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12/06/2014 | FRANCE | N°13LY00262

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 12 juin 2014, 13LY00262


Vu la requête, enregistrée le 31 janvier 2013, présentée pour le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes, représenté par son président en exercice, dont le siège est 55 place de la République à Lyon (69002) ;

Le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004878 du 30 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation :

- de la décision implicite du 10 octobre 2010 par laquelle le ministre de l

a santé et des sports a rejeté le recours hiérarchique formé contre l'arrêté n° 2010/...

Vu la requête, enregistrée le 31 janvier 2013, présentée pour le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes, représenté par son président en exercice, dont le siège est 55 place de la République à Lyon (69002) ;

Le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004878 du 30 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation :

- de la décision implicite du 10 octobre 2010 par laquelle le ministre de la santé et des sports a rejeté le recours hiérarchique formé contre l'arrêté n° 2010/1238 du 21 juillet 2010 par lequel le directeur général de l'Agence régionale de santé de Rhône-Alpes a autorisé le transfert de l'officine de pharmacie de Mme A...du 97 boulevard de la Roche du Roi à Aix-les-Bains au 2 rue Clément Ader, centre commercial " Le Marlioz ", dans la même commune ;

- de la décision explicite du 13 décembre 2010 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a rejeté le recours hiérarchique formé contre ladite décision du 21 juillet 2010 du directeur général de l'Agence régionale de santé de Rhône-Alpes ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'autorisation de transfert remet en cause l'approvisionnement en médicaments de la population résidente du quartier d'origine de l'officine, compte tenu de l'accès très malaisé au nouvel emplacement depuis ce quartier, situé sur le plateau ;

- ladite autorisation ne permet pas d'apporter une réponse optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans le quartier d'accueil, en l'absence d'éléments nouveaux relatifs à la population résidente par rapport à la situation ayant conduit à l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon du 3 décembre 2009 prononçant l'annulation de l'arrêté préfectoral du 19 mai 2005 ayant autorisé le transfert de l'officine dans les mêmes locaux ; Mme A... n'apporte aucun élément de preuve d'un apport de population de 1 200 personnes, alors que le maire n'évoque qu'un apport de 300 personnes, insuffisant pour autoriser le transfert ;

- l'évolution du plan local d'urbanisme du 29 mars 2007, impliquant la transformation du statut industriel de la zone en zone urbaine dense, ne présente qu'un caractère hypothétique et insuffisant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2013, présenté pour Mme B...A..., qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge du conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le conseil régional requérant ne démontre pas l'existence d'une demande de transfert concurrente à la sienne ni, par suite, la méconnaissance des règles d'antériorité des demandes ;

- par rapport à la situation ayant donné lieu à l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon du 3 décembre 2009, reposant sur un motif tiré d'une population insuffisante dans le quartier d'accueil de l'officine, lequel n'avait pas vocation à s'urbaniser, des éléments nouveaux, tirés d'une augmentation sensible de la population et de l'évolution de la réglementation légitimant le transfert, doivent être pris en compte ;

- le plan local d'urbanisme a été modifié aux fins de voir développer l'habitat collectif dans ce secteur, de nombreuses constructions ont été édifiées et de nouveaux habitants se sont installés ou ont vocation à le faire, compte tenu des permis de construire déjà délivrés à la date de l'autorisation et des projets en cours à cette date ; le total des habitants présents autour de l'implantation de l'officine peut être évalué à 1 800 personnes ;

- les dispositions de la loi du 21 juillet 2009 imposent de nouvelles obligations aux pharmaciens d'officine ;

- l'autorisation en litige ne remet pas en cause l'approvisionnement en médicaments de la population du quartier d'origine, eu égard à la présence de deux officines à proximité et à l'accès sans difficulté au nouvel emplacement de l'officine transférée ;

- la circonstance que la population à desservir soit située sur deux IRIS et séparée par une voie ne constitue pas un obstacle à la possibilité d'en solliciter toute la desserte ;

- il n'existe aucune difficulté d'accès à l'officine ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mai 2014 :

- le rapport de M. Seillet, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Duval, avocat du conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes, et de Me Daver, avocat de MmeA... ;

1. Considérant que Mme A..., qui a acquis, en 2004, une officine de pharmacie située 97 boulevard de la Roche du Roi à Aix-les-Bains, dans une zone urbanisée, située sur le plateau du quartier de Marlioz, a sollicité, une première fois, le 28 février 2005, le transfert de cette officine dans un local situé dans le centre commercial " Le Marlioz ", 2 rue Clément Ader, dans la même commune, en contrebas du secteur d'implantation d'origine et, par un arrêté du préfet de la Savoie du 19 mai 2005, l'intéressée a été autorisée à transférer cette officine dans ce local ; que, toutefois, sur la demande du conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes, le Tribunal administratif de Grenoble a, par un jugement du 22 juin 2007, annulé cet arrêté d'autorisation, au motif que le transfert, bien que s'effectuant au sein du même quartier, ne permettait pas une réponse optimale aux besoins en médicaments de la population résidente, au sens de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique ; que l'appel formé par Mme A... contre ce jugement a été rejeté par un arrêt de la Cour de céans du 3 décembre 2009, au motif, en particulier, que le nouveau lieu d'implantation de l'officine, dans un centre commercial situé entre l'hippodrome, le club de tennis et un club hippique, se trouvait dans une zone dont la population résidente était de très faible importance et n'était pas destinée à l'urbanisation ; qu'à la suite d'une nouvelle demande de transfert de son officine, dans le même local, déposée par Mme A... le 24 mars 2010, une autorisation a été délivrée par le directeur général de l'Agence régionale de santé de Rhône-Alpes, par une décision du 21 juillet 2010 ; que le recours hiérarchique formé par le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes contre cette décision, le 21 juillet 2010, auprès du ministre de la santé et des sports, a été rejeté implicitement, par une décision née le 10 octobre 2010, puis explicitement, par une décision du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, du 13 décembre 2010 ; que le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes fait appel du jugement du 30 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation desdites décisions ministérielles, qui doit être regardée comme tendant également à l'annulation de la décision du directeur général de l'Agence régionale de santé de Rhône-Alpes du 24 mars 2010 ;

2. Considérant que les dispositions de l'article L. 5125-14 du code de la santé publique autorisent le transfert d'une officine de pharmacie au sein d'une même commune s'il respecte les prescriptions de l'article L. 5125-3 du même code selon lesquelles : " Les créations, les transferts et les regroupements d'officines de pharmacie doivent permettre de répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans les quartiers d'accueil de ces officines. Les transferts et les regroupements ne peuvent être accordés que s'ils n'ont pas pour effet de compromettre l'approvisionnement nécessaire en médicaments de la population résidente de la commune ou du quartier d'origine. (...) " ;

3. Considérant que, pour l'application de ces dispositions, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier les effets du transfert envisagé sur l'approvisionnement en médicaments du quartier d'origine et du quartier de destination de l'officine qui doit être transférée ainsi que, le cas échéant, des autres quartiers pour lesquels ce transfert est susceptible de modifier significativement l'approvisionnement en médicaments ; que la population résidente, au sens des mêmes dispositions, doit s'entendre, outre éventuellement de la population saisonnière, de la seule population domiciliée... ; que l'administration peut toutefois tenir compte, pour apprécier cette population, des éventuels projets immobiliers en cours ou certains à la date de sa décision ; qu'enfin, le caractère optimal de la réponse apportée par le projet de transfert ne saurait résulter du seul fait que ce projet apporte une amélioration relative de la desserte par rapport à la situation d'origine ;

4. Considérant, en premier lieu, que si le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes soutient que l'autorisation de transfert de l'officine de pharmacie de Mme A... dans le local choisi, situé en contrebas du secteur d'implantation d'origine de cette officine, remettrait en cause l'approvisionnement en médicaments de la population résidente du quartier d'origine de l'officine, compte tenu de l'accès très malaisé au nouvel emplacement depuis ce quartier, situé sur le plateau, il ressort des pièces du dossier qu'eu égard à la configuration des lieux, notamment au fait que l'avenue du Golf qui passe entre le nouvel et l'ancien emplacement ne présente pas de difficultés particulières de franchissement, ainsi qu'à la faible distance séparant les deux emplacements, et alors qu'il n'est pas contesté qu'en l'absence de commerces de proximité dans le secteur d'origine, les habitants de ce secteur doivent se déplacer, soit vers le centre-ville, soit dans le secteur où est situé le nouveau local, le transfert de l'officine de Mme A... ne peut être regardé comme comportant le transfert d'un quartier à un autre ; que nonobstant la nécessité pour les habitants du secteur d'implantation d'origine de l'officine d'utiliser les voies piétonnes ou routières en pente permettant d'accéder au secteur situé en contrebas du plateau de Marlioz, qui aurait existé au demeurant si l'emplacement de transfert choisi avait été situé dans la zone, en bas du chemin des Bottes, à son débouché sur l'avenue du Golf, proposée par le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes dans son avis du 30 mars 2005, lors de l'instruction de la première demande de transfert de l'officine de MmeA..., ledit transfert ne compromet pas l'approvisionnement en médicaments de la population résidant à proximité de l'emplacement d'origine de l'officine ;

5. Considérant, en second lieu, qu'il ressort également des pièces du dossier, et en particulier d'une lettre du maire d'Aix-les-Bains du 5 mars 2010 et d'une lettre de la direction générale des services techniques de cette ville du 16 février 2011, qu'à la suite d'une modification du plan local d'urbanisme approuvée au cours de l'année 2007, faisant apparaître une restructuration de cette partie de la ville dans laquelle est implanté le local de transfert de l'officine de Mme A..., avec une " volonté d'urbanisation relativement importante ", impliquant la classification en secteur UA, correspondant à une densité très forte, d'une zone à proximité immédiate de l'emplacement choisi, un nombre important de projets immobiliers était, à la date des décisions en litige, projetés ou en cours de réalisation ; qu'ainsi, ladite lettre du maire d'Aix-les-Bains mentionnait, outre une augmentation de population estimée à 350 personnes, en conséquence des seuls programmes immobiliers lancés au printemps 2010, 300 logements supplémentaires résultant de nouvelles constructions à venir, et celle du 16 février 2011, énumérant les projets immobiliers, les permis de construire accordés ou les constructions en cours, ainsi que les études d'aménagement dans le secteur environnant immédiat du centre commercial d'implantation de l'officine, faisait état d'un total d'un peu plus de 370 logements ; qu'ainsi, eu égard à l'accroissement certain du nombre d'habitants du quartier à proximité immédiate du local de transfert de l'officine de Mme A... et à l'importance de la population susceptible d'être desservie, en conséquence d'une modification du plan local d'urbanisme postérieure à la décision d'autorisation de transfert prise par le préfet de la Savoie le 19 mai 2005, et annulée par la Cour de céans par son arrêt du 3 décembre 2009 pour un motif résultant d'éléments de fait propres à la situation antérieure à cette modification, le directeur général de l'Agence régionale de santé de Rhône-Alpes a pu légalement considérer que le transfert sollicité par Mme A... répondait de façon optimale aux besoins de la population du quartier d'accueil, au sens de l'article L. 5123-3 du code de la santé publique ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés à l'occasion de la présente instance par Mme A... et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes est rejetée.

Article 2 : Le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes versera la somme de 1 500 euros à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'officine de Rhône-Alpes, à Mme B... A...et au ministre des affaires sociales. Copie en sera adressée à l'Agence régionale de santé de Rhône-Alpes.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2014 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juin 2014.

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N° 13LY00262


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00262
Date de la décision : 12/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

55-03-04-01 Professions, charges et offices. Conditions d'exercice des professions. Pharmaciens. Autorisation d'ouverture ou de transfert d'officine.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : CABINET DEVERS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-06-12;13ly00262 ?
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