Vu la procédure suivante :
L'association Cinévallées, la SARL Chamonix Spectacle et la Maison des Jeunes et de la Culture (MJC) de La-Roche-sur-Foron ont demandé à la commission nationale d'aménagement commercial d'annuler la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de la Haute-Savoie du 18 mars 2014 autorisant la SAS Ciné Mont-Blanc à étendre de deux salles et cent quatre-vingt dix-huit places l'établissement de spectacles cinématographiques situé 561 avenue de Genève à Sallanches.
Par une décision du 24 juin 2014, la commission nationale d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique a rejeté ces recours et autorisé le projet.
Par une requête enregistrée le 22 septembre 2014 et deux mémoires enregistrés le 7 et le 20 avril 2016, qui n'ont pas été communiqués, l'association Cinévallées, la SARL Chamonix Spectacle et la MJC de La-Roche-sur-Foron demandent à la cour :
1°) d'annuler cette décision de la commission nationale d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique du 24 juin 2014 ;
2°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de la société Ciné Mont-Blanc en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- le dossier de demande et les rapports et avis n'indiquent pas qu'il existe des cinémas itinérants dans la zone d'influence cinématographique ;
- les avis des ministres intéressés sont signés par des autorités incompétentes ;
- l'extension projetée du Ciné Mont-Blanc va entraîner un déséquilibre encore plus important avec les cinémas indépendants de la zone d'influence cinématographique ;
- la qualité architecturale du projet est insuffisante ;
- le projet n'est pas relié par une piste cyclable et n'est pas desservi par les transports en commun ;
- en favorisant le déplacement en voiture, le projet aura un effet négatif sur l'environnement.
Par un mémoire enregistré le 16 avril 2015, la SAS Ciné Mont-Blanc conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge des requérantes en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 20 avril 2015, la commission nationale d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 18 mars 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 avril 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code du cinéma et de l'image animée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vaccaro-Planchet,
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant la SCP Bouyssou et associés, avocat de la SAS Ciné Mont-Blanc.
1. Considérant que, par une décision du 24 juin 2014, la commission nationale d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique a rejeté les recours de l'association Cinévallées, de la SARL Chamonix Spectacle et de la MJC de La-Roche-sur-Foron tendant à l'annulation de la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de la Haute-Savoie du 18 mars 2014 autorisant la SAS Ciné Mont-Blanc à étendre de deux salles et 198 places l'établissement de spectacles cinématographiques situé 561 avenue de Genève à Sallanches et a autorisé ce projet ; que l'association Cinévallées, la SARL Chamonix Spectacle et la MJC de La-Roche-sur-Foron demandent l'annulation de cette décision de la commission nationale d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique ;
2. Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article R. 752-51 du code de commerce : " (...) Le commissaire du gouvernement recueille les avis des ministres intéressés, qu'il présente à la commission nationale. (...) " ; que ces avis sont au nombre des actes dont la validité est subordonnée à la signature par une personne habilitée à engager le ministre concerné ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'avis du ministre chargé de l'environnement, qui d'ailleurs n'avait pas à être obligatoirement consulté, a été signé par Mme C..., sous-directrice du cadre de vie, dûment habilitée à cet effet par un arrêté de délégation du 19 novembre 2013 et que l'avis du ministre chargé de la culture a été signé par M. B..., dûment habilité à cet effet par un arrêté de délégation du 20 mai 2014 ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que ces avis n'auraient pas été signés par des personnes habilitées doit être écarté ;
4. Considérant, que, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, le dossier présenté par la société pétitionnaire comportait des éléments suffisants, notamment s'agissant de l'existence de cinémas itinérants au sein de la zone d'influence cinématographique, pour permettre à la commission nationale de se prononcer de façon éclairée sur la demande dont elle était saisie ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 212-6 du code du cinéma et de l'image animée : " Les créations, extensions et réouvertures au public d'établissements de spectacles cinématographiques doivent répondre aux exigences de diversité de l'offre cinématographique, d'aménagement culturel du territoire, de protection de l'environnement et de qualité de l'urbanisme, en tenant compte de la nature spécifique des oeuvres cinématographiques. Elles doivent contribuer à la modernisation des établissements de spectacles cinématographiques et à la satisfaction des intérêts du spectateur tant en ce qui concerne la programmation d'une offre diversifiée que la qualité des services offerts " ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 212-9 du code du cinéma et de l'image animée : " Dans le cadre des principes définis à l'article 30-1, la Commission d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique se prononce sur les deux critères suivants : / 1° L'effet potentiel sur la diversité cinématographique offerte aux spectateurs dans la zone d'influence cinématographique concernée, évalué au moyen des indicateurs suivants : / a) Le projet de programmation envisagé pour l'établissement de spectacles cinématographiques objet de la demande d'autorisation et, le cas échéant, le respect des engagements de programmation éventuellement contractés en application de l'article 90 de la loi n° 82-52 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle ; / b) La nature et la diversité culturelle de l'offre cinématographique proposée dans la zone concernée, compte tenu de la fréquentation cinématographique ; / c) La situation de l'accès des oeuvres cinématographiques aux salles et des salles aux oeuvres cinématographiques pour les établissements de spectacles cinématographiques existants ; / 2° L'effet du projet sur l'aménagement culturel du territoire, la protection de l'environnement et la qualité de l'urbanisme, évalué au moyen des indicateurs suivants : / a) L'implantation géographique des établissements de spectacles cinématographiques dans la zone d'influence cinématographique et la qualité de leurs équipements ; / b) La préservation d'une animation culturelle et le respect de l'équilibre des agglomérations ; / c) La qualité environnementale appréciée en tenant compte des différents modes de transports publics, de la qualité de la desserte routière, des parcs de stationnement ; / d) L'insertion du projet dans son environnement ; / e) La localisation du projet. " ;
7. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet d'équipement cinématographique contesté compromet la réalisation des objectifs et principes énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique, lorsqu'elles se prononcent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs et principes, au vu des critères d'évaluation et indicateurs mentionnés à l'article L. 212-9 du code du cinéma et de l'image animée, parmi lesquels ne figure plus la densité d'équipements en salles de spectacles cinématographiques dans la zone d'attraction du projet ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'extension de 8 à 10 salles du cinéma " Ciné Mont-Blanc " situé sur le territoire de la commune de Sallanches vise à " mieux absorber l'offre de films lorsqu'elle est très dense ", " améliorer l'exposition de certains titres " et " développer le créneau art et essai " ; que l'agglomération de Sallanches est dépourvue d'établissement de spectacles cinématographiques classé art et essai ; que les établissements cinématographiques existants dans la zone d'influence cinématographique, définie par un trajet en voiture de trente minutes maximum, n'offrent qu'une à trois salles chacun ; qu'ainsi, le projet aura pour effet de diversifier et augmenter l'offre cinématographique existante ; que, dès lors, en estimant que le projet autorisé permettrait une diversification et un rééquilibrage géographique de l'offre cinématographique dans l'agglomération de Sallanches, sans porter une atteinte excessive aux cinémas localisés dans la zone d'influence cinématographique, la commission nationale n'a pas méconnu les objectifs fixés par le législateur ; que, par suite, le moyen tiré de l'atteinte à la diversité de l'offre cinématographique et à l'objectif d'aménagement culturel du territoire doit être écarté ;
9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la qualité environnementale et urbanistique du projet, qui porte uniquement sur l'extension de 8 à 10 salles d'un cinéma existant, est acceptable et s'inscrit dans la continuité du bâtiment existant, même si son insertion paysagère et sa qualité architecturale sont perfectibles ; qu'une piste cyclable passe à proximité du cinéma, situé à 10 minutes à pied du centre ville de Sallanches, et que des arrêts des transports en commun se trouvent dans un rayon de 10 à 17 minutes à pied du cinéma ; que la création d'un parc de stationnement sur trois étages ne suffit pas à établir l'existence de risques en matière de pollution, même si l'accès au cinéma s'effectuera principalement en voiture ; que, par suite, le moyen tiré de l'atteinte à l'environnement doit être écarté ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que l'association Cinévallées, la SARL Chamonix Spectacle et la MJC de La-Roche-sur-Foron ne sont pas fondées à demander l'annulation de la décision de la commission nationale d'aménagement commercial du 24 juin 2014 ;
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par l'association Cinévallées, la SARL Chamonix Spectacle et la MJC de La-Roche-sur-Foron soit mise à la charge de la SAS Ciné Mont-Blanc, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre la somme globale de 2 000 euros à la charge de la l'association Cinévallées, la SARL Chamonix Spectacle et la MJC de La-Roche-sur-Foron au titre des frais exposés par la SAS Ciné Mont-Blanc à l'occasion du litige ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de l'association Cinévallées, de la SARL Chamonix Spectacle et de la MJC de La-Roche-sur-Foron est rejetée.
Article 2 : L'association Cinévallées, la SARL Chamonix Spectacle et la MJC de La-Roche-sur-Foron verseront la somme globale de 2 000 euros à la SAS Ciné Mont-Blanc au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Cinévallées, à la SARL Chamonix Spectacle, à la MJC de La Roche sur Foron, à la SAS Ciné Mont-Blanc et à la commission nationale d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique.
Délibéré après l'audience du 26 avril 2016, à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Picard, président-assesseur,
Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 mai 2016.
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N° 14LY02926
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