Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 5 novembre 2008, présentée pour M. Rahman X, ... ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0806773 en date du 28 octobre 2008, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 21 octobre 2008, par lequel le préfet de l'Isère a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, des décisions distinctes du même jour fixant le pays dont il a la nationalité comme destination de la reconduite et décidant son placement en rétention administrative ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans le délai de 48 heures à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er avril 2009 :
- le rapport de Mme Serre, présidente de chambre ;
- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 776-11 du code de justice administrative : Dans le cas où l'étranger, qui ne parle pas suffisamment la langue française, le demande, le président nomme un interprète qui doit prêter serment d'apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience. Cette demande peut être formulée dès le dépôt de la requête introductive d'instance. ;
Considérant que M. X a demandé l'assistance d'un interprète en langue bengali pour l'audience du Tribunal administratif de Lyon du 24 octobre 2008 ; qu'en l'absence d'un interprète en langue bengali pour cette audience, l'affaire a été renvoyée au 28 octobre 2008 ; qu'il ressort des mentions du jugement attaqué, lesquelles font foi jusqu'à preuve du contraire, que lors de cette audience, M. X n'a pu être assisté d'un interprète, en dépit des diligences du Tribunal ; que, dès lors, alors même que l'intéressé, dont il est constant qu'il avait besoin d'un interprète, et qu'il en avait formulé la demande, a pu bénéficier de l'assistance d'un avocat, M. X est fondé à soutenir que le jugement attaqué a été rendu sur une procédure irrégulière et à demander en conséquence son annulation ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. X dès lors qu'il doit être regardé comme demandant l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière dont il a fait l'objet, ainsi que des décisions fixant le pays de destination et ordonnant sa mise en rétention ;
Sur la légalité externe des décisions attaquées :
Considérant, en premier lieu, que, par décret du président de la République du 9 mars 2006, publié au journal officiel du 11 mars 2006, M. Michel Y a été nommé préfet de l'Isère ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que ce dernier n'aurait pas été compétent pour signer les décisions attaquées manque en fait et doit être écarté ;
Considérant, en second lieu, que l'arrêté par lequel le préfet de l'Isère a décidé la reconduite à la frontière de M. X relève que l'intéressé ne peut justifier être entré régulièrement en France, qu'il n'est pas en possession d'un titre de séjour en cours de validité et vise le 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il mentionne, au surplus, qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale dans la mesure où il est dépourvu d'attaches familiales sur le territoire national ; qu'il comporte dès lors l'exposé des faits et des considérations de droit sur lesquels il se fonde et est ainsi suffisamment motivé ; que la décision fixant le pays de destination et la décision ordonnant le placement de M. X en rétention administrative visent également les textes applicables et contiennent les considérations de fait qui en constituent le fondement ; qu'elles sont ainsi suffisamment motivées ;
Sur la légalité interne des décisions attaquées :
En ce qui concerne l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ;(...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité bangladaise, ne peut justifier être entré régulièrement en France et n'était pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité à la date de la mesure d'éloignement, le 21 octobre 2008 ; qu'ainsi, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant en premier lieu que, si M. X soutient travailler régulièrement en France avec un contrat de travail et les documents exigés par la réglementation en vigueur, il résulte des pièces du dossier et notamment des procès verbaux d'audition, qu'en tout état de cause, ces affirmations sont inexactes ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. X, célibataire sans enfant, soit dépourvu d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour du requérant en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, enfin que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison des risques encourus par M. X, en cas de retour au Bangladesh est, en tout état de cause, inopérant à l'encontre de l'arrêté de reconduite à la frontière qui ne désigne pas le pays de destination ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du 21 octobre 2008, par lequel le préfet de l'Isère a ordonné sa reconduite à la frontière serait illégal et, par suite, à en demander l'annulation ;
En ce qui concerne la décision désignant le pays de destination :
Considérant que, pour les motifs énoncés dans le cadre de l'examen de la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
Considérant par ailleurs, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : L'étranger qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : / 1º A destination du pays dont il a la nationalité / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;
Considérant que si M. X soutient avoir dû quitter le Bangladesh en raison des persécutions dont souffre l'ensemble de sa famille, il n'établit pas la réalité des faits allégués ni les menaces auxquelles il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi, la décision fixant le pays de renvoi ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant enfin qu'il ne démontre pas être légalement admissible en Italie, dès lors que le visa l'autorisant à travailler dans ce pays est expiré et que les autorités italiennes ont refusé sa réadmission le 22 octobre 2008 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions à fins d'annulation de la décision désignant le pays de destination doivent être rejetées ;
En ce qui concerne la décision de maintien en rétention administrative :
Considérant que les conclusions à fin d'annulation de la décision de maintien en rétention administrative ne sont assorties d'aucun moyen de légalité interne distinct de ceux développés à l'encontre de l'arrêté de reconduite à la frontière et de la décision fixant le pays de destination ; qu'elles ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n°0806773 du 28 octobre 2008 du Tribunal administratif de Lyon est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la demande de M. X devant le Tribunal administratif de Lyon et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetées.
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N° 08LY02403