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15/11/2018 | FRANCE | N°16DA01071

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 15 novembre 2018, 16DA01071


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première requête, la société Spontex a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler le titre de recettes émis le 4 juillet 2013 par l'agence de l'eau Seine-Normandie pour le recouvrement d'une somme de 67 059,08 euros, correspondant à la rectification du montant de la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau due au titre de l'année 2009, ainsi que la décision implicite rejetant la réclamation préalable dirigée contre ce titre de recettes.

Par une seconde requête, la

même société a demandé au même tribunal d'annuler le titre de recettes émis le 14 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première requête, la société Spontex a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler le titre de recettes émis le 4 juillet 2013 par l'agence de l'eau Seine-Normandie pour le recouvrement d'une somme de 67 059,08 euros, correspondant à la rectification du montant de la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau due au titre de l'année 2009, ainsi que la décision implicite rejetant la réclamation préalable dirigée contre ce titre de recettes.

Par une seconde requête, la même société a demandé au même tribunal d'annuler le titre de recettes émis le 14 novembre 2013 par l'agence de l'eau Seine-Normandie pour le recouvrement d'une somme de 51 098,40 euros, correspondant à la rectification du montant de la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau due au titre de l'année 2010, le titre émis le même jour pour le recouvrement d'une somme de 8 584,53 euros, correspondant aux pénalités de retard et majorations assortissant cette rectification, ainsi que la décision implicite rejetant la réclamation préalable dirigée contre ces deux titres de recettes.

Par un jugement nos 1400102-1401946 du 12 avril 2016, le tribunal administratif Amiens a procédé à la jonction de ces deux requêtes et rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 juin 2016, et un mémoire complémentaire, enregistré le 23 mai 2017, la société Spontex, représentée par la SELARL Soler-Couteux, LLorens, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ces décisions et titres de recettes ;

3°) d'enjoindre à l'agence de l'eau Seine-Normandie de lui restituer les sommes afférentes, assorties des intérêts au légal à compter de la date respective de leur paiement ;

4°) de mettre à la charge de l'agence de l'eau Seine-Normandie la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jimmy Robbe, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public,

- et les observations de Me E...F..., substituant Me B...D..., représentant la société Spontex, et de Me C...A..., substituant Me H...G..., représentant l'agence de l'eau Seine-Normandie.

Considérant ce qui suit :

1. La société Spontex relève appel du jugement du 12 avril 2016 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions et titre de recettes par lesquels l'agence de l'eau Seine-Normandie a rectifié le montant de ses redevances pour prélèvement sur la ressource en eau au titre des années 2009 et 2010 au motif qu'elle ne pouvait bénéficier du tarif réservé aux prélèvements pour le " refroidissement industriel conduisant à une restitution supérieure à 99 % ".

Sur la régularité du jugement :

En ce qui concerne le principe du contradictoire :

2. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. (...) ". Aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".

3. Un mémoire a été enregistré au greffe du tribunal administratif d'Amiens pour l'agence de l'eau Seine-Normandie le 12 février 2016, soit avant la clôture d'instruction fixée au 17 février 2016. Ce mémoire n'a pas été communiqué à la société Spontex. Toutefois, le tribunal ne s'est pas fondé sur les observations contenues dans ce mémoire, qui d'ailleurs ne comportait pas d'éléments nouveaux au sens des dispositions précitées de l'article R. 611-1 du code de justice administrative. Le tribunal, en ne communiquant pas ce mémoire, n'a donc pas méconnu le principe du contradictoire. La société requérante n'est donc pas fondée à soutenir que le jugement est entaché d'une irrégularité sur ce point.

En ce qui concerne la motivation :

4. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

5. Le jugement attaqué cite les dispositions de l'article L. 213-10-9 du code de l'environnement applicables au litige, indique ensuite la façon dont il l'interprète lorsqu'il est y fait référence au " refroidissement industriel conduisant à une restitution supérieure à 99 % " et en déduit enfin qu'en l'espèce, l'agence de l'eau Seine-Normandie en a fait une exacte application dans le cadre du redressement effectué à l'égard de la société Spontex. Le tribunal n'était pas tenu d'exposer les raisons l'ayant conduit à retenir l'interprétation à laquelle il s'est livré. Par suite, la société Spontex n'est pas fondée à soutenir que ce jugement serait insuffisamment motivé pour n'avoir pas indiqué ces raisons.

Sur le bien-fondé des impositions :

6. Aux termes de l'article L. 213-10 du code de l'environnement : " En application du principe de prévention et du principe de réparation des dommages à l'environnement, l'agence de l'eau établit et perçoit auprès des personnes publiques ou privées des redevances pour atteintes aux ressources en eau, au milieu marin et à la biodiversité, en particulier des redevances (...) pour prélèvement sur la ressource en eau (...) ". Aux termes de l'article L. 213-10-9 du même code : " I. - Toute personne dont les activités entraînent un prélèvement sur la ressource en eau est assujettie à une redevance pour prélèvement sur la ressource en eau. / (...) / III. - La redevance est assise sur le volume d'eau prélevé au cours d'une année. / (...) / V. - Pour la fixation du tarif de la redevance, les ressources en eau de chaque bassin sont classées en catégorie 1 lorsqu'elles sont situées hors des zones de répartition des eaux définies en application du 2° du II de l'article L. 211-2 ou en catégorie 2 dans le cas contraire. / Le tarif de la redevance est fixé par l'agence de l'eau en centimes d'euro par mètre cube dans la limite des plafonds suivants, en fonction des différents usages auxquels donnent lieu les prélèvements ". Le tableau figurant à la suite de ces dispositions a fixé, pour les années d'imposition en litige, un plafond de 2 euros en catégorie 1 et de 3 euros en catégorie 2 pour l'irrigation (sauf l'irrigation gravitaire), de 0,10 centimes d'euros en catégorie 1 et de 0,15 centimes d'euros en catégorie 2 pour l'irrigation gravitaire, de 6 euros en catégorie 1 et de 8 euros en catégorie 2 pour l'alimentation en eau potable, de 0,35 centimes d'euros en catégorie 1 de 0,50 centimes d'euros en catégorie 2 pour le refroidissement industriel conduisant à une restitution supérieure à 99 %, de 0,015 centimes d'euros en catégorie 1 et de 0,04 centimes d'euros en catégorie 2 pour l'alimentation d'un canal, et de 3 euros en catégorie 1 et de 4 euros en catégorie 2 pour les autres usages économiques.

7. Tout prélèvement sur la ressource en eau, quelque soit l'usage auquel il donne lieu, est susceptible de porter atteinte à cette ressource. La redevance pour prélèvement sur la ressource en eau prévue à l'article L. 213-10-9 du code de l'environnement a pour objet, à l'instar de toutes celles établies et perçues par les agences de l'eau pour les bassins hydrographiques dont elles ont la charge, de prévenir et de réparer ces atteintes. Le législateur a entendu mettre en oeuvre ces principes de prévention et de réparation en fixant les plafonds des différents tarifs de cette redevance selon la portée d'une telle atteinte au regard des différents usages auxquels donne lieu son prélèvement. La restitution de l'eau au même milieu naturel que celui dans lequel elle a été prélevée affectant moins la ressource en eau que son rejet dans un autre milieu naturel, les dispositions citées au point précédent doivent dès lors s'entendre comme réservant le tarif de la rubrique " refroidissement industriel conduisant à une restitution supérieure à 99 % " aux seuls prélèvements conduisant les opérateurs à restituer l'eau à son milieu naturel d'origine.

8. Il est constant que l'eau prélevée par la société Spontex dans la nappe phréatique n'est pas restituée à celle-ci, mais rejetée dans un cours d'eau, soit un milieu naturel différent du milieu naturel d'origine. Par conséquent, et sans qu'y fasse obstacle la circonstance, à la supposer établie, que cette restitution à la même nappe phréatique aurait été impossible à réaliser en l'espèce ou que l'arrêt des prélèvements dans cette nappe aurait été préjudiciable à la population, la société Spontex n'est pas fondée à soutenir que les impositions contestées devaient être établies sur la base du tarif " refroidissement industriel conduisant à une restitution supérieure à 99 % " et non sur celles du tarif relatif aux " autres usages économiques " qui lui a été appliqué en l'espèce. Les rectifications procédant de cette remise en cause trouvant leur base légale dans les seules dispositions précitées de l'article L. 213-10-9 du code de l'environnement, la société Spontex ne saurait utilement se prévaloir, pour en contester le bien-fondé, de l'illégalité de la circulaire n° 6/DE du 15 février 2008 relative à l'application des redevances prévues aux articles L. 213-10-1 et suivants du code de l'environnement.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Spontex n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes.

Sur les frais liés au procès :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'agence de l'eau Seine-Normandie, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme réclamée sur leur fondement par la société Spontex.

11. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société Spontex une somme de 1 500 euros à verser à l'agence de l'eau Seine-Normandie sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Spontex est rejetée.

Article 2 : La société Spontex versera à l'agence de l'eau Seine-Normandie une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Spontex et à l'agence de l'eau Seine-Normandie.

N°16DA01071 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01071
Date de la décision : 15/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

27-05-02 Eaux. Gestion de la ressource en eau. Redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. Richard
Rapporteur ?: M. Jimmy Robbe
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS SOLER-COUTEAUX / LLORENS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-11-15;16da01071 ?
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