectivités locales (SMACL).
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N°14DA00176