Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Pieux Ouest a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner la commune de Croth à lui verser la somme de 44 252 euros toutes taxes comprises, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 7 février 2012, au titre des travaux effectués dans le cadre de la restructuration de la mairie et de l'extension de la garderie périscolaire.
Par un jugement n° 1303533 du 7 juillet 2015, le tribunal administratif de Rouen a condamné la commune de Croth à verser à la société Pieux Ouest la somme de 29 501,33 euros toute taxes comprises, assortie des intérêts moratoires à compter du 9 février 2012, a subordonné le paiement de cette indemnité à la condition que la société requérante subroge la commune dans les droits qu'elle pourrait faire valoir à l'encontre de la société Minic Tmc, et a imposé à la société Pieux Ouest de reverser à la commune la différence entre, d'une part, la provision, assortie des intérêts, qui lui a été accordée par l'ordonnance n° 13DA00012 du 11 juillet 2013 et, d'autre part, la somme de 29 501,33 euros assortie des intérêts, sous réserve que ladite provision lui ait été effectivement versée.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 1er septembre 2015, la société Pieux Ouest, représentée par Me E...C...-jamin, demande à la Cour :
1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Rouen du 7 juillet 2015 en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité de ses conclusions indemnitaires ;
2°) de condamner la commune de Croth à lui verser la somme de 44 252 euros toutes taxes comprises, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 7 février 2012 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Croth la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- et les observations de Me B...D..., représentant la société Pieux Ouest et Me H... A...substituant Me G...F...représentant la commune de Croth.
1. Considérant que la commune de Croth a conclu en 2009 avec la société Minic Tmc un marché ayant pour objet les lots 1/2a et 1/2b (voirie, réseaux divers, fondations spéciales gros oeuvre), dans le cadre de la restructuration de la mairie et de l'extension de la garderie périscolaire ; que la société Minic Tmc a confié l'exécution d'une partie des travaux faisant l'objet de ce marché à la société Pieux Ouest ; que la société Minic Tmc, placée en procédure de redressement judiciaire, puis de liquidation judiciaire, n'a pas payé à la société Pieux Ouest les travaux que cette dernière a effectués ; que, par une ordonnance n° 1202011 du 19 décembre 2012, le juge des référés du tribunal administratif de Rouen a condamné la commune de Croth à verser à la société Pieux Ouest une provision de 10 000 euros ; que, par une ordonnance n° 13DA00012 du 11 juillet 2013, le président de la première chambre de la cour administrative d'appel de céans a porté le montant de la provision accordée par le juge des référés de première instance à la somme de 35 163,25 euros ; que, le juge des référés n'ayant pas fait droit à l'ensemble de la demande de la société Pieux Ouest, cette dernière a demandé au tribunal administratif de condamner la commune à lui verser la somme de 44 252 euros toutes taxes comprises en réparation du préjudice subi ; que par un jugement du 7 juillet 2015, le tribunal administratif de Rouen a condamné la commune de Croth à verser à la société Pieux Ouest la somme de 29 501,33 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts moratoires à compter du 9 février 2012, a subordonné le paiement de cette indemnité à la condition que la société requérante subroge la commune dans les droits qu'elle pourrait faire valoir à l'encontre de la société Minic Tmc, et a imposé à la société Pieux Ouest de reverser à la commune la différence entre, d'une part, la provision, assortie des intérêts, qui lui a été accordée par l'ordonnance n° 13DA00012 du 11 juillet 2013 et, d'autre part, la somme de 29 501,33 euros assortie des intérêts, sous réserve que ladite provision lui ait été effectivement versée ; que la société Pieux Ouest fait appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité de ses conclusions indemnitaires ; que la commune de Croth, par la voie de l'appel incident, demande à la Cour de réduire sa part de responsabilité ;
2. Considérant qu'en vertu de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1975, l'entrepreneur qui entend exécuter un contrat ou un marché en recourant à un ou plusieurs sous-traitants doit, au moment de la conclusion et pendant toute la durée du contrat ou du marché, faire accepter chaque sous-traitant et agréer les conditions de paiement de chaque contrat de sous-traitance par le maître de l'ouvrage ; qu'en vertu de l'article 6 de cette même loi, le sous-traitant direct du titulaire du marché qui a été accepté et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître de l'ouvrage, est payé directement par lui pour la part du marché dont il assure l'exécution ; qu'en outre, en vertu des dispositions de l'article 14-1 de cette loi, pour les contrats de travaux de bâtiment et de travaux publics, le maître de l'ouvrage doit, s'il a connaissance de la présence sur le chantier d'un sous-traitant n'ayant pas fait l'objet des obligations définies notamment à l'article 3 ou à l'article 6 précités, mettre l'entrepreneur principal ou le sous-traitant en demeure de s'acquitter de ces obligations ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que la responsabilité du maître d'ouvrage est engagée lorsqu'il connaît l'existence du sous-traitant et s'abstient de provoquer la régularisation de sa situation ;
3. Considérant qu'il est constant que la société Minic Tmc n'a pas, en méconnaissance des dispositions précitées, fait accepter par la commune de Croth la société Pieux Ouest comme son sous-traitant et n'a donc pas, non plus, fait agréer les conditions de paiement du contrat de sous-traitance ; qu'il résulte de l'instruction, notamment de la lettre du 11 janvier 2010, adressée par la société Pieux Ouest à la commune, lui demandant transmission des réponses des exploitants des réseaux enterrés sur l'emplacement de ces derniers et adressant la copie du courrier qu'elle a envoyé à la société Minic Tmc en vue de demander à cette dernière de faire le nécessaire pour qu'elle obtienne, du maître de l'ouvrage, l'agrément et l'acceptation des conditions de paiement, que la commune avait connaissance de l'existence d'un contrat de sous-traitance conclu entre la société Minic Tmc et la société Pieux Ouest ; que, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, la commune de Croth, en s'abstenant de procéder à l'acceptation de la société requérante en qualité de sous-traitant et à l'agrément des conditions de paiement, a méconnu les dispositions précitées et ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
4. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que la commune a eu connaissance du contrat de sous-traitance conclu entre la société Minic Tmc et la société requérante, par un courrier du 11 janvier 2010 que celle-ci lui a adressé ; que, par suite, elle n'est pas fondée à se prévaloir d'une faute du sous-traitant, ce dernier s'étant fait directement connaître auprès d'elle avant d'avoir exécuté les travaux ;
5. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que la société Minic Tmc n'a pas, contrairement à ce qu'imposent les dispositions de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1975, indiqué au maître de l'ouvrage l'identité du sous-traitant auquel elle entendait faire appel et n'a pas, en méconnaissance de l'article 3 de cette même loi, soumis ce sous-traitant à l'acceptation du maître de l'ouvrage ; que, par suite, la responsabilité de ce dernier est atténuée par la faute commise par la société Minic Tmc ; que les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce en exonérant la commune, du fait de cette faute, d'un tiers de sa responsabilité ;
6. Considérant enfin que la commune de Croth ne conteste pas l'évaluation du préjudice retenue par les premiers juges ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que ni la société Pieux Ouest ni la commune de Croth ne sont fondées à demander la réformation du jugement attaqué ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE
Article 1er : La requête de la société Pieux Ouest est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Croth au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Pieux Ouest et à la commune de Croth.
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N°15DA01454