Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société SMAC, société anonyme, a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner l'office public de l'habitat (OPH) d'Amiens à lui verser, d'une part, une somme de 109 851,20 euros toutes taxes comprises (TTC), assortie des intérêts moratoires contractuels à compter du 10 octobre 2010, au titre de l'exécution du marché de travaux de couverture des résidences Laennec et Roy à Rivery (Somme) conclu le 16 décembre 2008, d'autre part, une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de sa résistance abusive et, enfin, une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1101882 du 1er octobre 2013, le tribunal administratif d'Amiens a condamné l'OPH d'Amiens à verser à la société SMAC les intérêts moratoires sur la somme de 33 015,19 euros, pour la période du 11 octobre 2010 au 9 septembre 2011, et a rejeté le surplus de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 décembre 2013, la société SMAC, représentée par la SCP Boussageon, Guitard, Philippon, demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement ;
2°) de porter à la somme de 109 851,20 euros TTC, assortie des intérêts moratoires contractuels à compter du 10 octobre 2010, le montant de l'indemnité due au titre de l'exécution du marché précité ;
3°) de mettre à la charge de l'OPH d'Amiens une somme de 10 000 euros au titre de la " résistance " abusive ;
4°) de mettre à la charge de l'OPH d'Amiens la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-Michel Riou, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Perrine Hamon, rapporteur public,
- et les observations de Me B...A..., représentant l'OPH d'Amiens.
Sur l'indemnisation de travaux supplémentaires :
1. Considérant que l'entrepreneur ayant effectué des travaux non prévus au marché et qui ont été ordonnés, même sans ordre de service écrit, par le maître d'ouvrage a droit à être rémunéré de ces travaux, s'ils ont été utiles à la réalisation de l'ouvrage ;
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du décompte général établi par le maître d'ouvrage, que la fourniture de fenêtres de type " velux " pour les logements de la résidence Roy, pour un montant de 14 827,29 euros TTC, n'a pas fait l'objet d'une indemnisation ;
3. Considérant que l'article V.4 du cahier des clauses techniques particulières, relatif aux " nouvelles couvertures ", précisait les prestations pour lesquelles la fourniture et la pose d'un nouveau matériel étaient demandées à l'entrepreneur ; que cet article prévoyait, pour les fenêtres de toit de ces logements, un " traitement des velux par rehausse " ; qu'ainsi, la fourniture, à l'exclusion de la pose, de nouvelles fenêtres de toit constituait une prestation non prévue au marché ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le maître d'ouvrage, après avoir accepté le devis proposé par l'entreprise relatif à cette prestation, a établi un avenant qui, signé par lui, ne l'a pas été par l'entreprise au seul motif qu'elle souhaitait obtenir également un allongement du délai d'exécution du chantier ; que, toutefois, l'office n'a remis en cause ni son accord sur la prestation en cause, qui a été exécutée conformément à la proposition acceptée par l'office, ni son utilité ; que ces travaux supplémentaires doivent ainsi, dans les circonstances de l'espèce, être regardés comme ayant été exécutés sur ordre du maître d'ouvrage ; que le montant supplémentaire réclamé correspondant à la fourniture des éléments à poser, prestation qui n'avait pas été prévue au marché, n'est pas contesté ; que, par suite, la société est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande sur ce point ;
En ce qui concerne les pénalités pour retard dans l'exécution des travaux :
5. Considérant qu'en vertu de l'article 4.2.2 du cahier des clauses administratives particulières, sur les délais d'exécution du marché, les délais impartis pour les travaux étaient de vingt-huit semaines à compter de la date " fixée par recommandé " par le maître de l'ouvrage ;
6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que le maître de l'ouvrage a fixé, par ordre de service reçu le 12 mars 2009 par l'entrepreneur, le démarrage des travaux au 16 mars 2009 ; qu'il résulte de l'instruction que l'impossibilité de débuter le chantier a eu exclusivement pour cause l'absence de production, par l'entrepreneur, de documents relatifs notamment à la sécurité du chantier qui étaient indispensables à son démarrage ; que la circonstance qu'un compte rendu de chantier ait mentionné le 14 avril 2009 comme date de démarrage des travaux n'a pas eu pour objet et ne pouvait avoir pour effet de remettre en cause, le point de départ des travaux fixé par l'ordre de service précité ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment des comptes rendus de chantier, non contestés, que le retard pris par les travaux, notamment entre le 6 juillet 2009 et le 7 octobre 2009, est également imputable à l'entrepreneur qui, n'ayant pas affecté un personnel suffisant, a dû interrompre le chantier pendant environ six semaines du fait de la méconnaissance des règles de sécurité des travaux en hauteur et a dû, en outre, reprendre de multiples malfaçons ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ce retard serait également imputable au maître de l'ouvrage, notamment, en ce qui concerne le remplacement des fenêtres de toiture ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 19.22 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés de travaux, dans sa rédaction applicable au marché en cause : " 19.22. Dans le cas d'intempéries au sens des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur, entraînant un arrêt de travail sur les chantiers, les délais d'exécution des travaux sont prolongés. Cette prolongation est notifiée à l'entrepreneur par un ordre de service qui en précise la durée laquelle est égale au nombre de journées réellement constaté au cours desquelles le travail a été arrêté du fait des intempéries conformément auxdites dispositions, en défalquant s'il y a lieu, le nombre de journées d'intempéries prévisibles indiqué au C.C.A.P. / Dans le cas d'intempéries non visées par une disposition légale ou réglementaire ainsi que le cas d'autres phénomènes naturels entravant l'exécution des travaux, si le C.C.A.P. prévoit la prolongation du délai d'exécution en fonction de critères qu'il définit, cette prolongation de délai est notifiée à l'entrepreneur par un ordre de service récapitulant les constatations faites. " ; que l'article 4.2.3 du cahier des clauses administratives particulières, qui ne déroge pas à ces dispositions et ne définit pas de critères spécifiques pour une prolongation du fait d'intempéries, prévoyait un signalement des intempéries à la charge de l'entrepreneur, par télécopie confirmée en lettre recommandée ;
9. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'entrepreneur aurait demandé une prolongation de délai en raison d'intempéries ; que, dès lors, la demande présentée à ce titre doit être rejetée ;
10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 19.11 du CCAG applicable aux marchés de travaux, dans sa rédaction applicable au marché en cause : " Le délai d'exécution des travaux fixé par le marché s'applique à l'achèvement de tous les travaux prévus incombant à l'entrepreneur, y compris sauf stipulation différente du marché, le repliement des installations de chantier et la remise en état des terrains et des lieux. / (...) " ; que le marché en cause ne déroge pas à ces dispositions ;
11. Considérant que les réserves exprimées lors de la réception des travaux, et figurant au procès-verbal du 29 mars 2010, présentaient un caractère mineur ; qu'elles ne faisaient pas obstacle à ce que les travaux soient regardés comme achevés à la date du 29 mars 2010 retenue par le maître d'ouvrage pour la fin des travaux et le terme des pénalités de retard ; qu'en outre, il ne résulte pas de l'instruction que l'achèvement des travaux, qui comprennent le repliement des installations de chantier et la remise en état des terrains et des lieux conformément à l'article 19.11du CCAG précité, aurait été antérieur au 29 mars 2010 ;
12. Considérant qu'il résulte des points 5 à 11 que la société n'est pas fondée à soutenir que les pénalités ne seraient pas dues en raison des retards constatés dans l'exécution des travaux ;
En ce qui concerne les pénalités pour retard dans la production de documents :
13. Considérant qu'aux termes de l'article 4.2.1 du cahier des clauses administratives particulières : " A partir de la notification du marché, le titulaire du marché dispose d'un délai de deux semaines pour fournir les notices techniques des produits et matériaux utilisés, les échantillons et les plans d'exécution (...) " ; qu'aux termes de l'article 4.7 du même cahier : " En cas de retard dans la remise des documents à fournir par l'entrepreneur, une pénalité de 50 euros TTC par jour calendaire de retard sera appliquée. (...) " ;
14. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des comptes rendus de chantier, que la société SMAC, qui avait reçu notification du marché, par la signature de l'acte d'engagement, le 16 décembre 2008, n'a pas fourni les documents énumérés par les stipulations précitées de l'article 4.2.1 du cahier des clauses administratives particulières dans le délai de quinze jours suivant cette notification ; qu'il est constant que la totalité de ces documents n'a été produite que le 21 septembre 2009 ; que, par suite, le maître d'ouvrage, en appliquant des pénalités pour retard dans la production de documents pour une durée de deux cent cinquante-neuf jours, correspondant à la période écoulée entre le 5 janvier 2009 et le 21 septembre 2009, n'a pas méconnu les stipulations précitées des articles 4.2.1 et 4.7 du cahier des clauses administratives particulières ;
En ce qui concerne la demande de modulation des pénalités :
15. Considérant qu'il est loisible au juge administratif, saisi de conclusions en ce sens, de modérer ou d'augmenter les pénalités de retard résultant du contrat, par application des principes dont s'inspire l'article 1152 du code civil, si ces pénalités atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire eu égard au montant du marché ;
16. Considérant que, compte tenu des conditions d'exécution du marché par son titulaire, les pénalités de retard qui lui ont été appliquées, et qui ont été calculées conformément aux stipulations de l'article 4.5 du cahier des clauses administratives particulières, ne présentent pas, dans les circonstances de l'espèce, de caractère excessif, alors même qu'elles représentent environ 22 % du montant du marché ;
En ce qui concerne la demande d'indemnisation au titre de la " résistance abusive " de l'office :
17. Considérant que la société requérante ne justifie ni d'un préjudice autre que celui réparé par l'octroi d'intérêts moratoires que le tribunal administratif, par l'article 1er de son jugement, a condamné l'office à lui verser, ni du caractère " abusif " du comportement du maître de l'ouvrage ; que, par suite, ce chef de demande doit être rejeté ;
18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société SMAC est seulement fondée à obtenir l'indemnisation des travaux supplémentaires qu'elle a réalisés, soit la somme de 14 827,29 euros TTC ; que cette somme sera assortie des intérêts moratoires contractuels à compter du 11 octobre 2010, lendemain du jour d'expiration du délai de mandatement faisant suite à la date limite impartie au maître d'ouvrage pour établir le décompte général, le 26 août 2010 ;
19. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'office public de l'habitat d'Amiens une somme de 1 500 euros à verser à la société SMAC sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société SMAC, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que l'office public de l'habitat d'Amiens demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'office public de l'habitat d'Amiens versera à la société SMAC la somme de 14 827,29 euros TTC, assortie des intérêts moratoires contractuels à compter du 11 octobre 2010.
Article 2 : Le jugement du 1er octobre 2013 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er.
Article 3 : L'office public de l'habitat d'Amiens versera à la société SMAC une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société SMAC est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de l'office public de l'habitat d'Amiens présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société SMAC et à l'office public de l'habitat d'Amiens.
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N°13DA01909 2