Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... G... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1409472-1409473 du 13 juin 2017, le tribunal administratif de Lyon a réduit l'assiette des contributions sociales auxquelles M. G... a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 en raison de la non-application du coefficient multiplicateur de 1,25 prévu au premier alinéa du 7 de l'article 158 du code général des impôt (article 1), l'a déchargé dans cette mesure des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 (article 2) et a rejeté le surplus de sa demande (article 3).
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire enregistrés les 4 août 2017 et 18 octobre 2019, M. G..., représenté par Me A..., avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 13 juin 2017 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ainsi que des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les propositions de rectification ne sont pas suffisamment motivées ;
- l'administration ne lui a pas communiqué les éléments sur lesquels elle a fondé ses rectifications en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;
- l'administration ne rapporte pas la preuve qu'il a bénéficié d'un avantage occulte ; elle a reconnu le caractère professionnel des frais exposés en Russie, les dépenses de voyage pour se rendre dans ce pays devaient être reconnues comme ayant été engagées dans l'intérêt de l'entreprise ; le caractère professionnel de ces dépenses se déduit également du résultat de l'enquête pénale ;
- l'administration ayant reconnu le caractère professionnel des frais exposés en Russie, les dépenses de voyage pour se rendre dans ce pays devaient être reconnues comme ayant été engagées dans l'intérêt de l'entreprise ; le caractère professionnel de ces dépenses se déduit également du résultat de l'enquête pénale ;
- la majoration de 1,25 ne pouvait valablement être appliquée ;
- l'administration n'établit pas l'existence d'un manquement délibéré justifiant l'application d'une majoration de 40 %.
Par un mémoire enregistré le 13 février 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les propositions de rectification sont suffisamment motivées ;
- l'intéressé a eu communication de tous les documents sur lesquels les rectifications sont fondées ;
- le caractère personnel de certains frais est établi ;
- les avantages occultes dont il a bénéficié peuvent faire l'objet de la majoration de 25 % ;
- alors qu'il était président de la SASU Réflexions, il a fait prendre par la société, de façon répétée, des dépenses qu'il savait lui être personnelles ; ainsi, la majoration pour manquement délibéré est justifiée.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B..., présidente assesseure,
- les conclusions de Mme D..., rapporteure publique,
- les observations de Me A..., représentant M. G... ;
Considérant ce qui suit :
1. Jusqu'au 3 février 2010, date de son licenciement, M. G... a dirigé la SASU Réflexions qui avait une activité de bureau d'études relatives à l'élaboration des plans d'éclairage de magasin principalement pour le compte de SAS Fagerhult France. La société Fagerhult France qui le 9 décembre 2009 a absorbé la société Réflexions avec effet au 1er janvier 2009 a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2008 et 2009. A l'issue de ce contrôle, l'administration a refusé la déduction du résultat de la société de divers frais dont le caractère professionnel n'était pas démontré. L'administration, estimant que ces sommes constituaient des revenus distribués à M. G..., sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts a adressé à l'intéressé trois propositions de rectification en date du 15 novembre 2011 pour la première et du 25 juin 2012, pour les deux autres portant sur des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2008 et 2009 assorties de pénalités. M. G... relève appel du jugement du 13 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Lyon a réduit l'assiette des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 et l'a déchargé dans cette mesure des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009, en tant que le tribunal a rejeté le surplus de sa demande qui tendait à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, selon le premier alinéa de l'article L 57 du livre des procédures fiscales, lorsqu'elle envisage de procéder à des rectifications, " l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. "
3. Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la notification ".
4. Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ses motifs.
5. Il résulte de l'instruction que les propositions de rectification adressées les 15 novembre 2011 et 25 juin 2012 à M. G... exposent avec précision les éléments de fait et de droit sur lesquels l'administration s'est fondée pour effectuer les redressements litigieux, mentionnant notamment que les sommes mises à la disposition de l'intéressé au cours des années en litige par la société Réflexions, dont il a été le dirigeant, doivent être considérées comme des revenus distribués au sens du c) de l'article 111 du code général des impôts. Notamment, en ce qui concerne les notes de frais, ces propositions de rectification indiquent pour chacune de ces dépenses en les identifiant par leur date, leur montant et leur intitulé, les raisons pour lesquelles elles n'ont pu être considérées comme ayant été effectuées dans l'intérêt de l'entreprise. Ainsi, ces propositions de rectification qui énoncent l'ensemble des motifs sur lesquels l'administration a entendu se fonder pour justifier les rectifications envisagées, a permis au contribuable de présenter utilement ses observations.
6. En second lieu, l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales dispose que : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".
7. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée. Il en va autrement s'agissant des documents et renseignements qui, à la date de la demande de communication, sont directement et effectivement accessibles au contribuable dans les mêmes conditions qu'à l'administration. Dans cette dernière hypothèse, si le contribuable établit qu'il ne peut avoir effectivement accès aux mêmes documents et renseignements que ceux détenus par l'administration, celle-ci est alors tenue de les lui communiquer.
8. S'il est constant que les trois propositions de rectification qui lui ont été adressées comportaient l'origine et la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers, M. G... reproche à l'administration de ne pas lui avoir communiqué toutes les pièces visées par la proposition de rectification, alors qu'il en avait demandé la communication. Il soutient qu'il n'a jamais reçu les réponses de l'administration aux observations qu'il avait présentées dans le délai imparti pour contester les propositions de rectification dont il a été destinataire. Il résulte toutefois de l'instruction que l'administration a répondu par lettres n° 3926 du 14 septembre 2012 aux observations de contribuable présentées le 16 janvier 2012 et le 24 août 2012 et que ces courriers comportaient en annexe une copie des documents demandés. Pour justifier cet envoi, l'administration produit deux avis de réception postaux mentionnant que ces courriers ont été présentés au domicile de M. G..., le 18 septembre 2012, puis retirés au bureau de poste, le 29 septembre 2012. Enfin, le requérant ne se prévaut d'aucune diligence particulière pour obtenir auprès de l'administration une nouvelle communication de ces documents. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
9. En premier lieu, aux termes du de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c) Les rémunérations et avantages occultes (...) ".
10. Il incombe à l'administration qui a suivi la procédure contradictoire, et dès lors que les redressements n'ont pas été acceptés, d'apporter la preuve de l'existence et du montant des distributions ainsi que de leur appréhension par la contribuable.
11. M. G... reprend en appel, sans l'assortir d'éléments de fait ou de droit nouveau, le moyen tiré de ce que les redressements en litige correspondent au remboursement de frais professionnels qu'il aurait engagés en Russie dont l'administration a partiellement admis l'existence. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges. Par ailleurs, le requérant fait valoir que par un arrêt du 3 juin 2016, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon a confirmé l'ordonnance de non-lieu du 2 février 2016 concluant notamment à l'absence d'abus de bien sociaux commis par M. G... alors qu'il assurait la présidence de la société Réflexion. Toutefois, l'autorité de la chose jugée en pénale ne s'attache qu'aux décisions des juridictions de jugement qui statuent sur le fond de l'action publique. Tel n'est pas le cas des ordonnances de non-lieu que rendent les juges d'instruction quelles que soient les constatations sur lesquelles elles sont fondées. Ainsi, l'administration doit être regardée comme établissant l'existence de revenus distribués et leur appréhension par le contribuable.
12. En second lieu, aux termes de l'article 158 du même code : " 7. Le montant des revenus et charges énumérés ci-après, retenu pour le calcul de l'impôt selon les modalités prévues à l'article 197, est multiplié par 1,25. Ces dispositions s'appliquent : (...) 2° Aux revenus distribués mentionnés aux c) à e de l'article 111, aux bénéfices ou revenus mentionnés à l'article 123 bis et aux revenus distribués mentionnés à l'article 109 résultant d'une rectification des résultats de la société distributrice (...) ".
13. Ainsi qu'il a été dit précédemment, il résulte de l'instruction que la société Réflexions a déduit de ses résultats le remboursement de frais que M. G... n'avait pas engagés dans l'intérêt de l'entreprise. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a imposé les sommes en litige entre les mains de M.G... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts et qu'elle a appliqué la majoration de 1,25 pour l'assiette de l'impôt sur le revenu.
Sur la majoration pour manquement délibéré :
14. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ".
15. En faisant valoir que M. G... qui exerçait les fonctions de président de la société Réflexions a autorisé le remboursement des frais en litige alors qu'il avait connaissance de la nature de ces dépenses qui ont été engagées à son profit et en indiquant que ces dépenses personnelles ont été engagées de manière répétée, l'administration apporte la preuve qui lui incombe de la volonté délibérée du contribuable d'éluder l'impôt et justifie l'application de la pénalité de 40 % pour manquement délibéré.
16. Il résulte de ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... G... et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 24 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme B..., présidente,
Mme H..., première conseillère,
M. Savouré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 novembre 2019.
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N° 17LY03030
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