Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B...a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à ce que l'Université Joseph Fourier soit condamnée à lui verser la somme de 2 165 049,49 euros au titre de l'ensemble des préjudices qu'il estime avoir subis du fait du non-renouvellement de son contrat.
Par le jugement n° 1304650 du 22 mars 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 19 mai 2016, M.B..., représenté par Me F..., demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement du 22 mars 2016 du tribunal administratif de Grenoble et d'annuler la décision du 1er juillet 2013 par laquelle l'Université Joseph Fourier a rejeté sa demande indemnitaire ;
2°) de condamner l'Université Joseph Fourier à lui verser la somme de 2 165 049,49 euros au titre de l'ensemble des préjudices qu'il a subis ;
3°) de mettre à la charge de l'Université Joseph Fourier la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B... soutient que :
- son contrat doit être requalifié en contrat à durée indéterminée dès lors qu'il a été employé sans contrat de travail écrit de septembre 1993 au 31 décembre 1999 et qu'il a conclu quatorze contrats de travail pour la période allant de septembre 2010 au 31 juillet 2011 ;
- il doit être considéré comme un agent contractuel et non comme un vacataire ;
- les dispositions de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 ainsi que celles du décret du 17 janvier 1986 lui sont applicables et les contrats à durée déterminée qu'il a conclus ne pouvaient donc excéder une durée de six ans ;
- la fin des relations contractuelles avec l'Université, à partir d'août 2011, doit s'analyser comme un licenciement ;
- il a droit à une réparation pour la perte des salaires, des droits à la retraite, la perte économique depuis ses premières interventions en 1992-1993, le préjudice moral.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 octobre 2016, l'Université Grenoble Alpes, qui vient aux droits de l'Université Joseph Fourier, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) à titre principal de rejeter la requête de M. B...et de confirmer le jugement attaqué ;
2°) de mettre à la charge de M. B...la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
3°) à titre subsidiaire, de limiter le montant de l'indemnité sollicitée, tous préjudices confondus à la somme de 3 000 euros ;
4°) de constater que le préjudice revendiqué par M.B..., au titre de la réévaluation de sa rémunération pour les contrats passés et exécutés entre 2000 et 2001, relève d'un litige distinct et, en tout état de cause, est atteint par la prescription quadriennale.
L'Université fait valoir que :
- il n'est nullement établi que M. B...ait été recruté par l'Université depuis 1993 ;
- quel que soit le fondement de son recrutement, M. B... ne pouvait revendiquer au 31 juillet 2011, date de l'expiration de son premier contrat, le bénéfice d'un contrat à durée indéterminée ;
- les modalités de calcul de la demande indemnitaire sont irréalistes ; il ne pouvait prétendre à une évolution de carrière à l'instar d'un fonctionnaire titulaire ; il ne pouvait pas non plus prétendre à des heures supplémentaires années (HSA) : ceci est d'ailleurs un préjudice distinct et atteint par la prescription quadriennale ;
- si la cour considérait que le requérant a fait l'objet d'un licenciement irrégulier, il aurait droit, tout au plus, à 3 000 euros ; en tout état de cause, le non-renouvellement du contrat était justifié.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'éducation ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;
- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gondouin,
- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,
- et les observations de MeE..., représentant de M. B... et de Me D..., représentant de l'Université ;
1. Considérant que, par une décision du 20 mai 2011, le président de l'Université Joseph Fourier de Grenoble a informé M. A...B..., agent contractuel de cette université, que son contrat ne serait pas renouvelé au-delà de son terme le 31 juillet 2011 ; que, par un courrier du 6 mai 2013, M. B... a présenté au président de cette université une demande indemnitaire, rejetée le 1er juillet suivant ; que M. B... a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à la condamnation de l'Université Joseph Fourier à lui verser la somme d'un montant, dans le dernier état de ses écritures, de 2 165 049,49 euros au titre de l'ensemble des préjudices qu'il estime avoir subis du fait du non-renouvellement de son contrat ; que, par un jugement du 22 mars 2016, dont il relève appel, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
2. Considérant, en premier lieu, que pour la période allant du mois de septembre 1993 au 31 décembre 1999, M. B...n'établit par aucun des documents qu'il a produits, tant devant le tribunal administratif de Grenoble que devant la cour, avoir eu la qualité d'agent contractuel de l'Université Joseph Fourier ; que les pièces attestant qu'il intervenait dans le cadre de l'EJUG (école judo Université Grenoble) ou du GUC - JCD (judo-club du Dauphiné) qui sont des associations ne permettent pas de conclure qu'il avait la qualité d'agent contractuel de l'Université ; que la circonstance que l'Université Joseph Fourier ait reconnu qu'il avait effectué quelques vacations en 1997, 1998, et 1999 ne le permet pas davantage ;
3. Considérant, en second lieu, qu'à partir du 22 septembre 2000, M. B...a été recruté par l'Université Joseph Fourier par contrat à durée déterminée, en qualité d'agent contractuel, " à raison d'une quotité de travail de 75 heures mensuelles maximum " et affecté au Service inter-universitaire des activités physiques et sportives (SIUAPS) " pour y effectuer des tâches d'assistance à l'encadrement du judo universitaire " ; que, par une décision du 20 mai 2011, l'Université a décidé de mettre un terme aux renouvellements successifs jusqu'au 31 juillet 2011, de ces contrats ;
4. Considérant, d'une part, qu'aux termes des trois premiers alinéas de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État dans sa version issue de la loi du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des agents contractuels peuvent être recrutés dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; / 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A et, dans les représentations de l'État à l'étranger, des autres catégories, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient " ; qu'aux termes des quatrième et cinquième alinéas du même article 4 : " Les agents ainsi recrutés sont engagés par des contrats à durée déterminée, d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables, par reconduction expresse. La durée des contrats successifs ne peut excéder six ans. / Si, à l'issue de la période maximale de six ans mentionnée à l'alinéa précédent, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée " ; qu'en vertu du paragraphe I de l'article 13 de la loi du 26 juillet 2005, dans sa rédaction alors applicable : " Lorsque l'agent, recruté sur un emploi permanent, est en fonction à la date de publication de la présente loi (...) le renouvellement de son contrat est soumis aux conditions prévues aux quatrième, cinquième et sixième alinéas de l'article 4 de la même loi " ;
5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 6 de la loi du 11 janvier 1984 précitée : " Les fonctions qui, correspondant à un besoin permanent, impliquent un service à temps incomplet d'une durée n'excédant pas 70 % d'un service à temps complet, sont assurées par des agents contractuels. Les fonctions correspondant à un besoin saisonnier ou occasionnel sont assurées par des agents contractuels, lorsqu'elles ne peuvent être assurées par des fonctionnaires titulaires " ; que l'article 6 du décret du 17 janvier 1986 ci-dessus visé précisait, avant son abrogation par le décret n° 2014-364 du 21 mars 2014, que le contrat conclu en application du premier alinéa de l'article 6 de cette loi peut être conclu pour une durée indéterminée ; qu'aux termes des deux derniers alinéas de l'article 6 de ce décret : " Toutefois, lorsque le contrat est conclu pour une durée déterminée, celui-ci a une durée maximale de trois ans. Ce contrat est renouvelable, par reconduction expresse, dans la limite maximale de six ans. / À l'issue de la période maximale de six ans mentionnée à l'alinéa précédent, le contrat ne peut être reconduit que par décision expresse et pour une durée indéterminée " ;
6. Considérant que les dispositions citées de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984, applicables aux agents recrutés sur un emploi permanent en fonction à la date de la publication de la loi du 26 juillet 2005, prévoient que la durée totale de contrats à durée déterminée successifs ne peut excéder six ans et que, si l'autorité compétente entend les reconduire à l'issue d'une telle période, elle doit prendre une décision expresse et ne peut conclure avec l'agent qu'un contrat à durée indéterminée ; qu'il ne saurait toutefois en résulter, pas davantage que de celles citées au point 5, qu'un contrat à durée déterminée conclu, en méconnaissance de ces dispositions, pour une durée qui, compte tenu de la durée des contrats successifs précédemment conclus avec le même agent, conduit, en cours d'exécution du contrat, à dépasser la durée maximale d'emploi de six années, serait tacitement transformé en contrat à durée indéterminée ;
7. Considérant qu'il suit de là que M. B..., contrairement à ce qu'il soutient, n'était pas titulaire d'un contrat à durée indéterminée lorsque le président de l'Université Joseph Fourier lui a annoncé son intention de ne pas renouveler son dernier contrat ; qu'il n'a fait l'objet d'aucun licenciement ; que, par suite, ses conclusions tendant à ce que soient réparés les préjudices découlant de " ce licenciement intervenu sans motif légitime et au mépris de la procédure " ne peuvent qu'être rejetées ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
Sur les frais liés au litige :
9. Considérant que M. B...étant en l'espèce partie perdante, ses conclusions tendant à ce que soit mise à la charge de l'Université Grenoble Alpes, qui vient aux droits de l'Université Joseph Fourier, une somme à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de l'Université Grenoble Alpes présentées sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1 : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'Université Grenoble Alpes présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et à l'Université Grenoble Alpes.
Délibéré après l'audience du 1er juin 2018 où siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme Gondouin, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 juin 2018.
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N° 16LY01700