Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. H... F..., Mme E... F... et Mme D... F... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté de péril imminent du 14 avril 2016 que leur a notifié le maire de Champeix.
Par un jugement n° 1601027 du 2 novembre 2017, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour
Par une requête et des mémoires en réplique et récapitulatif enregistrés les 3 janvier, 18 août et 27 novembre 2018, M. H... F..., Mme E... F... et Mme D...F..., représentés par Me J..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 2 novembre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté de péril imminent du maire de Champeix du 14 avril 2016 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Champeix la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent, dans le dernier état de leurs écritures, que :
- tant leur requête d'appel que la demande de première instance ont été introduites dans les délais requis ;
- l'arrêté est entaché d'illégalité externe dès lors qu'il ne se réfère pas aux pouvoirs de police générale que le maire tient des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales alors que la mise en oeuvre d'une mesure de démolition ne peut être ordonnée sur le fondement de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation ; cet arrêté ne fait en outre pas état de la possibilité de faire commettre un expert chargé de procéder à une constatation contradictoire de l'état du bâtiment en cas d'application des articles L. 511-1 et L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation ;
- le rapport d'expertise du 19 décembre 2014 reprend intégralement le rapport du 9 octobre 2014, qui est antérieur à la saisine du tribunal administratif aux fins de désignation d'un expert ;
- c'est à tort que la commune a considéré qu'ils étaient propriétaires de l'immeuble en cause.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 février 2018, la commune de Champeix, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la recevabilité de la requête et de la demande de première instance ne sont pas établies, faute pour les requérants de préciser et établir les dates de notification du jugement attaqué et de l'arrêté critiqué, qui est confirmatif d'un arrêté de péril du 19 décembre 2014 et qui n'a pas été contesté en temps utile ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
L'instruction a été close le 13 février 2019 par une ordonnance du même jour prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;
- et les observations de Me G... pour les consortsF..., ainsi que celles de Me B... pour la commune de Champeix ;
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté de péril imminent du 16 janvier 2015 pris sur le fondement des articles L. 511-1 et L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, le maire de la commune de Champeix a prescrit aux consorts F..., en leur qualité de propriétaires de l'immeuble situé, rue des moulins, sur la parcelle cadastrée section AB n°1269 et au regard du risque d'effondrement de cet immeuble, de procéder dans un délai d'un mois à sa déconstruction partielle, avec conservation d'éléments de stabilité nécessaires à la préservation des constructions riveraines et des abords. Par arrêté du 14 avril 2016, le maire de Champeix a réitéré cet arrêté de péril imminent du 16 janvier 2015 pour en modifier diverses mentions relatives aux coordonnées de ses destinataires. Les consorts F...relèvent appel du jugement du 2 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 14 avril 2016.
2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de la construction et de l'habitation : " Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments ou édifices quelconques lorsqu'ils menacent ruine et qu'ils pourraient, par leur effondrement, compromettre la sécurité ou lorsque, d'une façon générale, ils n'offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique, dans les conditions prévues à l'article L. 511-2. Toutefois, si leur état fait courir un péril imminent, le maire ordonne préalablement les mesures provisoires indispensables pour écarter ce péril, dans les conditions prévues à l'article L. 511-3 ". Aux termes de l'article L. 511-1-1 du même code : " Tout arrêté de péril pris en application de l'article L. 511-1 est notifié aux propriétaires et aux titulaires de droits réels immobiliers sur les locaux, tels qu'ils figurent au fichier immobilier (...) / A défaut de connaître l'adresse actuelle des personnes visées au premier alinéa ou de pouvoir les identifier, la notification les concernant est valablement effectuée par affichage à la mairie de la commune (...) où est situé l'immeuble ainsi que par affichage sur la façade de l'immeuble (...) ". Aux termes de l'article L. 511-3 du même code : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d'un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l'état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril s'il la constate. / Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l'évacuation de l'immeuble. / Dans le cas où ces mesures n'auraient pas été exécutées dans le délai imparti, le maire les fait exécuter d'office. En ce cas, le maire agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais (...) ".
Sur l'objet de la requête :
3. L'arrêté du 14 avril 2016 se borne à réitérer l'arrêté de péril imminent du 16 janvier 2015 mentionné au point 1 en corrigeant des erreurs purement matérielles affectant les mentions relatives aux coordonnées de ses destinataires. Eu égard à l'objet et aux effets de cet arrêté, et ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, les conclusions de la requête dirigées contre l'arrêté du 14 avril 2016 doivent être regardées comme étant dirigées en réalité contre l'arrêté du 16 janvier 2015 tel que modifié le 14 avril 2016.
Sur la recevabilité de la requête :
4. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie (...) ". Il ressort du dossier transmis à la cour que le jugement attaqué a été notifié aux requérants par un courrier recommandé du greffe du tribunal administratif qui leur a été adressé le 7 novembre 2017. La requête dirigée contre ce jugement ayant été enregistrée le 3 janvier 2018, la fin de non-recevoir tirée de sa tardiveté doit être écartée.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
5. La demande des consorts F...dirigée contre l'arrêté du 14 avril 2016 ayant été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Clermont-Ferrand le 14 juin 2016, la fin de non-recevoir que soulève la commune de Champeix tirée de l'expiration du délai de recours contentieux de deux mois ouvert pour contester cet arrêté ne peut qu'être écartée.
6. Pour soutenir que la demande des consorts F...n'était pas recevable, la commune de Champeix expose également qu'il incombait aux requérants de contester en temps utile l'arrêté de péril imminent du 16 janvier 2015 que l'arrêté du 14 avril 2016 se borne à réitérer en en rectifiant les mentions erronées. Toutefois, en l'absence au dossier de tout élément relatif à la date de notification aux requérants de l'arrêté de péril du 16 janvier 2015 ou à la connaissance que ceux-ci auraient pu en avoir, la fin de non-recevoir tirée du caractère définitif de ce dernier arrêté doit être écartée.
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté de péril du 16 janvier 2015 modifié :
7. Si les différents extraits de matrice cadastrale produits au dossier font apparaître que la parcelle cadastrée section AB n° 1269 appartient, à titre de propriété non bâtie, à M. A... C..., oncle par alliance et grand-oncle des requérants, il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'attestation notariale de propriété du 12 mai 1959, que cette parcelle, anciennement cadastrée n° 882, est entrée, lors du décès de M. C... en 1958, dans le patrimoine de son épouse, elle-même décédée en 1980 et dont il n'apparaît pas que la succession a été réglée. Il ne ressort en outre d'aucune pièce du dossier que cette parcelle aurait été transmise par voie successorale à M. I... F... auquel les requérants ont eux-mêmes succédé. Dans ces conditions et au regard des éléments produits, les requérants sont fondés à contester la qualité de propriétaire de l'immeuble en cause qui leur a été attribuée par le maire de Champeix pour les rendre destinataires de l'arrêté de péril en litige leur enjoignant d'avoir à procéder aux travaux prescrits sur cet immeuble.
8. Il résulte de ce qui précède que les consorts F...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande et à demander, outre l'annulation de ce jugement, l'annulation de l'arrêté de péril imminent du maire de Champeix du 16 janvier 2015 et de l'arrêté modificatif du 14 avril 2016.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre des requérants, qui ne sont pas partie perdante dans la présente instance. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Champeix le versement d'une somme globale de 2 000 euros aux requérants au titre des frais qu'ils ont exposés.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 2 novembre 2017 et les arrêtés de péril du maire de Champeix des 16 janvier 2015 et 14 avril 2016 sont annulés.
Article 2 : La commune de Champeix versera aux consorts F...la somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... F..., premier dénommé pour l'ensemble des requérants, et à la commune de Champeix.
Délibéré après l'audience du 26 mars 2019, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre ;
M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Mme Christine Psilakis, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 avril 2019.
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N° 18LY00031
md