Vu le recours, enregistré le 23 mai 2011, du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE L'IMMIGRATION ;
Le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0901304 du 21 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé sa décision référencée 48SI en date du 23 février 2009 constatant la caducité du titre de conduite de M. A, ensemble les décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises les 22 août 2004, 7 juillet 2006 et 14 janvier 2008 et lui a enjoint de rétablir sur le permis de conduire de M. A, dans la limite de douze, les points afférents auxdites infractions ;
2°) de rejeter les conclusions de la demande formulée par M. Mohammed A devant le Tribunal administratif de Grenoble ;
Il soutient que le premier juge a commis une erreur de droit en considérant que la preuve de la remise de l'information préalable lors de la constatation des infractions n'était pas établie ; que s'agissant des infractions du 22 août 2004 et du 7 juillet 2006, l'intéressé s'est acquitté des amendes forfaitaires ; que le contrevenant est nécessairement rendu destinataire d'un procès-verbal et que le paiement de l'amende forfaitaire implique nécessairement la réception et donc la détention de l'avis de contravention ; qu'il appartient par suite au contrevenant de produire cet avis afin de démonter avoir été destinataire d'un avis inexact ou incomplet ; qu'il est inconcevable que le requérant ait pris lui-même l'initiative de s'acquitter d'une amende dont il n'aurait pas eu connaissance au préalable ; que s'agissant de l'infraction du 14 janvier 2008, sa réalité a été établie par une condamnation prononcée par le Tribunal de grande instance de Thonon-Les-Bains, ce qui rend inopérant le moyen tiré du défaut d'information préalable laquelle ne trouve à s'appliquer qu'en cas de procédure d'amende forfaitaire ou de composition pénale et pas dans le cas où le contrevenant a eu accès au juge pénal ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré le 20 septembre 2011, le mémoire par lequel M. Mohammed A conclut au rejet du recours et à ce qu'une somme de 900 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par les moyens que le ministre n'apporte pas la preuve que l'ensemble des informations exigées par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ont été données lors de la constatation des infractions ; que la circonstance que la réalité de l'infraction du 14 janvier 2008 a été établie par un jugement rendu le 11 septembre 2008 n'est pas de nature à établir la délivrance préalable de l'information ;
Vu, enregistré le 24 novembre 2011, le mémoire par lequel le MINISTRE DE L'INTERIEUR conclut aux mêmes fins que son recours par les mêmes moyens et par les moyens, en outre, que, d'une part, par son avis Gendron le Conseil d'Etat admet que l'administration prouve, par tous moyens, que le service verbalisateur n'a pas utilisé un avis de contravention non conforme ; qu'en l'espèce, il est attesté que tous les anciens formulaires ont été détruits et que toutes les infractions commises postérieurement au 1er janvier 2002 ont obligatoirement été constatées au moyen de nouveaux formulaires conformes aux exigences ; que, d'autre part, dans l'arrêt Sanz n° 335469, le Conseil d'Etat considère que dès qu'une condamnation pénale définitive est intervenue, le défaut éventuel de délivrance de l'information préalable ne peut avoir aucune conséquence sur la légalité de la procédure de retrait de point sachant que l'intéressé a eu la possibilité de contester la réalité de l'infraction devant le juge pénal ;
Vu, enregistré le 18 juin 2012, le mémoire par lequel M. Mohammed A porte à 1 500 euros la somme qu'il sollicite en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, pour le surplus, conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et par les moyens, en outre, que le MINISTRE DE L'INTERIEUR n'est pas en mesure de produire les procès-verbaux des contraventions du 22 août 2004 et du 7 juillet 2006 et ne rapporte donc pas la preuve que l'ensemble des informations a été donnée préalablement ; que la circonstance que la réalité de l'infraction du 14 janvier 2008 a été établie par un jugement n'est pas de nature à établir que l'information préalable lui aurait été délivrée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu le code de la route ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2012 :
- le rapport de Mme Verley-Cheynel, président-assesseur ;
Considérant que par décision référencée 48 SI du 23 février 2009, le MINISTRE DE L'INTERIEUR a constaté la perte de validité du permis de conduire de M. Mohammed A pour solde de points nul, à la suite des infractions commises par l'intéressé ayant entraîné respectivement la perte de 3 points pour celle constatée 22 août 2004, 1 point pour celle du 16 juillet 2005, 2 points pour celle du 7 juillet 2006 et 6 points pour celles du 14 janvier 2008 ; que le MINISTRE DE L'INTERIEUR fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Grenoble, statuant sur la demande de M. A, a, au motif qu'il n'était pas établi que ce dernier avait, pour chacune de ces infractions, reçu les informations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, annulé les décisions de retrait de points correspondant aux infractions commises les 22 août 2004, 7 juillet 2006 et 14 janvier 2008 ainsi que sa décision du 23 février 2009 et lui a enjoint de restituer à son titulaire, son permis de conduire assortis desdits points ;
Considérant que la délivrance, au titulaire du permis de conduire à l'encontre duquel est relevée une infraction donnant lieu à retrait de points, de l'information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, constitue une garantie essentielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre, avant d'en reconnaître la réalité par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'exécution d'une composition pénale, d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis et éventuellement d'en contester la réalité devant le juge pénal ; qu'elle revêt le caractère d'une formalité substantielle et conditionne la régularité de la procédure au terme de laquelle le retrait de points est décidé ; que toutefois, lorsque la réalité de l'infraction a été établie par une condamnation devenue définitive prononcée par le juge pénal qui a statué sur tous les éléments de fait et de droit portés à sa connaissance et que l'auteur de l'infraction a ainsi pu la contester, l'omission de cette formalité est sans influence sur la régularité du retrait de points résultant de la condamnation ;
Considérant, en premier lieu, que, s'agissant des infractions des 22 août 2004 et 7 juillet 2006, les dispositions portant application des articles R. 49-1 et R. 49-10 du code de procédure pénale en vigueur à la date de ces infractions, notamment celles de ses articles A. 37 à A. 37-4 de ce code, issues de l'arrêté du 5 octobre 1999 relatif aux formulaires utilisés pour la constatation et le paiement des contraventions soumises à la procédure de l'amende forfaitaire, prévoient que lorsqu'une contravention soumise à cette procédure est relevée avec interception du véhicule mais sans que l'amende soit payée immédiatement entre les mains de l'agent verbalisateur, ce dernier utilise un formulaire réunissant, en une même liasse autocopiante, le procès-verbal conservé par le service verbalisateur, une carte de paiement matériellement indispensable pour procéder au règlement de l'amende et l'avis de contravention, également remis au contrevenant pour servir de justificatif du paiement ultérieur, qui comporte une information suffisante au regard des exigences résultant des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ;
Considérant, dès lors, que le titulaire d'un permis de conduire à l'encontre duquel une infraction au code de la route est relevée au moyen d'un formulaire conforme à ce modèle et dont il est établi, notamment par la mention qui en est faite au système national des permis de conduire, qu'il a payé l'amende forfaitaire correspondant à cette infraction a nécessairement reçu l'avis de contravention ; qu'eu égard aux mentions dont cet avis est réputé être revêtu, l'administration doit alors être regardée comme s'étant acquittée envers le titulaire du permis de son obligation de lui délivrer les informations requises préalablement au paiement de l'amende, à moins que l'intéressé, à qui il appartient à cette fin de produire l'avis qu'il a nécessairement reçu, ne démontre s'être vu remettre un avis inexact ou incomplet ;
Considérant que si l'intervention de l'arrêté du 5 octobre 1999 ne garantit pas, à elle seule, que des formulaires établis selon un modèle antérieur, où le document comportant les informations requises et celui nécessaire au paiement étaient entièrement distincts, n'aient pas continué à être utilisés pour la constatation des infractions, il résulte tant du règlement du Conseil du 3 mai 1998 concernant l'introduction de l'euro que des mesures législatives et réglementaires prises pour sa mise en oeuvre, s'agissant notamment du montant des amendes, que de tels formulaires, libellés en francs, n'ont pu être employés après le 1er janvier 2002 ; que, pour les infractions relevées avec interception du véhicule à compter de cette date, la mention au système national des permis de conduire du paiement ultérieur de l'amende forfaitaire permet donc au juge d'estimer que le titulaire du permis s'est vu remettre un avis de contravention comportant les informations requises ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les infractions des 22 août 2004 et 7 juillet 2006 ont été verbalisées après interception du véhicule et que M. A a ultérieurement payé les amendes forfaitaires correspondantes ; qu'alors qu'il n'a pas produit les procès-verbaux des infractions, il doit être regardé comme établi qu'il a reçu préalablement au paiement de chacune des amendes l'information requise ; que, dès lors c'est à tort que le Tribunal administratif a estimé qu'il n'en n'avait pas bénéficié et a annulé, pour ce motif, les retraits de points correspondants ;
Considérant, en second lieu, s'agissant des infractions du 14 janvier 2008, que, lorsque la réalité de l'infraction a été établie par une condamnation devenue définitive prononcée par le juge pénal qui a statué sur tous les éléments de fait et de droit portés à sa connaissance et que l'auteur de l'infraction a ainsi pu la contester, l'omission de cette formalité est sans influence sur la régularité du retrait de points résultant de la condamnation ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la matérialité des infractions commises le 14 janvier 2008 par M. A a été établie par un jugement, devenu définitif, du Tribunal de grande instance de Thonon-Les-Bains du 11 septembre 2008 ; que dans ces conditions, le moyen tiré du manquement à l'obligation d'information préalable prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ne pouvait être utilement invoqué à l'encontre de la décision de retrait de 6 points correspondant à ces infractions ; que, dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur ledit moyen pour annuler ce retrait de 6 points ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, M. A n'ayant soulevé devant le Tribunal administratif de Grenoble ou la Cour aucun autre moyen, dont la Cour serait saisie par l'effet dévolutif de l'appel, le MINISTRE DE L'INTÉRIEUR est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions de retrait de points consécutives aux infractions des 22 août 2004, 7 juillet 2006 et 14 janvier 2008 ainsi que, par voie de conséquence, sa décision 48SI du 23 février 2009 constatant la perte de validité du permis de conduire de M. A ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Les articles 1 et 2 du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 21 mars 2011 sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de la demande de M. A tendant à l'annulation des décisions de retrait de points consécutives aux infractions des 22 août 2004, 7 juillet 2006 et 14 janvier 2008 et de la décision 48SI du 23 février 2009 et ses conclusions devant la Cour tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'INTÉRIEUR et à M. Mohammed A.
Délibéré après l'audience du 27 juin 2012, à laquelle siégeaient :
- M. du Besset, président de chambre,
- Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,
- M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 juillet 2012.
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N° 11LY01270
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