Vu la requête, enregistrée le 24 décembre 2010 à la Cour, présentée pour M. Artur A domicilié ..., par Me Couderc, avocat ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1003472, en date du 14 septembre 2010, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 11 février 2010, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention vie privée et familiale dans le délai d'un mois à compter l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, en cas d'annulation de la décision d'éloignement, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour permettant de travailler durant le réexamen de sa demande, dans le délai d'un mois à compte de la décision à intervenir et, à titre infiniment subsidiaire, en cas d'annulation de la décision fixant le pays de destination, de lui délivrer une assignation à résidence avec droit au travail, dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 300 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Il soutient que :
- il est dans l'impossibilité de reconstruire sa vie privée et familiale en Azerbaïdjan, pays qu'il a quitté à l'âge de 7 ans et où il ne dispose d'aucune attaches familiale et sociale ;
- le préfet a commis une erreur de fait en affirmant qu'il y avait exercé la profession de peintre en bâtiment, ce qui révèle par ailleurs l'absence d'examen réel et sérieux de sa situation ;
- il est dans l'impossibilité de reconstruire sa vie privée et familiale en Arménie, pays dont il n'a pas la nationalité, qu'il a quitté depuis 13 ans et où il a subi de graves violences en raison de ses origines azéries ;
- il est dans l'impossibilité de reconstruire sa vie privée et familiale en Russie où il n'a jamais été admis au séjour et où il a été victime de violences racistes ;
- il est atteint d'un syndrome anxio-dépressif, la quasi-totalité de ses attaches familiales se trouvent en France et il dispose d'une promesse d'embauche ;
- par conséquent, la décision portant refus de titre de séjour méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11, les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est, en outre, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle ;
- la décision portant refus de séjour étant illégale, la décision portant obligation de quitter le territoire est irrégulière ;
- cette dernière décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité des deux décisions précédemment mentionnées et sur lesquelles elle se fonde ;
- le préfet a commis une erreur de droit en fixant l'Azerbaïdjan comme destination à la reconduite sans être certain que l'intéressé est un ressortissant de ce pays ;
- il a, par ailleurs, commis une erreur de fait en indiquant qu'il était de nationalité azerbaïdjanaise ;
- il encourrait des risques de traitement inhumains ou dégradant en cas de retour en Azerbaïdjan ;
- la décision fixant le pays de destination méconnait donc les stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 février 2011, présenté pour le préfet du Rhône qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- la circonstance que M. A risquerait de subir des discriminations en raison de ses origines en cas de retour en Azerbaïdjan, en Arménie ou en Russie est sans incidence sur la légalité du refus de titre de séjour ;
- en tout état de cause, il n'établit pas la réalité de ses allégations concernant les risques qu'il encourrait en cas de retour dans un de ces trois pays ;
- l'intéressé ayant lui-même déclaré avoir exercé la profession de peintre en bâtiment en Azerbaïdjan, il n'a pas commis d'erreur de fait et, par conséquent, n'a pas entaché sa décision d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;
- il a séjourné en Arménie de 7 à 17 ans et y a donc nécessairement conservé des attaches sociales et culturelles fortes ;
- l'intéressé ne peut se prévaloir de son état de santé à l'appui du moyen tiré de la violation de son droit au respect de sa vie privée et familiale alors qu'il n'a pas sollicité de titre de séjour sur ce fondement ;
- M. A ne justifie pas de l'existence de liens privés et familiaux suffisamment intenses, anciens et stables pour que la décision portant refus de titre de séjour soit regardée comme ayant méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision attaquée n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas privée de base légale dès lors que la décision portant refus de titre de séjour est régulière ;
- pour les mêmes motifs que ceux précédemment évoqués, la mesure d'éloignement ne méconnait pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'intéressé n'entre pas dans une des catégories d'étrangers visés par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire étant légale, la décision fixant le pays de destination n'est pas privée de base légale ;
- l'intéressé ayant revendiqué à plusieurs reprises sa nationalité azerbaïdjanaise, le préfet n'a commis ni erreur de fait ni erreur de droit en fixant l'Azerbaïdjan comme pays de destination ;
- il ne démontre pas le caractère actuel et certain des risques qu'il invoque ;
- le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est donc infondé ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 avril 2011 :
- le rapport de M. Vivens, président ;
- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;
Considérant que M. A qui se prévaut de la nationalité azerbaïdjanaise, est entré en France en avril 2007 ; qu'après avoir vu sa demande d'asile rejetée, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ; que cette demande a été rejetée le 11 février 2010 par décision du préfet du Rhône assortie d'une obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que M. A relève appel du jugement du 14 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande à l'encontre de ces décisions ;
Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;
Considérant, d'une part, que le moyen tiré de l'impossibilité de reconstruire une vie privée et familiale en Azerbaïdjan, en Arménie ou en Russie en raison des risques qu'il y encourrait du fait de ses origines est inopérant à l'encontre de la décision portant refus de titre de séjour qui n'a ni pour objet ni pour effet d'obliger M. A à retourner dans l'un de ces pays ;
Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est entré irrégulièrement en France le 18 avril 2007 pour y rejoindre sa mère et sa soeur ; que, toutefois, si cette dernière, mariée à un ressortissant français et mère de deux enfants français, est titulaire d'un titre de séjour, au jour de la décision attaquée, son père dispose seulement d'une autorisation provisoire de séjour valable durant l'instruction de sa demande d'asile et sa mère se trouve en situation irrégulière ; que, dans ces conditions, et alors même que l'intéressé produit une promesse d'embauche et fait valoir qu'il est atteint d'un syndrome anxio-dépressif, il ne justifie pas de liens privés et familiaux tels que le refus de titre de séjour qui lui est opposé puisse être regardé comme contraire aux dispositions et stipulations précitées ; que ledit refus n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M.A n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
Considérant, en second lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour, les moyens tirés de la méconnaissance, par cette mesure d'éloignement, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont cette décision serait entachée, ne sauraient être accueillis ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
Considérant, d'une part, qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;
Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges d'écarter les moyens invoqués par M. A, qui ne comportent aucun élément de fait ou droit nouveau par rapport à l'argumentation qu'il avait développée devant le Tribunal administratif de Lyon, et tirés de ce que la décision litigieuse fixant le pays de renvoi serait contraire aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Artur A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 14 avril 2011 à laquelle siégeaient :
M. Vivens, président de chambre,
Mme Steck-Andrez, président-assesseur,
M. Stillmunkes, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 mai 2011.
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N° 10LY02883