Vu la requête, enregistrée le 24 novembre 2008, présentée pour Mme Marie-Annick A, domiciliée ... ;
Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0508201 en date du 19 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de Lyon à lui payer une somme de 35 000 euros, en réparation des préjudices financiers et moraux résultant des refus illégaux de la réintégrer dans ses services ;
2°) d'enjoindre à la ville de Lyon de saisir sans délai le Centre de gestion du Rhône de sa situation ;
3°) de condamner la ville de Lyon à lui payer une somme de 30 000 euros en réparation de ses différents chefs de préjudice financier, outre intérêts au taux légal à compter de sa demande indemnitaire préalable ;
3°) de mettre à la charge de la ville de Lyon la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- dès lors que la ville de Lyon n'établit pas qu'elle n'aurait disposé dans ses effectifs d'aucun emploi vacant correspondant au grade de moniteur éducateur, en refusant de procéder à sa réintégration dans un délai raisonnable, la ville de Lyon a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
- alors que le Tribunal a justement considéré que la ville de Lyon était dans l'obligation de saisir le Centre national de la fonction publique territoriale ou le centre de gestion locale afin qu'il lui propose tout emploi vacant correspondant à son grade, il a toutefois inexactement apprécié les faits s'agissant de la prétendue absence d'emploi vacant correspondant à son grade : ainsi, en refusant de saisir le centre de gestion du cas de Mme A, la ville de Lyon a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
- le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne les éléments qui ont permis d'écarter les chefs de préjudice invoqués ;
- elle justifie d'une perte de chance sérieuse de retrouver un emploi du fait de l'absence de prise en charge de sa situation par le Centre de gestion du Rhône ; l'absence de réintégration l'a privée de deux années de services effectifs pour prétendre à la jouissance d'une pension de retraite ; enfin, le préjudice moral qu'elle a subi est certain dans la mesure où la ville de Lyon l'a laissée dans l'ignorance de ses droits notamment concernant la saisine du centre de gestion ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2009, présenté pour la ville de Lyon qui conclut au rejet de la requête ;
Elle soutient que :
- la requête est tardive ;
- concernant la période du 27 janvier 1992 au 4 mai 2005, l'intéressée n'a pas formulé de demande de réintégration pour travailler dans des emplois correspondant à son grade auquel elle a expressément renoncé ; contrairement à ce qu'elle prétendait en première instance, aucune visite médicale n'est requise préalablement à une réintégration effective : ainsi, sur cette période aucune faute n'a été commise par la ville de Lyon ;
- concernant la période à compter du 4 mai 2005, dès lors qu'elle n'était pas tenue de réintégrer immédiatement l'intéressée, mais simplement de le faire dans un délai raisonnable, et que le délai de six mois séparant le refus implicite de la réintégrer et le recours exercé contre ce refus ne peut être regardé comme excessif, aucune faute n'a été commise à ce titre ; la preuve de l'absence de poste vacant qui a été opposé en première instance ne lui incombe pas ; l'intéressée doit établir elle-même qu'à la date de sa demande de réintégration, des postes correspondant à son grade étaient vacants ; à titre subsidiaire, il ressort de l'attestation produite par le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Rhône que pour la période du 4 mars 2005 au 28 novembre 2005, la ville de Lyon n'a déclaré aucune vacance d'emploi correspondant au grade de la requérante ;
- la réintégration étant incertaine, le préjudice était lui-même aléatoire et ne pouvait être établi ;
- la nouvelle évaluation du préjudice effectuée en appel et correspondant à l'absence de traitement à compter du 5 mai 2005 est disproportionnée ;
- la demande d'injonction présentée pour la première fois en appel n'est pas recevable ;
Vu le mémoire, enregistré le 30 décembre 2009, présenté pour Mme A qui demande en outre à la Cour de mettre à la charge de la ville de Lyon la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Elle soutient en outre que :
- la demande d'aide juridictionnelle a été déposée, le 3 avril 2008, soit dans le délai de recours : la requête est donc recevable ;
- contrairement à ce que prétend la ville de Lyon, elle avait présenté une demande de réintégration bien avant la demande de son conseil du 4 mars 2005 ; au plus tôt, dès 1997, la ville de Lyon doit être regardée comme ayant refusé de procéder à sa réintégration sur son cadre d'emploi d'origine ;
- concernant la période du 27 janvier 1992 au 4 mai 2005, à compter du 22 mars 2003, voire au plus tard à compter du 26 janvier 2004, elle doit être considérée comme ayant clairement émis le souhait de réintégrer son cadre d'emploi d'origine : en l'absence de réponse de la ville à la date du 26 mars 2004, elle était en possession d'une décision implicite de refus ;
- postérieurement au 4 mai 2005, le délai d'attente d'un an et demi qui a été opposé à sa demande de réintégration est manifestement déraisonnable compte tenu de l'ancienneté et du nombre conséquent des demandes qu'elle a formulées ;
- s'agissant de l'évaluation de son préjudice, il doit être tenu compte de ce que la ville de Lyon ne lui a jamais versé la moindre indemnité de chômage, ni même ne l'a informé de ce droit ;
- elle renonce à ses conclusions à fin d'injonction ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 mars 2010, présenté pour la ville de Lyon qui conclut aux mêmes fins, par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 22 avril 2010 présenté pour Mme A qui conclut aux mêmes fins ;
Vu les ordonnances en dates des 30 novembre 2009, 1er et 31 mars 2010, par lesquelles la date de la clôture de l'instruction a été fixée au 30 décembre 2009 et reportée au 23 avril 2010 ;
Vu la décision, en date du 25 septembre 2008, admettant Mme A au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadre, de disponibilité, de congé parental et de congé de présence parentale des fonctionnaires territoriaux ;
Vu le décret n° 92-847 du 28 août 1992 portant statut particulier du cadre d'emplois des moniteurs-éducateurs territoriaux modifié ;
Vu le décret n° 92-850 du 28 août 1992 portant statut particulier du cadre d'emplois des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mai 2010 :
- le rapport de Mme Pelletier, premier conseiller ;
- les observations de Me Walgenwitz représentant Mme A et de Me Verne pour la ville de Lyon ;
- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée aux parties présentes ;
Considérant que Mme A relève appel du jugement du 19 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de Lyon à l'indemniser des préjudices subis du fait du refus de la réintégrer dans les services de la ville ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'en estimant qu'eu égard aux motifs d'illégalité du refus opposé par le maire de la ville de Lyon de réintégrer Mme A sur un emploi correspondant à son grade, et dans la mesure où il ne résulte pas de l'instruction que des emplois correspondant à son grade auraient été vacants et susceptibles de lui être proposés par son administration ou son centre, Mme A qui, pendant la période où sa situation aurait dû être gérée par son centre de gestion, aurait été maintenue en disponibilité sans rémunération, n'a subi ainsi aucun préjudice financier, le Tribunal administratif de Lyon a suffisamment motivé son jugement sur ce point ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que ce dernier est irrégulier à défaut d'être suffisamment motivé ;
Sur la responsabilité de la ville de Lyon :
Sur la période du 27 janvier 1992 au 4 mai 2005 :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, le fonctionnaire qui, à l'issue de sa période de disponibilité, refuse successivement trois postes qui lui sont proposés dans le ressort territorial de son cadre d'emploi, ou corps en vue de sa réintégration, peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire ou, s'il accepte les postes proposés, être réintégré à l'expiration de sa période de disponibilité, dans les conditions prévues aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article 67 de la présente loi ; que, dans les autres cas, si la durée de la disponibilité n'a pas excédé trois années, une des trois premières vacances dans la collectivité ou l'établissement d'origine doit être proposée au fonctionnaire ; qu'en vertu de l'article 67 de la même loi, lorsqu'aucun emploi n'est vacant, après avoir été maintenu en surnombre pendant un an dans sa collectivité d'origine dans les conditions prévues à l'article 97 à compter du 28 décembre 1994, le fonctionnaire de catégorie A est pris en charge par le Centre national de la fonction publique territoriale, et le fonctionnaire de catégories B ou C par le centre de gestion dans le ressort duquel se trouve la collectivité ou l'établissement qui l'employait antérieurement à son détachement dans les conditions prévues aux articles 97 et 97 bis ; qu'en vertu de cet article 97, le fonctionnaire pris en charge par le Centre national de la fonction publique territoriale ou par le centre de gestion dans le ressort duquel se trouve la collectivité où l'établissement est placé sous l'autorité du centre compétent ; que, pendant la période où il est maintenu en surnombre, tout emploi créé ou vacant correspondant à son grade dans la collectivité ou l'établissement lui est proposé en priorité, le centre peut lui confier des missions ou lui proposer tout emploi vacant correspondant à son grade ; qu'aux termes de l'article 26 du décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 susvisé : Sauf dans le cas où la période de mise en disponibilité n'excède pas trois mois, le fonctionnaire mis en disponibilité sur sa demande doit solliciter sa réintégration deux mois au moins [trois mois à compter du 24 juillet 2003] avant l'expiration de la période de disponibilité en cours (...) ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que seul le fonctionnaire qui sollicite sa réintégration dans le ressort territorial de son cadre d'emploi, emploi ou corps, a vocation à bénéficier des procédures de réintégration qu'elles mettent en place ;
Considérant que Mme A fait valoir que, bien avant la demande de réintégration dans son cadre d'emploi formulée le 3 mars 2005, par l'intermédiaire de son conseil, elle avait déjà présenté plusieurs demandes en ce sens, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un délégué syndical ; que, si elle produit un courrier en date du 24 juin 1997, établissant qu'elle a présenté, à cette date, une demande de réintégration au sein des services de la ville de Lyon, indiquant son souhait d'obtenir un poste d'agent territorial spécialisé des écoles maternelles, ou toutes autres propositions afin de pouvoir élever correctement son enfant, toutefois, il résulte de l'instruction que, faisant suite à cette demande, ainsi qu'à un entretien avec l'intéressée, par courrier en date du 25 aout 2007, la ville de Lyon a informé Mme A qu'elle avait pris bonne note de son souhait de ne pas réintégrer un emploi de moniteur-éducateur en internat , lui confirmait son maintien en attente de réintégration jusqu'à ce qu'un poste d'agent d'entretien puisse lui être proposé, et lui indiquait qu'elle lui transmettrait la liste des postes proposés au cours des prochains transferts scolaires ; que dans un courrier du 21 décembre 2001, Mme A a exprimé sa volonté de renoncer provisoirement au grade de moniteur-éducateur dans l'attente d'une remise à niveau, et a confirmé sa volonté d'être réintégrée dans un service de restauration scolaire ; qu'il ne ressort ni du courrier en date du 22 mars 2003, par lequel un délégué syndical attirait l'attention du maire de la ville de Lyon, sur les demandes de réintégration formulées par Mme A, ni du courrier en date du 26 janvier 2004, par lequel l'intéressée a de nouveau expressément sollicité sa réintégration au sein des services de la ville de Lyon, qu'elle ait clairement exprimé sa volonté d'être réintégrée sur un emploi correspondant à son cadre d'origine et renoncé à postuler sur un poste d'agent de cantine ou d'agent territorial spécialisé des écoles maternelles ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'avant le rejet, le 4 mai 2005, de la demande présentée par l'intermédiaire de son conseil, Mme A ne pouvait être regardée comme ayant sollicité sa réintégration au sens des dispositions légales et réglementaires précitées, qui encadrent la réintégration des agents publics uniquement dans un emploi correspondant à leur grade ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sur la période antérieure au 4 mai 2005, en ne réintégrant pas Mme A sur les fonctions qu'elle sollicitait, la ville de Lyon n'a commis aucune illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité ; que, par suite, les conclusions indemnitaires présentées par la requérante au titre de cette période ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur la période postérieure à la décision du 4 mai 2005 :
Considérant qu'il résulte des dispositions des articles 72 et 73 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée et des articles 24 et 26 du décret du 13 janvier 1986 pris pour l'application de l'article 73 de la même loi que le fonctionnaire territorial mis en disponibilité sur sa demande a le droit, sous réserve de la vacance d'un emploi correspondant à son grade, d'obtenir sa réintégration à l'issue de la période de disponibilité ; que si les textes précités n'imposent pas à l'autorité dont relève le fonctionnaire de délai pour procéder à cette réintégration, celle-ci doit intervenir, en fonction des vacances d'emplois qui se produisent, dans un délai raisonnable ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'attestation produite par le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Rhône, que pour la période du 4 mars 2005 au 25 novembre 2005, la ville de Lyon n'a déclaré aucune vacance d'emploi correspondant au grade de la requérante ; que, dans ces conditions, la requérante qui n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause cette absence d'emploi vacant correspondant à son grade, n'est pas fondée à soutenir que la ville de Lyon n'a pas procédé à sa réintégration dans un délai raisonnable ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions susrappelées des articles 67 et 72 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, que sont applicables à la réintégration des fonctionnaires territoriaux en disponibilité les règles qui, dans cet article, fixent les conditions selon lesquelles des emplois sont proposés aux agents par le centre national ou par un centre local de gestion de la fonction publique territoriale ; qu'il suit de là que dans le cas où la collectivité dont relève l'agent qui a demandé sa réintégration à l'issue d'une période de disponibilité ne peut lui proposer un emploi correspondant à son grade, elle doit saisir le centre national ou le centre local de gestion de la fonction publique territoriale afin qu'il lui propose tout emploi vacant correspondant à son grade ;
Considérant qu'en application des dispositions susrappelées, le maire de Lyon, qui avait décidé du maintien de Mme A en position de disponibilité d'office, devait saisir le centre de gestion de la fonction publique territoriale ; que toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que des postes que l'intéressée aurait eu vocation à occuper auraient été déclarés vacants auprès du centre de gestion ; que, dès lors, la faute ainsi commise par le maire, qui n'a pas eu pour effet de la priver de la possibilité d'occuper un emploi, n'est pas de nature à engager à son égard la responsabilité de la commune ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées en défense, que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Marie-Annick A et à la ville de Lyon.
Délibéré après l'audience du 18 mai 2010, à laquelle siégeaient :
M. Fontanelle, président de chambre,
M. Givord, président-assesseur,
Mme Pelletier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 juin 2010.
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N° 08LY02582
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