Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon portant refus d'affectation en centre de détention suite à sa demande du 24 août 2011 ainsi que le rejet de son recours gracieux du 29 mars 2012, d'enjoindre au directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon de l'affecter au centre de détention de Roanne, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement à intervenir et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 050 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
Par un jugement n° 1202313 du 21 octobre 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 13 janvier 2015, M. B...A..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1202313 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon portant refus d'affectation en centre de détention suite à sa demande du 24 août 2011, ensemble le rejet de son recours gracieux du 29 mars 2012 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, au profit de son conseil, sous réserve que ce dernier renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le jugement est entaché d'une omission à statuer sur le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que sur le moyen tiré de la violation de l'article D. 75 du code de procédure pénale ;
- le jugement est entaché d'un défaut de motivation quant au moyen tiré de ce que la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon portant refus d'affectation en centre de détention suite à sa demande du 24 août 2011 n'aurait pas été motivée en dépit de sa demande de communication des motifs de celle-ci ;
- la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon a été prise en violation des dispositions des articles 717 et D. 75 du code de procédure pénale ainsi que des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 septembre 2015, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué en raison de l'omission à statuer sur le moyen tiré du défaut de motivation de l'acte attaqué est inopérant dès lors que la requête a été rejetée pour irrecevabilité ;
- le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sera écarté dès lors que le droit au respect de la vie privée invoqué par le requérant n'a pas été méconnu, en l'absence de mise en cause des droits fondamentaux de l'intéressé, la décision implicite portant refus d'affectation en centre de détention suite à sa demande du 24 août 2011 contestée constituant une mesure d'ordre intérieur insusceptible de recours ;
- le moyen tiré de la violation de l'article D. 75 du code de procédure pénale est inopérant dès lors que la requête a été rejetée pour irrecevabilité.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 novembre 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de procédure pénale ;
- le code de justice administrative ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,
- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public.
1. Considérant que M. B... A... alors détenu à la maison d'arrêt de Bourg-en-Bresse, demande l'annulation du jugement, du 21 octobre 2014, par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon portant refus d'affectation en centre de détention de Roanne suite à sa demande du 24 août 2011, ensemble le rejet de son recours gracieux du 29 mars 2012 ;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 707 du code de procédure pénale dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) / L'exécution des peines favorise, dans le respect des intérêts de la société et des droits des victimes, l'insertion ou la réinsertion des condamnés ainsi que la prévention de la récidive. (...) " ; qu'aux termes de l'article 717 du même code : " Les condamnés purgent leur peine dans un établissement pour peines. Les condamnés à l'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à deux ans peuvent, cependant, à titre exceptionnel, être maintenus en maison d'arrêt et incarcérés, dans ce cas, dans un quartier distinct, lorsque des conditions tenant à la préparation de leur libération, leur situation familiale ou leur personnalité le justifient. Peuvent également, dans les mêmes conditions, être affectés, à titre exceptionnel, en maison d'arrêt, les condamnés auxquels il reste à subir une peine d'une durée inférieure à un an. Toute personne condamnée détenue en maison d'arrêt à laquelle il reste à subir une peine d'une durée supérieure à deux ans peut, à sa demande, obtenir son transfèrement dans un établissement pour peines dans un délai de neuf mois à compter du jour où sa condamnation est devenue définitive. Cependant, elle peut être maintenue en maison d'arrêt lorsqu'elle bénéficie d'un aménagement de peine ou est susceptible d'en bénéficier rapidement. " ; qu'aux termes de l'article D. 70 de ce code : " Les établissements pour peines, dans lesquels sont reçus les condamnés définitifs, sont les maisons centrales, les centres de détention, les centres de semi-liberté et les centres pour peines aménagées (...) " ; qu'aux termes de l'article D. 75 dudit code : " La procédure d'orientation est obligatoirement mise en oeuvre pour les condamnés dont le temps d'incarcération restant à subir est supérieur à deux ans. Pour les condamnés mineurs, elle est obligatoire si le temps d'incarcération à subir est supérieur à trois mois. Elle s'opère dans les conditions définies aux articles D. 76 à D. 79, à l'aide des renseignements qui sont fournis par l'autorité judiciaire et par l'administration pénitentiaire sur les intéressés, et, éventuellement, grâce aux examens auxquels ces derniers sont soumis au centre national d'évaluation de l'administration pénitentiaire. " ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
4. Considérant, en premier lieu, que si M. A...soutient que le jugement du tribunal administratif de Lyon du 21 octobre 2014 est entaché d'irrégularités pour omission à statuer sur ses moyens et motivation insuffisante de ses réponses aux moyens tirés du défaut de motivation de la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon portant refus d'affectation en centre de détention suite à sa demande du 24 août 2011 et de violation, par cette décision, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'article D. 75 du code de procédure pénale précités, les premiers juges en rappelant qu'eu égard à leur nature et à leurs effets sur la situation des détenus, les décisions refusant de donner suite à la demande d'un détenu de changer d'établissement, ne constituent pas des actes administratifs susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir sous réserve que ne soient pas en cause des libertés et des droits fondamentaux des détenus et ayant, en conséquence, rejeté sa demande d'annulation, doivent être regardés comme ayant nécessairement répondu à ces moyens ; que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit, par suite, être écarté ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que doivent être regardées comme mettant en cause des libertés et des droits fondamentaux des détenus, et comme telles susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, les seules décisions qui portent à ces droits et libertés une atteinte qui excède les contraintes inhérentes à leur détention ;
6. Considérant que M.A..., dont la compagne et l'enfant qu'il a eu avec celle-ci vivraient à Eybens et dont les parents vivent à Echirolles, n'établit pas que la décision implicite portant refus d'affectation en centre de détention, suite à sa demande du 24 août 2011 de transfert du centre pénitentiaire de Bourg-en-Bresse au centre de détention de Roanne, porterait une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
7. Considérant, en dernier lieu, que les objectifs d'insertion et de réinsertion attachés aux peines subies par les détenus, tels qu'ils sont fixés par l'alinéa 2 précité de l'article 707 du code de procédure pénale, ne font pas partie des libertés et droits fondamentaux des détenus ; que M.A..., en faisant valoir que le refus de transfert vers le centre de détention qu'il souhaite intégrer l'empêcherait de suivre une formation professionnelle qualifiante, ne peut dès lors utilement soutenir que la décision de rejet implicite de sa demande de transfert qu'il attaque aurait été prise en violation de l'article 717 précité du code de procédure pénale ;
8. Considérant qu'il résulte de ce tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 21 octobre 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon portant refus d'affectation en centre de détention et le rejet de son recours gracieux contre cette décision ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées sur ce fondement par M. A...doivent, par suite, être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...et au garde des sceaux, ministre de la justice. Copie en sera adressée au directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon.
Délibéré après l'audience du 10 mars 2016 à laquelle siégeaient :
Mme Verley-Cheynel, président de chambre,
M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,
Mme Gondouin, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 mars 2016.
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N° 15LY00190