Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 28 février 2011 sous le n° 11LY00501, présentée pour le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE LE JARDIN BIR HAKEIM , représenté par son syndic, la société Audras et Delaunois, dont le siège est sis 11 rue de Bir Hakeim à Grenoble (38000), M. Jean-Marie B, domicilié 11 rue de Bir Hakeim à Grenoble (38000) et M. Jean-Pierre A, domicilié 11 rue de Bir Hakeim à Grenoble (38000), par Me Bornard ;
Ils demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0901608 du 27 décembre 2010 qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 27 novembre 2007, par lequel le maire de Grenoble a délivré un permis de construire à la SCI Mercure, ensemble sa décision portant implicitement rejet de leur recours gracieux ;
2°) d'annuler lesdites décisions ;
3°) de condamner la commune de Grenoble à leur verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que le dossier de permis de construire constitué par la SCI Mercure était incomplet en ce qu'il ne comportait pas le plan de la façade nord de l'édifice projeté, en méconnaissance de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme ; que le permis a été délivré sur le fondement de dispositions illégales du règlement du plan local d'urbanisme de Grenoble ; qu'en effet, l'article UM-B 6 de ce règlement, qui fixe les règles d'implantation des immeubles, les assortit de possibilités de dérogations formulées en termes imprécis, laissant une bien trop grande latitude au service instructeur, et méconnaît ainsi les articles L. 123-1 et R. 123-9 du code de l'urbanisme ; qu'il ne peut être admis que l'autorité d'urbanisme se fonde, comme en l'espèce, sur des notions telles que le respect d'une harmonie d'ensemble ou la configuration atypique de la parcelle ; que l'exception d'illégalité ainsi relevée affecte seulement ces dispositions dérogatoires, divisibles de la règle générale fixée par l'article UM-B 6, imposant de construire en limite de voirie publique ; que le permis de construire contesté a été délivré en violation de cette règle ;
Vu le jugement attaqué et les décisions contestées ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 mai 2011, présenté pour la SCI Mercure par Me Bénichou, concluant au rejet de la requête et à la condamnation solidaire des appelants à lui verser la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que MM. B et A n'ont pas justifié de leur intérêt pour agir ; que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE LE JARDIN BIR HAKEIM n'a quant à lui produit aucune habilitation conférée à son syndic pour le représenter en justice ; que, le projet étant situé en zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, l'architecte des bâtiments de France n'avait pas à donner la liste des monuments concernés ; que le projet est conforme à l'article UM-B 6 du règlement du plan local d'urbanisme, compte tenu de la configuration atypique du terrain, formant une parcelle en angle, et de la nécessité de préserver la continuité urbaine ; que l'aspect extérieur des façades du bâtiment projeté, différencié par niveaux, respecte l'architecture du quartier, tient compte des hauteurs de rive des immeubles voisins et répond aux objectifs d'insertion urbaine ; que le projet respecte les dispositions du plan local d'urbanisme en matière de stationnement, qui détermine d'ailleurs un nombre maximal de places de stationnement pour les bureaux, le but étant, en zone tramway , d'encourager les modes de transport alternatifs ; que le dossier de demande de permis comportait bien l'ensemble des plans, y compris celui de la façade nord ; que les documents photographiques et simulations d'insertion rendent parfaitement compte de l'intégration du futur bâtiment dans le tissu urbain ; que le permis n'a nullement été accordé sur le fondement des dispositions dérogatoires figurant aux paragraphes 1 et 5 de l'article UM-B 6 du règlement du plan local d'urbanisme ; que seule une bande de 6,81 m, en façade est, a été implantée en léger retrait de la limite de référence, afin de prendre en compte les constructions existantes, et notamment la résidence des requérants ; qu'il est parfaitement admis que les règles générales puissent être modifiées pour des raisons d'harmonie ; que les dispositions dérogatoires critiquées, au demeurant, sont parfaitement légales ; que la jurisprudence prohibe en effet les règles d'implantation abstraites ou imprécises, mais n'exige pas nécessairement qu'elles soient exprimées de manière quantitative ; qu'en l'espèce, la référence à l'harmonie d'ensemble n'a rien d'abstrait, cependant que le terme de configuration atypique ou complexe du terrain est explicité par le règlement ;
Vu le mémoire, enregistré le 13 septembre 2011, présenté pour la commune de Grenoble, représentée par son maire en exercice par Me Bénichou, concluant au rejet de la requête et à la condamnation solidaire des appelants à lui verser la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que MM. B et A n'ont pas justifié de leur intérêt pour agir ; que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE LE JARDIN BIR HAKEIM n'a quant à lui produit aucune habilitation conférée à son syndic pour le représenter en justice ; que, le projet étant situé en zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, les servitudes d'utilité publique instituées pour la protection du champ de visibilité des monuments historiques ne sont pas applicables, de sorte qu'il est indifférent que l'architecte des bâtiments de France n'ait pas dressé dans son avis la liste des monuments concernés ; que le dossier de demande de permis comportait bien l'ensemble des plans, y compris celui de la façade nord ; que les documents graphiques rendent parfaitement compte de l'intégration du futur bâtiment dans le tissu urbain et satisfont aux exigences de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme ; que les requérants invoquent inutilement l'article UM-B 7-2-1-1 du règlement du plan local d'urbanisme alors que leur critique vise l'implantation au droit de l'emprise publique ; qu'au demeurant, le projet respecte les règles d'implantation par rapport aux limites séparatives telles qu'elles résultent des articles UM-B 7-2-1-2, 7-2-2-1 et 7-2-2-2 ; que l'aspect extérieur des façades du bâtiment projeté, différencié par niveaux, respecte l'article UM-B 11 du règlement du plan local d'urbanisme ; que le permis n'a nullement été accordé sur le fondement des dispositions dérogatoires figurant aux paragraphes 1 et 5 de l'article UM-B 6 du règlement du plan local d'urbanisme ; que seule une bande de 6,81 m, en façade est, a été implantée en léger retrait de la limite de référence, afin de prendre en compte les constructions existantes, et notamment la résidence des requérants ; qu'il est parfaitement admis que les règles générales puissent être modifiées pour des raisons d'harmonie ; que les dispositions dérogatoires critiquées, au demeurant, sont parfaitement légales ; que la jurisprudence prohibe en effet les règles d'implantation abstraites ou imprécises, mais n'exige pas nécessairement qu'elles soient exprimées de manière quantitative ; qu'en l'espèce, la référence à l'harmonie d'ensemble n'a rien d'abstrait, cependant que le terme de configuration atypique ou complexe du terrain est explicité par le règlement ;
Vu le mémoire, enregistré le 10 novembre 2011, présenté pour la SCI Mercure par Me Bénichou, concluant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Elle soutient en outre que les requérants ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité de l'article UM-B 6 du plan local d'urbanisme, qui détermine de façon précise les possibilités de dérogation aux règles générales d'implantation des constructions ; que ces possibilités de dérogations n'avaient pas à être fixées au moyen de règles quantitatives ; qu'il est du reste admis que certains documents d'urbanisme peuvent avoir simplement valeur de directive ; que le léger retrait de la construction projetée a pour but de respecter l'harmonie du bâti environnant ; qu'il s'agit là, en tout état de cause, d'une adaptation mineure au sens de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme ;
Vu l'ensemble des pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2011 :
- le rapport de M. Zupan, président-assesseur ;
- les observations de Me Rigoulot, représentant le cabinet Lega-Cite Avocats, avocat des requérants, et celles de Me Benichou, représentant la SCP Benichou-Para-Triquet-Dumoulin, avocat de la SCI Mercure et de la commune de Grenoble ;
- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée aux parties présentes ;
Considérant que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE LE JARDIN BIR HAKEIM , M. B et M. A relèvent appel du jugement en date du 27 décembre 2010, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'arrêté du maire de Grenoble du 27 novembre 2007 accordant à la SCI Mercure un permis de construire sur un terrain sis rue Eugène Faure, ensemble sa décision portant implicitement rejet de leur recours gracieux ;
Sur la légalité des décisions contestées, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Grenoble et la SCI Mercure :
Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le dossier de demande de permis de construire présenté par la SCI Mercure comportait un plan de la façade nord du bâtiment à usage de bureaux projeté ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance du 3° de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, demeuré applicable à cette demande, manque en fait ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article UM-B 6 du règlement du plan local d'urbanisme de Grenoble, approuvé par délibération du 24 octobre 2005 : Les dispositions du présent article régissent l'implantation des constructions par rapport aux emprises publiques et aux voies (privées ou publiques) déterminée à partir de la limite de référence (...). 1 - Définition de la limite de référence : La limite de référence est constituée : - soit par la limite de fait de l'emprise publique ou de la voie (...) ; - soit par une marge de reculement, telle que définie dans le document graphique E2 dénommé plan de zonage (...). 2 - Règle générale : L'implantation des constructions est définie au document graphique E3 dénommé Plan des formes urbaines . Dès lors qu'un trait (continu ou discontinu) est inscrit au Plan des formes urbaines , les constructions ou installations doivent être implantées sur la limite de référence (...). 3 - Dispositions particulières : (...) Sous réserve de justifications techniques, architecturales ou d'intégration dans le site, des dispositions autres que celles définies dans la règle générale pourront être exceptionnellement autorisées ou imposées dans les cas suivants : 1. Pour le respect d'une harmonie d'ensemble : - lorsque l'implantation ou l'extension d'une construction se fait en continuité d'un corps de bâtiment principal existant implanté différemment de la règle, qu'il soit situé sur le même terrain ou sur un terrain contigu (...) ; 5. En raison d'une configuration atypique ou complexe du terrain (parcelles traversantes, parcelles en angle, parcelles en coeur d'îlot, etc...) (...) ; qu'il est constant que le terrain d'assiette du projet, situé en zone UM-B (zone urbaine mixte de centre ville) figure au plan des formes urbaines E3 dans un îlot entouré d'un trait continu et au plan de zonage E2 dans un secteur dépourvu de marge de recul et où la limite de référence correspond en conséquence à l'alignement sur voirie ; qu'il ressort des documents annexés à la demande de permis de construire, et notamment du plan de masse, que la façade est du futur immeuble suit une ligne progressivement détachée de l'alignement, l'angle sud-est se trouvant ainsi en recul, par rapport à celui-ci, d'environ 50 cm ; qu'ainsi, le permis contesté n'a pu être délivré qu'à la faveur des dispositions particulières prévues par l'article UM-B 6 précité du règlement du plan local d'urbanisme ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : (...) / Les plans locaux d'urbanisme comportent un règlement qui fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durable, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimitent les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions ; qu'aux termes de l'article R. 123-9 du même code : Le règlement peut comprendre tout ou partie des règles suivantes ; (...) / 6º L'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques ; / 7º L'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives (...) / Les règles mentionnées aux 6º et 7º relatives à l'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques et par rapport aux limites séparatives, qui ne sont pas fixées dans le règlement, doivent figurer dans les documents graphiques (...) ; que si, eu égard à l'objet de ces dispositions, le règlement du plan local d'urbanisme ou, à défaut, les documents graphiques, doivent fixer des règles précises d'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques et aux limites séparatives, ces règles, ainsi que les exceptions ou dérogations dont elles sont assorties, ne doivent pas nécessairement se traduire par un rapport quantitatif ; qu'en l'espèce, les dispositions particulières figurant à l'article UM-B 6 précité du règlement du plan d'occupation des sols de Grenoble, qui ne se bornent pas à évoquer des objectifs généraux à atteindre, même si elles font référence, notamment, aux notions générales d'insertion paysagère et d'harmonie architecturale, déterminent limitativement les cas de dérogation à la règle d'implantation sur la limite de référence et les encadrent suffisamment ; qu'ainsi, les requérants ne sont pas fondés, en tout état de cause, à exciper de leur illégalité et par suite à invoquer la méconnaissance par le permis des dispositions de portée générale de l'article UM-B 6 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE LE JARDIN BIR HAKEIM , M. B et M. A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Grenoble soit condamnée à payer au SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE LE JARDIN BIR HAKEIM , à M. B et à M. A la somme qu'ils réclament en remboursement des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu au contraire, sur ce fondement, de les condamner eux-mêmes à payer à la commune de Grenoble et à la SCI Mercure la somme globale de 1 000 euros chacune ;
DECIDE :
Article 1er : La requête du SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE LE JARDIN BIR HAKEIM , de M. B et de M. A est rejetée.
Article 2 : Le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE LE JARDIN BIR HAKEIM , M. B et M. A verseront à la commune de Grenoble et à la SCI Mercure la somme globale de 1 000 euros chacune en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE LE JARDIN BIR HAKEIM , à M. Jean-Marie B, à M. Jean-Pierre A, à la commune de Grenoble et à la SCI Mercure.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2011, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président de chambre,
M. Zupan, président-assesseur,
M. Chenevey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 décembre 2011.
''
''
''
''
1
6
N° 11LY00501
mg