Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 mai 1998, présentée pour le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS, représenté par son président, dont le siège est Hôtel de ville, Place de la Résistance à Châtillon-sur-Seine (21400), par Me X..., avocat au barreau de Dijon ;
Le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 952297 en date du 10 mars 1998, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société anonyme CREDIT CHIMIQUE à lui verser la somme de 613 150 francs, avec intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable initiale, au titre des contrats de cautionnement intervenus les 24 octobre 1984 et 9 avril 1985 entre ladite société CREDIT CHIMIQUE et la société B.S.F. ;
2°) de condamner la BANQUE GÉNÉRALE DU PHÉNIX, venue aux droits de la société CREDIT CHIMIQUE, à lui verser la somme de 613 150 francs, avec intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable initiale, ainsi que la somme de 10 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 ;
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Classement CNIJ : 39-05-04-02
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Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2004 :
- le rapport de Mme Besson-Ledey, conseiller ;
- les observations de Me Chaigne avocat de la BANQUE GÉNÉRALE DU PHÉNIX ;
- et les conclusions de M. Besle, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un marché en date du 22 mai 1984, le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS a confié au groupement d'entreprises B.S.F. et Bernardis la réalisation d'une usine d'incinération avec récupération de chaleur, la maîtrise d'oeuvre étant assurée par la direction départementale de l'agriculture et de la forêt de la Côte d'Or ; que, par deux actes des 24 octobre 1984 et 9 avril 1985, la société CREDIT CHIMIQUE s'est portée caution personnelle et solidaire de la société B.S.F. pour le montant de la retenue de garantie prévue par l'article 322 du code des marchés publics à laquelle cette dernière était assujettie en qualité de titulaire du marché et ce à hauteur de 613 150 francs ; qu'après la mise en redressement judiciaire de la société B.S.F. prononcée le 5 mai 1986, le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS a recherché la caution de la société CREDIT CHIMIQUE en raison des désordres imputables à la société B.S.F., qui ont affecté l'usine d'incinération ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande du SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS tendant à la condamnation de la société CREDIT CHIMIQUE à lui verser la somme de 613 150 francs, en application des actes de cautionnement des 24 octobre 1984 et 9 avril 1985 ;
Sur les fins de non-recevoir opposées à la requête par la BANQUE GÉNÉRALE DU PHÉNIX venue aux droits de la société CREDIT CHIMIQUE :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 228 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, repris à l'article R. 811-1 du code de justice administrative : Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. ; qu'il résulte de ces dispositions que le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS qui était partie à l'instance qu'il a engagée devant le Tribunal administratif de Dijon est recevable à faire appel du jugement contesté qui a rejeté sa demande, nonobstant la circonstance qu'en vertu d'un contrat d'affermage qu'il a conclu le 4 janvier 1985 avec la S.A. Streichenberger pour exploiter l'usine d'incinération, il a délégué à l'exploitant : tout droit de recours à l'encontre des installations, fournisseurs de matériels et de tous ceux qui ont la qualification de constructeur ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la télécopie de la requête, régularisée par le dépôt d'un exemplaire original, formée par le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS, contre le jugement attaqué du Tribunal administratif de Dijon, qui lui a été notifié le 23 mars 1998, a été enregistrée au greffe de la Cour le 20 mai 1998, soit dans le délai de deux mois imparti pour relever appel ;
Considérant, en troisième lieu, que le comité syndical a pu, postérieurement à l'enregistrement de la requête, régulariser la procédure en décidant, par une délibération du 4 juin 1998, d'interjeter appel du jugement contesté du Tribunal administratif de Dijon ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fins de non-recevoir opposées à la requête d'appel ne peuvent être accueillies ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que, pour rejeter la demande du SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS, tendant à la condamnation de la société CREDIT CHIMIQUE à lui verser la somme de 613 150 francs, en exécution des engagements qu'elle a souscrits pour se porter caution de la société B.S.F., le jugement attaqué a relevé qu'il résulte de l'instruction que les réserves émises lors de la réception étaient mineures et ne pouvaient dès lors faire obstacle à la restitution des sommes consignées à titre de caution ; qu'en statuant ainsi le tribunal administratif n'a pas mentionné les motifs qui l'ont conduit à retenir le caractère mineur des réserves émises, alors que cette appréciation faisait l'objet d'une contestation par le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS ; qu'en conséquence, le tribunal ne peut être regardé comme ayant satisfait à l'obligation qui s'impose aux juridictions de motiver leurs décisions ; que le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS est, dès lors, fondé à demander l'annulation du jugement ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'évoquer la demande présentée par le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS devant le Tribunal administratif de Dijon et d'y statuer immédiatement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées à cette demande :
Considérant d'une part, que l'engagement pris à l'égard d'un maître d'ouvrage par la personne qui s'est portée caution au profit d'une entreprise couvre, dans la limite du montant prévu par l'acte de caution, l'ensemble des obligations contractuelles de cette entreprise, et notamment celles découlant de la garantie de parfait achèvement prévue par les stipulations du marché passé entre le maître d'ouvrage et l'entreprise ; que d'autre part, la garantie de parfait achèvement s'étend à la reprise des désordres ayant fait l'objet de réserves dans le procès-verbal de réception, ainsi qu'à celle des désordres qui apparaissent et sont signalés dans l'année suivant la réception ;
Considérant que, pour demander la condamnation de la BANQUE GÉNÉRALE DU PHÉNIX, venue aux droits de la société CREDIT CHIMIQUE, à lui verser la somme de 613 150 francs en application des actes de cautionnement des 24 octobre 1984 et 9 avril 1985, le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS soutient que le coût des réparations des désordres imputables à la société B.S.F., qui ont affecté l'usine d'incinération, a été évalué à près de 3 000 000 francs par l'expert désigné par une ordonnance de référé du 2 septembre 1988 du président du Tribunal de Grande Instance de Dijon ;
Considérant que la réception de l'usine d'incinération des ordures ménagères s'est faite sous réserves le 11 juin 1985 ; que, le 5 juin 1986 la direction départementale de l'agriculture et de la forêt de la Côte-d'Or, maître d'oeuvre, a écrit à la société CREDIT CHIMIQUE pour l'informer que certains problèmes importants n'avaient pas été résolus et que les cautions émises en remplacement de la retenue de garantie à laquelle la société B.S.F. était assujettie en qualité de titulaire du marché passé le 22 mai 1984, pour la réalisation de l'usine d'incinération, ne pouvaient lui être restituées ; que les désordres visés par le courrier du 5 juin 1986 concernaient une insuffisante absorption par l'aéro-condenseur de la vapeur produite par l'usine et une vibration anormale de cet aéro-condenseur, une évacuation insuffisante des boues par l'équipement de la fosse de décantation sous les convoyeurs et un taux d'émission de poussières dans les fumées supérieur aux normes réglementaires ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment de comptes-rendus de réunions de concertation des 13 juin 1986 et 9 janvier 1987, qu'il a été remédié au problème de l'insuffisance d'absorption de l'aéro-condenseur par la mise en place, par l'entreprise défaillante, d'un aéro-condenseur complémentaire ; que le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS a précisé, dans un mémoire enregistré devant le tribunal administratif le 18 septembre 1997, que le problème du taux d'émission des poussières avait été résolu ; qu'ainsi les réserves auxquelles il n'a pas été remédié ne concernaient plus qu'une vibration anormale de l'aéro-condenseur et une évacuation insuffisante des boues par l'équipement de la fosse de décantation sous les convoyeurs ; qu'alors que la BANQUE GÉNÉRALE DU PHÉNIX conteste que le coût de réparation de ces réserves, eu égard à leur caractère mineur, soit égal au montant de la caution qu'elle a souscrite, le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS n'a apporté aucun justificatif sur le montant des réparations desdites réserves ; que s'il fait valoir que d'autres désordres imputables à la société B.S.F. sont apparus sur le réseau de distribution de vapeur dont le coût de réparation a été évalué par l'expert à près de 3 000 000 francs, il résulte des termes mêmes du rapport d'expertise prescrite par ordonnance du 2 septembre 1988 du Tribunal de Grande Instance de Dijon susmentionné, dont se prévaut ledit syndicat, que ces désordres sont sans lien avec les réserves émises lors de la réception des travaux et n'ont été constatés qu'en 1988, soit après l'expiration du délai de garantie de parfait achèvement ; qu'ils ne peuvent, dès lors, être couverts par ladite garantie ; que, dans ces conditions, faute pour le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS de justifier du coût des travaux de réfection des seules réserves auxquelles il n'a pas été remédié, les conclusions qu'il a présentées tendant à la condamnation de la BANQUE GÉNÉRALE DU PHÉNIX, venue aux droits de la société CREDIT CHIMIQUE, à lui payer une somme égale au montant total de la caution ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS à verser à la BANQUE GÉNÉRALE DU PHÉNIX une quelconque somme au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, reprenant celles de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; que ces dispositions font obstacle à ce que la BANQUE GÉNÉRALE DU PHÉNIX qui n'est pas la partie perdante soit condamnée à verser au SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS une quelconque somme au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Dijon en date du 10 mars 1998 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par le SYNDICAT DE PAYS DU CHÂTILLONNAIS devant le Tribunal administratif de Dijon et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions présentées par la BANQUE GÉNÉRALE DU PHÉNIX au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N°98LY00899