Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2009, présentée pour M. François A, domicilié ... ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0801563 du 16 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande en ce qu'elle tendait à la décharge, en droits, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005 ;
2°) de le décharger des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que, par les documents qu'il produit, parmi lesquels, d'une part, l'attestation de la Lyonnaise de Banque datée de 2008 identifiant les bons anonymes Croissance B remboursés par cet établissement en 2004 et 2005, d'autre part, les copies des trois bulletins de souscription s'y rapportant, datés de 1992, et dont la force probante est certifiée par une attestation de CIC datée du 15 avril 2009, il apporte une preuve suffisante qu'il détenait depuis 1992 ces titres de capitalisation, dont le remboursement, en 2004 et 2005, ne pouvait dès lors être regardé comme un revenu imposable au titre desdites années ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que la requête est irrecevable faute de moyen de contestation des chefs de redressements étrangers aux remboursements de bons anonymes, soit en base 5 500 euros au titre de 2004, et 36 600 euros au titre de 2005 ; que l'attestation de la Lyonnaise de Banque, du 11 juin 2008, produite par le requérant ne permet pas d'établir que les bons anonymes remboursés en 2004 et 2005 avaient été acquis dès 1992 ; qu'au surplus, le numéro de compte bancaire qu'elle mentionne diffère de celui sur lequel sont apparus les crédits taxés ; que l'attestation de CIC Assurances, du 15 avril 2009, déjà produite en première instance, ne se prononce pour la première fois sur l'origine de ces titres que plus de deux ans après l'ouverture du contrôle, circonstance de nature à faire naître des doutes sur sa validité, sauf pour le requérant à faire préciser par cet établissement les conditions d'obtention et de validité de cette attestation ; qu'enfin, la qualité des signataires ne figure pas sur les bulletins de souscription ; que dès lors, la preuve du caractère non imposable de ces crédits bancaires, au titre de 2004 et 2005, n'est pas apportée ;
Vu l'ordonnance en date du 19 juillet 2011 fixant la clôture d'instruction au 23 septembre 2011, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2011 :
- le rapport de M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
Considérant que M. et Mme A ont fait l'objet d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle portant sur les années 2004 et 2005 ; qu'en raison des discordances importantes entre les crédits enregistrés sur leurs comptes bancaires et les revenus qu'ils avaient déclarés, l'administration fiscale leur a adressé une demande d'éclaircissements et de justifications, le 23 janvier 2007, relative à l'encaissement d'espèces et de chèques, ainsi qu'au remboursement de bons anonymes ; que compte tenu des justifications apportées, à différents stades de cette procédure, ne restent en litige que la taxation des crédits bancaires restés selon l'administration injustifiés, résultant, d'une part, de versements d'espèces, pour 5 500 euros en 2004 et 36 600 euros en 2005, d'autre part, de remboursements auprès de la Lyonnaise de Banque de bons de capitalisations anonymes, pour 58 594 euros en 2004 et 241 440 euros en 2005 ; que M. A relève appel du jugement du 16 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande en ce qu'elle tendait à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu restant en litige ;
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable (...) des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. En particulier, si le contribuable allègue la possession de bons ou de titres dont les intérêts ou arrérages sont exclus du décompte des revenus imposables en vertu de l'article 157 du code général des impôts, l'administration peut exiger la preuve de la possession de ces bons ou titres et celle de la date à laquelle ils sont entrés dans le patrimoine de l'intéressé. Le contribuable ne peut pas alléguer la vente ou le remboursement de bons mentionnés au 2° du III bis de l'article 125 A du code général des impôts, ou de titres de même nature, quelle que soit leur date d'émission, lorsqu'il n'avait pas communiqué son identité et son domicile fiscal à l'établissement payeur dans les conditions prévues au 4° et 6° du III bis du même article (...) ; que, selon le 4° de ce III bis, (...) le bénéficiaire des intérêts autorise l'établissement payeur, au moment du paiement, à communiquer son identité et son domicile fiscal à l'administration fiscale ; qu'en vertu de l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales, les demandes de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte de ces dispositions qu'un contribuable, qui fait état du remboursement de bons anonymes en réponse à une demande de justifications, alors que l'anonymat n'a pas été levé à la date de la vente ou du remboursement allégué, doit être regardé comme s'étant abstenu de répondre et que l'administration est alors en droit de le taxer d'office ;
Considérant, d'autre part, qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées et de celles des articles L. 192, dernier alinéa, et L. 193 du livre des procédures fiscales que le contribuable, à la suite de son défaut de réponse, supporte la charge de la preuve devant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et, en cas de réclamation contre l'imposition, devant l'administration puis le juge de l'impôt ; qu'ainsi, si le contribuable qui fait état du remboursement de bons anonymes en réponse à une demande de justification, alors que l'anonymat n'a pas été levé à la date de la vente ou du remboursement allégué, se trouve en situation de taxation d'office en vertu des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, les dispositions de l'article L. 16 n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à ce que l'intéressé apporte ensuite la preuve qui lui incombe du caractère exagéré de l'imposition, en faisant état, devant la commission départementale puis, le cas échéant, devant le directeur des services fiscaux et devant le juge, d'autres éléments de nature à démontrer la vente ou le remboursement, au cours de l'année d'imposition, de bons anonymes qui sont entrés dans son patrimoine soit avant le 1er janvier, soit après cette date dans le cas où il établit qu'ils ont été acquis à titre gratuit ;
Considérant que, pour établir que les crédits bancaires en litige proviennent du remboursement de bons anonymes, M. A produit une attestation du 11 juin 2008 de la Lyonnaise de Banque, identifiant précisément neuf des dix bons de capitalisation SLB croissance 8 donnés en remboursement en 2004 et 2005, pour des montants respectifs de 58 594 euros et 241 440 euros ; que si l'administration fiscale oppose que l'identifiant bancaire visé dans l'attestation du 11 juin 2008 différerait de celui du compte sur lequel sont apparus les crédits taxés, il résulte de l'instruction que la concordance exacte des dates de remboursement, ainsi que le libellé explicite mentionné sur le compte bancaire vérifié, d'ailleurs repris dans la proposition de rectification, permettent de s'assurer que les crédits en litige proviennent du remboursement de bons de capitalisation ACM Vie SA Croissance 8 ; qu'afin d'établir, ensuite, la date à laquelle ces bons étaient entrés dans son patrimoine, M. A produit la copie des trois bulletins de souscriptions par lesquels il avait acquis, les 9 mars et 4 mai 1992, les neufs titres ainsi remboursés en 2004 et 2005 ; que la conformité de ces copies aux originaux en possession de la banque est attestée par un courrier de CIC Assurances, daté du 15 avril 2009, établi à la demande du conseil du requérant, portant le nom de son signataire, et dont il ne résulte pas de l'instruction qu'il serait d'une authenticité douteuse ; que ce document ne mentionnant toutefois que huit des neufs titres identifiés par l'attestation du 11 juin 2008, M. A ne peut être regardé comme apportant la preuve de la détention de ceux-ci, dans son patrimoine, depuis 1992, que dans cette seule mesure ; qu'il doit dès lors être regardé comme justifiant de l'origine des crédits bancaires de 58 594,98 euros en 2004 et de 181 080,54 euros en 2005, que l'administration fiscale n'est dès lors plus fondée à regarder comme des revenus d'origine indéterminée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A, qui, comme le fait valoir le ministre, ne soulève aucun moyen relatif à la taxation des encaissements d'espèces, pour 5 500 euros en 2004 et 36 600 euros en 2005, est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a refusé de lui accorder la réduction, en droits et pénalités, des impositions contestées, à hauteur des sommes, en base, de 58 594,98 euros en 2004 et de 181 080,54 euros en 2005 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser une somme de 1 000 euros à M. A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Les bases de l'impôt sur le revenu assignées à M. et Mme A sont réduites d'un montant de 58 594 euros au titre de l'année 2004, et de 181 080,54 euros au titre de l'année 2005.
Article 2 : M. et Mme A sont déchargés des droits correspondant à la réduction des bases d'imposition définies à l'article 1er.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à M. A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le jugement n° 0801563 du 16 juin 2009 du Tribunal administratif de Clermont Ferrand est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. François A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.
Délibéré après l'audience du 7 octobre 2011 à laquelle siégeaient :
M. Chanel, président de chambre,
MM. Besson et Lévy Ben Cheton, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 28 octobre 2011.
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N° 09LY01469