Vu la décision n° 349933 du 28 mars 2013 par laquelle le Conseil d'Etat a, sur le pourvoi de MeC..., mandataire liquidateur de la SARL Electric Industrie, d'une part, annulé l'arrêt n° 09LY01892 du 7 avril 2011 par lequel la Cour de Céans a rejeté la demande de l'intéressé tendant à la condamnation de la société Electricité de France, et, d'autre part, renvoyé l'affaire à la Cour ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 30 juillet 2009, présentée pour Me C..., mandataire liquidateur de la SARL Electric Industrie dont le siège social est Les Barbières, boite postale 26, à Montfaucon-en-Velay (43290) ;
Me C... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800579 du 5 juin 2009, par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à ce que la société anonyme Electricité de France (EDF) soit condamnée à lui verser la somme de 4 070 836 euros en réparation des conséquences dommageables de la méconnaissance par ladite société de l'obligation d'achat d'énergie électrique mise à sa charge ;
2°) de condamner la SA EDF à lui verser la somme de 4 070 836 euros, ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2007 ;
3°) de mettre à la charge de la SA EDF une somme de 7 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que le Tribunal administratif a commis une erreur de droit en se fondant sur une réglementation inapplicable en 1994 ; que même au regard de la réglementation issue de l'arrêté du 23 janvier 1995, la société disposait de toutes les autorisations nécessaires au projet, détenant une autorisation d'utilisation du combustible pétrolier depuis le 2 mai 1994 et alors que n'étaient requis ni un permis de construire ni une autorisation au titre des installations classées ; que le Tribunal administratif a dénaturé les faits en jugeant qu'elle n'était pas propriétaire des matériels nécessaires à son projet en raison de problèmes de financement alors que le matériel a été définitivement réglé le 5 janvier 1995 ; que les juges de première instance ne pouvaient se fonder sur la propriété des matériels alors que dès le 4 février 1994 le ministre a indiqué qu'il n'y a aucun fondement à ce qu'EDF réclame la justification d'une commande ferme de matériel par le producteur ; qu'EDF a commis une faute en se soustrayant à l'obligation d'achat prévue par le décret n° 55-662 du 25 mai 1955, en refusant d'instruire en temps utile la demande de contrat et de raccordement de la SARL Electric Industrie, en exigeant de nouvelles techniques injustifiées et coûteuses puis en exigeant tardivement de nouvelles pièces que la réglementation alors en vigueur n'imposait pas ; qu'elle a subi un manque à gagner calculé sur une quinzaine d'années, durée d'amortissement industriel normal des installations de production et durée habituelle des contrats d'achats conclus avec EDF ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré le 27 novembre 2009, le mémoire présenté pour Electricité de France qui conclut au rejet de la requête ainsi qu'à la condamnation de la requérante au paiement d'une somme de 7 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que la société Electric Industrie ne démontre pas avoir jamais été à même de produire de l'énergie électrique ; que le Tribunal n'a pas appliqué prématurément l'arrêté de 1995 mais a constaté que dès avant la publication de l'arrêté, la requérante n'était pas en mesure de produire de l'énergie électrique ; que la société n'était pas titulaire au 27 janvier 1995 de toutes les autorisations, le permis de construire étant du 22 avril 1995 et la déclaration " installation classée " n'ayant pas été faite avant cette date ; qu'il n'y a pas eu d'erreur de fait à constater qu'elle n'était pas propriétaire des matériels ; que l'absence de signature du contrat n'est pas due à une faute d'EDF ; qu'EDF n'a commis aucune faute lors de l'instruction de la demande, n'étant pas tenue de contracter avec l'ensemble des producteurs formulant une demande mais seulement sous réserve d'aménagements visant à éviter l'entrave au bon fonctionnement du réseau ; qu'elle n'était pas tenue de donner une suite immédiatement favorable à toute demande de signature d'un contrat d'achat ; que le décret du 20 mai 1955 ne fixait aucun délai à EDF pour donner suite à une demande de contrat d'achat, le délai d'instruction de dix-huit mois maximum n'étant prévu que pour les puissances inférieures à 3 000 kw ; que rien ne lui imposait de conclure un contrat avant la publication de l'arrêté du 23 janvier 1995 ; que la société n'avait pas fait les démarches nécessaires à l'obtention des autorisations ; que la société n'a fait parvenir que le 1er décembre 1994 un dossier devant permettre à EDF d'établir " une première approche objective de la centrale dans son environnement " ; que la société n'a déposé sa demande de permis de construire que le 7 février 1995 ; qu'en l'absence d'obligation de contracter, la requérante n'a subi aucun préjudice ; que son évaluation du préjudice est fondée sur des données purement théoriques ;
Vu le mémoire enregistré le 25 mars 2010 pour MeC..., qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et par les motifs, en outre, qu'un protocole d'accord a été conclu entre EDF, le syndicat national des producteurs indépendants d'électricité thermique (SNPIET) et d'autres producteurs ; que la SARL a déposé une demande de permis de construire dès le 17 févier 1994 ; qu'elle a fait une déclaration " installation classée " et avait une autorisation du propriétaire du terrain d'assiette ; qu'elle ne pouvait se lancer dans des investissements immobiliers en l'absence de toute volonté d'instruire de bonne foi de la part d'EDF ; qu'EDF ne justifie pas que sa solution technique n'était pas valable ;
Vu le mémoire enregistré le 21 juin 2010 présenté pour EDF qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les motifs, en outre, qu'elle n'a pas entendu transiger avec la société requérante puisqu'elle n'a commis aucune faute à son égard et n'a donc aucune raison de l'indemniser ; que la lettre produite par la requérante destinée à prouver le dépôt d'une demande de permis de construire à la date du 17 février 1994 ne porte pas sur le bâtiment nécessaire à la centrale faisant l'objet du permis délivré le 22 avril 1995 puisque ce dernier a été demandé le 7 février 1995 ; que la déclaration au titre des installations classées n'a été faite que le 16 février 1995, qu'en conséquence la requérante n'était pas, avant le 27 janvier 1995, en mesure de produire de l'électricité ; qu'EDF ne s'est pas abstenue d'instruire son dossier puisque elle a poursuivi l'instruction en informant la requérante des pièces manquantes comme en atteste un courrier du 14 novembre 1994 ; que la demande d'EDF de recourir à la technique du jeu de barres était justifiée et conforme aux normes alors applicables ; que l'absence de conclusion du contrat résulte des négligences de la société requérante puisque l'achat de la parcelle destinée à accueillir l'installation par la société requérante aurait pu se faire en le subordonnant à une condition suspensive d'obtention du permis de construire et de signature du contrat avec EDF ;
Vu le mémoire enregistré le 23 décembre 2010 présenté pour MeC..., qui soutient qu'EDF ne démontre pas en quoi le cas de la SARL Electric Industrie diffère de ceux ayant fait l'objet de la transaction intervenue avec le syndicat national des producteurs indépendants ; qu'EDF a paralysé le dépôt de la demande de permis de construire en restant dans l'expectative quant au lieu d'implantation de la centrale souhaité par EDF ;
Vu, enregistré le 7 février 2011, le mémoire par lequel la SA EDF conclut aux mêmes fins que précédemment par le moyen, en outre, qu'à l'époque la technique du " circuit bouchon passif " que la société entendait utiliser demeurait expérimentale ;
Vu le mémoire, enregistré le 24 mai 2013, présenté pour EDF, qui persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;
Vu les mémoires enregistrés les 17 juin, 17 juillet 2013, et le mémoire rectificatif enregistré le 20 août 2013, présenté pour MeC..., qui persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;
Vu les mémoires, enregistrés les 19 juillet et 29 août 2013, présenté pour EDF, qui persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;
Vu l'ordonnance en date du 16 juillet 2013, fixant la clôture de l'instruction au 30 août 2013, en application des dispositions des articles R. 613-1 et R. 613-4 du code de justice administrative ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 13 novembre 2013, présentée par MeC... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 ;
Vu le décret n° 55-762 du 20 mai 1955 réglant les rapports entre les établissements visés par les articles 2 et 23 de la loi du 8 avril 1946 et les producteurs autonomes d'énergie électrique ;
Vu le décret n° 94-1110 du 20 décembre 1994 modifiant le décret n° 55-662 du 20 mai 1955 ;
Vu l'arrêté du 23 janvier 1995 du ministre de l'industrie, des postes et télécommunications et du commerce extérieur relatif à la suspension de l'obligation de passer des contrats d'achat pour la production autonome ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 novembre 2013 :
- le rapport de M. Besse, premier conseiller,
- les conclusions de M. Lévy Ben Cheton, rapporteur public,
- les observations de MeB..., représentant MeC...,
- les observations de MeD..., représentant EDF,
- et les observations de M.A..., dirigeant de la SARL Electric Industrie ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SARL Electric Industrie, dont Me C...est le mandataire judiciaire, avait pour activité la production d'énergie électrique ; que, le 19 janvier 1994, elle a présenté à Electricité de France (EDF) une demande de raccordement au réseau et de contrat d'achat de cette énergie, en application de l'article 1er du décret du 20 mai 1955 réglant les rapports entre les établissements visés par les articles 2 et 23 de la loi du 8 avril 1946 et les producteurs autonomes d'énergie électrique, pour un projet de centrale thermique située à Sainte-Sigolène (Haute-Loire) ; que le Gouvernement a prévu, par un décret du 20 décembre 1994 la possibilité de suspension pour trois années de l'obligation d'achat, selon des modalités définies par un arrêté du 23 janvier 1995, publié le 27 janvier 1995 ; que, par courrier du 6 février 1995, EDF a informé la SARL Electric Industrie qu'elle ne poursuivrait pas l'instruction de sa demande, dès lors que son dossier ne comprenait pas les autorisations administratives requises par l'arrêté du 23 janvier 1995 ; que la SARL Electric Industrie, estimant que le rejet de sa demande et le retard pris dans l'examen de son dossier étaient la conséquence de carences fautives d'EDF, a demandé à cette dernière l'indemnisation du préjudice subi à raison de l'abandon de son projet ; que Me C...relève appel du jugement du 5 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;
2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 1er du décret du 20 mai 1955 dans sa rédaction en vigueur à la date de la demande : " Electricité de France sera tenue de recevoir sur les réseaux qu'elle exploite, sous réserve qu'il n'en résulte aucune entrave au bon fonctionnement de la distribution, et ce dans les conditions fixées ci-après, l'énergie produite dans les installations visées aux 3e alinéa (paragraphes 3 à 6), et 4e alinéa de l'article 8 de la loi du 8 avril 1946 modifiée par la loi du 2 août 1949. Elle sera tenue également de passer un contrat pour l'achat de l'énergie produite dans ces installations. " ; qu'aux termes du troisième alinéa de ce même article, dans sa rédaction issue du décret du 20 décembre 1994 : " L'obligation de passer un contrat d'achat peut être suspendue, par arrêté du ministre chargé de l'énergie, pour une durée déterminée, sur tout ou partie du territoire national, pour l'ensemble des installations de production ou pour celles répondant à une demande d'électricité de caractéristiques définies (base, semi-base ou pointe), lorsqu'il est constaté que les moyens de production existants sont suffisants pour faire face, à tout instant, à la demande correspondante dans des conditions économiques satisfaisantes de production, transport et distribution. (...) /Les dispositions de l'arrêté de suspension ne sont pas applicables aux projets d'installations pour la réalisation desquels, à la date de sa publication au Journal officiel de la République française, le producteur a : a) Présenté par écrit à Electricité de France une demande de raccordement ou de contrat d'achat ; b) Obtenu les autorisations administratives correspondantes, dont la liste est précisée par ledit arrêté. " ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 23 janvier 1995, publié le 27 janvier 1995 : " L'obligation pour Electricité de France et les organismes de distribution électrique visés à l'article 23 de la loi du 8 avril 1946 modifiée de passer un contrat d'achat, prévue par le décret du 20 mai 1955 modifié, est suspendue, pour l'ensemble des installations de production, sur le territoire métropolitain couvert par des réseaux interconnectés, pour une durée de trois ans à compter de la publication du présent arrêté. " ; qu'aux termes de l'article 2 de cet arrêté : " La liste des autorisations administratives dont il est fait mention au b du cinquième alinéa de l'article 1er du décret du 20 mai 1955 modifié est la suivante : - permis de construire ; - autorisation applicable aux centrales thermiques produisant de l'énergie électrique et utilisant exclusivement ou principalement des combustibles pétroliers, en application du décret n° 91-482 et de l'arrêté du 15 mai 1991 ; - autorisation au titre des installations classées en application du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977, dans la mesure où elles sont nécessaires à la réalisation du projet d'installation. " ;
3. Considérant qu'EDF a refusé de signer un contrat d'achat avec la SARL Electric Industrie au motif que, le 27 janvier 1995, date de publication de l'arrêté du 23 janvier 1995 susvisé, elle n'avait pas obtenu de permis de construire ; que la société n'établit pas que son projet de centrale thermique comprenant quatre groupes électrogènes d'une puissance totale de 6 620 kilowatts était dispensé de permis de construire ; que, toutefois, si l'instruction des demandes présentées au titre de l'article 1er du décret du 20 mai 1955 n'était pas enserrée dans un délai fixé par des textes, EDF était tenue de les examiner dans un délai raisonnable ; qu'un retard dans l'instruction de la demande est susceptible de constituer une faute engageant la responsabilité du concessionnaire public ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 19 janvier 1994, la SARL Electric Industrie a présenté à EDF une demande de raccordement au réseau électrique et de contrat d'achat de cette énergie ; que, le 1er février suivant, EDF lui a demandé de fournir, dans un premier temps, un dossier sommaire, composé d'un plan de situation et d'une description des caractéristiques électriques de la génératrice, éléments à partir desquels une étude de faisabilité du projet devait être réalisée et une définition des conditions techniques de raccordement effectuée ; que le courrier précisait que, dans un deuxième temps, après réception des conclusions de l'étude préliminaire, la SARL Electric Industrie devrait fournir les autorisations administratives nécessaires ; qu'il est constant que la société a transmis ce dossier technique le 20 février 1994 ; que, par courrier du 24 mars 1994, le responsable de la section relations clientèles EDF Grand Velay informait cette dernière qu'eu égard aux projets de modification du cadre réglementaire, qui conduiraient à supprimer l'obligation d'achat d'EDF à l'égard des nouvelles installations de production autonome, tout engagement était différé jusqu'à nouvel ordre ; que, malgré plusieurs relances de la SARL Electric Industrie, les 29 mars, 3 mai et 10 mai 1994, EDF ne lui a envoyé aucune étude de faisabilité ; que, le 14 novembre 1994, après que le ministre de l'industrie eut rappelé à EDF qu'elle ne pouvait différer toutes les demandes de raccordement, et après que, le 24 octobre 1994, la SARL Electric Industrie eut, une nouvelle fois, interrogé l'entreprise publique sur les dispositions qu'elle envisageait de prendre à propos de son projet d'implantation d'une unité de production autonome d'électricité, EDF l'a priée de faire parvenir différents documents, dont le permis de construire, envoi suite auquel elle lui ferait connaître les dispositions pratiques concernant la mise en oeuvre du projet ; que, par courrier du 1er décembre 1994, la société a transmis une copie du dossier ainsi que l'autorisation délivrée par la DRIRE en application du décret n° 91-482, indiquant par ailleurs que l'obtention du permis de construire serait une simple formalité ;
5. Considérant qu'EDF ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article 27 du cahier des charges type de la concession qui, en tout état de cause, fixent un délai pour le raccordement au réseau des installations et non pour la signature du contrat d'achat ; que, par ailleurs, et dès lors que le fait générateur du préjudice invoqué par Me C...est antérieur à la mise en place du régime prévu par le décret du 20 décembre 1994 et l'arrêté du 23 janvier 1995 susvisés, EDF ne peut utilement se prévaloir, pour s'exonérer de sa responsabilité, des règles fixées par ces dispositions pour la détermination des projets exclus de la suspension, la mise en place de telles mesures transitoires n'excluant pas la réparation de préjudices nés de fautes antérieures ;
6. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, il ne résulte pas de l'instruction qu'EDF ait procédé à une instruction du dossier de la SARL Electric Industrie entre le 20 février 1994, date à laquelle celle-ci a transmis le dossier technique sur la base duquel devait être réalisée une étude de faisabilité, et le 14 novembre 1994 ; qu'EDF ne pouvait se prévaloir d'une éventuelle modification ultérieure des règles relatives à l'achat d'électricité pour justifier son inaction ; qu'il ne peut être reproché à la SARL Electric Industrie de n'avoir pas sollicité pendant cette période la délivrance d'un permis de construire, sur un projet qui n'était au demeurant pas totalement défini, s'agissant notamment des conditions de raccordement, dès lors, d'une part, qu'aucune disposition législative ou réglementaire alors applicable ne subordonnait la signature d'un contrat à l'obtention préalable de cette autorisation et, d'autre part, qu'EDF avait indiqué, dans son courrier du 1er février 1994, que la fourniture de ces documents ne serait exigée que postérieurement à la réalisation d'une étude de faisabilité, laquelle n'a pas été faite ; que, si, par courrier du 14 novembre 1994, EDF a demandé à la SARL Electric Industrie de produire un permis de construire, elle n'a ni précisé expressément que la production de ce document était une condition préalable obligatoire à l'examen de sa demande ni fixé de délai pour la production de cette autorisation ; qu'ainsi, et compte tenu du délai ayant séparé cette demande de la date à laquelle la SARL Electric Industrie devait avoir obtenu la délivrance du permis de construire, date butoir dont cette société ne pouvait connaître l'existence, la négligence de la SARL Electric Industrie, à la supposer même établie, ne peut être regardée comme une faute ayant contribué au préjudice dont elle demande la réparation, de nature à exonérer partiellement EDF, qui n'a pas instruit la demande dans un délai raisonnable, de sa responsabilité ;
7. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 1er du décret du 20 mai 1955 qu'EDF aurait été tenue, si la SARL Electric Industrie avait disposé d'un permis de construire le 27 janvier 1995 de faire droit à sa demande de raccordement au réseau et de contrat d'achat de cette énergie, sauf s'il en résultait une entrave au bon fonctionnement de la distribution ; qu'EDF ne produit aucun élément qui établirait que le projet de la SARL Electric Industrie aurait pu entraver le bon fonctionnement de la distribution d'électricité ; que, par ailleurs, elle ne peut prétendre qu'il n'est pas certain que celle-ci se serait vu délivrer un permis de construire, dès lors qu'il résulte de l'instruction qu'un permis de construire lui a été délivré le 22 avril 1995, suite à sa demande du 7 février 1995 ; qu'enfin, si la SARL Electric Industrie n'était pas propriétaire de son matériel, le 27 janvier 1995, il n'est pas établi que celle-ci, qui a pu choisir d'attendre l'accord d'EDF avant d'en faire l'acquisition, n'aurait pu en disposer ultérieurement, alors au demeurant qu'il résulte de l'instruction qu'elle avait versé un acompte de 2,85 millions de francs à la société Alsthom ; que, dans ces conditions, la SARL Electric Industrie établit la réalité de son préjudice, résultant du manque à gagner sur le contrat qu'elle devait signer, lequel est directement lié à la faute commise par EDF dans l'instruction de son dossier ;
8. Considérant qu'en vertu de l'article 1er du décret du 20 mai 1955, le contrat d'achat de l'énergie produite peut, à la demande du producteur, être passé pour une durée au moins égale à celle de l'amortissement normal de ses installations ; qu'il y a lieu de déterminer le montant du manque à gagner en tenant compte d'une durée de contrat égale à l'amortissement normal des installations de la SARL Electric Industrie ;
9. Considérant, toutefois, que les documents produits par la SARL Electric Industrie, et notamment l'expertise réalisée en 2000, à la demande du Syndicat national des Producteurs Indépendants d'Electricité Thermique, laquelle porte sur des données générales et ne concerne pas spécifiquement l'installation qui devait être réalisée à Sainte-Sigolène, ne permet pas de déterminer le montant du préjudice subi par la SARL Electric Industrie pendant cette période ; qu'il y a lieu de faire procéder à une expertise aux fins de déterminer ce manque à gagner ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il sera, avant de statuer sur les conclusions de la requête, procédé à une expertise en vue de déterminer le manque à gagner résultant, pour la SARL Electric Industrie, de l'absence de signature d'un contrat d'achat de l'énergie électrique qu'elle devrait produire, sur la durée normale d'amortissement de son matériel, à compter de la date à laquelle l'investissement aurait dû entrer en fonction.
Article 2 : L'expert sera désigné par le président de la Cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative et se fera communiquer tout document utile à sa mission.
Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à MeC..., mandataire liquidateur de la SARL Electric Industrie, et à la SA EDF.
Délibéré après l'audience du 12 novembre 2013 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Samson, président-assesseur,
M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 novembre 2013.
''
''
''
''
2
N° 13LY00943
gt