Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour les 8 avril et 15 mai 1991, présentés pour le Centre Hospitalier de CHAMBERY représenté par son directeur, par la SCP Jean et Didier LE PRADO, avocat aux Conseils ;
Le Centre Hospitalier de CHAMBERY demande à la cour d' annuler le jugement du 6 février 1991 du tribunal administratif de Grenoble statuant sur la demande présentée par M. et Mme X... en leur nom personnel et au nom de leur enfant Anaïs, tendant à ce que le Centre Hospitalier de Chambéry soit condamné à réparer le préjudice subi par la jeune Anaïs, en tant que par ce jugement le tribunal a omis de prévoir l'imputation, sur le montant de la rente qu'il a allouée à Anaïs X..., des frais d'hébergement et d'éducation susceptibles d'être engagés en cas de placement de cette victime dans un établissement spécialisé ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mars 1993 :
- le rapport de M. ZUNINO, Conseiller ;
- et les conclusions de M. RICHER, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de GRENOBLE a condamné le centre hospitalier de CHAMBERY à payer à M. et Mme X... d'une part, pour le compte de leur fille mineure, une rente annuelle de 170 000 francs indexée, d'autre part, pour leur propre compte, diverses indemnités, en réparation des préjudices qui ont résulté de l'accident dont la jeune Anaïs a été victime lors de son hospitalisation, le 18 septembre 1982 ;
Sur la recevabilité des conclusions incidentes :
Considérant que le centre hospitalier de CHAMBERY, appelant principal, ne conteste le jugement attaqué qu'en ce que ce dernier n'a pas prévu que s'imputeraient sur la rente servie à Anaïs X... les frais éventuellement exposés par la caisse de sécurité sociale à l'occasion du placement de l'intéressée en établissement spécialisé ; que le litige ainsi ouvert ne concerne que les droits de la jeune Anaïs, à l'exclusion de ceux que, agissant pour leur compte propre, ses parents se sont vus reconnaître par le jugement en cause ; que les conclusions incidentes présentées par M. et Mme X... ont été enregistrées après l'expiration du délai d'appel ; que par suite, si les conclusions des intimés tendant à la modification du montant de la rente attribuée à la jeune Anaïs doivent être déclarées recevables, le surplus de leurs conclusions incidentes présente à juger un litige distinct en ce qu'elles tendent à ce que la cour majore les indemnités qui leur ont été attribuées personnellement, et sont dans cette mesure irrecevables ;
Au fond :
Sur le montant de la rente :
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'Anaïs X... est atteinte d'une incapacité permanente totale et que son état de paralysie accompagné d'une décérébration n'est susceptible d'aucune amélioration ; qu'elle est ainsi incapable d'accomplir les gestes de la vie courante sans l'assistance permanente d'une tierce personne et que son état nécessite en outre des soins paramédicaux fréquents et une surveillance médicale ; que compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il sera fait une juste appréciation de la rente devant être versée à M. et Mme X... en leur qualité d'administrateurs légaux des biens de leur enfant mineure Anaïs en la fixant au montant annuel de 250 000 francs, ladite rente devant être indexée sur les coefficients de revalorisation prévus à l'article L 434-17 du code de la sécurité sociale ; qu'il convient de réformer le jugement attaqué en tant qu'il a limité ladite rente à 170 000 francs par an ;
Sur les conclusions du centre hospitalier de CHAMBERY :
Considérant que le centre hospitalier de CHAMBERY est fondé à demander que les sommes qui seront le cas échéant supportées par la caisse de mutualité sociale agricole de l'Isère pour financer les frais de placement en institution spécialisée d'Anaïs X... s'imputent sur la fraction de la rente qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de l'enfant, et qui, compte tenu de l'état décrit ci-dessus de la victime, doit être fixée aux neuf dixièmes de cette rente ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation de sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L-8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit à la demande de M. et Mme X... ;
Article 1er : Le montant annuel de la rente que le centre hospitalier de CHAMBERY a été condamné à payer à M. et Mme X... en qualité d'administrateurs légaux de leur fille Anaïs est porté à 250 000 francs ; seront imputés sur le montant de cette rente, dans la limite des neuf dixièmes de ce montant, les frais de séjour d'Anaïs X... en établissement spécialisé que, le cas échéant, supportera la caisse de mutualité sociale agricole de l'Isère.
Article 2 : L'article 1er du jugement en date du 6 février 1991 du tribunal administratif de GRENOBLE est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions incidentes de M. et Mme X... est rejeté.