Vu la requête, enregistrée le 1er juillet 2008 au greffe de la Cour, présentée pour M. A... B..., demeurant ...;
M. B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800304, en date du 12 mars 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire du 10 janvier 2008 l'obligeant à quitter le territoire français, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Loire de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de 48 heures et sous astreinte de 500 euros par jour de retard, et enfin, à ce qu'une somme de 1 200 euros soit mise à la charge de l'Etat, à lui verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de prononcer l'annulation de cet arrêté du 10 janvier 2008 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de 48 heures à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- la décision est entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'ayant pu légalement lui faire obligation de quitter le territoire français sans prendre, dans le même arrêté, une décision de refus de titre de séjour ;
- la décision méconnaît également les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; il était en effet séparé de son épouse et ne pouvait pas, contrairement à ce que dit le préfet dans sa décision, faire l'objet d'une procédure de regroupement familial ; il vit avec sa fille issue d'une précédente union, venue en France en février 2007 du fait de la situation conflictuelle sévissant dans la province de Bandundu ; son père est décédé le 24 mai 2006 du fait des violences et persécutions qu'il a subies dans cette région ; il est depuis sans nouvelles de son fils et du reste de la famille ;
- cette décision est en outre, pour les mêmes raisons, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
- la décision est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a méconnu sa compétence s'agissant de son pouvoir de régularisation à titre exceptionnel ;
- la décision est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard aux risques qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, section administrative d'appel, en date du 24 juillet 2008, lui accordant l'aide juridictionnelle totale ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 décembre 2009, présenté pour le préfet de la Loire, tendant au rejet de la requête de M. B...; il soutient que cette requête est irrecevable pour tardiveté ; qu'en application des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en exécution du jugement du Tribunal administratif de Lyon du 13 décembre 2007, il a pu légalement prendre de nouvelles décisions faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français et fixant le pays de destination, sans avoir à reprendre une décision de refus de délivrance d'un titre de séjour ; qu'il n'établit pas que les décisions attaquées portent une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaissent ainsi les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que ces décisions ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle du requérant ; que les conclusions de M. B... à fin d'injonction et à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence du rejet de ses conclusions tendant à l'annulation des décisions attaquées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2010 :
- le rapport de M. Montsec, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Raisson, rapporteur public ;
Considérant que M. A...B..., ressortissant congolais, né le 24 septembre 1981, est entré en France le 11 octobre 2003 ; que, par décision du 28 mai 2004, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a refusé de lui reconnaître le statut de réfugié ; que cette décision a été confirmée par la Commission des recours des réfugiés le 9 décembre 2004 ; que la demande de réexamen présentée par l'intéressé a encore été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par une décision du 28 janvier 2005, confirmée par la Commission des recours des réfugiés le 19 mai 2006 ; que, suite à ces décisions, le préfet de la Loire a, par un premier arrêté du 24 août 2007, refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a précisé que le pays dans lequel il serait reconduit à l'issue de ce délai serait celui dont il a la nationalité ou tout pays dans lequel il établirait être admissible ; que, par jugement en date du 13 décembre 2007, le Tribunal administratif de Lyon a annulé seulement les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi ; que, par un nouvel arrêté en date du 10 janvier 2008, le préfet de la Loire a pris, à l'encontre de M.B..., de nouvelles décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ; que M. B...fait appel du jugement en date du 12 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 10 janvier 2008 ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le Préfet de la Loire à la requête de M. B... :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'un refus de séjour (...) assorti d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination peut, dans le délai d'un mois suivant la notification, demander l'annulation de ces décisions au Tribunal administratif (...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué doit être regardé comme ayant été notifié à M. B...le 14 mars 2008, date à laquelle il a été avisé de ce que le pli correspondant était à sa disposition au bureau de Poste ; que l'intéressé a déposé le 9 avril 2008 une demande d'aide juridictionnelle qui a eu pour effet d'interrompre le délai d'appel d'un mois prévu par les dispositions susmentionnées ; que la requête d'appel a été enregistrée au greffe de la Cour le 1er juillet 2008, avant même que, par une décision du 24 juillet 2008, le bureau d'aide juridictionnelle, section administrative d'appel, statue sur sa demande en lui accordant l'aide juridictionnelle totale ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir opposée par le préfet de la Loire et tirée de la tardiveté de la requête doit être écartée ;
Sur les conclusions de M. B...à fin d'annulation des décisions du préfet de la Loire en date du 10 janvier 2008 :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 512-1 du même code : " (...) Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires, que, d'une part et de façon générale, le préfet ne peut prendre une décision obligeant un étranger à quitter le territoire français sans lui avoir, dans le même arrêté, refusé, de manière explicite, un titre de séjour et que, d'autre part, lorsque, comme en l'espèce, la décision portant obligation de quitter le territoire et la décision fixant le pays de renvoi ont été annulées par un jugement qui a rejeté par ailleurs les conclusions du requérant dirigées contre la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, une autorisation provisoire de séjour doit être délivrée à l'intéressé jusqu'à ce que l'autorité administrative ait, à nouveau, statué sur son droit au séjour et que, donc, même dans ce cas, le préfet ne peut reprendre une décision portant obligation de quitter le territoire français qu'après avoir opposé à l'intéressé, de manière explicite et dans le même acte, une nouvelle décision de refus à sa demande de titre de séjour ;
Considérant qu'ainsi, alors même que l'arrêté du 10 janvier 2008 pris par le préfet de la Loire, ordonnant à M. B...de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et précisant que le pays dans lequel il serait reconduit à l'issue de ce délai serait celui dont il a la nationalité ou tout pays dans lequel il établirait être admissible, visait la précédente décision du 24 août 2007 par laquelle il avait explicitement opposé un refus à la demande de titre de séjour présentée par l'intéressé, ledit préfet n'a pu, sans méconnaître les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, obliger celui-ci à quitter le territoire français sans se prononcer à nouveau et explicitement, dans le même arrêté, sur cette demande de titre de séjour, en tenant compte le cas échéant des circonstances de fait et de droit nouvelles ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 12 mars 2008, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du préfet de la Loire en date du 10 janvier 2008 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;
Considérant que l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté en litige, en date du 10 janvier 2008, portant obligation de quitter le territoire français, n'implique pas la délivrance à M. B...du titre de séjour qu'il demande, portant la mention " vie privée et familiale ", mais seulement d'une autorisation provisoire de séjour en attendant que le préfet se prononce à nouveau sur son droit à un titre de séjour ; que les conclusions à fin d'injonction, telles que présentées par M.B..., ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros, à verser à Me C...D..., avocate de M.B..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37, alinéa 2, de la loi n° 91-64 du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de Me C...D...à percevoir l'aide juridictionnelle ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon n° 0800304, en date du 12 mars 2008, est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet de la Loire en date du 10 janvier 2008 est annulé.
Article 3 : L'Etat versera à Me C...D...une somme de 1 200 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37, alinéa 2, de la loi n° 91-64 du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de Me C... D... à percevoir l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au préfet de la Loire et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2010, à laquelle siégeaient :
M. Bernault, président de chambre,
M. Montsec, président-assesseur,
M. Givord, président-assesseur,
Mme Jourdan, premier conseiller.
Mme Besson-Ledey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 janvier 2010.
Le rapporteur,
P. MONTSEC Le président,
F. BERNAULT
Le greffier,
F. PROUTEAU
La République mande et ordonne au ministre l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition,
Le greffier,
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N° 08LY01503
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