Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A...E...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :
- d'annuler la décision du 8 juillet 2016 par laquelle le préfet de l'Isère lui a refusé un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé la destination d'éloignement en cas de non-respect de ce délai de départ volontaire ;
- d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ".
Mme B...D...épouse E...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :
- d'annuler les décisions du 8 juillet 2016 du préfet de l'Isère portant refus de délivrance d'un titre de séjour, assorti de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ;
- d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation.
Par un jugement nos 1605092-1605093 du 30 décembre 2016, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions du préfet de l'Isère du 8 juillet 2016, enjoint au préfet de l'Isère de délivrer à M. et Mme E...un certificat de résidence mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente, de leur délivrer un récépissé de demande de titre de séjour, et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 16 février 2017, présentée par le préfet de l'Isère, il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement nos 1605092-1605093 du tribunal administratif de Grenoble du 30 décembre 2016 ;
2°) de rejeter les demandes de M. et Mme E... devant le tribunal administratif.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a, par le jugement attaqué, qui est insuffisamment motivé sur ce point, annulé la décision portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de Mme E...comme une simple conséquence de l'annulation de la décision du même jour prise à l'encontre de son époux, alors que la décision de refus de titre de séjour prise à l'encontre de Mme E...ne saurait avoir pour conséquence la séparation du couple, quand bien même l'arrêté pris à l'encontre de son époux a été annulé, alors que cette seule décision de refus de séjour n'a pas pour effet de l'éloigner du territoire français ;
- c'est à tort que le tribunal a considéré que le refus de titre méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire, enregistré le 7 avril 2017, présenté pour M. et Mme E..., ils concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que, contrairement à ce que fait valoir le préfet de l'Isère, les décisions en litige portent une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale, eu égard à la présence nécessaire de M. E...auprès de ses parents en France.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Seillet, président-assesseur,
- les observations de MeC..., substituant Me Pallanca, avocat des épouxE... ;
1. Considérant que M. E...et Mme D...épouseE..., ressortissants algériens, nés respectivement le 14 juin 1971 et le 23 juin 1985, mariés le 27 juin 2005 en Algérie, sont entrés en France le 26 octobre 2015 sous couvert de passeports revêtus d'un visa de court séjour ; que, le 9 février 2016, ils ont sollicité un titre de séjour sur le fondement du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, par des décisions du 8 juillet 2016, le préfet de l'Isère a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que le préfet de l'Isère fait appel du jugement du 30 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé lesdites décisions du 8 juillet 2016 ;
Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :
2. Considérant que M. et Mme E... ont fait valoir que M. E... était entré en France pour s'occuper de ses parents âgés vivant en France depuis 1962 et 1989, lesquels sont confrontés à des problèmes de santé et de perte d'autonomie ; que les certificats médicaux versés au débat, établis par le docteur Chaix, démontrent la réalité des affections dont souffrent ses parents ainsi que leurs caractères invalidant et persistant ; que M. E... justifie, par les pièces qu'il produit, de la nécessité, pour ses deux parents, de bénéficier d'une assistance quotidienne dans l'accomplissement des actes de la vie courante ; que, toutefois, M. E...ne démontre pas être le seul à pouvoir aider ses parents en France alors que sa soeur réside sur le territoire national, quand bien même elle doit s'occuper de son mari, handicapé à 80 % ainsi que de son fils, autiste, et alors qu'il n'est pas établi que cette assistance ne pourrait être assumée par des services spécialisés et qu'il ressort des pièces du dossier que la mère de l'intéressé souffre des pathologies en cause depuis 2009, bien avant l'arrivée en France des intéressés en 2015 ; que M. et Mme E..., entrés en France à l'âge de, respectivement, quarante-quatre ans et de trente ans, étaient présents sur le territoire national depuis seulement neuf mois à la date des refus de certificat de résidence en litige ; qu'ils disposent d'attaches familiales et sociales fortes en Algérie, où résident notamment les trois frères de M. E... ainsi que la mère et des frères et soeurs de son épouse ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce et au regard des conditions d'entrée et de séjour en France des requérants, les refus de certificat de résidence qui leur ont été opposés n'ont pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ils ont été pris et n'ont, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler les décisions en litige du préfet de l'Isère, le tribunal administratif s'est fondé sur le motif tiré d'une atteinte disproportionnée portée au droit de M. et Mme E... au respect de leur vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme E... devant le tribunal administratif de Grenoble ;
Sur la légalité des refus de titre de séjour :
4. Considérant que, pour les motifs retenus pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être également écarté le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences des décisions en litige sur la situation personnelle de M. et Mme E... ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions du 8 juillet 2016 portant refus de titre de séjour et obligation pour M. et Mme E... de quitter le territoire français et lui a enjoint de délivrer à M. et Mme E... un certificat de résidence " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente, de leur délivrer un récépissé de demande de titre de séjour ;
6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par M. et Mme E... et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 1er à 3 du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 décembre 2016 sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de M. et Mme E... sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...E..., à Mme B...D...épouse E...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Grenoble.
Délibéré après l'audience du 19 octobre 2017 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 novembre 2017.
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
Le greffier,
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N° 17LY00737
mpd