Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 13 mars 2007 au 31 décembre 2010.
Par un jugement n° 1303849 du 13 mai 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 11 août 2014 et deux mémoires enregistrés les 14 janvier 2015 et 15 mars 2016, M. A... demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 13 mai 2014 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le prix d'achat qu'il a attribué à chaque pièce au moment de sa vente correspond à sa valeur propre ; il n'était pas tenu de détailler dans son livre de police le prix de chaque objet composant les lots achetés ; l'administration ne pouvait donc substituer au prix d'achat attribué lors de la vente un prix moyen ne tenant pas compte de l'hétérogénéité des objets composant les lots achetés ;
- le vérificateur n'a retenu que les 80 ventes pour lesquelles le prix d'achat attribué est supérieur au prix moyen et n'a pas effectué de compensation avec les 58 ventes pour lesquelles le prix d'achat attribué est inférieur au prix moyen et pour lesquelles il a acquitté la taxe sur une base d'imposition défavorable ;
- il est de bonne foi et n'a eu aucune intention de minorer sa marge au moment de l'attribution d'un prix d'achat aux objets vendus.
Par des mémoires enregistrés le 15 décembre 2014 et le 4 mai 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 7 mars 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 5 avril 2016.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 juin 2014.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code pénal, notamment ses articles R. 321-1 et suivants ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Savouré,
- et les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public.
1. Considérant que M. A...exerçait à titre individuel une activité d'antiquaire spécialisé notamment dans l'art africain et asiatique et l'archéologie ; que, pour le calcul de la taxe sur la valeur ajoutée due à raison de la vente d'oeuvres d'art et d'antiquités, il a fait application du régime sur la marge prévu par le 1° du I de l'article 297 A du code général des impôts ; qu'il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 13 mars 2007 au 31 décembre 2010 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration a estimé qu'il avait minoré sa marge et lui a assigné des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette période ; que par jugement du 13 mai 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de l'intéressé tendant à la décharge de ces rappels ; que M. A...relève appel de ce jugement ;
Sur la fin de non recevoir opposée à la demande de première instance :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête (...) contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. " ;
3. Considérant que la demande présentée par M. A...le 27 mai 2013 devant le tribunal administratif de Lyon faisait état de l'intention de l'intéressé de contester " devant la justice " la décision rejetant sa réclamation et de ce qu'il ne pouvait accepter le " redressement " ; qu'à cette demande était jointe la décision du 19 mars 2013 rejetant la réclamation préalable de l'intéressé relative aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des " années 2008 à 2010 " ; qu'ainsi, M. A...devait, ainsi que l'a relevé le tribunal administratif, être regardé comme sollicitant des premiers juges la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 13 mars 2007 au 31 décembre 2010 ; que, par ailleurs, le contribuable soutenait dans sa demande que sa comptabilité était rigoureusement tenue, que les objets achetés en lots avaient des valeurs marchandes différentes, qu'il ignorait avoir le droit d'individualiser dans son livre de police la valeur de ces objets, qu'il n'a jamais entendu diminuer fictivement sa marge et que, tout en étant compétent et honnête, il ne parvenait plus à vivre de son métier ; qu'ainsi, cette demande comportait l'exposé de faits et de moyens tendant à contester la décision de l'administration de maintenir les rappels de taxe sur la valeur ajoutée précités ; que, dans ces conditions, la demande de M. A...satisfaisait aux exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance par l'administration fiscale ne peut être accueillie ;
Sur le bien-fondé des impositions :
4. Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 55, L. 57, L. 11 et R. 194-1 du livre des procédures fiscales que, dans le cadre de la procédure contradictoire et en l'absence de dispositions contraires, la charge de la preuve incombe à l'administration lorsque, comme en l'espèce, le contribuable n'a pas accepté les rectifications envisagées et les a contestées dans le délai qui lui est imparti, lequel est, en principe, de trente jours et est prorogé de trente jours sur demande du contribuable reçue par l'administration avant son expiration ;
5. Considérant qu'aux termes du 1° du I de l'article 297 A du code général des impôts : " La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion, d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquité qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat (...) " ;
6. Considérant qu'il est constant que M. A...réalisait principalement ses achats soit lors de ventes publiques aux enchères, soit par cession à son entreprise d'une partie de sa collection personnelle ; que certains de ses achats portaient sur des lots composés de plusieurs objets, acquis pour un prix global, et non pour un prix individualisé par objet ; que le contribuable mentionnait dans son livre de police les lots d'objets acquis, sans détailler la valeur individuelle de chaque objet ; que, lors de la vente d'un objet tiré d'un lot, il évaluait le prix d'achat de cet objet et calculait ensuite la marge réalisée ainsi que le montant de la taxe sur la valeur ajoutée due au Trésor ;
7. Considérant que le vérificateur a estimé que, faute d'avoir évalué et mentionné dans son livre de police, dès l'acquisition des lots concernés, la valeur individuelle de chacun des objets composant les lots achetés, M. A...ne justifiait pas du prix d'achat des objets revendus individuellement, de telle sorte que les livraisons devraient en principe être soumises à la taxe sur la valeur ajoutée sur la totalité du prix d'achat ; qu'ayant relevé que les factures d'achats permettaient de déterminer pour chaque lot le prix moyen des objets achetés, le vérificateur a recalculé la marge réalisée lors de la vente de chaque objet en substituant ce prix d'achat moyen au prix d'achat évalué par le contribuable ; qu'il a constaté que pour certaines ventes, le prix d'achat attribué par le contribuable était supérieur au prix d'achat moyen déterminé dans les conditions rappelées précédemment et en a conclu que les marges réalisées lors des ventes concernées avaient été minorées ; qu'en conséquence, il a rappelé la taxe correspondant aux minorations des marges ainsi mises en évidence ;
8. Considérant, toutefois, qu'il appartient à l'administration, qui supporte la charge de la preuve, d'établir que les évaluations auxquelles a procédé le contribuable sont erronées ; que le ministre, qui se borne à faire valoir qu'elles n'ont eu lieu qu'au moment de la revente des objets, n'apporte aucun élément de nature à établir qu'elles auraient été surestimées ou qu'au sein des différents lots, le prix d'achat de chaque pièce serait identique ; que M.A..., qui est un professionnel de la vente d'objets d'arts et d'antiquités, explique, de façon circonstanciée, que les lots d'objets qu'il a acquis, notamment lors de ventes aux enchères, contiennent généralement des objets de valeur très différente ; qu'il produit un dossier documentaire comportant de nombreuses photographies et confirmant l'hétérogénéité des objets composant ces lots ; que dans ces conditions, le ministre n'établit pas que le requérant aurait minoré ses bases d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, dès lors, il ne justifie pas du bien-fondé des rectifications contestées ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
10. Considérant qu'aux termes du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée, repris à l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ; qu'aux termes de l'article 43 de la même loi : " Le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner dans les conditions prévues à l'article 75, la partie [tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante] au paiement d'une somme au titre des frais qu'il a exposés. " ; qu'aux termes de l'article 37 de cette loi : " Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. / En toute matière, l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale peut demander au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à lui payer une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. / Si le juge fait droit à sa demande, l'avocat dispose d'un délai de douze mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée pour recouvrer la somme qui lui a été allouée. S'il recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat. (...) " ;
11. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ne peut demander au juge de mettre à la charge de la partie perdante, à son profit, que le paiement des seuls frais qu'il a personnellement exposés, à l'exclusion de la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle confiée à son avocat, mais que l'avocat de ce bénéficiaire peut demander au juge de mettre à la charge de la partie perdante la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement à son profit de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;
12. Considérant que, d'une part, M.A..., pour le compte de qui les conclusions de la requête relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ont été présentées, n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée ; que, d'autre part, l'avocat de M. A...n'a pas demandé que soit mise à la charge de l'Etat la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamée à son client si ce dernier n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle totale ; que, dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1303849 du 13 mai 2014 du tribunal administratif de Lyon est annulé.
Article 2 : M. A...est déchargé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 13 mars 2007 au 31 décembre 2010.
Article 3 : Les conclusions de M. A...présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 22 septembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Pourny, président-assesseur,
M. Savouré , premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 octobre 2016.
''
''
''
''
6
N° 14LY02586