Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2011 au greffe de la Cour, présentée pour M. et Mme Enver domiciliés à La Relève 8 rue de l'Octant à Echirolles (38130) ;
M. et Mme Enver demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1101719-1101720 du 19 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de l'Isère, en date du 17 février 2011, leur refusant un titre de séjour, les obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de renvoi ;
2°) d'annuler ces arrêtés et d'enjoindre au préfet de l'Isère, sous l'astreinte journalière de 50 euros, de leur délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer leur demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de leur conseil, une somme de 1 050 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que le préfet n'ayant été saisi d'aucune demande de titre de séjour, son refus de délivrer un tel titre est entaché d'erreur de droit ; que le préfet a méconnu l'article 33 paragraphe 1 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et les articles L. 513-2 et L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en s'estimant lié par le fait qu'ils étaient ressortissants d'un pays considéré comme sûr ; qu'il ne pouvait leur refuser un titre de séjour ni les éloigner, avant qu'il ait été définitivement statué sur leurs demandes d'asile ; que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des articles L. 313-11 7° et " L. 311-11 11° " du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il devait consulter le médecin de l'agence régionale de santé ; que le préfet ne pouvait pas les obliger à quitter le territoire, leur ayant déjà refusé l'admission au séjour au titre de l'asile ; que le principe constitutionnel du droit d'asile ainsi que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnus ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été transmise au préfet de l'Isère qui n'a pas produit de mémoire ;
Vu les décisions du 7 octobre 2011, par lesquelles le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. et a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 juin 2012 :
- le rapport de M. Besson, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
Considérant que M. et Mme , ressortissants macédoniens nés respectivement en 1953 et 1957, font appel du jugement nos 1101719-1101720 du 19 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de l'Isère, en date du 17 février 2011, leur refusant un titre de séjour, les obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de renvoi ;
Sur les refus de séjour :
Considérant, en premier lieu, que la décision par laquelle le préfet refuse la délivrance d'un titre de séjour à un étranger auquel la qualité de réfugié a été refusée doit être regardée comme prise en réponse à une demande d'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile, la reconnaissance du statut de réfugié impliquant la délivrance immédiate d'une carte de résident ; que, dès lors, M. et Mme , dont les demandes d'asile ont été rejetées par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 25 novembre 2010, ne sont pas fondés à soutenir que le préfet n'ayant été saisi d'aucune demande de titre de séjour, ses décisions refusant ensuite de leur délivrer un tel titre seraient entachées d'erreur de droit ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 2° L'étranger qui demande à bénéficier de l'asile a la nationalité (...) d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr. Un pays est considéré comme tel s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 de ce code : " l'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 742-6 du même code : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office (...) " ; que l'organisation d'une procédure d'examen prioritaire, associée à l'obligation, qui incombe à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, à la Cour nationale du droit d'asile, de procéder, dans chaque cas, à un examen individuel de la demande, ne méconnaît pas le principe de non refoulement posé par les stipulations de l'article 33 de la convention relative aux réfugiés, aux termes desquelles : " 1. Aucun des Etats contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques " ; que, dès lors, M. et Mme ne sont pas fondés à soutenir que les décisions leur refusant un titre de séjour, après le rejet, par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, de leurs demandes d'asile, méconnaîtraient ces dispositions et stipulations ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de l'Isère se serait cru lié par le fait qu'ils étaient ressortissants d'un pays considéré comme sûr ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ; que M. et Mme , dont le séjour en France est récent, ne font état d'aucune circonstance précise, relative à leur vie privée ou familiale, permettant de regarder les refus de séjour qui leur ont été opposés, après le rejet de leurs demandes d'asile, comme entachés d'erreur manifeste d'appréciation ; que si M. , qui déclare souffrir d'un diabète et d'hypertension, reproche au préfet de n'avoir pas consulté le médecin de l'agence régionale de santé, il est constant qu'il n'a pas demandé un titre de séjour pour motif médical ni ne justifie de la gravité de son état de santé ;
Sur les obligations de quitter le territoire :
Considérant, en premier lieu, que le droit constitutionnel d'asile, qui a le caractère d'une liberté fondamentale, a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié ; que, si ce droit implique que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande, ce droit s'exerce dans les conditions définies par l'article L. 741-4 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.-L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa (...) " ; que pour les motifs déjà indiqués, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles L. 741-4 et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève ne peuvent qu'être écartés, les obligations de quitter le territoire assortissant, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 511-1 de ce code, les refus de séjour pris après le rejet, par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, de leurs demandes d'asile ;
Sur les décisions fixant le pays de destination :
Considérant, en premier lieu, que pour les motifs déjà indiqués, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles L. 741-4 et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève ne peuvent qu'être écartés ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que si M. et Mme prétendent avoir quitté la Macédoine en raison des graves persécutions dont ils y auraient fait l'objet, ils n'assortissent leurs allégations d'aucune précision ; que, dès lors, leurs moyens tirés de ce que le préfet aurait commis, en fixant le pays de renvoi, une erreur manifeste d'appréciation en violant les articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent qu'être écartés ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés attaqués ; que doivent être rejetées, en conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. et Mme Enver et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 22 juin 2012 à laquelle siégeaient :
M. Chanel, président de chambre,
MM. Besson et Segado, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 13 juillet 2012.
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N° 11LY02769