Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière Simon a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge de la taxe sur les plus-values de cession d'immeubles autres que les terrains à bâtir prévue à l'article 1609 nonies G du code général des impôts, ainsi que des intérêts correspondants, auxquels elle a été assujettie à raison de la cession d'un immeuble réalisée au profit de la SCI Frêne.
Par un jugement n° 1404260 du 27 avril 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 27 juin 2017, le 29 décembre 2017 et le 12 octobre 2018, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la SCI Simon, représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 27 avril 2017 ;
2°) de prononcer la décharge demandée et la restitution des sommes correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la promesse synallagmatique de vente sous conditions suspensives signée le 19 novembre 2012 en ce qui concerne l'immeuble en cause a acquis date certaine le 1er décembre 2012, date du versement d'un acompte de 15 000 euros ;
- les premiers juges et l'administration ont retenu à tort qu'une telle date certaine ne pouvait être reconnue à cet acte au seul motif qu'il ne répondait pas aux conditions posées par l'article 1328 du code civil, dès lors que cette approche stricte n'est pas conforme à l'intention du législateur, qu'elle ajoute à la loi et qu'elle méconnaît les principes de sécurité juridique et d'égalité devant les charges publiques ;
- la doctrine administrative du 6 août 2013, dont elle n'entend pas invoquer le bénéfice sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, est toutefois de nature à révéler cette intention quant à la possibilité de donner date certaine à un acte par d'autres moyens.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2017, le ministre de l'action des des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la SCI Simon ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par acte notarié dressé le 1er février 2013, la société civile immobilière Simon, dont le siège est situé à Sainte Adresse (Seine-Maritime), a vendu à la SCI Frêne un immeuble de rapport situé 1 rue Casimir Delavigne et 4 rue Jean-Baptiste Eyries au Havre au prix de 1 450 000 euros net. La SCI Simon a spontanément acquitté à l'administration fiscale la somme de 64 594 euros, correspondant au montant de la taxe sur les plus-values de cession d'immeubles autres que les terrains à bâtir introduite à l'article 1609 nonies G du code général des impôts par l'article 70 de la loi du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012. Néanmoins, la SCI Simon a formé, le 7 avril 2014, une réclamation visant à contester son assujettissement à cette taxe à raison de cette cession. Cette réclamation ayant été rejetée par une décision du 29 septembre 2014, la SCI Simon a porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen, qui par le jugement attaqué du 27 avril 2017, a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette taxe, ainsi que des intérêts correspondants, auxquels elle a été assujettie à raison de cette cession immobilière.
2. Aux termes de l'article 70 de la loi du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012 : " I. A. Après la section XIII quinquies du chapitre Ier du titre III de la deuxième partie du livre Ier du code général des impôts, est insérée une section XIII sexies ainsi rédigée : / " Section XIII sexies " Taxe sur les plus-values de cession d'immeubles autres que des terrains à bâtir / " Art. 1609 nonies G.-I. - Il est institué une taxe sur les plus-values réalisées dans les conditions prévues aux articles 150 U et 150 UB à 150 UD par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter et dans celles prévues à l'article 244 bis A par les contribuables non domiciliés fiscalement en France assujettis à l'impôt sur le revenu. / (...) / " II. - La taxe est assise sur le montant imposable des plus-values déterminé dans les conditions prévues, selon le cas, aux articles 150 V à 150 VD ou au II de l'article 244 bis A du présent code. / " Elle est due par le cédant et exigible lors de la cession. / " III. - La taxe est due à raison des plus-values imposables d'un montant supérieur à 50 000 (...) / (...) / C. - Le A du présent I s'applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2013, à l'exception de celles pour lesquelles une promesse de vente a acquis date certaine avant le 7 décembre 2012. / (...) ".
3. Les dispositions précitées du C du III de l'article 70 de la loi du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012 excluent du champ d'application de la taxe sur les plus-values de cession d'immeubles autres que des terrains à bâtir, désormais prévue à l'article 1609 nonies G du code général des impôts, les plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2013, lorsqu'elles ont fait l'objet d'une promesse de vente ayant acquis date certaine avant le 7 décembre 2012. Telle qu'elle est rédigée, la condition ainsi posée par ce texte renvoie nécessairement aux dispositions de l'article 1328 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, en vertu desquelles les actes sous seing privé n'ont de date contre les tiers que du jour où ils ont été enregistrés, du jour de la mort de celui ou de l'un de ceux qui les ont souscrits, ou du jour où leur substance est constatée dans les actes dressés par des officiers publics, tels que procès-verbaux de scellé ou d'inventaire.
4. Ainsi qu'il vient d'être dit au point précédent, les dispositions, citées au point 2, du C du III de l'article 70 de la loi du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012 sont claires, de sorte qu'il n'y a lieu de se référer, pour révéler l'intention du législateur ni aux travaux parlementaires qui en ont précédé l'adoption ni, en tout état de cause, à l'interprétation qui en a été donnée par l'administration dans une instruction publiée au bulletin officiel des impôts.
5. La SCI Simon soutient, en l'espèce, que la promesse de vente qu'elle a conclue avec M. et Mme A..., associés de la SCI Frêne auxquels cette dernière s'est depuis substituée, en la forme d'un acte sous seing privé signé le 19 novembre 2012, aurait acquis date certaine le 29 novembre 2012, date à laquelle un chèque d'un montant de 15 000 euros a été remis à titre d'acompte à l'agence immobilière qu'elle avait désignée comme mandataire. Toutefois, eu égard à ce qui a été dit au point 3, ni cette circonstance ni aucun des autres événements intervenus à la suite de la conclusion de cet acte sous seing privé et dont se prévaut la SCI Simon, ne sont, par eux-mêmes, de nature à conférer date certaine à cet acte au sens des dispositions précitées du C du III de l'article 70 de la loi du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012. En revanche, il est constant que celui-ci n'a fait l'objet, avant le 7 décembre 2012, ni d'un enregistrement, ni d'un acte dressé par un officier public pour en constater la substance, et qu'aucun des autres faits envisagés par les dispositions de l'article 1328 du code civil, rappelées au point 3, n'est intervenu avant cette date. Il suit de là que la SCI Simon n'est pas fondée à soutenir que la cession qu'elle a réalisée n'entrerait pas dans le champ d'application temporel de la taxe sur les plus-values de cession d'immeubles autres que les terrains à bâtir prévue par l'article 1609 nonies G du code général des impôts.
6. Pour estimer que la SCI Simon était redevable de cette taxe, l'administration s'est fondée sur le motif que la promesse de vente synallagmatique dont cette société se prévalait n'avait pas revêtu date certaine, au sens de ces dispositions de l'article 1328 du code civil, avant le 7 décembre 2012. Ce faisant, l'administration a fait une application littérale des dispositions du C du III de l'article 70 de la loi du 29 décembre 2012, qui ont instauré cette taxe et inséré l'article 1609 nonies G au code général des impôts, sans qu'il lui ait été nécessaire de se livrer à une interprétation de ces dispositions, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 4 ci-dessus, ces dispositions sont claires. Par suite, les moyens tirés de ce que l'interprétation qu'aurait retenue l'administration ajouterait à la loi fiscale et qu'elle méconnaîtrait les principes de sécurité juridique et d'égalité devant les charges publiques ne peuvent qu'être écartés.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Simon n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 27 avril 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Les conclusions qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SCI Simon est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Simon et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 23 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
- Mme C... B..., présidente de chambre,
- M. Xavier Fabre, premier conseiller,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 13 novembre 2018.
Le rapporteur,
Signé : J.-F. PAPINLa présidente de chambre,
Signé : J. GRAND B...La greffière,
Signé : N. ROMERO
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
Nathalie Roméro
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