Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C...a demandé, d'une part, au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006, 2007 et 2008, ainsi que des pénalités y afférentes et, d'autre part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009 et des pénalités y afférentes.
Par un jugement n° 1304166 - 1306203 du 1er octobre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes après les avoir jointes.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 2 décembre 2015, M. C..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement du 1er octobre 2015 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses pour les années 2006, 2007 et 2008 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. C...soutient que :
- s'agissant de la société G2F, elle était placée en liquidation judiciaire depuis le 5 décembre 2003, la procédure ayant été close pour insuffisance d'actif en 2008, et ne pouvait, par suite, pas avoir consenti des avances à son bénéfice, ni avoir procédé à une distribution exceptionnelle ou anticipée de produits sociaux ou attribuer une quelconque faveur spéciale au profit du bénéficiaire ;
- s'agissant des sommes réputées distribuées par la société Immopierre, il n'est pas établi, alors que les factures ont été réintégrées dans les résultats imposables de cette société pour l'année 2007, qu'elles auraient été mises à sa disposition en 2006 et pouvaient ainsi être imposées entre ses mains au titre de cette année ;
- s'agissant des rémunérations occultes supposées avoir été attribuées à sa fille, celles-ci doivent également être regardées comme ayant été perçues en 2007 et non en 2006 ;
- la procédure est irrégulière faute pour l'administration de lui avoir restitué les relevés de comptes de sa fille, ce qui l'a en outre empêché de critiquer utilement certains revenus taxés qui provenaient des comptes en cause ;
- les revenus attribués à sa fille, contribuable majeur, ne pouvaient être taxés entre ses mains, faute de demande de rattachement de celle-ci au foyer de son père.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mars 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la charge de la preuve pèse sur le requérant pour les trois années en litige ;
- les relevés bancaires remis à l'administration n'étaient que des photocopies que l'administration pouvait donc conserver ;
- l'existence d'une procédure de liquidation judiciaire n'interfère pas dans les mouvements financiers d'une société et la clôture de la procédure n'étant intervenue qu'en 2008, des sommes ont pu être versées au profit de M. C...en 2006 ;
- l'année de rattachement des factures de la société Immopierre engagées dans l'intérêt de M. C...est l'année 2006 eu égard à leur date de facturation ;
- les sommes imposées comme distributions en faveur de Mme C...ont été rattachées au titre de l'année d'inscription de ces prélèvements en comptabilité ;
- en portant leur fille sur leurs déclarations de revenus des années en litige, M. et Mme C... ont demandé son rattachement à leur foyer fiscal.
Le 29 mai 2017, le ministre de l'économie et des finances a produit les déclarations de revenus de M. et Mme C...pour les années 2006, 2007 et 2008, conformément à la mesure d'instruction en date du 24 mai 2017.
Par des mémoires en réplique enregistrés les 31 mai 2017, M. C...a conclut aux mêmes fins que dans sa requête par les mêmes moyens.
Il soutient en outre que le Conseil constitutionnel ayant jugé que les prélèvements sociaux sur les distributions occultes ne doivent pas être calculés sur la base majorée de 25 % qui est retenue pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, il a le droit d'être déchargé au moins à due concurrence ;
Par un mémoire enregistré le 1er juin 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens.
Il précise en outre, en réponse à la mesure d'instruction du 24 mai 2017, que les versements constatés à la clôture de l'exercice 2007 de la société Immo'Pierre et dont la fille du requérant a été désignée comme bénéficiaire, ont été débités du compte " débiteur divers " de la société entre mai et septembre 2006.
Par un nouveau mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2017, le ministre de l'action et des comptes publics informe la cour du prononcé d'un dégrèvement de 4 318 euros concernant les contributions sociales de la seule année 2006, la majoration de 25 % de l'assiette de calcul des cotisations supplémentaires n'ayant pas été appliquée pour les contributions sociales des années 2007 et 2008, et conclut au rejet du surplus des conclusions de M. C...par les mêmes moyens.
Par un nouveau mémoire, enregistré le 16 juin 2017, M. C...conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens.
Il soutient en outre que les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ont été méconnues, faute pour l'administration de lui avoir indiqué l'origine et la teneur des renseignements issus de la comptabilité de la société Immo'Pierre ayant fondé les impositions litigieuses.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vinet, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Thierry Besse, rapporteur public.
1. Considérant que M. et Mme C...ont fait l'objet, en 2009, d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle portant sur les années 2006, 2007 et 2008, à l'issue duquel ils ont été assujettis à des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assortis de majorations et d'intérêts de retard ; que, par ailleurs, à la suite de la vérification de comptabilité de la SARL Bar du Château, M. et Mme C...ont été assujettis à des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales résultant de l'imposition entre leurs mains, sur le fondement du a de l'article 111 du code général des impôts, du solde débiteur du compte courant d'associé de M. C...à la clôture de l'exercice 2009 ; que M. C...a saisi le tribunal administratif de Grenoble de deux demandes tendant à la décharge des impositions précitées et des pénalités et intérêts de retard correspondants ; qu'après les avoir jointes, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ces deux demandes par un jugement du 1er octobre 2015 ; que M. C...relève appel de ce jugement du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté sa demande relative aux impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des années 2006, 2007 et 2008 ;
Sur l'étendue du litige :
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction, que, par une décision en date du 12 juin 2017, le ministre de l'action et des comptes publics a prononcé un dégrèvement de 4 318 euros concernant les contributions sociales de l'année 2006 ; qu'il n'y a ainsi plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête à hauteur de la somme précitée ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la date de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont M. et Mme C...ont fait l'objet : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 16 A du même livre : " Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite. " ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : " (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 " ;
4. Considérant que la proposition de rectification du 11 juin 2010, relative aux années 2007 et 2008, fait état de la remise, le 30 septembre 2009, par le contribuable des photocopies des relevés bancaires pour les années 2006 à 2008 et indique que certains de ces relevés manquaient et que les photocopies des relevés des comptes bancaires manquants ainsi que ceux appartenant à ses deux enfants fiscalement à sa charge ont été remis à l'issue d'une réunion du 15 octobre 2009 ; que l'administration a produit en première instance une attestation en date du 7 décembre 2009, dans laquelle le requérant indique que les relevés bancaires remis le 30 septembre 2009 et le 15 octobre 2009 sont des photocopies, dont il autorise la conservation par l'administration ; qu'en se bornant à évoquer le caractère douteux de la rectification apportée sur l'une des dates mentionnée par l'attestation, M. C...ne conteste pas qu'il a lui-même rédigé et signé ladite attestation ; que, par suite, l'administration a pu, à bon droit, adresser au requérant des demandes de justifications sans avoir à restituer les photocopies des relevés de compte dont il détenait les originaux, et alors, au surplus, que lesdits documents n'ont pas fondé les impositions litigieuses ;
5. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'administration a indiqué à M. C...qu'elle s'était fondée, pour imposer entre ses mains les revenus distribués par la SARL Immo'Pierre, sur les éléments recueillis dans le cadre de la vérification de comptabilité de cette société, dont la proposition de rectification était annexée à celle du requérant ; que, par suite, l'administration ayant indiqué à M. C...l'origine et la teneur des renseignements à l'origine des rectifications le concernant, le moyen tiré de la méconnaissance des principes énoncés à l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les revenus distribués appréhendés par M.C... :
6. Considérant, en premier lieu, s'agissant des sommes distribuées par la société G2F, qu'en vertu de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes. (...) " ; que cet article institue une présomption de distribution des sommes mises à disposition des associés, par les sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés, qu'il appartient au bénéficiaire de combattre ; que si M. C...soutient que, compte tenu de son placement en liquidation judiciaire au cours de l'année 2003 et sa clôture pour insuffisance d'actif au début de l'année 2008, la société G2F Services n'a pas pu lui verser quelque somme que ce soit au cours de l'année 2006, une telle affirmation ne permet pas de renverser la présomption de distribution résultant de ce que des sommes provenant des comptes de la société G2F Services ont été mises à la disposition de M. C...d'autant que le versement de ces sommes a été constaté sur le compte bancaire personnel de M. C...;
7. Considérant, en deuxième lieu, s'agissant des revenus distribués provenant de la société Immo'Pierre, qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) " ; qu'aux termes de l'article R* 194-1 du code général des impôts : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. " ; que M. C...n'ayant pas répondu à la proposition de rectification dans le délai légal, il supporte la charge de la preuve ; que M. C... ne conteste pas être le maître de l'affaire de la société Immo'Pierre ni avoir appréhendé les sommes considérées comme des revenus distribués afférentes aux factures non engagées dans l'intérêt de l'entreprise, pour un montant de 60 568 euros ; que, s'agissant de l'année de rattachement de ces revenus, il résulte de l'instruction que les factures en cause ont, certes, été réintégrées aux résultats imposables de la société Immo'Pierre à la date de la clôture de l'exercice, en mars 2007, mais ont été émises en 2006 ; que M. C...n'apporte aucune preuve que ces factures n'auraient pas effectivement été payées au cours de l'année 2006 pour le montant de 60 568 euros retenu par l'administration ; qu'ainsi, cette dernière était fondée à imposer cette somme entre les mains du requérant au titre de l'année 2006 ;
En ce qui concerne les revenus distribués appréhendés par Mme A...C... :
8. Considérant, en troisième lieu, que si M. C...se prévaut de l'absence de demande de rattachement formellement rédigée par sa fille, pour contester l'imposition entre ses mains des sommes appréhendées par elle, il résulte de l'instruction, notamment des déclarations de revenus des années litigieuses, que M. et Mme C...ont déclaré à l'administration fiscale le rattachement de Mme A...C...à leur foyer fiscal, matérialisant ainsi leur acceptation de l'option nécessairement exercée par leur fille, dont il ne résulte d'ailleurs pas de l'instruction qu'elle aurait individuellement déclaré ses revenus au titre des années litigieuses ; qu'ainsi, l'administration, qui n'était pas tenue de vérifier la régularité des conditions dans lesquelles cette option avait été exercée, était fondée à imposer les revenus de Mme A...C...au sein du même foyer fiscal que ses parents ; que la circonstance que la déclaration des revenus 2006 aurait été effectuée tardivement est sans incidence sur la validité de l'option exercée par Mme A... C...et acceptée par ses parents dans ladite déclaration ;
9. Considérant, en quatrième lieu, que M. C...a désigné sa fille, Mme A... C..., comme bénéficiaire d'une somme de 10 932 euros, correspondant également à des factures non émises dans l'intérêt de l'entreprise Immo'Pierre et conteste seulement l'année de rattachement de ces revenus distribués ; que, pour les raisons indiquées au point 7 ci-dessus, M. C... supporte la charge de la preuve ; que si les sommes correspondant aux factures litigieuses ont été constatées en débit des comptes de la société au titre de l'exercice clôturé le 31 mars 2007, lesdites factures ont été émises entre les mois de mai et septembre 2006 ; que M. C... n'apporte aucune preuve que ces factures n'auraient pas effectivement été payées au cours de l'année 2006 ; qu'il suit de là que l'administration était fondée à imposer cette somme au titre de l'année 2006 ;
En ce qui concerne les contributions sociales :
10. Considérant que si M. C...conteste la majoration de 25 % de l'assiette des cotisations supplémentaires de contributions sociales mises à sa charge, il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit au point 2 ci-dessus, que l'administration a prononcé un dégrèvement correspondant à cette majoration pour l'année 2006 ; que l'administration n'ayant pas appliqué cette majoration s'agissant des années 2007 et 2008, le moyen doit être écarté ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble ne l'a pas déchargé des impositions supplémentaires, majorations et intérêts de retard restant en litige ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstance de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés dans l'instance par M. C...et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête dirigées contre les cotisations supplémentaires de contributions sociales mises à la charge de M. C...au titre de l'année 2006 à hauteur de la somme de 4 318 euros.
Article 2 : La somme de 1 500 euros sera mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 20 juin 2017, à laquelle siégeaient :
Mme Mear, président,
Mme Terrade, premier conseiller,
Mme Vinet, premier conseiller,
Lu en audience publique le 11 juillet 2017.
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N° 15LY03804