Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 16 août 2016 par laquelle le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.
Par un jugement n° 1601798 du 19 janvier 2017, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé cette décision du 16 août 2016 en ce qu'elle porte refus de titre de séjour et a enjoint au préfet de délivrer un titre de séjour à Mme D....
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 17 février 2017, le préfet du Puy-de-Dôme demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand.
Il soutient que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, sa décision ne méconnaît pas les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 juin 2017, Mme D..., représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à l'autorité préfectorale de lui délivrer sous astreinte une carte de séjour temporaire sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que la requête n'est pas fondée.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 11 juillet 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
1. Considérant que Mme B... D..., ressortissante de la République démocratique du Congo née en 1980, est entrée au mois de décembre 2012 en France, où sa demande d'asile a été rejetée par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides des 24 septembre 2013 et 29 octobre 2014 respectivement confirmées par la Cour nationale du droit d'asile les 27 mai 2014 et 5 mars 2015 ; que, par arrêté du 16 août 2016, la préfète du Puy-de-Dôme a rejeté la demande de titre de séjour que Mme D... avait présentée en se prévalant notamment de son état de santé et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que la préfète du Puy-de-Dôme relève appel du jugement du 19 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé sa décision du 16 août 2016 portant refus de titre de séjour et lui a enjoint de délivrer une carte de séjour à l'intéressée ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;
3. Considérant que, pour refuser de délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade à Mme D..., la préfète du Puy-de-Dôme s'est fondée sur la circonstance que l'état de santé de l'intéressée pouvait faire l'objet d'une prise en charge appropriée dans son pays d'origine ; que, ce faisant, la préfète du Puy-de-Dôme n'a pas fait sien l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 7 janvier 2016 selon lequel les soins requis par cet état de santé ne pouvaient être prodigués à l'intéressée en République démocratique du Congo ; que la préfète du Puy-de-Dôme, qui n'était pas liée par l'avis du 7 janvier 2016, justifie pour la première fois devant la cour des éléments relatifs à l'offre médicale et hospitalière en République démocratique du Congo sur lesquels elle s'est fondée et produit en particulier un message du 5 septembre 2013 du médecin référent de l'ambassade de France à Kinshasa relatif à la prise en charge des affections psychiatriques en République démocratique du Congo permettant de considérer que les institutions de ce pays sont en situation d'assurer de façon appropriée le suivi des troubles dont souffre Mme D... ; que ni les circonstances dont l'intéressée fait état en se prévalant notamment de l'ancienneté des éléments avancés par l'administration et de la fragilité de la situation sanitaire et politique en République démocratique du Congo ni la production de certificats médicaux attestant du suivi dont Mme D... fait l'objet ne permettent de regarder comme erronée l'appréciation portée sur ce point par l'autorité préfectorale ; que, dans ces conditions, la préfète du Puy-de-Dôme est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a retenu, pour annuler sa décision, que les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avaient été méconnues ;
4. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme D..., tant en première instance qu'en appel ;
Sur les autres moyens soulevés par Mme D... :
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par arrêté du 6 juin 2016, la préfète du Puy-de-Dôme a donné délégation à M. C..., sous-préfet de Riom, à l'effet de prendre les décisions portant refus de titre de séjour en cas d'absence ou d'empêchement de la secrétaire générale de la préfecture ; qu'il n'est pas établi que celle-ci n'était pas absente ou empêchée le 16 août 2016 ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée doit ainsi être écarté ;
6. Considérant que, compte tenu notamment du caractère circonstancié des motifs de l'arrêté contesté, le moyen tiré de ce que la décision du 16 août 2016 été prise sans examen de la situation particulière de l'intéressée doit être écarté ;
7. Considérant que Mme D... ne saurait utilement se prévaloir de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qui ne s'applique pas aux Etats membres mais aux institutions, organes et organismes de l'Union ;
8. Considérant que, lorsqu'il sollicite un titre de séjour, l'étranger est conduit à préciser à l'administration les motifs de sa demande et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de celle-ci ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir toute observation complémentaire utile auprès de l'administration ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, lors du dépôt de sa demande ou au cours de l'instruction de celle-ci, l'intéressée aurait été empêchée de faire valoir auprès de l'autorité préfectorale tout élément pertinent autre que ceux qu'elle a effectivement produits ; que Mme D... n'est, dès lors, pas fondée à soutenir qu'elle a été privée de son droit d'être entendue garanti par les principes généraux du droit de l'Union européenne ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la préfète du Puy-de-Dôme est, d'une part, fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé sa décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme D... et lui a fait injonction de délivrer à celle-ci un titre de séjour et, d'autre part, à demander, outre l'annulation de ce jugement, le rejet de la demande de Mme D... devant ce tribunal ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de Mme D... tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour du 16 août 2016, n'appelle aucune mesure d'exécution ;
Sur les frais d'instance :
11. Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur leur fondement par Mme D... et dirigées contre l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 19 janvier 2017 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la demande de Mme D... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand dirigées contre la décision de la préfète du Puy-de-Dôme du 16 août 2016 portant refus de titre de séjour, ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme ainsi qu'au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2017, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre ;
M. Antoine Gille, président-assesseur ;
M. Thierry Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 octobre 2017.
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N° 17LY00712
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