Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 25 novembre 2013 par lequel le Garde des sceaux, ministre de la justice a procédé à son reclassement dans le corps des adjoints techniques du ministère de la justice à compter du 1er novembre 2013 et l'a affecté au sein de la direction territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse Drôme-Ardèche.
Par un jugement n° 1403198 du 16 mai 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision contestée et mis à la charge de l'État le paiement d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 17 juillet 2017, le Garde des sceaux, ministre de la justice demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1403198 du 16 mai 2017 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) de rejeter la demande de M. A... devant le tribunal administratif.
Il soutient que c'est à tort que les premiers juges se sont fondés, pour annuler l'arrêté en litige, sur le motif tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 sur les droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, codifiées à l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, en raison de ce que ni la signature manuscrite ni aucune autre mention de ce document ne permettait d'identifier la personne qui en était l'auteur, alors que le respect des exigences posées à l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration s'apprécie au regard de l'acte administratif original et non de l'ampliation, qu'en l'espèce l'original de l'arrêté comporte en caractères lisibles les exigences légales puisqu'y figurent la qualité de l'auteur de l'arrêté, son prénom et son nom et que l'intéressé était en mesure d'identifier, sans ambigüité, l'auteur de l'arrêté. Il s'en remet pour le surplus à ses écritures de première instance.
La requête a été communiquée à M. A... qui n'a produit aucune observation.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le décret n° 2013-901 du 9 octobre 2013 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Seillet, président assesseur,
- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., agent technique d'éducation affecté au sein de l'unité éducative d'hébergement collectif de l'établissement de placement éducatif de Valence, relevant des services déconcentrés de la protection judiciaire de la jeunesse, a été reclassé, par un arrêté du 25 novembre 2013 du Garde des sceaux, ministre de la justice, à compter du 1er novembre 2013, dans le corps des adjoints techniques du ministère de la justice, en application des dispositions du décret du 9 octobre 1993 portant intégration des fonctionnaires du corps des agents techniques d'éducation de la protection judiciaire de jeunesse dans le corps des adjoints techniques du ministère de la justice. Par ce même arrêté l'intéressé a été affecté à la direction territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse Drôme-Ardèche. Le recours administratif présenté par l'intéressé le 31 janvier 2014 a fait l'objet d'une décision implicite de rejet. Le Garde des sceaux, ministre de la justice, interjette appel du jugement par lequel, sur la demande de l'intéressé, le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 25 novembre 2013.
Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 sur les droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, alors en vigueur et aujourd'hui codifié à l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. "
3. L'arrêté du 25 novembre 2013 par lequel le Garde des sceaux, ministre de la justice a procédé au reclassement de M. A... dans le corps des adjoints techniques du ministère de la justice et l'a affecté au sein de la direction territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse Drôme-Ardèche comporte, en caractères lisibles, les mentions prévues par ces dispositions. Par suite, la circonstance que l'ampliation de cette décision, notifiée à l'intéressé, ne comporte pas une mention lisible du nom et du prénom de son auteur et que ni la signature manuscrite, qui est illisible, ni aucune autre mention de ce document ne permet d'identifier la personne qui en est l'auteur, est sans incidence sur la légalité de cet arrêté. Dès lors, c'est à tort que, pour annuler ledit arrêté, les premiers juges se sont fondés sur le motif tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 sur les droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, reprises à l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration.
4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A....
Sur les autres moyens soulevés par M. A... :
5. En premier lieu, la décision en litige a été signée par Mme D... B..., directrice de service, adjointe au chef de bureau et du développement professionnel, agissant en vertu d'une décision du 21 juin 2013 portant délégation de signature à l'effet de signer, au nom du Garde des sceaux, ministre de la justice, tous actes, arrêtés et décisions, à l'exclusion des décrets, dans les limites de ses attributions. Dès lors le moyen tiré de l'incompétence du signataire de cette décision doit être écarté.
6. En deuxième lieu, si les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir l'administration peut, en dérogation à cette règle, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires, des militaires ou des magistrats, leur conférer une portée rétroactive dans la stricte mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation.
7. Aux termes de l'article 1er du décret du 9 octobre 2013 portant intégration des fonctionnaires du corps des agents techniques d'éducation de la protection judiciaire de la jeunesse dans le corps des adjoints techniques du ministère de la justice : " A la date d'entrée en vigueur du présent décret, les fonctionnaires relevant du corps des agents techniques d'éducation de la protection judiciaire de la jeunesse régis par le décret n° 97-925 du 8 octobre 1997 portant statut particulier du corps des agents techniques d'éducation de la protection judiciaire de la jeunesse sont intégrés dans le corps des adjoints techniques du ministère de la justice créé par le décret du 22 décembre 2008 susvisé ".
8. Aux termes de l'article 5 de ce décret : " Le présent décret entre en vigueur le premier jour du mois suivant sa publication au Journal officiel de la République française. A cette même date, le décret n° 97-925 du 8 octobre 1997 portant statut particulier du corps des agents techniques d'éducation de la protection judiciaire de la jeunesse et le décret n° 2008-1267 du 3 décembre 2008 portant mise en extinction du corps des agents techniques d'éducation de la protection judiciaire de la jeunesse sont abrogés ".
9. Il ressort des pièces du dossier qu'en raison de sa non-titularisation, après un détachement, dans le corps des éducateurs, M. A... avait été réintégré, par un arrêté du 10 octobre 2011, dans son corps d'origine des agents techniques d'éducation de la protection judiciaire de la jeunesse, au 1er octobre 2011, et affecté à l'établissement public d'éducation et d'insertion (EPEI) Drome Ardèche. Par l'arrêté en litige, le Garde des sceaux, ministre de la justice, s'est borné à le reclasser, à la date d'entrée en vigueur du décret du 9 octobre 2013, dans le corps des adjoints techniques du ministère de la justice, à la seule fin d'assurer la continuité de sa carrière dans le corps unique de reclassement, alors qu'à la date du 1er novembre 2013, les dispositions relatives à son ancien corps avaient été abrogées par l'effet du décret du 9 octobre 2013. Dès lors, le moyen tiré de l'illégalité de la décision en litige au motif de son caractère rétroactif doit être écarté.
10. En dernier lieu, il n'est pas contesté qu'à la date d'intégration de M. A... dans le corps des adjoints techniques du ministère de la justice, aucun poste d'agent relevant de ce corps n'était disponible au sein de l'unité éducative d'hébergement collectif de l'établissement de placement éducatif de Valence où il avait été auparavant affecté. Dès lors, le Garde des sceaux, ministre de la justice a pu, à bon droit, afin de le reclasser dans un poste vacant relevant de ce corps, l'affecter au sein de la direction territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse Drôme-Ardèche.
11. Il résulte de ce qui précède que le Garde des sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté en litige du 25 novembre 2013.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1403198 du 16 mai 2017 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.
Article 2 : La demande de M. A... devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Garde des sceaux, ministre de la justice et à M. C... A....
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président assesseur,
Mme Burnichon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 octobre 2019.
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N° 17LY02784