Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 février2013, présentée pour M. C...B..., domicilié ...;
M. B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1003922 du 13 novembre 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 décembre 2004 du préfet du Rhône refusant l'échange de son permis de conduire algérien contre un permis français ;
2°) d'annuler la décision du 21 décembre 2004 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de procéder à l'échange demandé sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 2 000 euros au titre des articles 37 alinéa 2 de la loi 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. B...soutient que, durant son séjour en Algérie de 1986 au 2 octobre 2004, il a obtenu son permis de conduire en mars et décembre 2003, pour les catégories B et C et en juillet 2004 pour, la catégorie D ; que sa résidence habituelle en Algérie résulte des attestations de résidence et de recensement produites ; que, par décision du 21 décembre 2004, le préfet du Rhône a rejeté sa demande d'échange de son permis de conduire algérien contre un titre français ; que ce refus a été confirmé par décision du 2 avril 2009 ; que ces décisions lui ont été notifiées par courrier recommandé du 14 avril 2010 ; que c'est à tort que le préfet lui a opposé le caractère douteux, voire mensonger des pièces fournies ; que les pièces versées au débat démontrent qu'il a obtenu son permis de conduire algérien durant son séjour, de 1986 au 2 octobre 2004, en Algérie, où il avait incontestablement fixé sa résidence normale à titre permanent ; qu'il a produit devant le Tribunal administratif de nombreuses preuves de son séjour de dix ans en Algérie, soit une durée largement supérieure à six mois exigée par l'article 7 de l'arrêté du 8 février 1999 ; que la jurisprudence accorde une valeur probante aux documents de caractère administratif émanant d'une institution publique ; que tel est le cas en l'espèce ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 6 juin 2013, présentée pour M.B... ;
Vu l'ordonnance en date du 2 septembre 2013 portant clôture de l'instruction au 23 septembre 2013 ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 septembre 2013, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;
Le ministre soutient que les pièces fournies par M. B...ne démontrent pas qu'il a bien résidé plus de six mois de façon permanente en Algérie ; qu'en effet, s'il produit une attestation de recensement, il ne produit pas l'attestation d'immatriculation auprès du consulat prévu par l'arrêté du 8 février 1999 ;
Vu la décision du 26 février 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle, près le Tribunal de grande instance de Lyon, a accordé l'aide partielle à M. B...;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu l'arrêté du 8 février 1999 du ministre de l'équipement, des transports et du logement fixant les conditions de reconnaissance et d'échange des permis de conduire délivrés par les Etats n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Vu la décision par laquelle le président de la formation du jugement a, sur le fondement de l'article L. 732-1 du code de justice administrative, décidé, sur proposition du rapporteur public, de dispenser celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 novembre 2011 le rapport de M. Wyss, président de chambre, rapporteur ;
1. Considérant que M.B..., qui possède la double nationalité française et algérienne, a sollicité l'échange de son permis de conduire délivré par les autorités algérienne, les 25 mars 2003 (catégorie B), 18 décembre 2003 (catégorie C) et 4 juillet 2004 (catégorie D), contre un permis français ; que, par décision du 21 décembre 2004, le préfet du Rhône a refusé l'échange demandé ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur les conclusions à fins d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de l'arrêté du 8 février 1999 susvisé, alors en vigueur : " 7.1. Pour être échangé contre un titre français, tout permis de conduire national, délivré par un Etat n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen, doit répondre aux conditions suivantes : / (...) 7.1.3. Avoir été obtenu (...) pour un ressortissant français, pendant un séjour permanent de six mois minimum dans l'Etat étranger ; / (...) 7.2. En outre, son titulaire doit : / (...) 7.2.3. S'il est français, apporter la preuve qu'il avait établi sa résidence normale à titre permanent pendant une période d'au moins six mois sur le territoire de l'Etat étranger qui lui a délivré le permis de conduire. / La preuve de ce séjour permanent doit être fournie par la présentation d'une attestation d'immatriculation de l'intéressé auprès du consulat de France dans la circonscription duquel il avait sa résidence. / Les Français qui ne se seront pas fait immatriculer ou dont l'immatriculation n'est plus valide devront fournir une attestation de résidence ou de changement de résidence établie par le consulat du lieu de leur résidence. / S'il est français et possède également la nationalité de l'Etat étranger qui lui a délivré le permis de conduire, apporter la preuve de sa résidence pendant six mois sur le territoire de cet Etat conformément aux paragraphes précédents ou, à défaut, à l'aide de tout document approprié présentant des garanties d'authenticité ; (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'un Français possédant également la nationalité de l'Etat qui lui a délivré un permis de conduire dont il demande l'échange doit établir qu'il a obtenu celui-ci au cours d'un séjour continu de six mois au moins dans cet Etat ; que la preuve de ce séjour doit être apportée par une attestation établie par le consulat du lieu de séjour ou par tout document présentant des garanties d'authenticité ;
4. Considérant que M. B...fait valoir que, né à Lyon en 1986, il a fixé sa résidence habituelle en Algérie de 1986 au 2 octobre 2004, date de son retour en France ; qu'à l'appui de cette allégation il produit entre autres, une attestation de recensement, établie le 28 août 2002, par le chargé des affaires militaires du Consulat général de France à Annaba (Algérie), de laquelle il ressort qu'à cette date M. B...résidait à Tebessa (Algérie) ; que différents tampons figurant sur son passeport algérien établissent sa présence en Algérie notamment les 10 juin 2002, 25 décembre 2002, 25 décembre 2003 ; que des fiches émanant des autorités de la commune de Tebessa attestent de la résidence de M. B...dans cette ville notamment les 25 mars 2003 et 22 décembre 2003 ; que d'autre part, en appel, le requérant produit les copies de trois carnets de rendez-vous pour des leçons pour l'obtention du permis de conduire susmentionné ; qu'il résulte de ces documents, dont la valeur probante n'est pas contestée, qu'à la fréquence de plusieurs par semaine, ces leçons ont eu lieu des 12 septembre 2002 au 8 février 2003, en ce qui concerne le permis de conduire B délivré le 25 mars 2003 et, des 3 mai 2003 au 20 octobre 2003, pour le permis de conduire C délivré le 18 décembre 2003 ; que, dans ces conditions, M. B...doit être regardé comme établissant avoir obtenu son permis de conduire, délivré le 25 mars 2003 par les autorités algériennes, au cours d'une résidence permanente d'au moins six mois en Algérie ; que, dès lors, le préfet du Rhône ne pouvait légalement refuser l'échange au motif que M. B...ne justifiait pas d'un séjour continu en Algérie durant une période de six mois englobant la date d'obtention du permis de conduire ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
6. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement, toutes les conditions posées à l'échange étant remplies, qu'il soit enjoint à l'administration d'échanger le permis de conduire algérien délivré à M. B...contre un permis français ; qu'il lui sera imparti à cet effet un délai d'un mois ; qu'il n'y a pas lieu toutefois d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions présentées au titre des frais non compris dans les dépens :
7. Considérant que M. B...est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Allouche, avocat de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Allouche de la somme de 1 000 euros ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1003922 du Tribunal administratif de Lyon en date du 13 novembre 2012 et la décision du préfet du Rhône du 21 décembre 2004 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône d'échanger le permis de conduire algérien de M. C...B...contre un permis de conduire français dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera, au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 000 euros à Me Allouche, désigné par le bâtonnier en remplacement de MeA..., sous réserve, pour cet avocat, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...au ministre de l'intérieur et au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 14 novembre 2013, où siégeaient :
- M. Wyss, président de chambre,
- M Gazagnes, président assesseur,
- M Dursapt, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 décembre 2013.
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N° 13LY00348