Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société Othelo a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 juillet 2016 par lequel le maire de la commune des Marches, agissant au nom de l'Etat, l'a mise en demeure d'interrompre les travaux entrepris sur un terrain de golf qu'elle exploite.
Par un jugement n° 1604395 du 13 juin 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 7 août 2017, la société Othelo, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 13 juin 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire des Marches du 29 juillet 2016 ;
3°) de mettre une somme de 4 000 euros à la charge de la commune des Marches et de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les travaux de profilage du terrain de golf, d'une profondeur comprise entre 20 et 70 centimètres et de pose à l'identique de tapis au niveau du sol naturel, ne nécessitaient aucune autorisation d'urbanisme, ainsi que l'ont estimé les premiers juges ;
- le maire ne pouvait légalement interrompre de tels travaux au motif qu'ils méconnaîtraient le plan local d'urbanisme (PLU) ;
- les travaux en litige ne constituent en tout état de cause pas des affouillements et exhaussements et ne portent pas atteinte à l'environnement ou à la qualité des paysages.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juin 2018, le ministre de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il s'en rapporte aux écritures du préfet de la Savoie devant le tribunal administratif de Grenoble.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;
- et les observations de Me B... pour la société Othelo ;
Considérant ce qui suit :
1. La société Othelo relève appel du jugement du 13 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 juillet 2016 par lequel le maire de la commune des Marches, agissant au nom de l'Etat, l'a mise en demeure d'interrompre des travaux entrepris sur un terrain de golf qu'elle exploite.
Sur la légalité de l'arrêté du 29 juillet 2016 :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme : " Les infractions aux dispositions des titres Ier, II, III, IV et VI du présent livre sont constatées par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l'Etat et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l'urbanisme suivant l'autorité dont ils relèvent et assermentés. Les procès-verbaux dressés par ces agents font foi jusqu'à preuve du contraire. / (...) Lorsque l'autorité administrative et, au cas où il est compétent pour délivrer les autorisations, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ont connaissance d'une infraction de la nature de celles que prévoient les articles L. 160-1 et L. 480-4, ils sont tenus d'en faire dresser procès verbal. / Copie du procès-verbal constatant une infraction est transmise sans délai au ministère public. (...) ". Aux termes du troisième alinéa de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme : " Dès qu'un procès-verbal relevant l'une des infractions prévues à l'article L. 480-4 a été dressé, le maire peut également, si l'autorité judiciaire ne s'est pas encore prononcée, ordonner par arrêté motivé l'interruption des travaux. (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 480-4 du même code : " Le fait d'exécuter des travaux mentionnés aux articles L. 421-1 à L. 421-5 en méconnaissance des obligations imposées par les titres Ier à VII du présent livre et les règlements pris pour leur application ou en méconnaissance des prescriptions imposées par un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou par la décision prise sur une déclaration préalable est puni d'une amende (...) " ;
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 152-1 du code de l'urbanisme : " L'exécution par toute personne publique ou privée de tous travaux, constructions, aménagements, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, et ouverture d'installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan sont conformes au règlement et à ses documents graphiques. Aux termes de l'article L. 610-1 du même code : " En cas d'infraction aux dispositions des plans locaux d'urbanisme, les articles L. 480-1 à L. 480-9 sont applicables, les obligations visées à l'article L. 480-4 s'entendant également de celles résultant des plans locaux d'urbanisme. ".
4. La société Othelo a entrepris des travaux sur le terrain de golf qu'elle exploite sur le territoire de la commune des Marches. Ces travaux ont fait l'objet, le 25 juin 2016, d'un procès-verbal de constat d'infraction, établi à l'initiative du maire de cette commune, agissant en qualité d'autorité administrative de l'Etat, en application de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme cité au point 2. Le maire des Marches, par un arrêté du 29 juillet 2016 pris sur le fondement de l'article L. 480-2 du même code, a ordonné à la société Othelo d'interrompre les travaux qu'elle avait engagés, aux motifs que ces travaux étaient exécutés en violation de l'article A 1.3 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) et qu'ils étaient réalisés sans autorisation.
5. Pour critiquer le jugement attaqué, qui a retenu comme fondé le seul motif tiré de la méconnaissance du règlement du PLU pour rejeter sa demande, la société requérante soutient que le maire ne peut légalement interrompre des travaux ne nécessitant aucune autorisation d'urbanisme au motif qu'ils méconnaîtraient le PLU. Toutefois, la circonstance retenue par le tribunal que les travaux en litige ne nécessitaient ni permis d'aménager, ni déclaration de travaux, ni aucune autre autorisation de construire, est, en vertu des dispositions de l'article L. 152-1 du code de l'urbanisme citées au point 3, sans incidence sur l'opposabilité des dispositions figurant dans le règlement du PLU de la commune. Dès lors, contrairement à ce que soutient la société Othelo et ainsi que le prévoient expressément les dispositions de l'article L. 610-1 du code de l'urbanisme également citées au point 3, le maire peut légalement, sur le fondement des articles L. 480-2 et L. 480-4 du code de l'urbanisme, interrompre des travaux qui ne requièrent pas d'autorisation d'urbanisme à la date de sa décision, au motif qu'ils méconnaissent le PLU.
6. En vertu de l'article A 1 du règlement du PLU, sont interdits les bâtiments et installations nouveaux et destinés à des activités économiques ou touristiques non agricoles ainsi que les affouillements ou exhaussements du sol non directement liés à une construction autorisée. Il ressort des pièces du dossier que le terrain de golf a été créé au cours de l'année 2011 sans autorisation, à la faveur d'un projet de révision du PLU finalement abandonné, sur un terrain classé en zone agricole. Les travaux effectués, qui ont consisté à profiler la terre du terrain de golf sur une superficie et une hauteur significatives, constituent, quelle que soit leur finalité, des affouillements de sol au sens du règlement du PLU, sans lien avec une construction autorisée dans la zone et méconnaissent ainsi les dispositions de l'article A 1 du règlement du PLU.
7. Il résulte de ce qui précède que la société Othelo n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de la commune des Marches, qui n'a pas la qualité de partie dans une instance relative à une décision prise par son maire au nom de l'Etat. Ces dispositions font également obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la requérante présentées sur le même fondement contre l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Othelo est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Othelo et au ministre de la cohésion des territoires.
Copie en sera adressée à la commune des Marches.
Délibéré après l'audience du 25 septembre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 octobre 2018.
4
N° 17LY03081
md