La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/02/2024 | FRANCE | N°23DA01435

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 20 février 2024, 23DA01435


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé.



Par un jugement n° 2204409 du 30 mars 2023, le tribunal a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :

r>
Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées les 19 juillet et 14 septembre 2023, M. B..., représen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé.

Par un jugement n° 2204409 du 30 mars 2023, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées les 19 juillet et 14 septembre 2023, M. B..., représenté par Me Abdel Alouani, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention : " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, à verser à son conseil, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

- le refus de son admission au séjour méconnaît les stipulations de l'article 2 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leur famille, dès lors qu'il est entré régulièrement en France et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus d'admission au séjour.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 août 2023, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête et fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par l'appelant n'est fondé.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 9 mars 1995 relatif à la déclaration d'entrée sur le territoire ;

- la décision du Conseil constitutionnel n° 91-294 DC du 25 juillet 1991 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Marc Baronnet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est un ressortissant algérien né en 1997 en Algérie, entré en France le 6 avril 2017 muni d'un visa de court séjour délivré par les autorités espagnoles valable du 21 mars 2017 au 19 avril suivant. M. B... fait appel du jugement du 30 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 octobre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour sur le fondement du 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ".

3. L'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 stipule que : " I - Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans les conditions fixées par chaque partie contractante, aux autorités compétentes de la partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent (...) ". Selon les dispositions de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date d'entrée en France de M. B..., et qui, désormais codifiées à l'article L. 621-2, demeurent applicables : " I. - Par dérogation aux articles L. 213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-1, L. 512-3, L. 512-4, L. 513-1 et L. 531-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1 et L. 311-1 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne, en vigueur au 13 janvier 2009. / (...) ". Et selon les dispositions de l'article L. 531-2 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, et qui, désormais codifiées à l'article L. 621-3, demeurent applicables : " L'article L. 531-1 est applicable à l'étranger qui, en provenance du territoire d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, est entré ou a séjourné sur le territoire métropolitain sans se conformer aux dispositions des articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, ou 21, paragraphe 1 ou 2, de cette convention ou sans souscrire, au moment de l'entrée sur ce territoire, la déclaration obligatoire prévue par l'article 22 de la même convention, alors qu'il était astreint à cette formalité. / (...) ". Il résulte également des articles R. 211-32 et R. 211-33 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction applicable au litige, que la déclaration obligatoire mentionnée à l'article 22 de la convention de Schengen est souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne et qui est en provenance directe d'un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen, auprès des services de la police nationale ou, en l'absence de tels services, des services des douanes ou des unités de la gendarmerie nationale, dans des conditions fixées par un arrêté du 9 mars 1995 relatif à la déclaration d'entrée sur le territoire. Sont toutefois dispensés de cette formalité, en vertu de l'article R. 212-6 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, les étrangers qui ne sont pas astreints à l'obligation de visa pour un séjour inférieur à trois mois et ceux qui sont titulaires d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, délivré par un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen.

4. Il résulte de la décision n° 91-294 DC du 25 juillet 1991 du Conseil constitutionnel que la souscription de la déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen et dont l'obligation figure à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un État partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France au moyen d'un autobus assurant la liaison Bilbao-Paris le 6 avril 2017, muni de son passeport revêtu d'un visa délivré par les autorités espagnoles valable du 21 mars 2017 au 19 avril suivant. Tout d'abord, contrairement à ce que soutient M. B..., l'arrêté prévu au dernier alinéa de l'article R. 211-33 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'entrée en France de l'intéressé, fixant les modalités d'application de cet article, et notamment les mentions de la déclaration d'entrée et son lieu de souscription a bien été pris et correspond à l'arrêté du 9 mars 1995 relatif à la déclaration d'entrée sur le territoire, en vigueur à la date de son entrée en France. En outre, M. B... n'établit pas avoir respecté l'obligation à laquelle il était soumis de souscrire une déclaration d'entrée sur le territoire français. S'il soutient que les services de police auraient refusé d'apposer un visa sur son passeport lors d'un contrôle intervenu lors du franchissement de la frontière franco-espagnole, cette circonstance n'est pas établie et est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, dès lors qu'il n'est pas accusé réception de la déclaration d'entrée en France par un nouveau visa mais par une mention figurant sur le document de voyage de l'étranger. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le préfet de la Seine-Maritime a considéré que M. B... n'était pas entré régulièrement en France et ne satisfaisait pas ainsi aux conditions fixées par le 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations sera donc écarté.

6. Si M. B... se prévaut de sa relation avec une ressortissante française depuis plusieurs années et de son mariage avec l'intéressée le 6 novembre 2021, il ne verse au dossier aucune pièce susceptible d'attester de l'ancienneté de leur vie commune, les documents les plus anciens produits à cet effet datant du mois de décembre 2021, tandis que la copie du bail produite ne comporte pas de date d'effet. En outre le requérant ne justifie pas de son intégration en France, en dépit de sa présence depuis 2017 ni des opportunités alléguées d'insertion professionnelle. Par ailleurs, il n'établit pas être dépourvu de toute attache familiale en Algérie où il a vécu jusqu'à l'âge de 19 ans. Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus d'admission au séjour contenu dans l'arrêté en litige. Il en va de même, par suite, de ses conclusions tendant à l'annulation, par la voie de l'exception d'illégalité, de l'obligation de quitter le territoire français et de celles aux fins d'injonction.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Abdel Alouani.

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 6 février 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Marc Baronnet, président-assesseur ;

- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 février 2024.

Le rapporteur,

Signé : M. C...La première vice-présidente de la cour,

Signé : M-P. Viard

La greffière,

Signé : E. Héléniak

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière

Anne-Sophie VILLETTE

N°23DA01435 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA01435
Date de la décision : 20/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: M. Marc Baronnet
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : ALOUANI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-20;23da01435 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award