Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour le 21 avril 1997 et le 11 septembre 1997, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS, dont le siège est à 58020 Nevers Cedex, représenté par son directeur en exercice à ce autorisé par délibération de son conseil d'administration en date du 25 avril 1997, par Me Y... LE PRADO, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
Le CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 952845, en date du 4 février 1997, par lequel le tribunal administratif de DIJON l'a condamné à payer la somme de 61.657,06 francs à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA NIEVRE, outre les intérêts, et la somme de 28.444 francs à Mme Marie-Paule X..., en réparation des préjudices résultant de la chute de cette dernière survenue le 13 octobre 1994 dans le minibus qui la transportait vers le service de radiologie alors qu'elle séjournait au service diabétologie ;
2°) de rejeter les demandes présentées par Mme Marie-Paule X... et la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA NIEVRE devant le tribunal administratif de DIJON ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 février 1998, présenté pour M. Lucien X..., époux de Z... Marie-Paule CHAMPAGNE décédée le 22 avril 1997, par Me A... de VALMONT, avocat ;
Il demande à la cour :
- de rejeter la requête ;
- de déclarer le CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS entièrement responsable des conséquence dommageables de l'accident et réformer le jugement en conséquence quant au montant de l'indemnité qui lui a été allouée ;
- de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS à lui verser en outre la somme de 60.000 francs en réparation des préjudices qu'il a lui même subis en raison de l'état de sa femme ;
- de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS à lui verser une somme de 5.000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du ... :
- le rapport de M. MONTSEC, premier conseiller ;
- les observations de Me MORENO, avocat du CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS et de Me de LABORIE, avocat de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA NIEVRE ;
- et les conclusions de M. VESLIN, commissaire du gouvernement ;
Sur la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme Marie-Paule X..., qui était alors hospitalisée au CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS, a été victime d'une chute, le 13 octobre 1994, dans l'enceinte de cet établissement, en prenant place dans une ambulance-minibus appartenant à l'hôpital et qui devait la ramener du service de radiologie au service de diabétologie où elle séjournait ; que cette chute a été directement provoquée par la présence sur le plancher du véhicule d'un rail destiné à la manipulation des brancards et sur lequel la victime s'est entravée ; que les ambulanciers connaissaient nécessairement la présence de ce dispositif et le danger qu'il pouvait constituer pour une personne affaiblie par la maladie ; que Mme X..., même si elle restait alors autonome, souffrait de cirrhose, de diabète insulino-nécessitant, d'anémie chronique avec leucopénie et thrombopénie, et enfin d'hémorragies digestives récidivantes, affections qui étaient de nature à diminuer sensiblement ses capacités de mouvement ; que, dans ces conditions, l'embarquement de Mme X... devait être effectué avec les plus grandes précautions ; qu'il n'est pas allégué que, pour l'installation dans le véhicule, l'intéressée ait été aidée par les deux ambulanciers présents sur place qui se sont bornés à lui signaler verbalement les précautions à prendre ; que ce défaut de précaution constitue, dans les circonstances de l'espèce, une faute de nature à engager la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS, qui ne conteste pas les évaluations des préjudices auxquelles se sont livrés les premiers juges, n'est pas fondé à se plaindre de ce que le TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE DIJON a retenu en l'espèce sa responsabilité ;
CConsidérant toutefois que Mme Marie-Paule X..., qui connaissait elle-même la configuration du véhicule qu'elle avait déjà emprunté à l'aller, a fait preuve d'inattention en cette occasion ; que M. Lucien X..., époux de Z... CHAMPAGNE sous le régime de la communauté universelle et qui justifie à ce titre d'un intérêt pour agir au nom de cette dernière, décédée le 22 avril 1997, n'est en conséquence pas non plus fondé à contester, par des conclusions incidentes, le partage de responsabilité retenu par les premiers juges et à soutenir que les indemnités allouées auraient dû être supérieures ;
Sur les conclusions de M. Lucien X... tendant à l'indemnisation de ses préjudices propres :
Considérant que M. Lucien X... n'est pas recevable à demander pour la première fois en appel une indemnité pour les préjudices qu'il aurait lui même subis du fait de l'état de santé de son épouse ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :
Considérant que M. Lucien X... est recevable à demander pour la première fois en appel que lui soient versés les intérêts sur la somme de 28.444 francs que le CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS a été condamné à verser à Mme X... ; que ces intérêts doivent courir à compter du 7 novembre 1994, date de réception par l'hôpital de son assignation par Mme X... devant le juge judiciaire, et jusqu'à la date du versement effectif des sommes dues ; que la capitalisation des intérêts a été demandée par M. X... le 22 mai 1998 ; qu'à cette date il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Considérant que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA NIEVRE, qui a obtenu en première instance la condamnation du CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS à lui verser la somme de 61.657,06 francs, outre les intérêts de droit à compter du 11 mai 1995 à hauteur d'une fraction de la condamnation égale à 3.122,64 francs, et à compter du 31 octobre 1995 à hauteur du solde, soit 58.534,42 francs, n'est fondée à demander la capitalisation desdits intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, que si et dans la mesure où ils ne lui auraient pas encore été versés à la date à laquelle elle a fait cette demande, soit le 23 mars 1998 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'aux termes des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi susvisée n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner, dans les conditions prévues à l'article 75, la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à une somme au titre des frais que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Il peut, en cas de condamnation, renoncer à percevoir la somme correspondante à la part contributive de l'Etat et poursuivre le recouvrement à son profit de la somme allouée par le juge " ;
Considérant il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS à payer à Me A... de VALMONT la somme de 5.000 francs demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sous réserve toutefois qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;
Considérant en revanche qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS à payer à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA NIEVRE la somme qu'elle demande au même titre en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : La requête du CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS est rejetée.
Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS est condamné à verser aux ayants-droit de Mme Marie-Paule X... les intérêts au taux légal sur la somme de 28.444 francs que ledit centre hospitalier a été condamné à verser à celle-ci par le jugement susvisé en date du 4 février 1997. Ces intérêts seront appliqués à compter du 7 novembre 1994 et jusqu'à la date du paiement effectif de la somme correspondante. Les intérêts échus le 22 mai 1998 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Les intérêts dus par le CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA NIEVRE en application de l'article 2 du jugement susvisé en date du 4 février 1997 seront capitalisés, pour produire eux-mêmes intérêts, à la date du 23 mars 1998, si et dans la mesure où ils n'avaient pas été versés à cette date.
Article 4 : Le CENTRE HOSPITALIER DE NEVERS versera à Me A... de VALMONT une somme de cinq mille francs (5.000 F) au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 5 : Le surplus des conclusions de M. Lucien X... et de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA NIEVRE est rejeté.