Vu, I, la requête, enregistrée le 28 mars 2013, sous le n° 13LY00784, présentée pour la commune de Crolles, prise en la personne de son maire en exercice ;
La commune de Crolles demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0904338 du 28 janvier 2013 du Tribunal administratif de Grenoble qui a annulé l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 9 avril 2009 déclarant d'utilité publique la construction d'une digue pare-éboulis du secteur de Fragnès ainsi que la décision implicite du préfet de l'Isère portant refus d'annuler cet arrêté ;
2°) de mettre à la charge de l'Association Trait d'Union la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La commune de Crolles soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a estimé que les travaux objet de la décision attaquée, consistant en la mise en place d'un fossé piège à blocs terrassé avec établissement d'un parement raidi, la mise en place de pneus usagés non réutilisables avec l'apport de géotextiles et de matériaux permettant de les solidariser, l'édification d'un ouvrage de correction torrentielle, la création de puits d'écoulement des eaux, l'ouverture d'une piste à l'aval permettant la maintenance de l'ouvrage, l'engazonnement et le débroussaillage de terrains environnants n'étaient pas de nature à bénéficier des exceptions visées par l'article R. 122-6 du code de l'environnement selon lesquelles les travaux d'affouillements et d'exhaussements du sol et de coupe ou d'abattage d'arbres ne sont pas soumis à la procédure d'étude d'impact et a jugé que ces travaux auraient dû en conséquence être soumis à la procédure de réalisation préalable d'une telle étude d'impact ; que les dispositions de l'article R. 122-9 7° du code de l'environnement applicables à la date de la décision attaquée qui précisent la nature des opérations étant dispensées de la réalisation d'une étude d'impact devaient en effet s'appliquer à ces travaux, dès lors que la construction d'un merlon prévue par ce projet, emportait la restauration des terrains en montagne et dès lors que l'opération était d'un montant inférieur à 1 900 000 euros ;
- c'est à tort que le tribunal a jugé que la notice d'impact annexée au projet n'avait pas suffisamment envisagé les effets de l'ouvrage sur les réseaux hydrologiques et ne répondait pas aux exigences posées par l'article R. 122-3 du code de l'environnement qui dispose que l'étude ou la notice d'impact doit présenter " une analyse des effets directs et indirects temporaires et permanents du projet sur l'environnement et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau ", dès lors que ce texte ne s'applique qu'aux études d'impact et non aux seules notices d'impact, laquelle notice suffisait eu regard à la faible ampleur du projet ; que cette notice décrivait de manière suffisante les incidences éventuelles des travaux projetés sur les sources d'eau avoisinantes et répondait ainsi parfaitement aux exigences réglementaires ;
- c'est à tort que le tribunal a jugé que le projet attaqué devait être regardé comme constituant une phase s'intégrant à un programme plus vaste de travaux dans le cadre d'un projet fractionné au motif que l'ouvrage prévu aurait complété le dispositif de protection établi sur Crolles et aurait prolongé les quatre ouvrages déjà mis en place dans la vallée du Grésivaudan et qu'en conséquence, et en application des dispositions de l'article R. 122-3 IV du code de l'environnement, la réalisation de cet ouvrage aurait dû être précédée d'une étude d'impact ; que les dispositions de ce texte ne pouvaient en effet s'appliquer à cette opération puisqu'elles ne concernent que celles devant être précédées de la réalisation d'une étude d'impact alors que l'opération en cause n'exigeait que la réalisation d'une simple notice d'impact ; qu'aucune connexité étroite ne peut, au surplus, être reconnue entre le dispositif de protection établi sur Crolles, tel que prévu dans le projet des travaux en cause, et les quatre ouvrages déjà mis en place dans la vallée du Grésivaudan ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2013, présenté pour l'Association Trait d'Union, dont le siège est chez M. Wormser, Cidex 204, 382 avenue de la Résistance à Crolles (38920), représentée par son président, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Crolles en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
L'Association Trait d'Union soutient que :
- la requête introductive d'appel de la commune est irrecevable dès lors que la délibération du conseil municipal en date du 28 mars 2008 ne donne au maire qu'une compétence pour défendre la commune dans les actions intentées contre elle et non compétence pour intenter une action en appel ;
- c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les travaux objet de la décision attaquée n'étaient pas de nature à pouvoir bénéficier des exceptions visées par l'article R. 122-6 du code de l'environnement et auraient dû être précédés de la réalisation d'une étude d'impact préalable, sans que la commune soit désormais fondée à soutenir que le projet querellé relèverait de l'exception visée au 14° de l'article R. 122-5 du même code, dès lors que la restauration des terrains de montagne visée aux articles R. 122-5 et R. 122-9 du code de l'environnement ne peut se rapporter à l'ensemble des dispositifs mis en oeuvre pour protéger les populations des risques de glissements de terrain ou de chutes de blocs, seul but visé par l'ouvrage querellé ;
- quand bien-même le projet ne devait-il être soumis qu'à la seule réalisation de la notice d'impact prévue à l'article R. 122-9 du code de l'environnement, l'application de cet article devra être écarté dès lors qu'il est contraire aux dispositions de l'article L. 122-1 du même code ; que les dispositions de l'article R. 122-9 du code de l'environnement sont de même inconventionnelles au regard des objectifs et des dispositions précises et inconditionnelles de la directive 85-337/CEE concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, telles qu'opposables à l'époque des faits ; que le projet litigieux doit dès lors être regardé comme devant être soumis, en application des dispositions législatives du code de l'environnement comme de celles précitées de la directive 85/337/CEE, à la réalisation préalable d'une étude d'impact ; que le moyen ainsi développé de l'inconventionnalité des dispositions de l'article R. 122-9 du code de l'environnement ne pourra être écarté par la Cour sans au préalable que celle-ci saisisse la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ;
- c'est à bon droit que le tribunal a jugé que la notice d'impact annexée au projet n'avait pas suffisamment envisagé les effets de l'ouvrage sur les réseaux hydrologiques et ne répondait pas aux exigences posées par l'article R. 122-3 du code de l'environnement dès lors que la fragilité hydrologique du secteur concerné par les travaux est connue, qu'il s'agit d'un enjeu environnemental majeur, que les effets de l'ouvrage sur ce point seront majeurs et que la notice d'impact présentée au public pendant l'enquête a explicitement reporté à des études ultérieures cette analyse indispensable ; que la notice d'impact réalisée souffre, au surplus, d'une insuffisance manifeste de l'évaluation environnementale des conséquences du projet ;
- c'est à bon droit que le tribunal a jugé que le projet attaqué devait être regardé comme constituant une phase au sein d'un programme plus vaste de travaux dans le cadre d'un projet fractionné puisque l'ouvrage prévu, ainsi que cela était clairement indiqué en page 2 de la notice d'impact, avait pour but de compléter le dispositif de protection déjà établi sur Crolles et prolongeait les quatre ouvrages déjà mis en place dans la vallée du Grésivaudan et dès lors que l'ouvrage projeté s'inscrivait bien dans un programme unique, fractionné dans le temps et dont l'évaluation environnementale aurait donc dû présenter l'ensemble de ses effets à l'échelle du programme, ce qui aurait nécessité la réalisation préalable d'une étude d'impact ;
- à titre subsidiaire, l'intimée, dans le cadre éventuel de l'effet dévolutif de l'appel, soutient comme en première instance que :
- la notice d'impact produite souffrait d'un certain nombre d'inexactitudes, d'omissions ou insuffisances de nature à vicier la procédure suivie, dès lors qu'elle ne précisait pas les effets de l'urbanisation certaine des secteurs situés à l'aval de l'ouvrage, ne présumait pas davantage des effets probables de l'utilisation de pneus usagers pour structurer l'ouvrage alors que leur innocuité environnementale n'était pas démontrée, ne précisait pas le régime de protection à apporter aux nombreuses espèces d'animaux protégés, ne couvrait pas l'ensemble des espèces végétales dont la présence sur le site est attestée et notamment rapportée dans les arrêts préfectoraux des 20 janvier 1982, 4 décembre 1990, 10 octobre 2010, qui doivent également être protégées ;
- le coût réel de l'opération, qui s'est finalement élevé non pas à 957 000 euros mais à 1 300 000 euros, justifiait à lui seul la réalisation d'une étude d'impact ;
- le projet litigieux n'était pas conforme au Plan d'occupation des sols (POS) et la mise en compatibilité dudit POS par l'acte querellé n'a pas porté sur les dispositions de son règlement qui interdisent l'implantation d'un tel ouvrage dans ce secteur ;
- l'utilité publique de ce projet n'est pas établie, alors que la seule protection des terrains déjà bâtis n'aurait pas nécessité la construction d'un tel ouvrage s'il avait été décidé et que, par application du principe de précaution, les terrains non bâtis auraient dû le rester pour empêcher toute apparition d'enjeux nouveaux ; que l'expropriant pouvait réaliser cette protection par la simple pose d'écrans de filets pare-blocs de type ASM dont l'emprise au sol et l'effet environnemental sont quasi-nuls ; que le choix de l'utilisations de vieux pneus était contraire à l'objectif poursuivi de prévention de la pollution et des risques d'incendie ;
Vu le mémoire, enregistré le 17 juin 2013, présenté pour la commune de Crolles, qui conclut aux mêmes fins que la requête par la reprise des mêmes moyens et qui soutient en outre que :
- l'association Trait d'Union est irrecevable à produire un mémoire en défense devant la Cour dès lors que ses statuts prévoient uniquement la possibilité pour elle d'agir devant les " tribunaux " ;
- le maire de la commune a qualité pour intenter une action en appel devant la Cour au nom de la commune qui a toujours la qualité de défendeur ; par délibération du conseil municipal du 28 mai 2008, le conseil municipal a, au surplus, autorisé le maire à poursuivre devant la Cour la procédure ;
- l'association Trait d'Union n'est pas fondée à soutenir que la restauration des terrains en montagne, prévue au code de l'environnement, ne correspondrait ni à la définition qui en est donnée aux articles L. 142-7 à L. 142-9 du code forestier, ni au service en lui-même qui est rattaché à l'Office national des forêts ; qu'il était dès lors parfaitement possible pour la commune de faire application de l'exception prévue à l'article R. 122-9 7° du code de l'environnement alors applicable ;
- la mise en oeuvre des objectifs et dispositions précises et inconditionnelles de la directive 85/377/CEE n'impose nullement, contrairement à ce que soutient l'Association Trait d'Union, le recours préalable à la procédure d'étude d'impact ; qu'ainsi le gouvernement français a procédé à une transposition correcte de la directive précitée en distinguant " étude d'impact " et " notice d'impact " en fonction du seuil financier et/ou des catégories de constructions ; qu'il appartiendra à la Cour, qui n'est nullement tenue de se plier à une telle obligation dès lors que l'arrêt qu'elle rendra demeurera susceptible d'être frappé d'un pourvoi en cassation, de décider de l'opportunité de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ainsi que le propose l'intimée ;
- contrairement à ce que soutient l'intimée, l'exigence réglementaire de la notice d'impact n'exigeait pas qu'il fût procédé pour chaque élément de l'environnement à un examen détaillé exhaustif puisqu'une approche générale des incidences éventuelles de la construction sur l'environnement suffisait ; que l'intimée n'établit pas, au demeurant, que l'éventuelle insuffisance de la notice d'impact quant à la situation hydrologique, aurait été de nature à nuire à l'information complète de la population ;
- l'intimée n'établit pas davantage que l'éventuelle insuffisance de la notice d'impact quant au caractère éventuellement fractionné des travaux objets du projet, aurait pu nuire à l'information complète de la population ;
- les dispositions de l'article R. 122-3 du code de l'environnement n'imposaient nullement que la notice d'impact portât sur les effets que pourrait avoir la mise en place de l'ouvrage sur le développement de l'urbanisation ;
- la notice d'impact mentionnait suffisamment les espèces animales et végétales dont la protection était à prendre en compte ;
- le règlement du plan d'occupation des sols du secteur considéré prévoyait bien, contrairement à ce qui est soutenu, l'implantation possible d'équipements publics et d'équipements d'infrastructure ; que l'ouvrage prévu est donc parfaitement compatible avec ledit règlement ;
- l'utilité publique de l'opération projetée est parfaitement démontrée ; que contrairement à ce qui est soutenu la création d'une digue n'a nullement pour but d'étendre l'urbanisation mais seulement de protéger les habitations déjà existantes ;
- il n'est nullement démontré qu'un risque grave pour l'environnement ou pour la santé puisse résulter de l'accomplissement des travaux et puisse ainsi justifier, au nom du respect du principe de protection soulevé par l'intimé pour la première fois en appel, l'abandon dudit projet ; que la commune entretient depuis plusieurs années la totalité de l'emprise des ouvrages parant les risques d'incendie de forêt et la digue projetée a pour but de faire office de pare-feu ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 juin 2013, présenté pour l'Association Trait d'Union, qui conclut au rejet de la requête pour les mêmes motifs que précédemment, prend acte de la délibération du conseil municipal de Crolles du 28 mai 2013 qui a purgé la requête d'appel du défaut de qualité pour agir de son signataire, et soutient en outre que :
- elle est recevable à défendre en appel ainsi que le stipulent ses statuts et son président a été autorisé à représenter celle-ci tout au long de l'instance engagée ;
- le caractère incomplet et incorrect de la transposition par la France de la directive 85/337/CEE est largement affirmé et reconnu par l'administration et l'Etat français eux-mêmes ainsi que cela ressort des travaux parlementaires relatif au projet de loi portant engagement national pour l'environnement annexé au procès-verbal de la séance du 12 janvier 2009 de l'Assemblée nationale ; qu'il appartient en conséquence à la Cour, dans l'hypothèse où elle estimerait devoir écarter le moyen tiré de l'inconventionnalité des dispositions de l'article R. 122-9 du code de l'environnement, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle sans que puisse être utilement soutenu qu'un tel pouvoir ne lui appartiendrait pas ;
- le contenu de la notice d'impact, du fait de son caractère insuffisant, ne permettait pas en tout état de cause au public d'apprécier effectivement les effets du projet de construction de la digue sur l'environnement ;
- l'effet conjugué de la réalisation de l'ouvrage lors des différentes phases de son exécution est parfaitement démontré ;
- l'appelante ne démontre pas la réalité des études complémentaires ou annexes de nature à prévenir les atteintes portées à la faune et à la flore sauvage par l'ouvrage projeté ;
- les risques d'incendies et d'atteintes possibles à l'environnement du fait de la réalisation de l'ouvrage qui justifiaient l'abandon de ce projet par application du principe de protection, demeurent... ;
Vu l'ordonnance en date du 4 décembre 2013 fixant la clôture d'instruction au 9 janvier 2014, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire, enregistré le 19 décembre 2013, présenté pour l'Association Trait d'Union, qui conclut au rejet au rejet de la requête pour les mêmes motifs que précédemment et, en outre, pour le motif que :
- les lacunes manifestes de la notice d'impact quant à la protection des espèces protégées auxquelles le projet querellé portera atteinte sont attestées par les termes du courrier du 27 novembre 2013 du maire de la commune de Croles qui déclare qu'un dossier de dérogation au titre desdites espèces est en cours d'élaboration, démontrant ainsi, si besoin était, les insuffisances flagrantes du dossier présenté au public lors de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 janvier 2014, présenté pour la commune de Crolles, qui conclut aux mêmes fins que la requête par la reprise des mêmes moyens et qui soutient en outre que :
- l'engagement d'une étude relative aux espèces protégées et l'élaboration d'un dossier devant être déposé auprès du conseil national de protection de la nature ne sont pas, en eux-mêmes des évènements de nature à démontrer que l'étude contenue dans la notice d'impact relative à la faune et à la flore, notamment dans ses annexes 1 et 2 qui mentionnaient les espèces protégées, leur statut et qui présentaient les mesures de compensation, aurait été insuffisante ;
Vu l'ordonnance en date du 13 janvier 2014 reportant la clôture de l'instruction au 28 janvier 2014 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire et le mémoire rectificatif, enregistrés les 15 et 20 janvier 2014, présentés pour l'Association Trait d'Union, qui conclut au rejet au rejet de la requête pour les mêmes motifs que précédemment et, en outre, pour le motif que :
- contrairement à ce que soutient la commune de Crolles, l'étude contenue dans la notice d'impact relative à la faune et à la flore, notamment dans ses annexes 1 et 2, ne recensait pas de manière complète les espèces protégées telles qu'existantes antérieurement à la réalisation des opérations de construction projetées ;
Vu, II, le recours enregistré le 29 mars 2013, sous le n° 13LY00798, présenté pour le ministre de l'intérieur ;
Le ministre demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0904338 du 28 janvier 2013 du Tribunal administratif de Grenoble qui a annulé l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 9 avril 2009 déclarant d'utilité publique la digue pare-éboulis du secteur de Fragnès et la décision implicite du préfet de l'Isère portant refus d'annuler cet arrêté ;
Le ministre soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a jugé que les travaux objet de la décision attaquée n'étaient pas de nature à pouvoir bénéficier des exceptions visées par l'article R. 122-6 du code de l'environnement qui dispose que les travaux d'affouillements et exhaussements du sol et de coupe ou d'abattage d'arbres ne sont pas soumis à la procédure d'étude d'impact et auraient dû, dès lors, être soumis à la procédure d'étude d'impact préalable ; que le programme en cause dont le montant était inférieur au seuil de 1 900 000 euros fixé par l'article R. 122-8 du code de l'environnement, n'était en tout état de cause pas soumis à réalisation préalable d'une étude d'impact mais seulement subordonné à la rédaction d'une notice d'impact, conformément aux 6° et 7° de l'article R. 122-6 et de l'article R. 122-9 du code de l'environnement en vigueur à la date de réalisation de l'enquête publique ;
- la notice d'impact présentait suffisamment les effets de la construction de l'ouvrage sur les réseaux hydrologiques ;
- c'est à tort que le tribunal a jugé que le projet attaqué devait être regardé comme constituant une phase au sein d'un programme plus vaste de travaux dans le cadre d'un projet fractionné et qu'en application des dispositions de l'article R. 122-3 IV du code de l'environnement, il devait être précédé d'une étude d'impact, dès lors que les dispositions de ce texte ne pouvaient s'appliquer à cette opération qui n'exigeait que la réalisation préalable d'une simple notice d'impact ;
- l'utilité de ce projet, qui consiste en la mise en place d'une protection pare-éboulis de l'ensemble du secteur du Fragnès situé en contrebas des falaises des Petites Roches afin de protéger les habitants de ce secteur du risque important, ne saurait être contestée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2013, présenté pour l'Association Trait d'Union, dont le siège est au cidex 204 à Crolles (38920), représentée par son président, qui conclut au rejet du recours du ministre de l'intérieur et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
L'Association Trait d'Union soutient que :
- c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les travaux objet de la décision attaquée n'étaient pas de nature à pouvoir bénéficier des exceptions visées par l'article R. 122-6 du code de l'environnement et auraient dû être précédés de la réalisation d'une étude d'impact préalable, sans que le ministre soit désormais fondé à soutenir que le projet querellé relèverait de l'exception visée au 14° de l'article R. 122-5 du même code dès lors que la restauration des terrains de montagne visée aux articles R. 122-5 et R. 122-9 du code de l'environnement ne peut se définir comme l'ensemble des dispositifs susceptibles d'être mis en oeuvre pour protéger les populations des risques de glissements de terrain ou de chutes de blocs, seul but visé par la construction de l'ouvrage projeté ;
- quand bien-même le projet ne devait-il être soumis qu'à la réalisation préalable d'une notice d'impact prévue à l'article R. 122-9 du code de l'environnement, l'application de cet article devra être écarté dès lors qu'il est contraire aux dispositions de l'article L. 122-1 du même code ; que les dispositions de l'article R. 122-9 du code de l'environnement comme le seuil de 1 900 000 euros évoqué par le ministre sont de même inconventionnelles au regard des objectifs et des dispositions précises et inconditionnelles de la directive 85-377/CEE concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, tels qu'opposables à l'époque des faits ; que le projet litigieux doit dès lors être regardé comme devant être soumis, au titre des dispositions législatives du code de l'environnement comme de celles précitées de la directive 85/337/CEE, à la réalisation préalable d'une étude d'impact ; que le moyen ainsi développé de l'inconventionnalité des dispositions de l'article R. 122-9 du code de l'environnement ne pourrait être écarté par la Cour sans au préalable que celle-ci saisisse la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ;
- c'est à bon droit que le tribunal a jugé que la notice d'impact annexée au projet n'avait pas suffisamment envisagé les effets de l'ouvrage sur les réseaux hydrologiques existants et ne répondait pas aux exigences posées par l'article R. 122-3 du code de l'environnement dès lors que la fragilité hydrologique du secteur concerné par les travaux est connue, qu'il s'agit d'un enjeu environnemental majeur, que les effets à venir de l'ouvrage sur ce point seront majeurs et que la notice d'impact présentée au public pendant l'enquête a explicitement reporté à des études ultérieures cette analyse indispensable ; que la notice d'impact réalisée souffre, au surplus, d'une insuffisance manifeste de l'évaluation environnementale des conséquences de la construction ;
- c'est à bon droit que le tribunal a jugé que le projet attaqué devait être regardé comme constituant une phase au sein d'un programme plus vaste de travaux dans le cadre d'un projet fractionné puisque l'ouvrage prévu, ainsi que cela était clairement indiqué en page 2 de la notice d'impact, avait pour but de compléter le dispositif de protection établi sur Crolles et prolongeait les quatre ouvrages déjà mis en place dans la vallée du Grésivaudan et que l'ouvrage projeté s'inscrivait bien dans un programme unique, fractionné dans le temps et dont l'évaluation environnementale devait donc présenter l'ensemble de ses effets à l'échelle du programme, nécessitant dès lors la réalisation préalable d'une étude d'impact ;
- à titre subsidiaire, l'intimée, dans le cadre éventuel de l'effet dévolutif de l'appel, soutient comme en première instance que :
. la notice d'impact produite souffrait d'un certain nombre d'inexactitudes, d'omissions ou d'insuffisances de nature à vicier la procédure suivie, dès lors qu'elle ne précisait pas des effets probables de l'urbanisation certaine des secteurs situés à l'aval de l'ouvrage, ne présumait pas plus les effets de l'utilisation de pneus usagés pour structurer l'ouvrage alors que l'innocuité environnementale d'un recours à ce type de matériaux n'est pas démontrée, ne précisait pas le régime de protection à apporter aux nombreuse espèces d'animaux protégés, ne couvrait pas l'ensemble des espèces végétales dont la présence sur le site est attestée et notamment rapportée dans les arrêts préfectoraux des 20 janvier 1982, 4 décembre 1990, 10 octobre 2010, lesquelles espèces doivent également être protégées ;
. le coût réel de l'opération qui s'est finalement élevé, non pas à 957 000 euros mais à 1 300 000 euros, justifiait à lui seul la réalisation préalable d'une étude d'impact ;
. le projet litigieux n'était pas conforme au Plan d'occupation des sols et la mise en compatibilité dudit POS par l'acte querellé n'a pas porté, comme cela aurait été nécessaire, sur les dispositions de son règlement qui interdisent l'implantation d'un tel ouvrage dans ce secteur ;
. l'utilité publique de ce projet n'est pas établie, alors que la seule protection des terrains déjà bâtis n'aurait pas nécessité la construction d'un ouvrage d'une telle ampleur s'il avait été décidé par application du principe de prévention que les terrains non bâtis auraient dû le rester pour empêcher toute création d'enjeux nouveaux, que l'expropriant pouvait réaliser cette protection par la simple pose d'écrans de filets pare-blocs de type ASM dont l'emprise au sol et l'effet environnemental sont quasi-nuls ; que le choix de l'utilisations de vieux pneus est contraire à la prévention du risque de pollution et des risques d'incendie ;
Vu l'ordonnance en date du 4 décembre 2013 fixant la clôture d'instruction au 9 janvier 2014, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire, enregistré le 19 décembre 2013, présenté pour l'Association Trait d'Union, qui conclut au rejet au rejet de la requête pour les mêmes motifs que précédemment et, en outre, pour le motif que :
- contrairement à ce que soutient le ministre, l'étude contenue dans la notice d'impact relative à la faune et à la flore, notamment dans ses annexes 1 et 2, ne recensait pas de manière complète les espèces protégées telles qu'existantes antérieurement aux opérations projetées, ainsi que le prouve le contenu du courrier en date du 27 novembre 2013 de la mairie de Crolles à l'association ;
Vu l'ordonnance en date du 13 janvier 2014 rouvrant la clôture d'instruction jusqu'au 28 janvier 2014, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la charte de l'environnement intégrée au préambule de la Constitution du 4 octobre 1958, et notamment son article 7 ;
Vu la directive 2003/35/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 mai 2003 modifiant la directive n° 85/337 du Conseil du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics ou privés sur l'environnement, modifiée par la directive 97/11/CE du 3 mars 1997 ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2014 :
- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;
- et les observations de Me A...représentant la commune de Crolles et celles de M. Wormser, président de l'Association Trait d'Union ;
1. Considérant que la commune de Crolles et le ministre de l'intérieur demandent l'annulation du jugement n° 0904338 du 28 janvier 2013 du Tribunal administratif de Grenoble qui a annulé l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 9 avril 2009 déclarant d'utilité publique la digue pare-éboulis du secteur de Fragnès ainsi que la décision implicite du préfet de l'Isère rejetant le recours gracieux présenté par l'association trait d'Union ;
2. Considérant que la requête de la commune de Crolles et le recours du ministre de l'intérieur sont dirigés contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la recevabilité du mémoire en défense de l'Association Trait d'Union :
3. Considérant, d'une part, que l'article 2 des statuts de l'association Trait d'Union stipule que celle-ci a pour objet d'engager toute action devant les tribunaux pour défendre le cadre de vie des habitants de Crolles, en particulier en matière d'environnement ; que l'article 9 desdits statuts stipule que le conseil d'administration de l'association a pouvoir pour autoriser le président à ester en justice pour défendre l'objet et les intérêts de celle-ci ; que, d'autre part, le compte-rendu du conseil d'administration du 21 février 2013 autorisant le président de l'association à défendre devant la Cour a été produit par l'intimée ; que, par suite, le mémoire en défense présenté par l'association était recevable, contrairement à ce que prétend la commune de Crolles ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. Considérant que pour annuler l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 9 avril 2009 déclarant d'utilité publique la digue pare-éboulis du secteur de Fragnès et la décision implicite du préfet de l'Isère portant refus d'annuler cet arrêté, le Tribunal administratif de Grenoble a estimé dans son jugement du 28 janvier 2013 que cette décision était illégale dès lors que le préfet de l'Isère s'était contenté de présenter une notice d'impact alors que le dossier soumis à l'enquête aurait dû comprendre une étude d'impact s'agissant de travaux consistant en la mise en place d'un fossé piège à blocs terrassé avec établissement d'un parement raidi, la mise en place de pneus usagés non réutilisables avec l'apport de géotextiles et de matériaux permettant de les solidariser, l'édification d'un ouvrage de correction torrentielle, la création de puits d'écoulement des eaux, l'ouverture d'une piste à l'aval permettant la maintenance de l'ouvrage ainsi que l'engazonnement et le débroussaillage de terrains environnants qui, en raison de leur ampleur, n'étaient pas de nature à pouvoir bénéficier des exceptions visées par l'article R. 122-6 du code de l'environnement ;
5. Considérant que, compte tenu de ses caractéristiques, le projet litigieux ne peut être regardé ni comme consistant en des travaux de restauration de terrains en montagne au sens de l'article R. 122-5 du code de l'environnement dans sa rédaction alors applicable ni des travaux d'affouillement et d'exhaussement du sol au sens de l'article R. 122-6 du même code ;
6. Considérant que le ministre, soutient pour la première fois en appel que le projet litigieux était dispensé d'étude d'impact en application de l'article R. 122-8 du code de l'environnement dans sa rédaction alors applicable qui dispose : " " I.-Ne sont pas soumis à la procédure de l'étude d'impact, sous réserve des dispositions de l'article R. 122-9, les aménagements, ouvrages et travaux dont le coût total est inférieur à 1 900 000 euros. En cas de réalisation fractionnée, le montant à retenir est celui du programme général de travaux. " ; qu'aux termes de l'article R. 122-9 du même code, dans sa rédaction applicable : " Pour les travaux et projets d'aménagements définis au présent article, la dispense, prévue aux articles R. 122-5 à R. 122-8, de la procédure d'étude d'impact est subordonnée à l'élaboration d'une notice indiquant les incidences éventuelles de ceux-ci sur l'environnement et les conditions dans lesquelles l'opération projetée satisfait aux préoccupations d'environnement : (...) 7° Ouvrages et équipements relatifs à la correction des torrents, à la restauration des terrains en montagne, à la lutte contre les avalanches, à la fixation des dunes et à la défense contre l'incendie (...) " ;
7. Considérant que les dispositions de l'article 2 de la directive 85/337/CEE du Conseil du 17 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, dans sa rédaction issue de la directive 97/11/CE du Conseil du 3 mars 1997 dont le délai de transposition a expiré le 14 mars 1999, prévoient que : " Les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que, avant l'octroi de l'autorisation, les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis à une évaluation " ; qu'aux termes de l'article 3 : " L'évaluation des incidences sur l'environnement identifie, décrit et évalue de manière appropriée, en fonction de chaque cas particulier et conformément aux articles 4 à 11, les effets directs et indirects d'un projet sur les facteurs suivants : l'homme, la faune et la flore, le sol, l'eau, l'air, le climat et le paysage, les biens matériels et le patrimoine culturel, l'interaction entre les facteurs visés aux premier, deuxième et troisième tirets. " ; qu'aux termes de l'article 4 : " 2. Sous réserve de l'article 2 paragraphe 3, les Etats membres déterminent, pour les projets énumérés à l'annexe II : a) sur la base d'un examen cas par cas, ou b) sur la base des seuils ou critères fixés par l'Etat membre, si le projet doit être soumis à une évaluation conformément aux articles 5 à 10. Les Etats membres peuvent décider d'appliquer les deux procédures visées aux points a) et b). 3. Pour l'examen cas par cas ou la fixation des seuils ou critères fixés en application du paragraphe 2, il est tenu compte des critères de sélection pertinents fixés à l'annexe III. " ; que la Cour de justice de l'Union européenne juge que lorsqu'un Etat membre fixe des seuils en dessous desquels un projet est soustrait à l'obligation d'étude d'incidence, il outrepasse la marge d'appréciation dont il dispose en vert des articles 2 § 1 et 4 § 2 de cette directive s'il ne réserve pas la possibilité d'examiner si de tels projets ne seraient pas susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement notamment au regard des critères fixés par l'annexe III de la directive et, dans l'affirmative, de les soumettre à une étude d'incidence ;
8. Considérant dans ces conditions qu'alors même que le 7° de l'article R. 122-9 du code de l'environnement dans sa rédaction alors applicable soumet seulement la réalisation des ouvrages et équipements relatifs à la lutte contre les avalanches à la production d'une notice d'impact, l'association Trait d'Union est fondée à soutenir que l'article R. 122-8 précité du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige, est incompatible avec les objectifs fixés par la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 ; que, par suite, cet article n'est pas susceptible de justifier légalement l'absence d'étude d'impact pour le projet considéré ; qu'il n'est pas soutenu qu'il a été procédé à l'examen de la nécessité pour le projet de faire l'objet d'une étude d'incidence conformément aux dispositions précitées de la directive et qu'un tel examen a conduit à conclure à ce que le projet ne devait pas être soumis à une étude d'incidence ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Crolles et le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé, en l'absence d'étude d'impact, l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 9 avril 2009 déclarant d'utilité publique la digue pare-éboulis du secteur de Fragnès ainsi que la décision implicite du préfet de l'Isère portant refus d'annuler cet arrêté ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Association Trait d'Union, qui n'est pas la partie perdante, soit condamnée à verser à la commune de Crolles la somme quelle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Crolles et de l'Etat chacun une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l'Association Trait d'Union et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête n° 13LY00784 de la commune de Crolles et le recours n° 13LY00798 du ministre de l'intérieur sont rejetés.
Article 2 : La commune de Crolles versera à l'Association Trait d'Union la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : L'Etat versera à l'Association Trait d'Union la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Crolles, au ministre de l'intérieur et à l'Association Trait d'Union.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 27 mars 2014 à laquelle siégeaient :
M. Wyss, président de chambre,
M. Gazagnes, président-assesseur,
M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,
Lu en audience publique, le 30 avril 2014.
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N° 13LY00784-13LY00798