Vu la requête, enregistrée le 25 juin 2010, présentée pour M. Farid A domicilié ... ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0707880, en date du 11 mai 2010, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du préfet du Rhône du 25 août 2007 rejetant sa demande d'assignation à résidence ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision susmentionnée ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui notifier une assignation à résidence avec droit au travail ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 196 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Il soutient que :
- les premiers juges ont ajouté une condition à celles prévues par l'article L. 523-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- ils ont donc commis une erreur de droit ;
- le préfet n'ayant pas transmis les motifs de sa décision implicite, celle-ci méconnait les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ;
- les premiers juges ont considéré à tort que le moyen tiré de l'absence de motivation était inopérant ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, un tel moyen étant d'ailleurs opérant ;
- le refus d'assignation à résidence méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention sur les droits de l'enfant ainsi que celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2010, présenté par le préfet du Rhône qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que ;
- le jugement vise les dispositions de l'article L. 523-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les premiers juges ont donc à bon droit considéré que M. A devait établir qu'il n'était pas admissible dans aucun autre pays ;
- il était tenu de refuser l'assignation à résidence, sa décision n'est donc pas entachée d'illégalité externe ;
- la décision attaquée n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant et de celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droit de l'homme et des libertés fondamentales sont inopérants à l'encontre d'une décision refusant une assignation à résidence ;
- en tout état de cause, de tels moyens ne sont pas fondés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mai 2011 :
- le rapport de M. Vivens, président ;
- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;
Considérant que M. A, qui a fait l'objet d'une interdiction judiciaire de résider sur le territoire français, fait appel du jugement du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 août 2007 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de faire droit à sa demande d'assignation à résidence ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 523-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion et qui justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français en établissant qu'il ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays peut faire l'objet d'une mesure d'assignation à résidence dans les conditions prévues à l'article L. 513-4. Les dispositions de l'article L. 624-4 sont applicables. (...) ; .
Considérant que l'administration n'est pas en situation de compétence liée pour rejeter la demande d'un étranger tendant, sur le fondement des dispositions précitées, à être astreint à résidence ; que, par suite, et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision en litige, par laquelle le préfet du Rhône a rejeté la demande d'assignation à résidence présentée par M. A, n'est pas inopérant ;
Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs : (...) Une décision implicite intervenue dans des cas où une décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé formulée dans les délais de recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront être lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'assignation à résidence effectuée par M. A, par lettre du 18 juin 2007, a été reçue en préfecture le 25 juin 2007 ; que l'intéressé a sollicité, par courrier en date du 27 août 2007, reçu en préfecture le 31 août 2007, la communication des motifs de la décision implicite née le 25 août 2007 du silence gardé pendant plus de deux mois par l'administration ; qu'il est constant que l'administration n'a pas communiqué ces motifs à M. A ; que, par suite, la décision implicite attaquée, en date du 25 août 2007, se trouve entachée d'illégalité pour défaut de motivation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que l'annulation pour défaut de motivation de la décision n'implique pas qu'il soit fait droit à la demande d'assignation à résidence de M. A ; que ses conclusions à fin qu'il soit enjoint au préfet de lui notifier une telle assignation ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Sabatier, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au profit de Me Sabatier, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0707880 du Tribunal administratif de Lyon du 11 mai 2010 est annulé.
Article 2 : La décision du préfet du Rhône du 25 août 2007 est annulée.
Article 3 : L'Etat versera à Me Sabatier une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de renonciation à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. A est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Farid A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 19 mai 2011 à laquelle siégeaient :
M. Vivens, président de chambre,
Mme Steck-Andrez, président-assesseur,
M. Picard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 juin 2011.
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N° 10LY01465