Vu, I) enregistrée au greffe de la cour le 7 août 1995, sous le n 95LY01435, la requête présentée pour M. Armand Y... demeurant ... 83 CARCES, par Me X..., avocat au barreau de Nice ;
M. Y... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement du 24 mai 1995 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes tendant respectivement à l'annulation de l'arrêté du préfet du Var du 8 novembre 1993 lui prescrivant de procéder à des évaluations et travaux pour prévenir les risques et pollutions liés à l'activité des anciennes tanneries de Barjols et de l'arrêté du préfet du Var du 22 septembre 1994 le mettant en demeure d'exécuter le précédent arrêté dans un délai de quatre mois ;
2 ) d'annuler les arrêtés litigieux ; La commune de Barjols demande à la cour :
1 ) de rejeter la requête de M. Y... ;
2 ) de le condamner à lui payer une somme de 10 000 francs sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
II) Vu, enregistrée au greffe de la cour le 28 août 1996 sous le n 96LY02017, la requête présentée pour M. Armand Y... par la SCP BOUZEREAU-GAYRARD, avocat au barreau de Draguignan ;
M. Y... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement du 22 mars 1996, par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Var du 11 septembre 1995 lui ordonnant de consigner une somme de 300 000 francs pour répondre des travaux prescrits par l'arrêté du 8 novembre 1993 sur le site des anciennes tanneries de Barjols ;
2 ) d'annuler l'arrêté litigieux ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement ;
Vu le décret n 77-1133 du 21 septembre 1977 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 1997 :
- le rapport de M. FONTBONNE, conseiller ;
- et les conclusions de M. GAILLETON, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées relatives à la situation de la même installation présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par un même arrêt ;
Sur l'intervention de la commune de Barjols : Considérant que la commune de Barjols à intérêt à voir disparaître un dépôt incontrôlé de produits toxiques situé sur son territoire ; que son intervention est recevable ;
Sur la légalité des arrêtés litigieux :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n 76-663 du 19 juillet 1976 : "Sont soumis aux dispositions de la présente loi les usines, ateliers, dépôts, chantiers et d'une manière générale les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature et de l'environnement, soit pour la conservation des sites et des monuments." ; qu'aux termes de l'article 34 du décret du 21 septembre 1977 : "Lorsqu'une installation cesse l'activité au titre de laquelle elle était autorisée ou déclarée, son exploitant doit en informer le préfet ... L'exploitant doit remettre le site de l'installation dans un état tel qu'il ne s'y manifeste aucun des dangers ou inconvénients mentionnés à l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976. A défaut il peut être fait application des procédures prévues par l'article 23 de cette loi." ; qu'aux termes dudit article 23 : "Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées et lorsqu'un inspecteur des installations classées ou un expert désigné par le ministre chargé des installations classées a constaté l'inobservation des conditions imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet met en demeure ce dernier de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. Si, à l'expiration du délai fixé pour l'exécution, l'exploitant n'a pas obtempéré à cette injonction, le préfet peut : a) obliger l'exploitant à consigner entre les mains d'un comptable public une somme répondant du montant des travaux à réaliser ... b) faire procéder d'office, aux frais de l'exploitant, à l'exécution des mesures prescrites. c) suspendre par arrêté, après avis de la commission départementale consultative compétente, le fonctionnement de l'installation ..." ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que lorsque, après la cessation d'activité d'une installation, se manifestent des dangers ou inconvénients mentionnés à l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976, il appartient au préfet d'assurer la protection des intérêts visés à l'article 1er de la même loi, en prescrivant à l'exploitant de prendre toute mesures appropriées ; que si ce dernier ne satisfait pas aux mesures prescrites, il appartient au préfet en vertu de l'article 34 du décret précité de prononcer, après mise en demeure, une des trois sanctions énoncées à l'article 23 précité de la loi du 19 juillet 1976 ; qu'à défaut d'exploitant présent et solvable, ces obligations de remise en état doivent être mises à la charge du détenteur de ladite installation lequel dès lors qu'il se trouve substitué dans les obligations de l'exploitant, et alors même que les dispositions précitées de l'article 23 de la loi du 19 juillet 1976 ne visent expressément que ce dernier peut se voir appliquer après mise en demeure, une des trois sanctions prévues par ledit article 23 ;
Considérant, d'une part, que M. Y... ne conteste pas que l'activité industrielle de tannerie précédemment exercée dans un ensemble de locaux constituant l'usine du Blancs à Barjols qu'il avait acquis le 29 novembre 1990 alors que cette activité avait cessée depuis la mise en liquidation en 1983 de la SA des tanneries de Barjols était soumise à la législation relative aux installations classées sous le régime de la loi du 19 décembre 1917 et l'était restée sous l'empire de la loi du 19 juillet 1976 ; que par suite après cessation d'activité et dès lors qu'il a été constaté par un inspecteur des installations classées et qu'il n'est pas contesté que s'y manifestent des dangers et inconvénients mentionnés à l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 en raison de la présence de déchets toxiques liés à l'ancienne activité, le site continue à constituer une installation classée et à relever des prescriptions résultant de l'arrêté initial d'autorisation, et le cas échéant des arrêtés complémentaires ainsi que de l'ensemble de la législation et réglementation applicable en la matière ;
Considérant, d'autre part, que M. Y... n'établit, ni même n'allègue que la liquidation de la SA des tanneries de Barjols disposerait encore dans le cas où elle ne serait pas clôturée, d'un actif suffisant pour répondre au coût des travaux de remise en état du site ni que les déchets en cause relèveraient de la garde d'une autre personne physique ou morale ; qu'il est ainsi détenteur de l'installation classée en cause auquel, à défaut d'un exploitant présent et solvable, il incombe, alors même qu'il est constant que ni lui-même, ni la société de laquelle il a acquis l'ensemble immobilier n'ont exercé d'activité industrielle, de supporter la charge des obligations de remise en état du site ;
Considérant, enfin, que la circonstance que l'administration aurait auparavant négliger de mettre en oeuvre ses pouvoirs de police alors que l'exploitant était encore présent et solvable, si elle peut le cas échéant ouvrir une action en responsabilité, est sans influence sur la légalité des mesures mises à la charge du détenteur ; que M. Y... ne peut en conséquence utilement faire valoir que le préfet n'aurait pas pris en temps utile les mesures qui s'imposaient à l'égard de la SA les tanneries de Barjols ou de sa liquidation ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Var ne pouvait par un premier arrêté du 8 novembre 1993 mettre à sa charge des prescriptions de remise en état du site et par un second arrêté du 23 septembre 1994 en poursuivre l'exécution par une mise en demeure et ensuite par un troisième arrêté du 11 septembre 1995 ordonner la consignation entre les mains du comptable public de la somme nécessaire pour assurer l'exécution de cette remise en état ; qu'il n'est en conséquence pas fondé à soutenir que c'est à tort que par les jugements attaqués le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des trois arrêtés litigieux ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les conclusions de M. Y..., d'ailleurs non chiffrées, ne peuvent qu'être rejetées dès lors qu'il est partie perdante ;
Considérant que la commune de Barjols intervenante en défense n'étant pas partie à la présente instance, les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que M. Y... soit condamné à lui payer une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'intervention de la commune de Barjols est admise.
Article 2 : Les requêtes de M. Y... sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de M. Y... et de la commune de Barjols tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.