Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 3 février 2009, présentée pour la société CSF, venant aux droits de la SA Annonay Distribution, dont le siège est ZI route de Paris à Mondeville (14120) ;
La société CSF demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 0400949-0501211 du 2 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté les demandes de la SA Annonay Distribution tendant à la restitution, assortie des intérêts moratoires, de la taxe sur les achats de viande qu'elle a acquittée au titre, respectivement, de la période du 1er janvier 2002 au 30 juin 2003 et du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2001 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ou, à titre subsidiaire, d'interroger la Cour de justice des communautés européennes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que la loi du 26 décembre 1996 instituant la taxe sur les achats de viande a instauré une aide de l'Etat à des entreprises ou des produits français, sans qu'il n'y ait eu de notification à la Commission, en application de l'article 88 du traité de Rome ; que la taxe continue de faire partie du régime d'aides antérieur ; que la violation de l'obligation de notifier le régime d'aide n'est pas affectée par la modification du système de financement de l'aide ; que le principe pollueur-payeur a été méconnu ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 27 mars 2009, présenté pour la société CSF qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens et en outre au motif que l'administration ne pouvait revenir sur sa décision de dégrèvement, faute de proposition de rectification et de notification d'avis de mise en recouvrement ayant interrompu la prescription ;
Vu le mémoire enregistré le 7 août 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'à compter du 1er janvier 2001 le produit de la taxe abondait le budget général de l'Etat ; que les circonstances de fait soumises à la Cour de justice des communautés européennes étaient différentes dès lors que l'article 35 de la loi de finances rectificative pour 2000 a supprimé l'affectation du produit de la taxe sur les achats de viande à un fonds spécifique et a affecté ce montant au budget général de l'Etat ; que, ne faisant pas partie intégrante d'une mesure d'aide à compter du 1er janvier 2001, le dispositif de la taxe sur les achats de viande n'avait pas à être notifié au préalable à la Commission, comme l'a jugé d'ailleurs le Conseil d'Etat à deux reprises ; que le principe pollueur-payeur n'a pas été méconnu ;
Vu le mémoire enregistré le 15 novembre 2010, présenté pour la société CSF ; elle conclut aux mêmes fins que précédemment ; elle soutient en outre que l'administration ne pouvait revenir sur ses décisions de dégrèvement sans les rapporter et sans rétablir les impositions notamment en procédant à la mise en oeuvre d'une nouvelle imposition ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 avril 2011 :
- le rapport de M. Chanel, président de chambre ;
- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
Considérant qu'après avoir déclaré conformément aux dispositions de l'article 302 bis ZD du code général des impôts alors en vigueur la valeur de ses achats et payé la taxe sur les achats de viande qu'elle estimait en conséquence devoir au titre de la période du 1er janvier 2001 au 30 juin 2003, la SA Annonay Distribution, aux droits de laquelle vient la société CSF, en a demandé la restitution par réclamations des 27 octobre, 3 novembre et 29 décembre 2003 respectivement au titre de la période du 1er janvier au 30 juin 2003, du 1er janvier au 31 décembre 2002 et du 1er janvier au 31 décembre 2001 ; que ces réclamations ont été rejetées par décision du 5 janvier 2004 s'agissant de la période du 1er janvier 2002 au 30 juin 2003 et par décision du 7 janvier 2005 s'agissant de la période du 1er janvier au 31 décembre 2001 et ont donné lieu respectivement devant le Tribunal à l'introduction de l'instance n° 0400949 et de l'instance n° 0501211 ; que l'administration lui a accordé le dégrèvement, d'une part, de ces deux impositions par décision du 13 septembre 2004, d'autre part, de l'imposition au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2001 par décision du 14 septembre 2004 ; qu'en novembre 2004, elle a informé la société que les dégrèvements ne seraient pas exécutés ; que, par jugement du 2 décembre 2008, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté les demandes de la société tendant à la restitution de la taxe sur les achats de viande qu'elle a acquittée au titre de la période litigieuse ; que la société CSF, venant aux droits de la SA Annonay Distribution, interjette appel de ce jugement ;
Considérant qu'en vertu du VI de l'article 302 bis ZD du code général des impôts, alors en vigueur, la taxe sur les achats de viande est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée ; que selon l'article L. 256 du livre des procédures fiscales, dont les dispositions ont ainsi été rendues applicables à cette taxe : Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité (...) ; que, lorsqu'une taxe a été déclarée et payée spontanément par le redevable, puis a fait l'objet d'un dégrèvement, cette décision implique, alors même que le paiement a été effectué à la date d'exigibilité, que l'administration émette un avis de mise en recouvrement si elle entend rétablir l'imposition ; que faute d'avoir, après avoir prononcé le dégrèvement des taxes payées par la société au titre de la période en litige, émis un avis de mise en recouvrement correspondant au montant dégrevé, l'administration ne pouvait lui refuser la restitution de ces taxes ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la société CSF, venant aux droits de la SA Annonay Distribution, est fondée à soutenir, par les moyens nouveaux soulevés en appel, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat au profit de la société CSF une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Il est accordé à la société CSF, venant aux droits de la SA Annonay Distribution, la restitution des taxes sur les achats de viande qu'elle a versées au titre de la période du 1er janvier 2001 au 30 juin 2003.
Article 2 : Le jugement attaqué est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à la société CSF au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société CSF et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.
Délibéré après l'audience du 19 avril 2011 à laquelle siégeaient :
M. Chanel, président de chambre,
MM. Pourny et Lévy Ben Cheton, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 31 mai 2011.
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N° 09LY00195