Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 novembre 2011
et 13 janvier 2012, présentés pour la société Ferme éolienne du Plateau Paradis, dont le siège est 20 avenue de la Paix à Strasbourg (67000) ;
La société Ferme éolienne du Plateau Paradis demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1001389, n° 1001390, n° 1001391, n° 1001393, n° 1001394, n° 1001395, n° 1001396, n° 1001397, n° 1001398, n° 1001399, n° 1001400, n° 1001401, n° 1001403, n° 1001404, n° 1001409, n° 1001411 et n° 1001416 du tribunal administratif de Dijon du 22 septembre 2011 qui a annulé les trois arrêtés du 25 novembre 2009 par lesquels le préfet de l'Yonne lui a accordé des permis de construire en vue de l'implantation d'éoliennes sur le territoire des communes de Charmoy, Epineau-les-Voves et Villemer ;
2°) de rejeter les demandes présentées devant le tribunal administratif ;
3°) de condamner les demandeurs devant le tribunal à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société Ferme éolienne du Plateau Paradis soutient, en premier lieu, que le jugement attaqué est entaché d'un vice de procédure ; qu'en effet, seul le permis de construire qui a été délivré pour l'édification de trois éoliennes sur le territoire de la commune de Charmoy a été produit ; qu'en application de l'article R. 412-1 du code de justice administrative, les demandes étaient dès lors irrecevables en tant qu'elles portaient sur les deux autres permis de construire ; que le tribunal aurait dû relever cette irrecevabilité ; qu'en deuxième lieu, contrairement à ce qu'impose l'article L. 9 du code de justice administrative, le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé, le tribunal n'ayant pas précisé en quoi l'étude d'impact et ses compléments ne respectent pas les dispositions de l'article R. 431-7 du code de l'urbanisme ; qu'en troisième lieu, le tribunal a commis une erreur de droit en se fondant sur l'article R. 431-7 du code de l'urbanisme pour estimer que l'étude d'impact paysager est insuffisante, et non sur l'article R. 122-3 du code de l'environnement relatif au contenu de l'étude d'impact ; qu'en tout état de cause, il n'est pas possible d'estimer que l'un ou l'autre de ces articles a été méconnu sans commettre une erreur de fait et une erreur d'appréciation ; qu'en effet, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'ensemble des impacts sur le centre ancien de Joigny et l'église de Saint-Cydroine a été dûment apprécié et analysé ; qu'enfin, c'est à tort que le tribunal a estimé que le projet est de nature à induire des conséquences dommageables pour l'avifaune nécessitant la prescription de mesures en application de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme ; qu'en délivrant les permis de construire litigieux sans les assortir de prescriptions, le préfet de l'Yonne n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation, aucune contrainte majeure ne s'opposant à l'implantation d'un parc éolien ; qu'en tout état de cause, elle s'est engagée à des mesures compensatoires dans l'étude d'impact ;
Vu le jugement attaqué ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 23 avril 2012, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 mai 2012 ;
Vu les mémoires, enregistrés les 24 avril et 21 mai 2012, présentés pour M. N..., MmeZ..., M.AC..., M. et MmeB..., MmeL..., M.K..., M.P..., M. H..., M.AB..., M. et MmeAA..., M. et MmeT..., M. et Mme D..., M. et MmeAE..., MmeX..., M. et Mme V...et M. et Mme Q...qui demandent à la cour :
- de rejeter la requête ;
- de condamner la société Ferme éolienne du Plateau Paradis à leur verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Les intimés soutiennent, en premier lieu, qu'en application de l'article R. 411-2 du code de justice administrative, la requête est irrecevable, la société requérante n'ayant pas acquitté la contribution pour l'aide juridique imposée depuis le 1er octobre 2011 ; qu'en deuxième lieu, cette société ne peut utilement invoquer en appel la méconnaissance de l'article R. 412-1 du code de justice administrative, dès lors que le tribunal n'aurait pu rejeter les demandes dont il était saisi sans avoir préalablement invité leurs auteurs à les régulariser ; qu'en tout état de cause, le moyen manque en fait, dès lors que les demandes étaient toutes accompagnées des trois permis de construire attaqués ; qu'au surplus, ces permis sont à nouveau versés aux débats ; qu'en troisième lieu, le tribunal a suffisamment motivé sa décision au regard des exigences de l'article L. 9 du code de justice administrative, en précisant en quoi l'étude paysagère ne respecte pas les dispositions de l'article R. 431-7 du code de l'urbanisme ; qu'en quatrième lieu, le tribunal n'a pas commis d'erreur de droit en recherchant dans l'ensemble des pièces jointes aux demandes de permis de construire les documents susceptibles de répondre aux exigences des articles R. 431-7 et suivants du code de l'urbanisme ; que le dossier produit par la société à l'appui de ses demandes de permis de construire ne permettait pas d'apprécier correctement l'insertion du projet dans le paysage environnant, notamment au regard du secteur sauvegardé de Joigny et de l'église classée Saint-Cydroine ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal a considéré que les autorisations contestées méconnaissent l'article R. 431-7 du code de l'urbanisme ; qu'en cinquième lieu, compte tenu de son implantation au milieu d'un couloir de migration et à défaut de toute mesure compensatoire adaptée, le projet litigieux portera une grave atteinte aux oiseaux migrateurs, et notamment à la grue cendrée ; que, par suite, en s'abstenant d'assortir les permis de construire attaqués des prescriptions qui auraient pu permettre de préserver l'avifaune migratrice, le préfet de l'Yonne a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des intérêts protégés par l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme ; qu'enfin, ils renvoient à leurs écritures de première instance, dans l'hypothèse dans laquelle la cour examinerait les autres moyens par l'effet dévolutif de l'appel ; que l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme a été méconnu, le dossier déposé à l'appui des demandes de permis ne comportant aucune pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation du domaine public ; que l'étude d'impact ne respecte pas les dispositions de l'article R. 122-3 du code de l'environnement, l'impact du projet sur les chiroptères n'ayant pas été convenablement apprécié ; qu'il résulte des dispositions combinées de l'article R. 123-6 du code de l'environnement, de l'article R. 425-9 du code de l'urbanisme et de l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile que le dossier d'enquête publique devait comporter l'accord du ministre de l'aviation civile et du ministre de la défense ; que, si la direction de l'aviation civile nord-est a donné son accord, celui-ci, qui était de nature à éclairer le public sur l'impact du projet sur la sécurité de la navigation aérienne, n'a pas été joint au dossier d'enquête publique ; qu'en outre, ce dossier ne comportait pas la mention des textes qui régissent l'enquête publique et l'indication de la façon dont cette enquête s'insère dans la procédure administrative relative à l'opération considérée ; que l'article NC 6 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune d'Epineau-les-Voves est méconnu par quatre éoliennes, qui sont prévues à moins de 10 mètres de voies publiques ; que l'article NC 7 de ce règlement est également violé, ces mêmes éoliennes ne respectant pas la distance prescrite par rapport aux limites séparatives ; que l'article NC 11 n'est pas respecté par les cinq éoliennes autorisées sur le territoire de cette commune, les dispositions de cet article interdisant le blanc pur ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 29 mai 2012, la clôture de l'instruction a été reportée au 20 juin 2012 ;
Vu le mémoire, enregistré le 14 juin 2012, présenté pour la société Ferme éolienne du Plateau Paradis, tendant aux mêmes fins que précédemment et, en outre, à ce que la cour enjoigne au ministre de l'écologie de justifier de la régularité du dossier d'enquête publique ;
La société requérante soutient, en outre, en premier lieu, que la requête, qui a été régularisée par la production d'un timbre fiscal est, par suite, recevable ; qu'en second lieu, s'agissant des autres moyens invoqués devant le tribunal, elle s'en rapporte à ses écritures de première instance ; qu'ainsi, l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme n'a pas été méconnu, dès lors que le dossier déposé à l'appui des demandes de permis n'avait pas à comporter une pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation du domaine public ; que l'article R. 122-3 du code de l'environnement a été respecté, l'impact du projet sur les chiroptères ayant été convenablement apprécié ; qu'à supposer même que l'avis donné par la direction de l'aviation civile nord-est n'aurait pas été joint au dossier d'enquête publique, cette omission serait sans incidence sur l'information du public ; que ce dossier comportait bien la mention des textes qui régissent l'enquête publique et l'indication de la façon dont cette enquête s'insère dans la procédure administrative relative à l'opération considérée ; que l'article R. 123-6 du code de l'environnement n'a donc pas été méconnu ; que la méconnaissance des articles NC 6 et NC 7 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune d'Epineau-les-Voves ne peut être utilement invoquée, dès lors que les éoliennes ne constituent pas des bâtiments ou des constructions au sens des dispositions de ces articles ; que le fait que la couleur prévue des éoliennes est le blanc ne saurait lui être opposé, dès lors que cette couleur est imposée par la réglementation ; que l'article NC 11 du règlement de dudit plan n'a dès lors pas été méconnu ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 20 juin 2012, la clôture de l'instruction a été reportée au 13 juillet 2012 ;
Vu le mémoire, enregistré le 13 juillet 2012, présenté pour les intimés, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
En application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative, par une ordonnance du 7 août 2012, l'instruction a été rouverte ;
Vu le mémoire, enregistré le 30 août 2012, présenté pour la société Ferme éolienne du Plateau Paradis, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
Vu le courrier du 23 janvier 2013, par lequel la cour, en application de l'article
R. 611-7 du code de justice administrative, a informé les parties du fait qu'elle envisage de soulever d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité des conclusions additionnelles que
M. et MmeK..., M. et Mme D...et M. et Mme V...ont présentées en cours d'instance devant le tribunal administratif de Dijon ;
Vu le mémoire, enregistré le 4 février 2013, présenté pour les intimés, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
Les intimés soutiennent, en outre, que l'accord du ministre de l'aviation civile sur le projet a été émis par une autorité incompétente ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 février 2013, présenté pour la société Ferme éolienne du Plateau Paradis, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
La société requérante soutient, en outre, que le ministre de l'aviation civile doit être regardé comme ayant tacitement émis un avis favorable sur le projet, lequel ne saurait être entaché d'incompétence ;
Vu le mémoire, enregistré le 7 février 2013, présenté pour les intimés, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistré le 12 février 2013, présenté pour la société Ferme éolienne du Plateau Paradis ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 février 2013 :
- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
- et les observations de MeM..., représentant le cabinet Volta, avocat de la société Ferme éolienne du Plateau Paradis, et celles de M.N..., un des intimés ;
1. Considérant que, par trois arrêtés du 25 novembre 2009, le préfet de l'Yonne a accordé à la société Ferme éolienne du Plateau Paradis des permis de construire en vue de l'édification d'un parc de dix éoliennes sur le territoire des communes de Charmoy, Epineau-les-Voves et Villemer ; que des habitants des communes situées à proximité de ce projet ont saisi le tribunal administratif de Dijon de 17 demandes d'annulation de ces arrêtés ; que, par un jugement du 22 septembre 2011, après avoir joint ces demandes, le tribunal a annulé les trois permis de construire litigieux ; que, par la présente requête, la société Ferme éolienne du Plateau Paradis relève appel de ce jugement ;
Sur la fin de non-recevoir :
2. Considérant que la société requérante s'est acquittée de la contribution pour l'aide juridique prévue par l'article 1635 bis Q du code général des impôts ; que la fin de non-recevoir soulevée par les intimés ne peut en conséquence être accueillie ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de la décision attaquée (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier qui a été transmis à la cour par le tribunal administratif de Dijon que les trois permis de construire attaqués ont été produits dans chacune des 17 demandes dont ce tribunal a été saisi, conformément aux dispositions précitées ; que, par suite, contrairement à ce que soutient la société Ferme éolienne du Plateau Paradis, le tribunal n'a commis aucune irrégularité en s'abstenant d'inviter les demandeurs à régulariser leurs demandes ;
4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ; que, conformément à ces dispositions, le tribunal administratif de Dijon a expliqué, d'une manière suffisamment précise, pour quelles raisons le volet paysager annexé à l'étude d'impact ne permet pas d'apprécier l'incidence du projet sur le secteur sauvegardé de Joigny et l'église classée de Saint-Cydroine ;
Sur la recevabilité des demandes :
5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas (...) de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire, (...), l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. (...) / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt (...) du recours (...) " ;
6. Considérant que, dans leur mémoire introductif d'instance devant le tribunal,
M. et Mme K...se sont bornés à demander l'annulation de l'arrêté du 25 novembre 2009 par lequel le préfet de l'Yonne a délivré un permis de construire à la société Ferme éolienne du Plateau Paradis en vue de l'édification de deux éoliennes sur le territoire de la commune de Villemer (demande n° 1001395) ; que, de même, dans leur mémoire introductif d'instance,
M. et Mme D...ont seulement sollicité du tribunal l'annulation de l'arrêté du 25 novembre 2009 accordant un permis à cette société pour la construction de trois éoliennes sur le territoire de la commune de Charmoy (demande n° 1001403) ; que le mémoire introductif d'instance de M. et Mme V...ne tend également qu'à la seule annulation de ce dernier permis de construire (demande n° 1001411) ; que, dans ces trois demandes, les intéressés ont ensuite sollicité du tribunal, dans leurs mémoires en réplique, l'annulation des deux autres permis également délivrés par le préfet de l'Yonne le 25 novembre 2009 à ladite société pour la construction du parc éolien ; que, toutefois, ces conclusions additionnelles n'ont pas donné lieu à la notification imposée par les dispositions précitées de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; qu'en conséquence, les conclusions de M. et Mme K...tendant à l'annulation des permis de construire délivrés sur le territoire des commune de Charmoy et d'Epineau-les-Voves et les conclusions de M. et Mme D...et de M. et Mme V...tendant à l'annulation des permis de construire délivrés sur le territoire des communes d'Epineau-les-Voves et de Villemer sont irrecevables ; que, par suite c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon a accueilli les conclusions desdites demandes tendant à l'annulation de ces permis de construire ;
Sur la légalité des arrêtés attaqués :
7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions alors applicables de l'article R. 122-3 du code de l'environnement, auquel renvoie l'article L. 553-2 du même code : " I. - Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. / II. L'étude d'impact présente successivement : / 1° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement (...) ; / 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur (...) les sites et paysages, (...) sur la protection des biens et du patrimoine culturel (...) " ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le secteur sauvegardé de Joigny, qui comporte 19 monuments classés ou inscrits, et l'église classée de Saint-Cydroine, des XI° et XII° siècle, qui constitue l'un des édifices romans les plus importants du département de l'Yonne, sont situés à des distances relativement modérées, d'environ respectivement 7 et 4 kilomètres, du projet litigieux de construction d'un parc de dix éoliennes, d'une hauteur de 150 mètres en bout de pale ; qu'en outre, ce secteur sauvegardé et cette église, qui sont séparés du plateau Paradis sur lequel se situe le terrain d'assiette du projet par la vallée de l'Yonne, font face à ce dernier ; que, même si les différences d'altitudes sont minimes dans cette partie faiblement accidentée du département de l'Yonne, le projet sera visible, au moins depuis certaines parties du secteur sauvegardé de Joigny, dont certains monuments dominent la vallée de l'Yonne, et au moins depuis les abords immédiats de l'église de Saint-Cydroine ; que de nombreuses situations de co-visibilité existeront entre le projet, d'une part, ce secteur sauvegardé et cette église, d'autre part ; que, pourtant, le volet paysager de l'étude d'impact ne propose aucun plan de coupe passant par le projet et la commune de Joigny, susceptible de permettre une appréciation de la situation, et ne comporte aucun photomontage depuis le secteur sauvegardé de Joigny lui-même, mais seulement un photomontage depuis un coteau situé en arrière plan de cette commune ; qu'aucun autre document du volet paysager que ce photomontage ne permet d'apprécier les situations de co-visibilité avec le secteur sauvegardé de Joigny ; que, s'agissant de l'église de Saint-Cydroine, alors qu'un plan de coupe fait apparaître que le village de Laroche-Saint-Cydroine, dans lequel est implanté ce monument, sera directement en vis-à-vis du projet, le volet paysager comporte seulement un photomontage depuis les abords de cette église, mais ne propose aucun document susceptible de permettre d'apprécier les situations de co-visibilité ; que, dans ces conditions, la société Ferme éolienne du Plateau Paradis n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a estimé que l'étude d'impact, qui ne permet de porter qu'une appréciation partielle de l'impact du projet sur ledit secteur sauvegardé et ladite église classée, est, par suite, insuffisante ;
9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme : " Le permis (...) doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement " ; qu'aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'environnement : " I. - Les espaces, ressources et milieux naturels, les sites et paysages, la qualité de l'air, les espèces animales et végétales, la diversité et les équilibres biologiques auxquels ils participent font partie du patrimoine commun de la nation. / II. - Leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état et leur gestion sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs (...) " ;
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux, qui est situé au coeur d'un couloir de migration, est susceptible d'être survolé par l'avifaune migratrice, au printemps et en automne, lors des migrations prénuptiale et postnuptiale, et notamment par la grue cendrée, qui fait l'objet d'un programme de protection au niveau européen ; que, toutefois, la largeur de ce couloir de migration est de plusieurs dizaines de kilomètres ; que la ligue de protection des oiseaux de l'Yonne, qui a réalisé l'étude spécifique sur l'avifaune annexée à l'étude d'impact, a constaté que le secteur d'implantation du projet n'est pas celui qui fait l'objet du plus grand nombre de passages d'oiseaux migrateurs, l'axe principal de migration à l'échelle locale étant situé plus à l'est, le long de la vallée de l'Yonne ; que, même si la ligue de protection des oiseaux a estimé que le couloir principal de migration est susceptible de varier d'une année sur l'autre, cette circonstance demeure hypothétique ; que, dans ces conditions, même si les 10 éoliennes projetées, d'une hauteur en bout de pale de 150 mètres, doivent être implantées sur une double ligne, de 4 et 10 machines, sur une longueur d'environ deux kilomètres perpendiculaire à l'axe du couloir de migration, le risque de collision entre les oiseaux migrateurs et les éoliennes demeure très faible, s'agissant notamment de la grue cendrée, dont la hauteur de vol peut atteindre une hauteur supérieure à 200 ou 300 mètres ; qu'en outre, l'étude avifaunistique relève que les oiseaux migrateurs, qui sont particulièrement sensibles au risque d'effarouchement, contournent habituellement les parcs éoliens ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le contournement d'un parc éolien serait susceptible d'entraîner des conséquences notables sur l'avifaune migratrice, s'agissant notamment d'un éventuel affaiblissement des individus ; que la ligue de protection des oiseaux de l'Yonne a émis un avis favorable sur le projet, en ne proposant aucune mesure compensatoire significative pour l'avifaune migratrice ; qu'il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que le préfet de l'Yonne aurait pu émettre une prescription susceptible d'avoir un impact un tant soit peu significatif sur l'avifaune migratrice, et notamment sur la grue cendrée ; qu'une prescription ne pouvant pas substantiellement modifier le projet, les intimés ne peuvent utilement faire valoir que le préfet aurait pu imposer une implantation différente des éoliennes ; que, dans ces conditions, contrairement à ce que le tribunal administratif de Dijon a estimé, en s'abstenant d'émettre toute prescription en application des dispositions précitées de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme, le préfet n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation dans l'application de ces dispositions ;
11. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société Ferme éolienne du Plateau Paradis est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a accueilli les conclusions de M. et Mme K...tendant à l'annulation des permis de construire délivrés sur le territoire des commune de Charmoy et d'Epineau-les-Voves et les conclusions de M. et Mme D...et de M. et Mme V... tendant à l'annulation des permis de construire délivrés sur le territoire des communes d'Epineau-les-Voves et de Villemer ; qu'il y a lieu, dans cette seule mesure, d'annuler ce jugement et de rejeter ces conclusions ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les intimés, qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes, soient condamnés à payer à la société Ferme éolienne du Plateau Paradis la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de cette société le versement d'une somme globale de 1 500 euros au bénéfice des intimés, à l'exception de M. et MmeK..., M. et Mme D...et M. et MmeV..., sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 22 septembre 2011 est annulé en tant que, par ce jugement, le tribunal a accueilli les conclusions de M. et Mme K...tendant à l'annulation des arrêtés du 25 novembre 2009 par lesquels le préfet de l'Yonne a délivré des permis de construire à la société Ferme éolienne du Plateau Paradis sur le territoire des commune de Charmoy et d'Epineau-les-Voves et les conclusions de M. et Mme D...et de M. et Mme V... tendant à l'annulation des arrêtés du 25 novembre 2009 par lesquels cette même autorité administrative a accordé à cette même société des permis de construire sur le territoire des communes d'Epineau-les-Voves et de Villemer.
Article 2 : Les conclusions de M. et Mme K...tendant à l'annulation des arrêtés
du 25 novembre 2009 par lesquels le préfet de l'Yonne a délivré des permis de construire à la société Ferme éolienne du Plateau Paradis sur le territoire des commune de Charmoy et d'Epineau-les-Voves et les conclusions de M. et Mme D...et de M. et Mme V...tendant à l'annulation des arrêtés du 25 novembre 2009 par lesquels cette même autorité administrative a accordé à cette même société des permis de construire sur le territoire des communes d'Epineau-les-Voves et de Villemer sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Ferme éolienne du Plateau Paradis est rejeté.
Article 4 : La société Ferme éolienne du Plateau Paradis versera aux intimés, à l'exception de M. et MmeK..., M. et Mme D...et M. et MmeV..., une somme globale de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ferme éolienne du Plateau Paradis, à M. Y... N..., à Mme S...Z..., à M. AF...-AG...AC..., à M. et Mme E...B..., à Mme W...L..., à M. AF...-F...K..., à M. A...R..., à M. F... P..., à M. I... H..., à M. C...AB..., à M. et Mme O...AA..., à M. et Mme F...T..., à M. et Mme U...D..., à M. et Mme AF...-F...AE..., à Mme AD...X..., à M. et Mme J...V...et à M. et Mme G...Q.... Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.
Délibéré après l'audience du 12 février 2013, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président,
M. Zupan, président-assesseur,
M. Chenevey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 mars 2013.
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N° 11LY02790
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