Vu la décision en date du 2 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 6 mars 1989, par laquelle le président de la 8e sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour la société EUROFROMAGE, société anonyme dont le siège social est ..., par la Société Civile Professionnelle Jean LE PRADO - Didier LE PRADO ;
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 27 octobre 1987 ;
La société EUROFRANCE demande au Conseil d'Etat :
1) d'annuler le jugement du 26 juin 1987 par lequel le tribunal administratif de GRENOBLE a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1976 dans les rôles de la commune de REIGNIER ;
2) de lui accorder la décharge de l'imposition litigieuse ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 24 janvier 1990 :
- le rapport de M. LANQUETIN, conseiller ; - et les conclusions de Mme HAELVOET, commissaire du gouvernement ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que par une décision postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux du département de la Haute-Savoie a accordé à la société EUROFROMAGE décharge de l'imposition contestée sur le revenu ; qu'ainsi la requête est devenue sans objet sur ce point ;
Sur la prescription :
Considérant qu'en vertu des dispositions du 1 de l'article 1966 du code général des impôts alors en vigueur, les omissions constatées dans l'assiette de l'impôt peuvent être réparées par l'administration jusqu'à l'expiration de la quatrième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due ; que, toutefois, en vertu de l'article 1975 du même code, applicable en l'espèce, le délai de prescription ainsi prévu peut être interrompu, notamment, par une notification de redressements ; qu'il résulte des dispositions dudit article 1975 que l'effet interruptif qui découle d'une notification de redressements ne dépend ni des motifs qu'elle énonce, ni de la procédure suivie par l'administration ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par notification du 11 août 1980, l'administration a fait connaître à la société EUROFROMAGE les redressements qu'elle entendait apporter aux résultats imposables des exercices clos en 1976, 1977, 1978 et 1979 ; que cette notification a interrompu la prescription à concurrence du montant des impositions correspondant à ces redressements ; que si une nouvelle notification, datée du 10 mars 1981, a, au titre de la même période et pour les mêmes impôts et à l'intérieur du nouveau délai de reprise ouvert par la notification du 11 août 1980, retenue une procédure différente et précisé qu'elle annulait et remplaçait les notifications précédentes, ces circonstances ne sont pas de nature à priver la notification du 11 août 1980 de son effet interruptif de la prescription ; qu'ainsi, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'imposition litigieuse était couverte par la prescription lors de l'envoi de la notification du 10 mars 1981 ;
Sur la procédure de rectification d'office :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les contrôles effectués par le vérificateur ont mis en évidence d'importantes irrégularités dans l'évaluation des stocks et des omissions de recettes ; qu'en admettant que les constatations de la police judiciaire dans l'entreprise GARANCINI ne constituent pas la preuve de la minoration des stocks de la société EUROFROMAGE, ladite minoration, d'ailleurs reconnue par cette dernière dans ses réponses aux notifications de redressements, résultait des investigations effectuées par le vérificateur dans les documents comptables de l'entreprise ; que la circonstance qu'une telle irrégularité ait été connue du service avant l'envoi de la première notification, aux termes de laquelle l'administration avait choisi de suivre la procédure de redressement contradictoire, ne faisait pas obstacle à ce que cette dernière ultérieurement et, ainsi qu'il a été dit, avant l'expiration du délai de répétition, choisisse la procédure de rectification d'office en se fondant sur les irrégularités ci-dessus énumérées ; qu'aucune disposition du code sus-visé n'impose à l'administration de prononcer le dégrèvement d'impositions initialement établies selon une procédure régulière avant la mise en oeuvre d'une nouvelle procédure ; que, par suite, la comptabilité de la société EUROFROMAGE a pu, à bon droit, être regardée comme dépourvue de valeur probante et les bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés fixées par voie de rectification d'office ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter les conclusions de la société EUROFROMAGE tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1976 ;
Article 1er : Il n'y a pas lieu à statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge de l'impôt sur le revenu établi au titre de l'année 1976.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.