Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 13 juin 2006, présentée pour M. Dursun X, domicilié ..., par Me Kouma, avocat au barreau de Dijon ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0601270 en date du 24 mai 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 mai 2006, par lequel le préfet de la Côte d'Or a ordonné sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler l'arrêté susmentionné pour excès de pouvoir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mars 2007 :
- le rapport de Mme Lorant, présidente ;
- et les conclusions de M. d'Hervé, commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que, contrairement à ce que soutient le préfet de la Côte d'Or, la requête de M. X contient des moyens de nature à mettre le juge à même d'apprécier le bien-fondé du jugement attaqué ;
Sur le bien-fondé du jugement :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité turque, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 18 mars 2006, de la décision du préfet de la Côte d'Or du 9 mars 2006 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 16 mai 2006, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si le requérant n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où ses deux enfants, nés d'une précédente union, en 1999 et 2000, vivent avec leur mère, il vit depuis la fin de l'année 2004 avec une ressortissante française qu'il a épousée le 17 septembre 2005, et qu'il lui apporte son soutien tant matériel que moral ; qu'ainsi, compte tenu des circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté contesté a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi, il a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que M. X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, dès lors, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que l'avocat de M. X, Me Kouma, renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat, au profit de Me Kouma, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement en date du 24 mai 2006 et l'arrêté de reconduite à la frontière du 16 mai 2006 sont annulés.
Article 2 : l'Etat versera à Me Kouma une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me Kouma renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
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N° 06LY01247