Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Kosmos a demandé au tribunal administratif de Lille :
1°) d'enjoindre à la région Hauts-de-France de produire les rapports d'analyse des offres des 27 février et 11 mars 2019 ainsi que la méthode de notation appliquée, les montants versés au groupement d'entreprises Open Digital Education et CGI France en exécution du marché en litige ou les bons de commande notifiés à celui-ci ;
2°) d'annuler la décision du 26 mars 2019 par laquelle le président du conseil régional des Hauts-de-France a attribué le marché public ayant pour objet la mise en œuvre, l'exploitation, la maintenance et l'hébergement d'un environnement numérique de travail (ENT) pour les établissements scolaires et les écoles du territoire Hauts-de-France, au groupement d'entreprises constitué des société Open Digital Education et CGI France, ainsi que la décision autorisant la signature de cet accord-cadre et l'accord-cadre conclu le 3 mai 2019 ;
3°) d'annuler la décision par laquelle le président de la région Hauts-de-France a reconduit l'accord-cadre précité pour les années scolaires 2021-2022 et 2022-2023, ainsi que l'accord-cadre conclu au titre de ces années ;
4°) de condamner la région Hauts-de-France à lui verser la somme de 428 624 euros, assortie des intérêts aux taux légal à compter du 27 juin 2019 et de la capitalisation des intérêts à compter du 28 juin 2020 ;
5°) de rejeter les conclusions présentées par la région Hauts-de-France à titre reconventionnel.
Par un jugement n° 1905397 du 3 juin 2022, le tribunal administratif de Lille a résilié le marché conclu le 3 mai 2019 entre la région Hauts-de-France et le groupement d'entreprises constitué des sociétés Open Digital Education et CGI France, cette résiliation prenant effet au 5 décembre 2022, sous réserve qu'il ne soit pas expiré à cette date. Par ce même jugement, le tribunal a condamné la région Hauts-de-France à verser à la société Kosmos une somme de 3 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2019, les intérêts échus à la date du 27 juin 2020, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts et a rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour :
I - Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 22 juillet 2022 et le 23 juin 2023, sous le n° 22DA01593, la société par actions simplifiée (SAS) Kosmos, représentée par Me Oillic, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de solliciter de la région Hauts-de-France la communication du fichier d'analyse des offres du 27 février 2019, non occulté des appréciations littérales des offres des candidats ;
3°) d'annuler l'accord-cadre de fourniture d'un environnement numérique de travail (ENT) pour les établissements scolaires et les écoles du territoire des Hauts-de-France conclu le 3 mai 2019 et reconduit pour les années 2021-2022 et 2022-2023 avec le groupement momentané d'entreprises Open Digital Education et CGI France ;
4°) à défaut, de confirmer la résiliation dudit accord-cadre à effet du 5 décembre 2022 ;
5°) d'évaluer le préjudice consécutif à son éviction irrégulière de l'attribution de
l'accord-cadre conclu par la région Hauts-de-France le 3 mai 2019, sur la base des prestations effectivement commandées par cette dernière au groupement momentané d'entreprises Open Digital Education - CGI France sur la durée de l'accord-cadre, affectées des prix mentionnés par la SAS Kosmos sur le bordereau des prix unitaires et du taux de résultat courant avant impôt de 17,75% et solliciter à cette fin la communication par la région des bons de commande effectivement émis durant cette période ;
6°) à défaut, d'évaluer ce préjudice à la somme de 389 816,62 euros résultant de l'application du taux de résultat courant avant impôt de 17,75 % à la somme de 2 196 150 euros constitutive de la simulation de commande proposée par la région Hauts-de-France ;
7°) à défaut, de désigner avant-dire droit, un expert-comptable aux fins d'évaluer, dans le respect du secret des affaires, le chiffre d'affaires et le résultat courant avant impôt perdus par la SAS Kosmos du fait de son éviction irrégulière de l'attribution de l'accord cadre ;
8°) de condamner la région Hauts-de-France à l'indemniser du préjudice ainsi évalué, à compter du 27 juin 2019, date de réception de la demande préalable, assortie des intérêts de retard au taux légal, capitalisés à compter du 28 juin 2020 ;
9°) de mettre à la charge de la région Hauts-de-France, le versement d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les dispositions des articles 42 1° a) et 52- I de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ainsi que celles de l'article 62 II du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 ont été méconnues ; la candidature de la société Itop Education ayant été déclarée irrecevable, son élimination aurait dû conduire à ce que la région retienne sa candidature dès lors que selon le fichier d'analyse des offres du 27 février 2019 qu'elle a pu se procurer mais qu'elle ne peut produire compte tenu du secret des affaires, son offre avait été classée 2ème ; la comparaison de ce fichier d'analyse des offres avec celui du 8 mars 2019 montre que les modifications opérées ont eu pour objet de ramener sa note de 73,20 à 73,47 de manière à sous-valoriser son offre et inverser sa position dans le classement ; dans ces conditions, l'offre de l'attributaire n'était pas l'offre économiquement la plus avantageuse ; l'alinéa 2 du IV de l'article 55 du décret du 25 mars 2016 ne peut, sans méconnaître le principe selon lequel le marché doit être attribué à l'offre économiquement la plus avantageuse, permettre l'attribution du marché au groupement constitué des sociétés Open Digital Education et CGI France ; cet article ne respectant pas la hiérarchie des normes et notamment la primauté de l'article 67 de la directive 2014/24/UE du Parlement Européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics, il doit être écarté ;
- la cour confirmera l'analyse faite par le tribunal aux point 24, 29 et 31 du jugement, en ce qui concerne la violation du principe d'égalité de traitement des candidats et de l'article 7.2 du règlement de la consultation ; cependant, le tribunal n'a pas pleinement mis en œuvre ses pouvoirs d'instruction en ne sollicitant pas la communication du fichier Excel d'analyse des offres du 27 février 2019 permettant de corroborer sa pièce n° 30 et de constater la volonté de la région de favoriser le groupement momentané d'entreprises Open Digital Education - CGI France ; il a dénaturé ses écritures en jugeant qu'elle n'avait pas contredit le déroulement de l'analyse des offres exposé par la région Hauts-de-France ;
- la cour confirmera l'analyse faite par le tribunal au point 37 du jugement, en ce qui concerne l'erreur de calcul affectant l'attribution de la note relative à l'item " conformité technique de l'offre au SDET " ;
- s'agissant de l'indemnisation du préjudice consécutif à son éviction irrégulière de l'attribution du marché, les premiers juges ont commis une double erreur de droit en retenant d'abord que si les irrégularités n'avaient pas été commises, elle disposait d'une chance sérieuse d'emporter le marché puis en écartant le caractère certain du préjudice au motif que l'accord-cadre ne comportait aucun minimum garanti ; la passation d'un accord-cadre sans minimum garanti n'exclut pas, par principe, tout droit à indemnité dès lors que la région a nécessairement passé des commandes pour l'exécution du contrat ; ce préjudice de perte de chiffres d'affaires doit être apprécié au regard des prestations effectivement commandées par l'acheteur public, affectées des prix unitaires ou forfaitaires de l'offre du candidat évincé, avec un taux de résultat courant prévisionnel de 17,75 % ; pour apprécier ce chiffre d'affaires, la cour sollicitera de la région les prestations effectivement commandées durant l'exécution de l'accord-cadre ;
- à défaut, son évaluation peut être faite sur la base de la simulation de commande réalisée par la région pour l'appréciation du critère prix des offres, soit un chiffre d'affaires perdu de 2 196 150 euros donnant droit à une indemnisation de 389 816,62 euros ;
- à défaut, avant dire-droit, un expert-comptable pourrait être désigné pour l'évaluer, dans le respect du secret des affaires ;
- les moyens soulevés par la région par la voie de l'appel incident doivent être écartés pour les motifs exposés dans le mémoire en défense produit le 21 mars 2023 dans l'instance n° 22DA01689.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2023, la région Hauts-de-France, représentée par Me Jamais, conclut au rejet de la requête, par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement du 3 juin 2022 du tribunal administratif de Lille et, par l'effet dévolutif de l'appel, au rejet de l'intégralité des demandes et prétentions de la société Kosmos et enfin, à ce qu'une somme de 5 000 euros, à lui verser, soit mise à la charge de la SAS Kosmos au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la SAS Kosmos ne sont pas fondés, en faisant valoir que :
- la société Kosmos n'établit pas l'existence des manœuvres visant à évincer sa candidature ;
- c'est sans méconnaître les dispositions des articles 42 1° a) et 52- I de l'ordonnance du 23 juillet 2015 ainsi que celles de l'article 62- II du décret du 25 mars 2016 qu'elle a écarté la société initialement retenue ;
- aucune disposition de ce décret n'impose au pouvoir adjudicateur de reprendre l'analyse des offres en réévaluant la notation du critère de prix lorsque l'offre de l'attributaire initial a été écartée ;
- l'exception d'illégalité du décret du 25 mars 2016 doit être écartée ;
- les principes d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures n'ont pas été méconnus ; contrairement à ce que soutient l'appelante, la seule version existante du rapport d'analyse des offres est celle du 8 mars 2019, de sorte qu'il n'y a pas eu de modification irrégulière des notes des candidats ; des appréciations littérales similaires peuvent donner lieu à des notations différentes ;
- il n'existe aucun caractère certain du préjudice dans la mesure où l'accord-cadre ne prévoit aucun minimum garanti ; l'existence de bons de commande ne suffit pas à établir le caractère certain de son propre préjudice ;
- pour les mêmes motifs et moyens que ceux présentés à l'appui de sa propre requête d'appel n° 22DA01689, le jugement doit être annulé en toutes ses dispositions.
La requête a été communiquée à la société Open Digital Education ainsi qu'à la société CGI France, qui n'ont pas produit d'observations.
Par une ordonnance du 14 juin 2023, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 12 juillet 2023 à 12 heures.
II - Par une requête n° 22DA01689, enregistrée le 1er août 2022, la région Hauts-de-France, représentée par Me Jamais, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 3 juin 2022 ;
2°) par l'effet dévolutif de l'appel, de rejeter l'intégralité des demandes et prétentions de la société Kosmos ;
3°) de mettre à la charge de la société Kosmos, le versement d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a retenu que la passation de l'accord-cadre était entachée d'irrégularités et a prononcé sa résiliation ; ce faisant, il a dénaturé les pièces du dossier soumises à son appréciation et entaché son jugement d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit ;
- le principe d'égalité de traitement des candidats n'a pas été méconnu ; contrairement a ce qu'ont estimé les premiers juges, les items SOC-INT-ASE-01, SOC-SEC-PII-03, UTI-CCO-EEC - 02, EXPANN-22 et EXPANN-23 présentent tous des appréciations littérales faisant apparaître de réelles différences techniques qui expliquent les écarts de notation entre la société Kosmos et le candidat retenu ; à supposer que les mêmes appréciations littérales aient dû conduire à l'attribution des mêmes notes, la notation de la société Kosmos (73,61) se trouverait encore inférieure à celle de l'attributaire (73,72) ; au surplus, il est jugé que des appréciations littérales similaires peuvent donner lieu à des notations différentes ;
- la méthode de notation annoncée dans le règlement de la consultation (article 7.2) a été respectée ; le tribunal s'est mépris sur la méthodologie mise en œuvre ; si les notes attribuées aux offres en ce qui concerne les sous-critères ORG et TECH n'ont pas été évaluées de 0 à 3 points, elles l'ont été dans le respect de la méthodologie consistant d'abord à évaluer les sous-critères selon une échelle de 0 à 20 ensuite portée à 25 pour le sous-critère 1 ;
- les arrondis opérés pour le calcul de l'item "'conformité technique de l'offre du SDET " ne sont constitutifs d'aucune irrégularité ; ils s'expliquent, par souci de lisibilité, par la limitation à deux, du nombre de décimales sur les tableaux " Excel " mais les calculs ont bien été effectués sur la base des données brutes non arrondies ;
- l'accord-cadre étant régulier, la SAS Kosmos ne pouvait prétendre à aucune indemnisation ;
- par l'effet dévolutif de l'appel, toutes les demandes, fins et prétentions de la société Kosmos doivent être rejetées ;
- les conclusions dirigées à l'encontre des actes détachables du contrat sont irrecevables ;
- c'est sans commettre d'irrégularités qu'elle a rejeté l'offre de la société Itop Education ;
- les principes d'égalité de traitement des candidats et de transparence de la procédure n'ont pas été méconnus ;
- la méthode de notation retenue pour l'évaluation du troisième sous-critère technique relatif à la valeur pédagogique de l'offre était suffisamment exposée à l'article 7.2 du règlement de consultation ;
- elle a respecté la méthode de notation décrite par ce même règlement en ce qui concerne les deux premiers sous-critères de la valeur technique pour les items ORG et TECH ;
- l'échelle de notation retenue pour l'évaluation de chacun des sous-critères du critère de la valeur technique ne prive pas de portée la pondération des sous-critères en cause ;
- l'analyse des offres n'a pas été opérée sur la base de critères et d'éléments de notation non annoncés ;
- aucune erreur de fait ou d'appréciation n'affecte l'analyse des offres en ce qui concerne les fonctionnalités " UTI-UTL-RES-04 " et " UIT-CCO-CEL-03 " ;
- en l'absence de toute irrégularité entachant la procédure de passation, la société Kosmos ne peut prétendre à aucune indemnisation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mars 2023, la société Kosmos, représentée par Me Oillic, conclut au rejet de la requête et demande à la cour :
1°) de solliciter de la Région Hauts-de-France la communication du fichier d'analyse des offres du 27 février 2019, non occulté des appréciations littérales des offres des candidats ;
2°) d'annuler l'accord-cadre de fourniture d'un environnement numérique de travail (ENT) pour les établissements scolaires et les écoles du territoire des Hauts-de-France conclu le 3 mai 2019 et reconduit pour les années 2021-2022 et 2022-2023 avec le groupement momentané d'entreprises Open Digital Education et CGI France ;
3°) à défaut, de confirmer la résiliation dudit accord-cadre à effet du 5 décembre 2022 ;
4°) d'évaluer le préjudice consécutif à son éviction irrégulière de l'attribution de
l'accord-cadre conclu par la Région Hauts-de-France le 3 mai 2019, sur la base des prestations effectivement commandées par cette dernière au groupement momentané d'entreprises Open Digital Education - CGI France sur la durée de l'accord-cadre, affectées des prix mentionnés par la SAS Kosmos sur le bordereau des prix unitaires et du taux de résultat courant avant impôt de 17,75 % et solliciter à cette fin que la Région Hauts-de-France lui communique les bons de commande effectivement émis durant cette période ;
5°) à défaut, d'évaluer ce préjudice à la somme de 389 816,62 euros résultant de l'application du taux de résultat courant avant impôt de 17,75 % à la somme de 2 196 150 euros constitutive de la simulation de commande proposée par la Région Hauts-de-France ;
6°) à défaut, de désigner avant-dire droit, un expert-comptable aux fins d'évaluer, dans le respect du secret des affaires, le chiffre d'affaires et le résultat courant avant impôt perdus par la SAS Kosmos du fait de son éviction irrégulière de l'attribution de l'accord cadre ;
7°) de condamner la Région Hauts-de-France à l'indemniser du préjudice ainsi évalué, à compter du 27 juin 2019, date de réception de la demande préalable, assortie des intérêts de retard au taux légal, capitalisés à compter du 28 juin 2020 ;
8°) de mettre à la charge de la région Hauts-de-France, le versement d'une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sans préjudice de l'argumentation développée dans sa propre requête d'appel enregistrée sous le n° 22DA01593, les irrégularités relevées par le tribunal l'ont été à bon droit ;
- le principe d'égalité de traitement des candidats a bien été méconnu ; il est inexact d'affirmer que les items SOC-INT-ASE-01, SOC-SEC-PII-03, UTI-CCO-EEC - 02, EXPANN-22 et EXPANN-23 présenteraient des appréciations littérales faisant apparaître de réelles différences techniques expliquant les écarts de notation entre son offre et celle du candidat retenu ; il n'en ressort aucune différence notable ;
- s'agissant de la violation de la méthode de notation portée à la connaissance des candidats à l'article 7.2 du règlement de consultation, il ressort des propres écritures de la région devant le tribunal, qu'elle a appliqué une échelle de notation de 0 à 3 ; elle n'a donc pas appliqué la méthode d'évaluation des sous-critères de 0 à 20 et de 0 à 25 ;
- en ce qui concerne les arrondis opérés pour le calcul de l'item " conformité technique au SDET ", la région n'explique pas comment elle a calculé les notes initiales de 74,60 et 69,09 ;
- l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre les actes détachables du contrat sont sans objet dès lors qu'elle y a renoncé dans son mémoire n° 8 du 29 avril 2022 ;
- s'agissant de l'indemnisation du préjudice consécutif à son éviction irrégulière de l'attribution du marché, il y a lieu d'y faire droit selon l'argumentation développée dans sa requête d'appel n° 22DA01593.
La requête a été communiquée à la société Open Digital Education ainsi qu'à la société CGI France le 23 août 2022, lesquelles n'ont présenté aucune observation.
Par une ordonnance du 27 décembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 2 février 2024 à 12 heures.
Une mesure d'instruction a été diligentée par la cour dans le cadre des dispositions de l'article R. 412-2-1 du code de justice administrative à laquelle a répondu la région Hauts-de-France le 15 novembre 2024.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 ;
- le code de la commande publique ;
- l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ;
- le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Frédéric Malfoy, premier conseiller,
- les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public,
- et les observations de Me Oillic, représentant la SAS Kosmos et de Me Jamais, représentant la région Hauts-de-France.
Considérant ce qui suit :
1. Par une convention signée en avril 2012, la région Hauts-de-France, les départements du Nord et du Pas-de-Calais, le rectorat de l'académie de Lille ainsi que la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) des Hauts-de-France ont constitué un groupement de commandes pour l'acquisition et la mise en œuvre d'un environnement numérique de travail (ENT) dans les établissements publics locaux d'enseignement situés sur leurs périmètres de compétence. Cette convention prévoyait notamment la passation de marchés de service relatifs à la mise à disposition, l'exploitation et l'hébergement d'un ENT. En sa qualité de coordonnatrice du groupement, la région Hauts-de-France a, le 7 juin 2017, conclu un accord-cadre à bons de commande avec la société Kosmos pour une durée de deux ans, destiné à couvrir les besoins des membres du groupement.
2. Par un avis d'appel public à la concurrence envoyé à la publication le 5 décembre 2018, la région Hauts-de-France, en sa qualité de coordinatrice d'un groupement de commande, a initié la passation d'un marché public à bons de commande, sans maximum ni minimum, portant sur la mise en œuvre, l'exploitation, la maintenance et l'hébergement d'un environnement numérique de travail (ENT) pour les établissements scolaires et les écoles du territoire des Hauts-de-France. Plusieurs sociétés ou groupements de sociétés, parmi lesquels la société Kosmos, attributaire sortant, ont candidaté. Par un courrier du 12 mars 2019, le pouvoir adjudicateur a informé cette dernière du rejet de son offre, classée troisième, et de l'attribution du marché à la société Itop Education. Toutefois, à la suite de l'absence de présentation par cette dernière des documents justifiant du respect des obligations sociales en vigueur, le président de la région Hauts-de-France a, par une décision du 26 mars 2019, attribué le marché au groupement d'entreprises constitué de la société Open Digital Education et de la société CGI France, dont l'offre avait été classée deuxième après celle de la société Itop Education. Par un jugement n°1902910 du 2 mai 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a rejeté le recours, formé par la société Kosmos en application des dispositions de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, tendant à l'annulation de cette décision. L'accord-cadre du marché public en cause a été conclu le 3 mai 2019 et notifié à l'attributaire le 13 mai suivant. Par un courrier du 27 juin 2019, reçu le jour même, la société Kosmos a contesté l'attribution du marché à un autre candidat et a demandé à la région Hauts de-France de l'indemniser des préjudices subis du fait de l'irrégularité de son éviction, à hauteur de la somme de 428 624 euros. Par un courrier du 12 juillet 2019, le président du conseil régional Hauts-de-France a rejeté sa demande.
3. La société Kosmos a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 26 mars 2019 par laquelle le président du conseil régional des Hauts-de-France a attribué le marché public au groupement d'entreprises constitué des sociétés Open Digital Education et CGI France, d'annuler la décision autorisant la signature de cet accord cadre, d'annuler
l'accord-cadre conclu le 3 mai 2019, d'annuler la décision du président de la région Hauts-de-France reconduisant cet accord-cadre pour les années scolaires 2021-2022 et 2022-2023 et de condamner la région Hauts-de-France à lui verser la somme de 428 624 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2019 et de la capitalisation des intérêts à compter du 28 juin 2020.
4. Par un jugement du 3 juin 2022, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, résilié le marché conclu le 3 mai 2019 entre la région Hauts-de-France et le groupement d'entreprises constitué des sociétés Open Digital Education et CGI France avec effet au 5 décembre 2022, sous réserve qu'il ne soit pas expiré à cette date et, d'autre part, condamné la région Hauts-de-France à verser à la société Kosmos une somme de 3 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2019, avec capitalisation.
5. La société Kosmos relève appel de ce jugement en tant que le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la région Hauts-de-France à réparer l'intégralité du préjudice consécutif à son éviction irrégulière de l'attribution de l'accord-cadre conclu par la Région Hauts-de-France le 3 mai 2019. La région Hauts-de-France relève appel de ce même jugement. Ces deux requêtes, qui présentent des questions semblables à juger, ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur les irrégularités retenues par le tribunal pour résilier le marché :
6. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles.
7. Les tiers, autres que le représentant de l'État dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Le tiers agissant en qualité de concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif ne peut ainsi, à l'appui d'un recours contestant la validité de ce contrat, utilement invoquer, outre les vices d'ordre public, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction.
8. Saisi ainsi par un tiers dans les conditions définies ci-dessus, de conclusions contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses, il appartient au juge du contrat, après avoir vérifié que l'auteur du recours autre que le représentant de l'État dans le département ou qu'un membre de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, se prévaut d'un intérêt susceptible d'être lésé de façon suffisamment directe et certaine et que les irrégularités qu'il critique sont de celles qu'il peut utilement invoquer, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier l'importance et les conséquences. Ainsi, il lui revient, après avoir pris en considération la nature de ces vices, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, soit d'inviter les parties à prendre des mesures de régularisation dans un délai qu'il fixe, sauf à résilier ou résoudre le contrat. En présence d'irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l'exécution du contrat, il lui revient de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s'il se trouve affecté d'un vice de consentement ou de tout autre vice d'une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d'office, l'annulation totale ou partielle de celui-ci. Il peut enfin, s'il en est saisi, faire droit, y compris lorsqu'il invite les parties à prendre des mesures de régularisation, à des conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice découlant de l'atteinte à des droits lésés.
9. Pour assurer le respect des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, l'information appropriée des candidats sur les critères d'attribution d'un marché public est nécessaire, dès l'engagement de la procédure d'attribution du marché, dans l'avis d'appel public à concurrence ou le cahier des charges tenu à la disposition des candidats. Dans le cas où le pouvoir adjudicateur souhaite retenir d'autres critères que celui du prix, l'information appropriée des candidats doit alors porter également sur les conditions de mise en œuvre de ces critères. Il appartient au pouvoir adjudicateur d'indiquer les critères d'attribution du marché et les conditions de leur mise en œuvre selon les modalités appropriées à l'objet, aux caractéristiques et au montant du marché concerné. En outre, si le pouvoir adjudicateur décide, pour mettre en œuvre ces critères de sélection des offres, de faire usage de sous-critères, il doit porter à la connaissance des candidats leurs conditions de mise en œuvre dès lors que ces sous-critères sont susceptibles d'exercer une influence sur la présentation des offres par les candidats ainsi que sur leur sélection et doivent en conséquence être eux-mêmes regardés comme des critères de sélection. Il n'est, en revanche, pas tenu d'informer les candidats de la méthode de notation des offres.
10. Par ailleurs, le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en œuvre de chacun des critères de sélection des offres qu'il a définis et rendus publics. Toutefois, ces méthodes de notation sont entachées d'irrégularité si, en méconnaissance des principes fondamentaux d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, elles sont par elles-mêmes de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération et sont, de ce fait, susceptibles de conduire, pour la mise en œuvre de chaque critère, à ce que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre, ou, au regard de l'ensemble des critères pondérés, à ce que l'offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie. Il en va ainsi alors même que le pouvoir adjudicateur, qui n'y est pas tenu, aurait rendu publiques, dans l'avis d'appel à concurrence ou les documents de la consultation, de telles méthodes de notation.
11. Pour résilier l'accord-cadre litigieux, les premiers juges, qui ont mis en œuvre la procédure prévue à l'article R. 412-2-1 du code de justice administrative permettant de statuer au vu de pièces couvertes par le secret des affaires et non soumises au contradictoire, ont retenu que trois irrégularités entachaient l'ensemble de la procédure de passation du marché litigieux et avaient été susceptibles d'avoir une influence sur le choix de l'attributaire. La première est relative à la circonstance que la méthode de notation annoncée dans le règlement de consultation n'a pas été suivie en ce qui concerne deux sous-critères, la deuxième à la méconnaissance du principe d'égalité de traitement des candidats, la troisième à ce que les arrondis opérés pour le calcul de l'item " conformité technique de l'offre du SDET " a eu une incidence sur les notes attribuées aux candidats.
12. En premier lieu, il résulte de l'instruction, d'une part, que le règlement de la consultation, en son article 7-2, fixait deux critères de sélection des offres, à savoir, le prix des prestations et la valeur technique pondérés respectivement à 35 % et à 65 %. Il indiquait que la valeur technique des offres se décomposait en trois sous critères, à savoir un premier sous-critère référencé 2.1 " Valeur de la stratégie et des moyens organisationnels mis en œuvre pour le pilotage du projet " à hauteur de 25 %, un deuxième sous-critère référencé 2.2 " Valeur de la technicité et de la couverture fonctionnelle " à hauteur de 20 % et un troisième sous-critère référencé 2.3 " Valeur pédagogique de la solution ".
13. Selon le règlement de la consultation, le sous-critère référencé 2.1 " Valeur de la stratégie et des moyens organisationnels mis en œuvre pour le pilotage du projet " est évalué sur 25 points au regard des éléments codés ORG du cadre de réponse et du mémoire technique et la méthode de notation est précisée par une grille prévoyant l'attribution de 0 à 6 points lorsque " La réponse ne répond pas aux besoins ", de 7 à 13 points lorsque " La réponse apporte une réponse limitée aux besoins. Absence d'exemples pour illustrer les propositions. Le candidat ne répond pas aux attentes en termes de qualité / quantité ou avec un niveau de risque sur les délais ", de 14 à 19 points lorsque " La réponse répond aux besoins et aux exigences " et enfin de 20 à 25 points lorsque " La réponse va au-delà des attentes. Le candidat répond parfaitement à l'ensemble des attentes et apporte une valeur ajoutée supplémentaire par rapport aux besoins exprimés dans la consultation (délais, qualité de service, démarche projet...) ". Selon ce même règlement, le
sous-critère référencé 2.2 " Valeur de la technicité et de la couverture fonctionnelle " est évalué sur 20 points au regard du cadre de réponse, du mémoire technique et des éléments codés TECH figurant dans les grilles d'analyse issues du schéma directeur des espaces numériques de travail pour l'enseignement scolaire (SDET) et de la plateforme de tests et la méthode de notation est précisée par une grille prévoyant l'attribution de 0 à 5 points lorsque " La réponse ne répond pas aux besoins ", de 6 à 10 points lorsque " La réponse apporte une réponse limitée aux besoins. Absence d'exemples pour illustrer les propositions. Le candidat ne répond pas aux attentes en termes de qualité / quantité ou avec un niveau de risque sur les délais ", de 11 à 15 points lorsque " La réponse répond aux besoins et aux exigences " et enfin de 16 à 20 points lorsque " La réponse va au-delà des attentes. Le candidat répond parfaitement à l'ensemble des attentes et apporte une valeur ajoutée supplémentaire par rapport aux besoins exprimés dans la consultation (délais, qualité de service, démarche projet...) ". Pour le dernier sous-critère référencé 2.3 " Valeur pédagogique de la solution ", le règlement de la consultation indique qu'il sera apprécié sur 20 points au regard des éléments codés PEDA figurant dans les grilles d'analyse issues du SDET et précise que chaque item de la grille est noté de 0 à 3 pour le premier et le second degré selon un barème prévoyant l'attribution d'une note de 0/3 lorsque " La réponse ne répond pas aux besoins ", d'une note de 1/3 lorsque " La réponse à ce critère / sous critère apporte une réponse limitée aux besoins. Absence d'exemples pour illustrer les propositions. Le candidat ne répond pas aux attentes en termes de qualité / quantité ou avec un niveau de risque sur les délais ", d'une note de 2/3 lorsque " La réponse à ce critère / sous critère répond aux besoins et aux exigences " et d'une note de 3/3 lorsque " La réponse à ce critère / sous critère va au-delà des attentes. Le candidat répond parfaitement à l'ensemble des attentes et apporte une valeur ajoutée supplémentaire par rapport aux besoins exprimés dans la consultation (délais, qualité de service, démarche projet...) ".
14. Les trois derniers paragraphes de l'article 7.2 du règlement de la consultation précisent que " Quand les exigences du 1er degré (1D) et du 2nd degré (2D) sont différentes, on regardera la valeur la plus exigeante et on lui appliquera la pondération adaptée. Dans les autres cas, on prend la note la plus basse attribuée à l'exigence du 1er degré ou au 2nd degré et on applique la pondération adaptée. L'ensemble des items seront évalués y compris les items facultatifs. Les coefficients multiplicateurs sont définis ainsi : - exigé (E) : 5 - recommandé (R) : 2 - facultatif (F) : 1 ".
15. Pour la remise et la présentation de leur offre, le règlement de la consultation demandait aux candidats de compléter le cadre de réponse constitué notamment d'un fichier Excel composé de trois onglets, dont un onglet " cadre de réponse par unités d'œuvre ", un onglet " SDET exigences et recommandations de la solution logicielle " et un onglet " SDET exigences et recommandations de mise en œuvre " accompagné de leur mémoire technique et des documents justificatifs à l'appui du cadre de réponse.
16. Il résulte de l'instruction que les cadres de réponse correspondant aux exigences du SDET, dans sa version V6.0 ou V6.1, selon la fonction ou les thèmes référencés dans ce schéma, ont été mis à disposition des candidats sous la forme d'un fichier Excel comportant un onglet " SDET - Exigences et recommandations de la solution logicielle " et un onglet " SDET exigences et recommandations de mise en œuvre ", chacun mentionnant, en préambule " notation de 0 à 3 " et reprenant les précisions citées au point 14, figurant à la fin de l'article 7.2 du règlement de la consultation en ce qui concerne la pondération applicable selon les exigences du SDET et la nature de l'établissement concerné. Pour chacune des fonctions ou thèmes référencés dans le SDET, apparaît systématiquement l'indication du sous-critère de rattachement (TECH ou PEDA), ainsi que la mention E, R ou F dans la colonne 1er Degré ainsi que dans la colonne 2nd degré.
17. Il résulte de l'instruction que, s'agissant de l'évaluation de la valeur technique, la méthode de notation de 0 à 3 prévue par le règlement de la consultation pour le seul sous-critère référencé 2.3 " Valeur pédagogique de la solution " a été également appliquée pour l'appréciation des sous-critères référencés 2.1 " Valeur de la stratégie et des moyens organisationnels mis en œuvre pour le pilotage du projet " (ORG) et 2.2 " Valeur de la technicité et de la couverture fonctionnelle " (TECH). Comme l'a retenu le tribunal, le non-respect de la méthode de notation annoncée dans le règlement de la consultation porté à la connaissance des candidats est susceptible d'affecter la régularité de la procédure de passation du marché. Toutefois, d'une part, comme l'ont du reste relevé les premiers juges, et ainsi qu'il a été dit précédemment, il résulte de l'instruction que les cadres de réponse fournis aux candidats en ce qui concerne les deux onglets " SDET - Exigences et recommandations de la solution logicielle " et " SDET exigences et recommandations de mise en œuvre ", représentant la plus grande part des items permettaient aux candidats, dont il n'est pas allégué qu'ils auraient questionné le pouvoir adjudicateur sur ce point précis, d'être informés de la méthodologie de notation de ces éléments, en ce qui concerne le sous-critère TECH. D'autre part, s'il apparait que l'onglet n° 1 du cadre de réponse correspondant aux item ORG et TECH, pour l'ensemble des unités d'œuvres autres que celle relative à la conformité technique au SDET (TECH), ne reprenait pas cette information quant à la mise en œuvre d'une notation de 0 à 3, la société Kosmos n'apporte aucun élément de nature à établir l'incidence de la mise en application de cette méthode plutôt que celle consistant à attribuer des notes échelonnées de 0 à 25 pour le premier sous-critère (ORG) et de 0 à 20 pour le deuxième sous-critère (TECH). Et il ressort de la comparaison des grilles de notation prévues pour les sous critères ORG et TECH avec celle prévue pour le sous-critère PEDA, que l'attribution du nombre minimal jusqu'au nombre maximal de points, répond à une logique identique de notation selon le degré de satisfaction de la réponse. En outre, il n'est pas allégué par la société Kosmos de motifs permettant de présumer que les réponses des candidats auraient été différentes selon la méthode de notation effectivement suivie. Il s'ensuit que la méthode de notation mise en œuvre par la région Hauts-de-France n'a pas été, par elle-même, de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération et de ce fait, susceptible de conduire, pour la mise en œuvre de chaque critère, à ce que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre, ou, au regard de l'ensemble des critères pondérés, à ce que l'offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie.
18. En deuxième lieu, pour faire droit au moyen tiré de la rupture d'égalité de traitement des candidats, soutenu par la société Kosmos, le tribunal a estimé que l'attribution de notes plus élevées au groupement constitué des sociétés Open Digital Education - CGI France pour cinq items
(SOC-INT-ASE-01, SOC-SEC-PII-03, UTI-CCO-EEC-02, EXPANN-22 et EXPANN-23) ne pouvait être justifiée par les appréciations littérales portées par le pouvoir adjudicateur.
19. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'analyse des offres non occulté, que pour les items SOC-INT-ASE-01, UTI-CCO-EEC-02, EXPANN-22 et EXPANN-23, la société Kosmos a obtenu une note de 2/3, et que pour l'item SOC-SEC-PII-03, la note de 1/3 lui a été attribuée. Cette dernière note n'est pas justifiée dès lors que la réponse apportée par la société Kosmos ayant été évaluée par le pouvoir adjutateur comme " conforme à la demande ", c'est a minima une note de 2/3 qu'elle aurait dû obtenir. Pour autant, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, pour chacun des quatre autres items, les appréciations littérales portées par l'acheteur en ce qui concerne la réponse de l'attributaire révèlent, à travers un commentaire complémentaire ou un signe " + " une supériorité technique de la réponse apportée par le groupement attributaire, permettant de justifier l'attribution d'une note de 3/3 correspondant à une réponse " allant au-delà des attentes ", supérieure à la note de 2/3 attribuée à la société Kosmos, correspondant à une réponse estimée comme seulement " conforme à la demande ". En tout état de cause, même à supposer que la même appréciation " conforme à la demande " devait donner lieu à l'attribution, à la société Kosmos, du même nombre de points, la région fait valoir, sans être contestée, qu'une hausse de trente points du total des items " TECH " issus des onglets concernant le SDET conduit à une hausse de 0,09 point sur la note finale attribuée, laquelle n'aurait ainsi eu aucune incidence sur le classement final de la société Kosmos.
20. En troisième et dernier lieu, le tribunal a retenu que les arrondis opérés par le pouvoir adjudicateur pour le calcul de l'item " conformité technique de l'offre du SDET ", figurant dans l'onglet n° 1 et agrégeant les notes obtenues pour les items codés TECH listés dans les deux onglets relatifs aux éléments prévus dans le SDET, ont " légèrement modifié les notes attribuées aux candidats ".
21. En l'occurrence, la société Kosmos soutenait que le groupement formé par les sociétés Open Digital Education - CGI France ayant obtenu la note de 1,96, la multiplication par le coefficient 38 donnait un résultat de 74,48 et non de 74,60 alors qu'elle-même ayant obtenu la note de 1,82, elle avait obtenu un total de 69,16 et non de 69,09. Toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment du détail du calcul opéré par la région et de ses explications non sérieusement contestées, que, par souci de lisibilité, le pouvoir adjudicateur a limité à deux le nombre de décimales sur les tableaux " Excel " mais que les calculs ont bien été effectués sur la base des données brutes non arrondies. Il s'ensuit que le groupement attributaire a obtenu une note de 1,963'065'558'6 x 38 = 74,596'491'228'1 arrondie à 74,60 alors que la note de 1,818'097'876'3 x 38 = 69,087'719'298'2 obtenue par la société Kosmos a été arrondie à 69,09. Dans ces conditions, il n'en est résulté aucune modification des notes attribuées aux candidats.
22. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a retenu que les trois vices mentionnés au point 11, justifiaient la résiliation du marché en litige.
23. Toutefois, il appartient à la cour saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Kosmos devant le tribunal administratif de Lille et devant la cour.
Sur les autres moyens soulevés par la société Kosmos pour contester la validité de
l'accord-cadre :
24. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 4 de l'ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics alors applicable : " Les marchés publics soumis à la présente ordonnance sont les marchés et les accords-cadres définis ci-après. Les marchés sont les contrats conclus à titre onéreux par un ou plusieurs acheteurs soumis à la présente ordonnance avec un ou plusieurs opérateurs économiques, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services. Les accords-cadres sont les contrats conclus par un ou plusieurs acheteurs soumis à la présente ordonnance avec un ou plusieurs opérateurs économiques ayant pour objet d'établir les règles relatives aux bons de commande à émettre ou les termes régissant les marchés subséquents à passer au cours d'une période donnée, notamment en ce qui concerne les prix et, le cas échéant, les quantités envisagées (...) ". Aux termes de l'article 52 de cette même ordonnance : " I. - Le marché public est attribué au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l'offre économiquement la plus avantageuse sur la base d'un ou plusieurs critères objectifs, précis et liés à l'objet du marché public ou à ses conditions d'exécution. / (...) ".
25. D'autre part, aux termes de l'article 67 (critères d'attribution du marché) de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE : " Sans préjudice des dispositions législatives, réglementaires ou administratives nationales relatives au prix de certaines fournitures ou à la rémunération de certains services, les pouvoirs adjudicateurs se fondent, pour attribuer les marchés publics, sur l'offre économiquement la plus avantageuse. / 2. L'offre économiquement la plus avantageuse du point de vue du pouvoir adjudicateur est déterminée sur la base du prix ou du coût, selon une approche fondée sur le rapport coût/efficacité, telle que le coût du cycle de vie, conformément à l'article 68, et peut tenir compte du meilleur rapport qualité/prix, qui est évalué sur la base de critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux et/ou sociaux liés à l'objet du marché public concerné. Il peut s'agir, par exemple, des critères suivants : / a) la qualité, y compris la valeur technique, les caractéristiques esthétiques et fonctionnelles, l'accessibilité, la conception pour tous les utilisateurs, les caractéristiques sociales, environnementales et innovantes et la commercialisation et ses conditions; / b) l'organisation, les qualifications et l'expérience du personnel assigné à l'exécution du marché, lorsque la qualité du personnel assigné peut avoir une influence significative sur le niveau d'exécution du marché; ou c) le service après-vente, l'assistance technique et les conditions de livraison, telles que la date de livraison, le mode de livraison et le délai de livraison ou d'exécution. / (...) ".
26. En outre, aux termes de l'article 62 du décret du 25 mars 2016, alors applicable : " (...) II. - Pour attribuer le marché public au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, l'acheteur se fonde : 1° Soit sur un critère unique (...) 2° Soit sur une pluralité de critères non-discriminatoires et liés à l'objet du marché public ou à ses conditions d'exécution au sens de l'article 38 de l'ordonnance du 23 juillet 2015 susvisée, parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux. Il peut s'agir, par exemple, des critères suivants : a) La qualité, y compris la valeur technique et les caractéristiques esthétiques ou fonctionnelles, l'accessibilité, l'apprentissage, la diversité, les conditions de production et de commercialisation, la garantie de la rémunération équitable des producteurs, le caractère innovant, les performances en matière de protection de l'environnement, de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture, d'insertion professionnelle des publics en difficulté, la biodiversité, le bien-être animal ; / b) Les délais d'exécution, les conditions de livraison, le service après-vente et l'assistance technique, la sécurité des approvisionnements, l'interopérabilité et les caractéristiques opérationnelles ; / c) L'organisation, les qualifications et l'expérience du personnel assigné à l'exécution du marché public lorsque la qualité du personnel assigné peut avoir une influence significative sur le niveau d'exécution du marché public./ D'autres critères peuvent être pris en compte s'ils sont justifiés par l'objet du marché public ou ses conditions d'exécution. (...) ".
27. Enfin, aux termes de l'article 55 de ce même décret : " (...) / IV. - Si un candidat ou un soumissionnaire se trouve dans un cas d'interdiction de soumissionner, ne satisfait pas aux conditions de participation fixées par l'acheteur, produit, à l'appui de sa candidature, de faux renseignements ou documents, ou ne peut produire dans le délai imparti les documents justificatifs, les moyens de preuve, les compléments ou explications requis par l'acheteur, sa candidature est déclarée irrecevable et le candidat est éliminé. / Dans ce cas, lorsque la vérification des candidatures intervient après la sélection des candidats ou le classement des offres, le candidat ou le soumissionnaire dont la candidature ou l'offre a été classée immédiatement après la sienne est sollicité pour produire les documents nécessaires. Si nécessaire, cette procédure peut être reproduite tant qu'il subsiste des candidatures recevables ou des offres qui n'ont pas été écartées au motif qu'elles sont inappropriées, irrégulières ou inacceptables. ".
28. Il résulte des dispositions précédemment citées de l'article 52 de l'ordonnance du 23 juillet 2015 et de l'article 62 du décret du 25 mars 2016, interprétées à la lumière de celles citées au point 25 de l'article 67 de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014 qu'elles transposent en droit national, qu'il appartient au pouvoir adjudicateur de déterminer l'offre économiquement la plus avantageuse en se fondant sur des critères permettant d'apprécier la performance globale des offres au regard de ses besoins et non sur le seul critère prix. Ces critères doivent être liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution, être définis avec suffisamment de précision pour ne pas laisser une marge de choix indéterminée et ne pas créer de rupture d'égalité entre les candidats. Le pouvoir adjudicateur détermine librement la pondération des critères de choix des offres. Toutefois, il ne peut légalement retenir une pondération, en particulier pour le critère du prix ou du coût, qui ne permettrait manifestement pas, eu égard aux caractéristiques du marché, de retenir l'offre économiquement la plus avantageuse.
29. Ainsi qu'il a été dit plus haut, le règlement de la consultation, en son article 7-2, fixait deux critères de sélection des offres, à savoir, le prix des prestations et la valeur technique pondérés respectivement à 35 % et à 65 %. En outre, son article 7-3 énonçait que l'offre la mieux classée serait retenue à titre provisoire dans l'attente que le ou les candidats produisent les certificats et attestations de l'article 51 du décret du 25 mars 2016, dans un délai ne pouvant être supérieur à dix jours.
30. Il est constant qu'après avoir classé première l'offre de la société Itop Education, le pouvoir adjudicateur l'a écartée, faute pour cette candidate d'avoir été en mesure de justifier, dans le délai imparti par le règlement de la consultation, du paiement des cotisations et contributions de sécurité sociale. La région Hauts-de-France a ainsi décidé, sur le fondement des dispositions du IV de l'article 55 du décret du 25 mars 2016 et au vu du rapport d'analyse des offres daté du 11 mars 2019, d'attribuer le marché au groupement d'entreprises constitué des sociétés Open Digital Education et CGI France, classé deuxième avec une note globale de 73,72, devançant l'offre de la société Kosmos, classée troisième avec une note globale de 73,52.
31. La société Kosmos soutient d'abord que l'attribution du marché au groupement d'entreprises constitué des sociétés Open Digital Education et CGI France, à la suite de l'élimination de la candidate initialement retenue, procèderait de manœuvres organisées par le pouvoir adjudicateur, consistant à avoir modifié les résultats d'une première analyse des offres opérée le 18 février 2019 par la commission technique d'analyse des offres, au terme de laquelle sa candidature aurait été classée en deuxième position. Au soutien de cette affirmation, la société Kosmos se prévaut d'un document qu'elle désigne comme correspondant à un fichier d'analyse des offres daté du 27 février 2019 transcrivant l'ensemble des notes et appréciations formulées par la commission le 18 février, document dont elle allègue avoir obtenu la communication dans le cadre de l'instruction d'une plainte pour délit de favoritisme qu'elle aurait déposée. Toutefois, les agissements qu'elle impute au pouvoir adjudicateur ne sauraient être regardés comme établis ni même présumés sur le fondement de cette seule pièce dont la région réfute l'existence. Dans ces conditions, compte tenu des dénégations de cette dernière, il n'y a pas lieu pour la cour de mettre en œuvre ses pouvoirs d'instruction aux fins de communication. Par suite, pour l'application des dispositions du IV de l'article 55 du décret du 25 mars 2016 organisant la procédure de sélection des candidats après élimination de la candidature initialement retenue, l'offre de la société Kosmos ne saurait être regardée comme ayant été classée au deuxième rang.
32. La société Kosmos soutient ensuite que son offre ayant obtenu la note de 31,07 sur le critère " prix des prestations ", supérieure à celle de 24,74 obtenue par le groupement attributaire, elle devait se voir réattribuer, suite à l'élimination de la société Itop Education, la note maximale de 35 obtenue par cette dernière. Toutefois, comme l'ont retenu les premiers juges, les dispositions de l'article 55 du décret du 25 mars 2016, pas plus qu'aucune autre disposition de celui-ci, ni d'autres dispositions en vigueur applicables aux marchés publics, n'imposent au pouvoir adjudicateur de revoir le classement des autres soumissionnaires en cas d'élimination du candidat n'ayant pu justifier de sa capacité à soumissionner. Par ailleurs, la société Kosmos ne saurait davantage soutenir qu'ayant en tout état de cause obtenu une note supérieure à celle du groupement attributaire en ce qui concerne le critère prix, la région était tenue de la retenir dès lors que le règlement de la consultation ne prévoyait pas la sélection des offres sur ce seul critère mais également sur celui de la valeur technique, conformément aux dispositions de l'article 62 du décret du 25 mars 2016 selon lesquelles le marché est attribué au candidat ayant présenté l'offre économiquement la plus avantageuse déterminée sur la base de plusieurs critères. A cet égard, compte tenu de ce qui a été énoncé au point 28, la société Kosmos n'est pas davantage fondée à soutenir que les dispositions du IV de l'article 55 de ce décret, sur lesquelles s'est également fondée la région pour attribuer le marché au groupement attributaire, méconnaissent les dispositions de l'article 67 de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics, dans la mesure où la procédure d'attribution du marché au candidat classé immédiatement après le candidat éliminé résulte nécessairement et directement de la mise en œuvre préalable de l'ensemble des critères permettant de désigner l'offre économiquement la plus avantageuse.
33. En deuxième lieu, la société Kosmos soutient que l'application d'un coefficient 38 pour l'évaluation de l'item " conformité technique au SDET ", correspondant à l'unité d'œuvre " 3 - Mise en œuvre et déploiement de la solution ENT ", constitue un critère que le pouvoir adjudicateur n'a pas communiqué aux candidats. Toutefois, l'application de ce coefficient ne saurait être regardée comme un critère différent du critère TECH dès lors qu'il ne vise qu'à tenir compte de la part largement majoritaire, pour l'appréciation globale du sous-critère TECH, des éléments de réponses apportées par les candidats dans l'onglet n° 2 " SDET - Exigences et recommandations de la solution logicielle " ainsi que dans l'onglet n° 3 " SDET - Exigences et recommandations de la mise en œuvre ".
34. En troisième lieu, si la société Kosmos reproche encore à la région Hauts-de-France d'avoir analysé six items non annoncés dans le cadre de réponse, il ressort des explications convaincantes corroborées par les pièces du dossier, apportées par cette dernière, que ce sont bien 353 items qui ont été analysés au titre de la solution logicielle et 83 au titre de la mise en œuvre dans le cadre du SDET, les chiffres de 356 et 86 allégués correspondant en réalité au nombre de lignes du tableau Excel.
35. En quatrième lieu, pour soutenir que sa candidature n'a pas été traitée à égalité avec celle du groupement attributaire, la société Kosmos soutient d'une part, s'agissant de l'item " UTIL UTL-RES-04 ", que le groupement d'entreprises constitué de la société Open digital Education et de la société CGI France n'offrant pas la fonctionnalité export/import dans son intégralité, il aurait dû être noté 0. Cependant, il ressort de l'analyse des offres, que la société requérante ne propose ni import, ni export des données alors que l'offre du groupement attributaire permet de récupérer via un export ce que l'utilisateur avait saisi. En outre, le SDET n'exigeant pas un import et un export de manière cumulative, la note de " 0 " n'avait pas à être attribuée au groupement. D'autre part, si la société Kosmos reproche à la région d'avoir valorisé la fonctionnalité " UTI-CCO-CEL-033 " sans que le règlement de la consultation ne l'autorise, cette fonctionnalité est bien prévue dans le SDET et n'a jamais été interdite par le règlement de la consultation.
36. En dernier lieu, la société Kosmos soutient que d'autres items que les cinq retenus par le tribunal ont fait l'objet d'écarts de notes non justifiés entre son offre et celle de l'attributaire. Toutefois, il résulte de l'instruction que la note de 2/3 obtenue par la société Kosmos pour sa réponse aux items SOC-INT-IED-02, SOC-INT-IED-03, SOC-INT-IED-04, SOC-INT-IED-05, SOC-INT-IED-24 et SOC-SEC-DVS-01 est cohérente avec l'appréciation " conforme à la demande " qu'elle a obtenue alors que celle de 3/3 obtenue par le groupement attributaire ne présente pas d'incohérence avec les commentaires ajoutés qui doivent être regardés comme démontrant que ses propositions allaient " au-delà des attentes ".
37. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, qu'en l'absence d'irrégularités affectant la procédure de passation du marché en litige, la société Kosmos n'est pas fondée à en demander l'annulation ou la résiliation.
Sur les conclusions indemnitaires :
38. La société Kosmos n'ayant pas été illégalement évincée du marché en litige, ses conclusions tendant à obtenir l'indemnisation du préjudice subi du fait de son éviction doivent être rejetées.
39. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, d'une part, que la région des Hauts-de-Fance est fondée à demander l'annulation du jugement du 3 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Lille a résilié le marché conclu le 3 mai 2019 avec le groupement d'entreprises constitué des sociétés Open Digital Education et CGI France et l'a condamnée à verser à la société Kosmos une somme de 3 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2019 et capitalisation, d'autre part, que la requête de la société Kosmos et ses conclusions d'appel incident doivent être rejetées.
Sur les frais de l'instance :
40. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la région Hauts-de-France, qui n'est pas la partie perdante dans les deux instances devant la cour, les sommes que la société Kosmos demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la société Kosmos, une somme totale de 2 000 euros au titre des frais exposés dans ces deux instances par la région et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 1er, 2 et 3 du jugement n° 1905397 du tribunal administratif de Lille du 3 juin 2022 sont annulés.
Article 2 : La demande présentée par la société Kosmos devant le tribunal administratif de Lille et l'ensemble des conclusions qu'elle a présentées devant la cour sont rejetées.
Article 3 : La société Kosmos versera une somme de 2 000 euros à la
région Hauts-de-France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Kosmos, à la région Hauts-de-France et aux sociétés Open Digital Education et CGI France.
Délibéré après l'audience publique du 3 décembre 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,
- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,
- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 décembre 2024.
Le rapporteur,
Signé : F. Malfoy
La présidente de chambre,
Signé : M.-P. Viard
La greffière,
Signé : C. Huls-Carlier
La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
par délégation,
La greffière,
C. Huls-Carlier
Nos 22DA01593, 22DA01689 2