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20/09/2016 | FRANCE | N°15LY00206

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 20 septembre 2016, 15LY00206


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner l'Etat à lui payer les sommes :

- de 4 689,36 euros en paiement d'heures supplémentaires effectuées de nuit ;

- de 4 689,36 euros au titre de la majoration d'heures supplémentaires effectuées la nuit ;

- de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice subi en raison du non respect du temps de pause obligatoire ;

- de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation

d'un préjudice subi en raison du dépassement de la durée quotidienne du travail ;

- de 3 000 euros ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner l'Etat à lui payer les sommes :

- de 4 689,36 euros en paiement d'heures supplémentaires effectuées de nuit ;

- de 4 689,36 euros au titre de la majoration d'heures supplémentaires effectuées la nuit ;

- de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice subi en raison du non respect du temps de pause obligatoire ;

- de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice subi en raison du dépassement de la durée quotidienne du travail ;

- de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice résultant du non respect du temps quotidien de repos ;

- de 9 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice résultant d'une dissimulation partielle de son activité professionnelle à l'administration fiscale et aux organismes sociaux.

Par un jugement n° 1203468 du 12 novembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2015, MmeC..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 novembre 2014 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes réclamées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros pour la première instance et une somme de 2 500 euros pour l'instance d'appel.

Elle soutient que :

- le mécanisme de pondération des heures de nuit prévu par l'article 2 du décret du 6 juin 2003 conduit à une inobservation des seuils et des plafonds communautaires énoncés par la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 ;

- elle n'a pas bénéficié de temps de pause en méconnaissance des dispositions de l'article 2 de la directive 93/104/CE du 23 novembre 1993 et de l'article 2 du décret du 25 août 2000 ;

- la méconnaissance de ces dispositions qui a porté atteinte à ses droits en matière d'organisation de son temps de travail et de pause justifie l'indemnisation demandée à ce titre ; pour les mêmes raisons, elle est fondée à demander un rappel de rémunérations ainsi qu'une indemnisation pour heures dissimulées à l'administration fiscale et aux organismes sociaux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juin 2015, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

- s'agissant de la rémunération des heures supplémentaires effectuées de nuit et de leur majoration, la requérante ne saurait se prévaloir de la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 qui n'est pas applicable à la rémunération des travailleurs ;

- il ressort de l'emploi du temps de la requérante qu'elle n'a jamais travaillé au-delà des durées de travail quotidienne et hebdomadaire maximales fixées par la directive précitée et le décret du 25 août 2000 ;

- la requérante a bénéficié d'un temps de pause réglementaire d'au moins vingt minutes consécutives, y compris dans les cas où des interventions éventuelles et exceptionnelles auraient pu lui être demandées durant cette période en cas de nécessité, notamment pour des motifs de sécurité vis-à-vis des élèves ; de plus, la requérante ne produit aucune pièce, ni aucun élément de nature à établir le préjudice relatif au non-respect des temps de pause obligatoire qu'elle allègue ; enfin, le montant de l'indemnité demandée est excessif ;

- il y a lieu de reprendre en appel les moyens et arguments développés par le recteur devant le tribunal administratif.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 modifiée concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ;

- la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ;

- le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat et dans la magistrature ;

- le décret n° 2003-484 du 6 juin 2003 fixant les conditions de recrutement et d'emploi des assistants d'éducation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 30 août 2016 :

- le rapport de M. Boucher, président ;

- et les conclusions de M. Clément, rapporteur public.

1. Considérant que Mme C...qui a été recrutée en qualité d'assistante d'éducation à l'établissement régional d'enseignement adapté de Claix à compter de septembre 2008, relève appel du jugement du 12 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser des rémunérations dues en paiement d'heures supplémentaires effectuées de nuit et à l'indemniser de préjudices qu'elle impute au non-respect des temps de pause obligatoire, de la durée quotidienne de travail et des temps de repos ainsi qu'à une dissimulation partielle par l'administration de son activité professionnelle aux services fiscaux et aux organismes sociaux ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la directive 93/104/CE du 23 novembre 1993, devenu l'article 2 de la directive n° 2003/88/CE du 4 novembre 2003 : " Aux fins de la présente directive, on entend par : / 1) " temps de travail " : toute période durant laquelle le travailleur est au travail, à la disposition de l'employeur et dans l'exercice de son activité ou de ses fonctions, conformément aux législations et/ou pratiques nationales ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 2 décret n° 2000-815 du 25 août 2000 : " La durée du travail effectif s'entend comme le temps pendant lequel les agents sont à la disposition de leur employeur et doivent se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles. " ; qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 2003-484 du 6 juin 2003 susvisé : " Le travail des assistants d'éducation se répartit, dans le respect de la durée annuelle de référence prévue à l'article 1er du décret du 25 août 2000 susvisé, sur une période d'une durée minimale de trente-neuf semaines et d'une durée maximale de quarante-cinq semaines. / Le service de nuit correspondant à la période, fixée par le règlement intérieur de l'établissement, qui s'étend du coucher au lever des élèves, est décompté forfaitairement pour trois heures. (...) " ;

Sur le paiement des heures supplémentaires effectuées de nuit et leur majoration :

3. Considérant qu'il résulte clairement des termes des directives citées au point 2 que celles-ci ne concernent pas la rémunération des travailleurs ; que, par suite, la requérante ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de ses objectifs pour demander le paiement d'heures supplémentaires qu'elle soutient avoir effectuées au titre d'un travail de nuit en internat, pour lequel sa présence pendant neuf heures a donné lieu à une rémunération de trois heures, en application des dispositions précitées de l'article 2 du décret du 6 juin 2003 ;

Sur le dépassement des durées quotidiennes de travail et de repos :

4. Considérant, en premier lieu, que si la requérante soutient que le mécanisme de pondération des heures de nuit tel que prévu par les dispositions de l'article 2 du décret du 6 juin 2003 conduirait à un dépassement des seuils et des plafonds prévus par les dispositions des directives du 23 novembre 1993 et du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, elle ne précise pas les dispositions qui seraient, selon elle, méconnues, alors que ces directives ne font pas obstacle, par elles-mêmes, à l'application de rapports d'équivalence aux durées maximales de travail fixées par le droit national, dès lors que le respect de l'intégralité des prescriptions minimales édictées par ces directives en vue de protéger de manière efficace la sécurité et la santé des travailleurs est assuré ;

5. Considérant, en second lieu, que la requérante fait valoir que, par une note du service du 25 septembre 2008 concernant les horaires de travail des instituteurs, éducateurs en internat en fonction dans les établissements régionaux d'éducation adaptée, le recteur de l'académie de Grenoble a recommandé aux directeurs de ces établissements de veiller à ce que le régime d'équivalence horaire prévu pour ces personnels n'ait pas pour conséquence de porter atteinte aux prescriptions du droit communautaire concernant le respect d'une durée maximale de travail hebdomadaire de quarante-huit heures et d'une période minimale de repos journalier de onze heures consécutives, ainsi que de s'assurer que les services de garde soient pris en compte pour leur durée effective dans le décompte du temps de travail ; que, toutefois, en se bornant à produire ce document, la requérante n'établit pas que son temps de travail personnel pour les années en litige était contraire à ces prescriptions, notamment pour ce qui concerne son temps de travail et de repos hebdomadaire ou la prise en compte de ses service de garde ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

Sur le respect des temps de pause :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret 25 août 2000 susvisé : " Aucun temps de travail quotidien ne peut atteindre six heures sans que les agents bénéficient d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes. " ;

7. Considérant qu'eu égard à leur objet, qui est de garantir un temps de pause toutes les six heures de travail effectif aux agents publics, ces dispositions ne trouvent pas à s'appliquer à une période de travail comprenant un service de garde de nuit au cours duquel l'agent bénéficie d'un temps de sommeil nocturne dont il est libre de disposer, même s'il est susceptible d'intervenir ponctuellement pour les besoins du service ; que la requérante n'est dès lors pas fondée à soutenir que l'administration a commis une faute à son égard en ne ménageant pas des temps de pause au cours de son service ;

Sur la dissimulation partielle par l'employeur d'une activité professionnelle :

8. Considérant qu'au regard de ce qui a été dit aux points 3 à 7, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait dissimulé à l'administration fiscale ou aux organismes sociaux une partie des heures de travail accomplies par la requérante ; que celle-ci n'est, par suite, pas fondée à se prévaloir à cet égard d'une faute de l'administration à son encontre ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que Mme C...demande au titre de ses frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Grenoble.

Délibéré après l'audience du 30 août 2016 à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre ;

M. Drouet, président-assesseur ;

Mme Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 septembre 2016.

L'assesseur le plus ancien,

H. DrouetLe président-rapporteur,

Y. Boucher

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition,

Le greffier,

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N° 15LY00206

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY00206
Date de la décision : 20/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Enseignement et recherche - Questions propres aux différentes catégories d'enseignement - Enseignement du second degré - Personnel enseignant - Maîtres d'internat et surveillants d'externat.

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération - Traitement.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Yves BOUCHER
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : COSTA et MLADENOVA-MAURICE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-09-20;15ly00206 ?
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