Vu la décision, en date du 18 octobre 1993, par laquelle le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt, en date du 26 juin 1990, par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté la requête de M. Paul Y... dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 12 janvier 1988, rejetant sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1974 ;
Vu la requête présentée pour M. Paul Y... demeurant ..., par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, enregistrée au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat le 16 mars 1988 ;
M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1 ) d'annuler le jugement n 62351/1-63614/1 du 12 janvier 1988 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1974 dans les rôles de la ville de Paris, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2 ) de lui accorder la décharge demandée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d' appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience du 21 octobre 1998 :
- le rapport de M. RICHER, président,
- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 1991 du code général des impôts, applicable en l'espèce : "Sous réserve des dispositions particulières relatées par la présente codification et pour permettre l'assiette et le contrôle des impôts faisant l'objet de ladite codification, les agents des impôts ont le droit d'obtenir des contribuables ou assujettis communication des livres dont la tenue est prescrite par le titre II du livre 1er du code de commerce ainsi que tous livres et documents annexes, pièces de recettes et de dépenses" ; qu'aux termes de l'article 1649 septies du même code également applicable : "Les contribuables peuvent se faire assister au cours des vérifications de comptabilité ou au cours des vérifications approfondies de leur situation fiscale d'ensemble d'un conseil et doivent être avertis de cette faculté, à peine de nullité de la procédure. Dans tous les cas, la procédure de vérification doit comporter l'envoi d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification en mentionnant expressément la faculté pour le contribuable de se faire assister par un conseil de son choix." ;
Considérant que pour soutenir que la vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble et la vérification de comptabilité ayant fait l'objet d'envois d'avis de vérifications le 20 novembre 1978 avaient commencé antérieurement à cette date, M. Y... fait valoir que l'administration fiscale lui a demandé dès le 21 juin 1977 de lui présenter ses factures d'achat, la copie de ses factures de vente ainsi qu'un "dossier cession SI Globe Union" ; qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir que le redressement relatif à une commission de 200 000 F au titre du revenu de l'année 1974 procéderait d'un examen critique des éléments ainsi communiqués dans le cadre de la procédure organisée par l'article L.81 du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'à défaut de remise en cause de tout autre élément concourant à la détermination du revenu net global imposable, la notification de redressement adressée à M. Y... intéressait nécessairement, en l'espèce, tant ses revenus imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux que son revenu global et satisfaisait, par suite, aux prescriptions de l'article 1649 quinquies A du code général des impôts alors applicable ; que la circonstance que l'administration n'ait pas procédé, à la suite de la vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble du requérant, à une notification l'informant de l'absence de redressements établis à un autre titre est sans influence sur la régularité du redressement contesté ;
Considérant enfin que si les dispositions de l'article 1649 quinquies A ne font pas obstacle à ce que l'administration, après avoir reconnu, à la suite notamment d'une réclamation contentieuse du contribuable, l'irrégularité de la procédure de redressement suivie en vertu de cet article, reprenne cette procédure dans le délai imparti par l'article 1966 du code, repris à l'article L.169 du livre des procédures fiscales, afin de parvenir à la fixation de l'imposition dans des conditions régulières, cette faculté ne lui est cependant ouverte qu'autant qu'elle a expressément constaté l'irrégularité de la première procédure en notifiant le dégrèvement de l'imposition précédente ; qu'il résulte de l'instruction que l'imposition litigieuse a été mise une première fois en recouvrement le 18 juin 1982 ; que M. Y... a présenté une réclamation, le 28 juillet suivant, se fondant notamment sur la circonstance que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'avait pas été saisie du différend comme il l'avait demandé ; que, faisant droit à sa demande, l'administration a prononcé un dégrèvement le 22 octobre 1982 et a saisi ladite commission, qui a émis son avis le 22 novembre 1982 ; que le requérant n'établit ni même ne soutient que l'administration l'aurait invité à prendre connaissance du rapport soumis à la commission ou à se faire entendre auprès de cette commission antérieurement à la notification du dégrèvement prononcé le 22 octobre 1982 ; que, dès lors, M. Y... n'est pas fondé à soutenir que l'administration a engagé la seconde procédure d'imposition avant de notifier le dégrèvement de l'imposition précédente ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.60-3 du livre des procédures fiscales : "L'avis ou la décision de la commission départementale doit être motivé. Il est notifié au contribuable par l'administration des impôts" ; que ni ce texte ni aucune autre disposition ne font obligation à l'administration de notifier au contribuable la composition de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d'indication de cette composition dans la notification de l'avis faite à M. Y... est inopérant ; que si le requérant soutient que les dispositions de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme faisaient obligation à l'administration de mentionner la composition de la commission, ces dispositions, qui ne sont applicables qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur des droits et obligations en matière civile ou sur des accusations en matière pénale, n'énoncent aucune règle susceptible de se rapporter aux procédures administratives d'imposition et notamment au fonctionnement de ladite commission départementale des impôts ;
Considérant que la base d'imposition retenue par l'administration étant conforme à l'avis de la commission départementale, il appartient à M. Y..., conformément aux dispositions de l'article L.192 dans sa rédaction alors applicable, d'établir son éventuelle exagération ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 1975 du code général des impôts : "Les prescriptions sont interrompues par des notifications de redressements" ; que la notification de redressements faite par l'administration le 21 décembre 1978 a eu pour effet d'interrompre le délai de prescription relatif à l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 1974 et de le proroger jusqu'au 31 décembre 1982 ; que, dès lors, la mise en recouvrement de la cotisation litigieuse, intervenue le 31 décembre 1982, n'était pas tardive ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'un tiers s'est engagé le 17 septembre 1974 à verser à l'agence immobilière dont M. Y... est l'exploitant une commission forfaitaire de 200 000 F, en rémunération de son intervention sur la cession de titres représentatifs d'un appartement situé ..., appartenant à la société Globe Union dont le siège social est en Suisse, lors de la réalisation de cette opération ; qu'il ressort des déclarations de l'acheteur, consignées dans un procès-verbal dressé par le service des douanes le 22 mai 1978, que, le 23 septembre 1974, il a signé à Genève le contrat d'acquisition des titres en présence d'un membre de la société Globe-Union et de M. Y... pour un prix global de 5 100 000 F versé en espèces à une banque suisse, et représentant le prix d'achat de ces titres et le montant de la commission de M. Y... ; que si le requérant soutient qu'il n'était pas à Genève le jour de la signature du contrat de cession, cette circonstance qui, au surplus n'est fondée sur aucune des pièces du dossier, ne saurait à elle seule établir qu'il n'aurait pas été bénéficiaire de cette commission ; que la rapidité avec laquelle la transaction s'est concrétisée ne permet pas d'estimer, comme le prétend le contribuable, qu'il a été tenu écarté de la conclusion de l'opération ; qu'il a d'ailleurs omis, alors qu'il y était légalement tenu, de mentionner dans ses écritures comptables la remise du chèque de réservation qui lui avait été faite par l'acheteur le jour de la signature de la promesse d'achat ; que, dans ces conditions, M. Y... n'établit pas que la commission de 200 000 F ne devait pas être réintégrée par l'administration dans ses bénéfices de l'année 1974 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Considérant que M. Y... n'est pas fondé à demander que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamné à lui verser une somme quelconque par application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.