Vu la requête, enregistrée le 10 novembre 2000, présentée pour Mme Marie-Christine X, domiciliée ..., par Me Jacky Durand, avocat au barreau de Lille ;
Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 993835, en date du 5 septembre 2000, par laquelle le président du Tribunal administratif de Grenoble a constaté qu'il n'y a pas lieu à statuer sur sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, auxquelles Mme X a été assujettie au titre des années 1992, 1993, 1994 et 1995, ainsi que des pénalités dont elle ont été assorties ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2005 :
- le rapport de Mme Delétang, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Gimenez, commissaire du gouvernement ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par une décision, en date du 7 avril 2003, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de la Savoie a prononcé le dégrèvement, d'un montant total de 16,16 euros, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu, à laquelle Mme X a été assujettie au titre de l'année 1992, correspondant au redressement afférent à l'amortissement ; que la requête est, dans cette mesure, devenue sans objet ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que par l'ordonnance attaquée, le Tribunal administratif de Grenoble a prononcé un non-lieu à statuer total sur les conclusions relatives aux années 1992, 1993, 1994 et 1995 dont il était saisi, alors que le dégrèvement ne concernait pas l'année 1992 ; que, par suite, ladite ordonnance doit être annulée, dans cette mesure, en tant qu'elle n'a pas statué sur la demande de décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu, à laquelle Mme X reste assujettie au titre de l'année 1992 ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur cette demande ;
Sur les conclusions restant en litige présentées devant le Tribunal administratif :
En ce qui concerne la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 quater du code général des impôts chaque membre des copropriétés de navires régies par le chapitre IV de la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 modifiée portant statut des navires et autres bâtiments de mer est personnellement soumis à l'impôt sur le revenu à raison de la part correspondant à ses droits dans les résultats déclarés par la copropriété ; qu'aux termes de l'article 35 du même code, présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : ... 7° membres des copropriétés de navires mentionnées à l'article 8 quater ; qu'aux termes de l'article 61 A du même code, les résultats à déclarer par les copropriétés mentionnées aux articles 8 quater et 8 quinquies sont déterminés dans les conditions prévues pour les exploitants individuels soumis au régime du bénéfice réel, avant déduction respectivement de l'amortissement du navire... Les copropriétés sont tenues aux obligations qui incombent à ces exploitants ; qu'enfin aux termes de l'article 39 E du même code chaque membre des copropriétés de navire mentionnées à l'article 8 quater amortit le prix de revient de sa part de propriété suivant les modalités prévues à l'égard des navires ; pour la détermination des plus values, les amortissements pratiqués viennent en déduction du prix de revient... ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les bénéfices industriels et commerciaux imposables d'un copropriétaire de navire doivent être déterminés en deux étapes, d'abord au niveau de la copropriété, laquelle doit tenir la comptabilité des opérations d'exploitations du navire, dont elle n'a que la jouissance et qui ne figure donc pas à l'actif de son bilan, ensuite au niveau du copropriétaire, lequel doit comptabiliser, outre sa quote-part des résultats de l'exploitation de la copropriété, ses propres opérations patrimoniales d'acquisition des quirats, les charges d'amortissement et le cas échéant d'emprunt supportées à ce titre, ainsi que le produit de leur cession éventuelle ; que, pour être réduites, les obligations comptables incombant ainsi personnellement au copropriétaire autorisent le service à procéder, comme il l'a fait en l'espèce, à la vérification sur place de leur respect, sans être pour autant tenu de vérifier la comptabilité de la copropriété ; que la requérante, qui a rencontré le vérificateur à deux reprises, n'a pas été privée de la garantie du débat oral et contradictoire attachée à cette procédure ;
Considérant que si Mme X soutient que le vérificateur aurait, sans son accord, irrégulièrement emporté hors du siège de son entreprise des documents comptables pendant la période du 16 novembre au 5 décembre 1995, elle n'apporte pas la preuve d'une telle irrégularité ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article 238 bis HA du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : I. Les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés ou assujetties à un régime réel d'imposition peuvent déduire de leurs résultats imposables une somme égale au montant total des investissements productifs réalisés dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion à l'occasion de la création ou l'extension d'exploitations appartenant aux secteurs d'activité de l'industrie, de la pêche, de l'hôtellerie, du tourisme, des énergies nouvelles, de l'agriculture, du bâtiment et des travaux publics, des transports et de l'artisanat. La déduction est opérée sur le résultat de l'exercice au cours duquel l'investissement est réalisé, le déficit éventuel de l'exercice étant reporté dans les conditions prévues au I des articles 156 et 209 (...) III bis. Pour ouvrir droit à déduction, les investissements mentionnés au I réalisés à compter du 1er janvier 1992 dans les secteurs de l'hôtellerie, du tourisme, des transports et de la production et de la diffusion audiovisuelle et cinématographique doivent avoir reçu l'agrément préalable du ministre de l'économie, des finances et du budget ; que, toutefois, en vertu du dernier alinéa du même article, cet agrément n'est pas exigé lorsque les biens mobiliers ont été commandés et ont fait l'objet de versements d'acomptes au moins égaux à 10 % de leur prix, avant le 1er décembre 1991 ;
Considérant que, par notification du 13 décembre 1995, l'administration fiscale a, au titre des bénéfices industriels et commerciaux de l'année 1992, remis en cause la déduction effectuée par Mme X, du montant représentant le prix d'acquisition de copropriété du navire Le Lalysos, dont le port d'attache est à Pointe-à-Pitre ; qu'il est constant que l'agrément ministériel préalable prévu par les dispositions précitées n'a pas été sollicité ; que pour soutenir que son investissement dans le navire Le Lalysos était, en application des dispositions précitées, dispensé d'agrément, Mme X fait valoir que ledit navire a été commandé le 12 septembre 1991 par la société de droit américain Jet Sea USA aux chantiers canadiens Beach Boat Builders et qu'un acompte, supérieur à 10 % de son prix, a alors été versé par cette société ; que toutefois il résulte de l'instruction que la société Jet Sea USA, qui a réalisé une plus value de 10 900 000 francs en rétrocédant le navire à la copropriété, devait être regardée comme ayant agi dans son intérêt exclusif et non en tant que mandataire de la copropriété du Lalysos, nonobstant les stipulations de l'article 15 de la convention de copropriété du navire, intervenue le 31 décembre 1992, soit après l'expiration de la période de dispense d'agrément, selon lesquelles la copropriété a repris les engagements de la commande par la société Jet Sea SA pour le compte de la copropriété Lalysos à la date du 12 septembre 1991 ; que Mme X ne peut à cet égard, en tout état de cause, invoquer les dispositions de l'article 1843 du code civil, aux termes desquelles la société régulièrement immatriculée peut reprendre les engagements souscrits, qui sont alors réputés avoir été dès l'origine contractés par celle-ci, dès lors que la portée rétroactive attachée à une telle reprise d'engagement ne peut s'appliquer à l'acquisition du navire dont les copropriétaires conservent la propriété et qui n'est qu'apporté en jouissance à la copropriété ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à demander la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu restant en litige au titre de l'année 1992 ;
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête à concurrence de 16,16 euros (seize euros seize centimes), correspondant au redressement relatif à l'amortissement.
Article 2 : L'ordonnance, en date du 5 septembre 2000, du président du Tribunal administratif de Grenoble est annulée en tant qu'elle a omis de statuer sur les conclusions de la demande de Mme X relatives à l'année 1992 restant en litige.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et de la demande de première instance de Mme X est rejeté.
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N° 00LY02382
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