Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 septembre 2013, présentée pour M. A... B..., domicilié ... ;
M. B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0902121 du 4 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes à concurrence de la somme de 68 699 euros mises à sa charge au titre de l'année 2004 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient :
- que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité substantielle dès lors que la cession litigieuse est intervenue le 14 octobre 2004 avec une prise d'effet au 1er octobre 2004 alors que la période vérifiée s'achevait le 30 septembre 2004 ; que la période redressée ne peut excéder la période vérifiée ;
- que la remise en cause de l'exonération de plus-value professionnelle n'est pas fondée au regard de la législation applicable dès lors que le prix des biens cédés n'excédait pas 300 000 euros ; que les dispositions de l'article 238 quaterdecies ont pour seul et unique objet d'exonérer des plus-values provenant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé relevant des article 39 duodecies à 39 quindecies réalisée dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, et non point de régir l'assiette des droits d'enregistrement ; que l'interprétation donnée par le service du 3° de l'article 238 quaterdecies du code général des impôts introduit une inégalité devant l'impôt entre les contribuables ayant une activité commerciale, industrielle ou artisanale, d'une part, et ceux exerçant une activité libérale, d'autre part ;
- que l'administration fiscale a formellement pris position sur les faits lors du calcul par l'agent de la Trésorerie du montant des droits d'enregistrement relatif à cette opération de cession ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 janvier 2014, présenté par le ministre chargé du budget qui conclut au rejet de la requête ;
Le ministre expose que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés ;
Vu l'ordonnance du 4 février 2014 fixant la date de clôture de l'instruction au 3 mars 2014 ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 février 2014, présenté pour M. B...qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution, notamment son Préambule et ses articles 38 et 61-1 ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 avril 2014 :
- le rapport de Mme Terrade, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Lévy Ben Cheton, rapporteur public ;
1. Considérant qu'à l'issue de la vérification de comptabilité de son activité individuelle de chirurgien dentiste, portant sur la période du 1er janvier 2002 au 30 septembre 2004, l'administration fiscale a remis en cause, sur le fondement de l'article 238 quaterdecies du code général des impôts, l'exonération de la plus-value professionnelle dégagée par M. B...à l'occasion de la cession de son activité libérale à la Selarl Cabinet Girod-Roux dont il est par ailleurs le gérant et l'unique associé ; que, par la présente requête, M. B...relève appel du jugement du 4 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes à concurrence de la somme de 68 699 euros mises à sa charge au titre de l'année 2004 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix " ; que la vérification peut, sans irrégularité, porter sur une année non mentionnée sur l'avis de vérification dès lors que le contrôle n'a entrainé l'établissement d'aucune imposition supplémentaire au titre de ladite année ;
3. Considérant que le requérant soutient que la procédure d'imposition suivie à son encontre est entachée d'une irrégularité substantielle au motif que l'avis de vérification de comptabilité fixait au 30 septembre 2004 le terme de la période vérifiée, alors que l'acte de cession de son activité individuelle en date du 14 octobre 2004, pour laquelle le vérificateur a remis en cause l'exonération de plus-value professionnelle, n'a pris effet que le 1er octobre 2004, soit postérieurement à la date de fin de la période vérifiée ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que la cession de l'activité individuelle de chirurgien dentiste de M. B...à la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (Selarl) Cabinet Girod-Roux, par acte du 14 octobre 2004 conférant à cette cession et au transfert de propriété, par la volonté des parties, son plein effet au 1er octobre 2004, s'est traduite par la cessation d'exercice de l'activité libérale vérifiée de M. B...et une fin d'exercice comptable au 30 septembre 2004, cette cession constituant le dernier acte enregistré dans ses écritures comptables à cette date ; que, par suite, l'administration fiscale a pu, sans entacher la procédure d'irrégularité, ni priver le contribuable d'aucune garantie, remettre en cause l'exonération de plus-value professionnelle dont celui-ci a entendu bénéficier à l'occasion de la cession de son activité individuelle de chirurgien-dentiste au titre de l'exercice clos en 2004 ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Sur le terrain de la loi fiscale :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 238 quaterdecies du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable issue de la loi n° 2004-804 du 9 août 2004 : " - Les plus-values soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies et réalisées dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale sont exonérées lorsque les conditions suivantes sont simultanément satisfaites : (...) 2° La cession est réalisée à titre onéreux et porte sur une branche complète d'activité ; 3° La valeur des éléments de cette branche complète d'activité servant d'assiette aux droits d'enregistrement exigibles en application des articles 719, 720 ou 724 n'excède pas 300 000 euros. (...) III- Les dispositions des I et II s'appliquent aux cessions intervenues entre le 16 juin 2004 et le 31 décembre 2005. " ; qu'aux termes de l'article 720 du même code : " Les dispositions du présent code applicables aux mutations de propriété à titre onéreux de fonds de commerce ou de clientèle sont étendues à toute convention à titre onéreux, ayant pour effet de permettre à une personne d'exercer une profession, une fonction ou un emploi occupé par un précédent titulaire, même lorsque ladite convention conclue avec ce titulaire ou ses ayants cause ne s'accompagne pas d'une cession de clientèle. / Les droits sont exigibles sur toutes les sommes dont le paiement est imposé, du chef de la convention, sous quelque dénomination que ce soit, au successeur, ainsi que sur toutes les charges lui incombant au même titre. " ;
5. Considérant que, pour ouvrir droit au bénéfice de l'exonération prévue par les dispositions précitées, la cession doit concerner une branche complète d'activité susceptible de faire l'objet d'une exploitation autonome chez l'entreprise cédante comme chez la société cessionnaire, sous réserve que cette cession opère un transfert complet des éléments essentiels de cette activité tels qu'ils existaient dans le patrimoine de l'entreprise cédante et dans les conditions permettant à la société cessionnaire de disposer durablement de tous ces éléments ; que pour bénéficier de la même exonération, la valeur des éléments de la branche d'activité cédée servant d'assiette aux droits d'enregistrement en application des dispositions de l'article 720 du code général des impôts, dans le cas d'une convention de successeur, ne doit pas excéder 300 000 euros ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a remis en cause l'exonération de plus-value professionnelle dégagée par M. B...à l'occasion de la cession de son activité individuelle de chirurgien dentiste, au motif que le prix des éléments cédés servant d'assiette aux droits d'enregistrement dépassait le seuil de 300 000 euros prévu par les dispositions de l'article 238 quaterdecies du code général des impôts ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment des stipulations de la convention de cession conclue le 14 octobre 2004, regardée comme une convention de successeur au sens de l'article 720 du code, que M. B...a cédé à la Selarl Cabinet Girod-Roux, cessionnaire, les éléments corporels et incorporels de la branche complète de son activité libérale de chirurgien dentiste, moyennant un prix total de 314 700 euros, comprenant outre les éléments d'actif immobilisé et l'indemnité de présentation de patientèle pour un montant de 299 700 euros, le prix du stock de petites instrumentations et de fournitures dentaires valorisé à la somme de 15 000 euros ; qu'ainsi, quand bien même ne seraient comptabilisés ni le montant du stock de fournitures administratives valorisé à 290 euros, ni celui des produits d'entretien à hauteur de 912 euros, éléments corporels servant à l'exploitation de l'activité et figurant pourtant dans les écritures de cession de la branche, la valeur des éléments de la branche d'activité cédée du chef de la convention dont le paiement a été imposé au successeur et servant d'assiette aux droits d'enregistrement, qui, contrairement à ce que soutient le requérant, ne saurait se limiter aux seuls éléments de l'actif immobilisé, dépasse le seuil de 300 000 euros prévu par les dispositions précitées de l'article 238 quaterdecies du code général des impôts ; que, par suite, l'administration fiscale a pu, à bon droit, remettre en cause l'exonération de la plus-value professionnelle réalisée lors de cette cession ;
7. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'État [...]. Le moyen est présenté, à peine d'irrecevabilité, dans un mémoire distinct et motivé [...] " ; que si le moyen tiré de ce que " l'interprétation retenue par l'administration fiscale des dispositions du 3° du quaterdecies I de l'article 238 du code général des impôts introduit une inégalité entre les contribuables exerçant une activité commerciale, industrielle et artisanale, d'une part, et ceux exerçant une activité libérale d'autre part " en tant qu'il est fondé sur l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, doit être regardé comme un moyen tiré de ce que les dispositions du 3° du I de l'article 238 quaterdecies du code général des impôts porterait atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, le requérant ne l'a pas présenté dans un mémoire distinct ; que ce moyen n'est, par suite, pas recevable et ne peut qu'être écarté ;
Sur le terrain de la doctrine :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi d'un texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration (...) ", qu'aux termes de l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal (...) " ;
9. Considérant que M. B...soutient que le calcul, par la recette principale des impôts, des droits d'enregistrement dus à raison de l'enregistrement de l'acte de cession sur la seule base des éléments corporels et incorporels de l'actif immobilisé déclarée, à l'exclusion du stock de petits instruments et de fournitures dentaires, équivaut, de la part de l'administration fiscale, à une prise de position formelle tant au regard des règles d'assiette des droits d'enregistrement visées à l'article 720 du code général des impôts, qu'au regard de l'exonération de plus-value professionnelle prévue par les dispositions de l'article 238 quaterdecies du même code ; que, toutefois, la seule production d'un décompte de liquidation qui n'est ni daté, ni signé et ne comporte aucune référence à un texte fiscal, ni l'établissement par l'administration fiscale d'une imposition en fonction des déclarations et actes produits par le contribuable ne peuvent être regardés comme une prise de position formelle sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal opposable à l'administration dont le contribuable serait fondé à se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales dans le cadre de la présente instance ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 4 juillet 2013, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 22 avril 2014, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Samson, président-assesseur,
Mme Terrade, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 mai 2014.
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N° 13LY02439